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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

2 participants

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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Patlotch Mer 10 Oct - 17:40


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Moiguitarechat2
1978

une longue fidélité de plus de 50 ans, et des traces sur interne : Patlotch Jazz

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS MoiGuitarPhoto1
1980

sur le site Livredel

DIT DE LONGUES FIDÉLITÉS, mai 2006...
JAZZ ET POESIE, 1979-2005
SORTI DE MA DISCOTHÈQUE
JAZZ ET COMMUNISME, 2003 texte
JAZZITUDE, 2002 livre
JAZZ ET PROBLEMES DES HOMMES, Livre, 2002
JAZZ DIVERS TEXTES 2001-2002
PAT'CRITIC, Forums, 2001
BASS'SCORY, 2000

sur le site Patlotch.com

sommaire et accès sur le site

3.1. Histoires des jazz
3.1.1. du jazz classique aux jazz modernes, continuités-ruptures
'Le jazz et les gangsters', un lien vital
Des pianistes qui durent
La clarinette, princesse du classique
Clarinet Marmalade
La batterie classique
Des vents et des cordes dans les graves
Le jazz classique à partir des années 50
'mon' jazz classique en 25 disques
3.1.2. l'arrangement de jazz, avec l'oubli ?
Jelly Roll MORTON
Fletcher HENDERSON
Don REDMAN
Duke ELLINGTON
Mary-Lou WILLIAMS
Sy OLIVER, For Dancers only ?
Benny CARTER
Adrian ROLLINI, le jazz d'en face
John KIRBY
Billy STRAYHORN avec Duke Ellington
Tadd DAMERON, Gil FULLER, George RUSSELL, Clare FISHER... arrangent Dizzy Gillespie
Modernité, complexités
Claude Thornhill et Gil Evans, la vraie naissance du Cool 1942
Miles Davis 'The Birth of the Cool' avant son nom
John LEWIS, ou le jazz bien tempéré
Gerry MULLIGAN, de la bande des 4 au concert à 13
George RUSSELL, entre Ellington et Zappa
John CARISI, un art en tensions
André HODEIR, Problème du Jazz ?
Avant GIUFFRE, le sax ? des anches !
Jimmy GIUFFRE, petit, grandes oreilles
Gerald WILSON, des 40' aux 70'
McFARLAND Gary (vib compositeur arrangeur)
Kurt WEILL-Mike ZWERIN, John LEWIS, Dolphy, Raney... + Gil EVANS
Toshiko AKIYOSHI, le jazz nippo-américain au féminin
Martial SOLAL, Jazz écrit toutes tailles
3.1.3. Jazz en France 1920-1970
Free-Jazz en France 1960-1975
3.1.4. jeunes pousses ou les débuts des grands
3.1.5. Parker's Mood 12 versions et plus si affinités
3.1.7.  le trio piano contrebasse batterie dans le jazz 'moderne'
les pianistes de Charlie Parker
McPartland, Bryant, Prévin, Carl Perkins
Toshiko, Winton Kelly, Barry Harris, Elmo Hope, Bobby Timmons, Jutta Hipp
Vic Feldman, Mose Allison, Joe Zawinul
Figures de styles
Ahmad JAMAL vs George SHEARING
Bill EVANS, Scott LaFARO, Paul MOTIAN
MORGAN Dick, piano
3.1.8. 'Free-Jazz', idées reçues ?
Free-Jazz en France 1960-1975
Free Jazz Women
3.1.9. Japan is Jazz . Japanese Jazz
Shakuhachi et jazz
3.1.10. le jazz 'pour les nuls', d'un savoir écouter
temps forts, temps faibles... Harmonie vs Rythme
la rythmique de Count Basie, de Jo Jones... à Joey Baron
les sons du jazz, la 'matière sonore'
du collectif à l'individuel, écoute globale ou spécifique
l'impro mélodique et rythmique, le 'swing', la vocalisation
de la contrebasse jusqu'à Jimmy Blanton (1940)
des 'ratés' dans l'improvisation ?
les conditions du jazz 'moderne'
Rebop, Be Bop... Dizzy Atmosphere
Highlights of the 50'
Alors ! c'est quoi le "jazz" ?
3.2. Jazz musicien-ne-s A... Z
3.2.1. AEBI Irène (violoncelle, chant)
3.2.2. AKIYOSHI Toshiko, p lead argt
3.2.3. ALDEN Howard, 7 guitare
3.2.4. ANDRESS Tuck, guitare
3.2.5. AUSTIN Lovie, piano argt et chef d'orchestre
3.2.6. BENJAMIN Sathima Bea, vocal
3.2.7. BICKERT Ed, guitare
3.2.8. BLOOM Jane Ira, soprano sax
3.2.9. BOOKER Beryl, piano vocal
3.2.10. BROOKS Hadda, pianiste et chanteuse
3.2.11. BRACKEEN Joanne, piano
3.2.12. BREAU Lenny, guitare
3.2.13. BRYANT Clora, trompette
3.2.14. BUNNET Jane, soprano sax, flûte
3.2.15. BURNSIDE Vi, ténor saxophone
3.2.16. CARISI John, argt
3.2.17. CARRINGTON Terry Lyne
3.2.18. CARTER Benny, saxophones, tp, argt, lead
3.2.19. CHARLES Teddy, vibra argt
3.2.20. COOPER Lindsay, basson hautbois...
3.2.21. DAMERON Tadd, argt, piano
3.2.22. DAVIS Billie, batterie
3.2.23. DAVIS Martha, piano vocal
3.2.24. DAVIS Miles 1969
3.2.25. DENNERLEIN Barbara, orgue
3.2.26. DICKERSON Walt, vibraphone
3.2.27. ESCHETE Ron, 7strings guitar
3.2.28. FOUQUET Jérôme, trompette
3.2.29. FOX Mimi, guitare
3.2.30. FRINK Laurie, trompette pédagogue
3.2.31. FUJII Satoko, piano
3.2.32. FUJIWARA Kiyoto, contrebasse
3.2.33. FULLER Tia, alto soprano sax, flûte
3.2.34. GELLER Herb, alto sax, compo, argt
3.2.35. GIUFFRE Jimmy, sax clar flûte argt
Four ? Si ce n'est toi, c'est donc ton frère...
Giuffre étudie le contrepoint... Debussy, Bartok
Giuffre Hall, 2 Jim pour un ménage à 3 + si affinités
Plus loin que l'Ouest, du Cool au free
Jimmy Shorty Shelly Teddy
Howard Rumsey Lighthouse
Jimmy Free Lance
Clarinette Marmelade
Giuffre Bley Swallow The Shape of Jazz to come
Du Free aux frissons
Des errances à 3 à l'évidence à 2
Far de l'Ouest à l'Extrême-Orient, la flûte...
Jimmy l'enchanteur et la fée électrique
Jaume et Jimmy du haut des anches
Jimmy for ever
Et Dieu dans tout ça ? Sonny Stitt, le blues selon Jimmy
Hommages, héritages et documents
3.2.36. GREENE Bob, piano
3.2.37. GREENE Ted, guitare pédagogue
3.2.38. HAMILTON Chico, batterie percussions
3.2.39. HARRIS Jerome, guitare, basse
3.2.40. HENDERSON Fletcher, argt, lead, piano
3.2.41. HERBERMAN Steve, 7 Guitar, contrepoint...
3.2.42. HIPP Jutta, piano
3.2.43. HODEIR André, composition argt
3.2.44. HOPE Bertha, piano
3.2.45. HORN Jazzmeia, vocal
3.2.46. HUNTER Charlie, guitare&basse
3.2.47. HYAMS Marjorie, vibraphone
3.2.48. JACKSON Ronald Shannon, batterie
3.2.49. JUAREZ Juarez, guitare contrepoint
3.2.50. KATZ Fred, viloncelle
3.2.51. KIRBY John, contrebasse, tuba, argt, lead
3.2.52. LABARRIERE Hélène, contrebasse
3.2.53. LAURENT Géraldine, alto sax
3.2.54. LEANDRE Joëlle, contrebasse, voix
3.2.55. LEWIS John, argt, piano, lead
3.2.56. LISTON Melba, trombone, argt
Randy WESTON arrangé par Melba Liston
3.2.57. LUTCHER Nellie, pianiste et chanteuse
3.2.58. LYNNE Gloria, vocal
3.2.59. MAALOUF Ibrahim, trompette
3.2.60. MAC KAC, batterie
3.2.61. Mc GANN Bernie, saxophone
3.2.62. Mc INTYRE Kalaparusha Maurice, sax bcl flûte...
3.2.63. Mc PARTLAND Marian, piano, radioTV
3.2.64. MONTOLIU Tete, piano
3.2.65. MORGAN Dick, piano
3.2.66. MORTON Jelly Roll, piano, argt, lead
3.2.67. MOST Sam, flûte, clarinette
3.2.68. MULLIGAN Gerry, baryton sax, argt, lead
3.2.69. OLIVER Sy, arrangeur, trompette
3.2.70. ONISHI Junko, piano
3.2.71. OSBORNE Mary, guitare
3.2.72. PARKER William, contrebasse
3.2.73. PASS Joe, guitare
3.2.74. POLLARD Terry, vibraphone, piano
3.2.75. PONDER Jimmy, guitare, vocal
3.2.76. REDMAN Don, argt, lead, saxophones
3.2.77. ROGERS Rachel, flûte
3.2.78. ROLLINI Adrian, multi-instr., argt, lead
3.2.79. RUSSELL George, théoricien, compo, argt, percussions
3.2.80. SAMB Hervé, guitare
3.2.81. SCHWEIZER Irène, piano
3.2.82. SCOTT Hazel, piano vocal
3.2.83. SCOTT Rhoda, orgue
3.2.84. SCOTT Shirley, Orgue
3.2.85. SMITH Johnny, guitare
3.2.86. SMOCK Ginger (violon)
3.2.87. SNOW Valaïda 'Little Louie', trompette, vocal...
3.2.88. SOLAL Martial, trésor national de jazz
'Ma vie sur un tabouret'
Club Saint-Germain, Django, Don Byas, Kenny Clarke 1950-54
Piano sous influences ?
"Mes" Lucky pas chanceux
du sandwich à la choucroute à Jo Jaguar
Sidney Bechet... Coleman Hawkins, Stan Getz, Barney Wilen
à suivre à quatre en ré bémol
Melville et Solal dans Manhattan
d'ardus trios en valse à quat' temps
Un Parisien en Amérique
Clés pour tout : Hampton Hawes et Martial Solal
Traversées en solitaire
Solal et Lee, deux doués des duos s'amadouent
'Sans tambour ni trompette'
1 2 3 Solal !
Du haut des duos
Jazz écrit toutes tailles
'Six pianos pour cent doigts'
L'autre monde : 'classique" et 'contemporain'
Solal Jazz' Teacher
Hank et Martial
'Il y avait un piano'
'vous faire rire et pleurer'
3.2.89. STOWELL John, guitare
3.2.90. STRAYHORN Billy, argt, compo, lead
3.2.91. TERAKUBO Elena, alto sax
3.2.92. THOMPSON Kimberly 'Kim', batterie
3.2.93. TUCKER Ben, contrebasse
3.2.94. UEHARA Uromi, piano, claviers
3.2.95. Van EPS George, 7Strings Guitar, pédagogue
3.2.96. WALTON Cedar, piano
3.2.97. WARREN Butch, contrebasse
3.2.98. WATANABE Sadao, saxophones, flûtes
Sadao Watanabe, l'héritage parkérien
'I wanna be loved by You'
Sadao, la bossa, et les latinos
Sadao disparaît à Montreux
Gary McFarland et Sadao à l'apéro
el Chico y el Sadao
The Beatles, Patti Austin, Roberta Flack, Randy Crawford
Sadao et Charlie
Sadao l'Africain
Afro'Funk'Fusion' Jazz nippon ni mauvais, Sadao fusionne
Afro-Bop-Zil-Funk-Symphony... Japanese Jazz Fusion
'Rendez-vous'... avec Roberta Flack
Pourquoi, pourquoi, pourquoi...?
10 albums à choisir
Sadao Nougaro Saisse
Live Rehearsal ou la répèt'
3.2.99. WESS Frank, saxophones, flûtes
3.2.100. WESTBROOK Kate, tuba, chant, théâtre, textes
3.2.101. WHITTLE Tommy, saxophone
3.2.102. WILLIAMS Mary-Lou, piano argt
3.2.103. WILSON Gerald, argt, lead, trompette
3.2.104. WYBLE Jimmy, guitare, théoricien
3.2.105. YAMASHITA Yosuke, piano

3.3. la femme est l'avenir du jazz (Female Jazz Instrumentalists)
3.3.1. International Sweethearts of Rhythm
3.3.2. All Girl Band of the 40'
Vivien Garry Edna Williams quintet
3.3.3. musiciennes de blues
3.3.4. batteuses et battantes
3.3.5. trompette au féminin
3.3.6. des livres des femmes du jazz
3.3.7. femmes 'au net' du jazz
3.3.8. le cinéma des filles de jazz
3.3.9. les voir en peintures
3.3.10. Free Jazz Women
3.3.11. Jazz et féminisme
Rosetta Reitz, historienne du jazz
Joëlle Léandre met les pieds dans le plat
3.3.12. Jazz et Gender Studies
ce n'est qu'un débat le combat n'est pas vu
3.3.13. et la critique ?

3.4. Jazz / Sujets généraux
3.4.1. Jazz sur paroles, propos de musicien-ne-s
3.4.2. Les publics du jazz
3.4.3. Le jazz en rit
3.4.4. La critique de jazz
3.4.5. Martin Luther King et le jazz
3.5. Jazz : Techniques et instruments
3.5.1. La guitare jazz comme un piano, histoire et techniques
Avant George Van EPS, le blues, Eddie Lang...
George Van EPS, 'lap piano'
Howard ALDEN, orfèvre discret
Ron ESCHETE, master of 7 Strings Guitar
Steve HERBERMAN, le contrepoint à point
Guitare classique et Jazz
Jimmy WYBLE, l'improvisation à deux voix
Sid JACOBS
Juampy JUAREZ, le contrepoint contemporain
Ted GREENE, le pédagogue des pédagogues
Joe PASS, la sobriété, somme toute...
Lenny BREAU, une légende, un génie
Tuck ANDRESS, pas toujours seul
Solos intégrals de maîtres de la guitare Jazz
Charlie HUNTER, soul guitarbass
Jazz Guitar Tapping

3.5.2. 'Conseils' aux débutants
Harmonie et improvisation
Le swing et le shuffle à la basse
3.5.3. Ray Estwick, pédagogue oublié
Improvisation jazz-blues, notes de cours 1975
Blues impro / Permutations Ray Estwick

3.6. Jazz et cinéma
3.6.1. Martial Solal et le cinéma
3.6.2. André Hodeir et le cinéma
3.6.3. Chico Hamilton et le cinéma
3.6.4. John Cage et Roland Kirk
3.6.5. Cassavetes et le jazz
3.6.6. Louis de Funès... pianiste de jazz ? Et Gainsbourg ?
3.6.7. Edouard Molinaro et le jazz
3.7. Jazz et littérature
3.7.1. Albert Murray, écrivain, poète et critique

3.8. Jazz et poésie
3.9. mes poèmes Jazz

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Moitrio
trio Chabada1984
Lionel Jacubowiez, alto & soprano sax, clarinette et cl. basse
Mario Mora, percussions, guitare, chant

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS MoiQuartet
quartet Label inconnu1986
Pierre Wekstein, ténor sax, soprano sax, flûte
Lionel Jacubowiez
Bernard Charleux, batterie

compositions (partitions)
32 déposées à Sacem 1981-1982, libres de droits

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS BlackPeople
Medium lent, aux mineurs anglais, 13 mars 1985

'Jazz' peintures 1973-1991

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS DexterGordon
Dexter Gordon 31 mai 1973, gouache sur carton 43 x 57 cm

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Nico%20et%20moi%2020
avec mon fils, 2005

pour la suite, je proposerai quelques écoutes commentées, et s'il advenait que je retourne au concert, des comptes-rendus


Dernière édition par Patlotch le Lun 31 Déc - 22:45, édité 1 fois

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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Patlotch Sam 12 Jan - 10:24

ma "vraie famille" s'en va dans le silence et dans le vent, merci à l'ami Jacques Denis...

JOSEPH JARMAN, MORT D'UN GUERRIER POÈTE DU JAZZ
Jacques Denis Libération 11 janvier 2019

Tribute To The Chicago Blues Tradition

Art Ensemble Of Chicago - Lugano 1993
vidéo ajoutée

Le jazzman américain s'est éteint mercredi à l’âge de 81 ans. Il fut, au sein de l'Art Ensemble de Chicago, un ardent ­défenseur du spectacle total.

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 1186060-men07139
Joseph Jarman en concert avec l'Art Ensemble de Chicago à Milan, le 19 janvier 2002
Photo Marcello Mencarini. Leemage

Jacques Denis a écrit:« L’Art Ensemble est comme un gâteau confectionné à partir de cinq ingrédients : si vous en supprimez un, le gâteau n’existe plus ! » Cette sentence délivrée par Joseph Jarman lors d’une interview au mensuel Jazz Hot en 1978 rappelle que, pour celui qui vient de disparaître à 81 ans, la plus emblématique formation de l’Association For The Advancement of Creative Musicians (AACM) n’avait de raison d’être qu’au grand complet. Lui l’avait intégrée en 1969, suite au décès de deux membres de sa propre formation, et dès lors, le nom du natif de Pine Bluff (Arkansas) ne sera plus qu’associé à cet « ensemble d’individualités en harmonie et en complète liberté, c’est-à-dire une sensibilité une », pour reprendre les mots d’un proche, Anthony Braxton (ils enregistreront ensemble en 1971 un formidable Together Alone), qu’il avait croisé une dizaine d’années plus tôt au Woodrow Wilson Junior College de Chicago.

Joseph Jarman vient alors de quitter l’armée, où il a délaissé les baguettes pour se mettre au saxophone et à la clarinette. Il va dès lors sympathiser avec le bassiste Malachi Favors et le saxophoniste Roscoe Mitchell, deux autres musiciens qui feront l’Art Ensemble. Tous les trois se rapprochent du pianiste Muhal Richard Abrams, l’incubateur de toutes les nouvelles idées qui vont advenir.

Spectacle total
Cinq ans plus tard, en mai 1965, Jarman sera ainsi l’un des vingt signataires de la charte originelle de l’AACM, une organisation qui révolutionnera le monde du jazz, en prônant tout à la fois l’émancipation de tous et la responsabilité de chacun. Jarman s’y retrouve d’autant plus qu’il pratique le théâtre et écrit des poésies. C’est d’ailleurs l’une des particularités de son premier disque, Song For en 1966 : il déclame d’une voix sombre des textes qui rappellent l’influence d’Amiri Baraka, dans un engagement qui voit plus loin que les termes du nationalisme noir. Le texte de Non-Cognitive Aspects of the City est exemplaire de sa vision d’un monde, où tout en critiquant ardemment la ségrégation, il interroge la question du pouvoir, «noir ou blanc». Cette ligne de conduite sera toujours la même lorsqu’il intègre l’Art Ensemble.

Si Roscoe Mitchell en fut le principal compositeur concepteur, Lester Bowie le médiateur crossover, Joseph Jarman sera, lui, l’ardent défenseur du spectacle total, comme le rappelle fort justement la courte notice qui lui est dédiée dans le récent coffret sur les années ECM de l’Art Ensemble. Sous le masque du guerrier (en scène, où ses emportements marqueront les esprits, comme à la ville, où il planta par exemple un couteau sur la table avant de signer son contrat avec la firme BYG, en 1969) il s’y fait le porteur d’un message éminemment poétique, la question politique ne pouvant être disjointe des enjeux esthétiques.

Longtemps réduit au free-jazz dans ce qu’il a de plus radical, Joseph Jarman, en bon disciple d’Eric Dolphy à qui il rendit un bel hommage, allait bien entendu au-delà : il suffit d’écouter ses interventions au sein du Art Ensemble comme ses trop rares propres albums (notamment dans les années 70, où il enregistrera avec Steve Colson, Don Pullen, Johnny Dyani) pour mesurer combien ce désir d’improvisation se conjuguait tout autant aux musiques contemporaines qu’aux musiques anciennes.

Irréductible
Son jeu, tout en nuances, était de fait irréductible à une grille de lecture, et la dimension spirituelle était sans doute la clef d’écoute d’un musicien qui, après avoir pratiqué l’aïkido, choisit la voie du bouddhisme zen, ouvrant même son propre dojo à Brooklyn, en 1993. Celui qui adopta le surnom de Shaku le temps d’un intermède de dix ans avec l’Art Ensemble (qu’il réintègre pleinement avec The Meeting, en 2003), cherchera même à concilier ses deux voies méditatives à travers «une nouvelle musique sacrée». Confronté à de sérieux problèmes de santé, son nom n'apparaît plus ensuite que de loin en loin, comme s’effaçant peu à peu de la mémoire. Jusqu’à ce 9 janvier, où l’annonce de sa mort, et la réaction qu’elle suscite auprès des musiciens des deux côtés de l’Atlantique, permet de mesurer l’importance de son empreinte sur cette histoire. Et nous laisse augurer quelques espoirs.


Joseph Jarman saxophone & WORKS :
Michel Gentile - flute,
Daniel Kelly - piano,
Rob Garcia - drums
performing at Brooklyn Jazz Wide Open on December 15, 2010


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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Patlotch Sam 26 Jan - 13:56


le petit jazz de Michel Legrand
est mort
le grand s'en remettra


appréciation certes d'un goût douteux après sa mort cette nuit : je n'ai jamais aimé Michel Legrand, sauf quand je ne savais pas que c'était lui, ses premières orchestrations pour Henri Salvador, et ce qui est peu connu aujourd'hui, les premiers rocks en France avec le même et/ou Boris Vian... certes un rock bien détourné...


les deux films de Jacques Demy, dont Michel Legrand a écrit la musique, Les Parapluies de Cherbourg en 1964 et Les Demoiselles de Rochefort en 1967, me tombent des yeux et des oreilles. Et encore, on l'a échappé belle, Catherine Deneuve est doublée pour le chant par Danielle Licari (source : Les "voix de l'ombre" des films de Jacques Demy). Plus proches du jazz dans l'esprit, et du trompettiste Miles Davis par ailleurs, ni Juliette Gréco Jeanne Moreau n'ont jamais été doublées, et à l'écran, désolée pour l'actrice préférée des Français, dont les goûts ne sont absolument pas les miens. Comme par hasard deux femmes "progressistes" (Gréco membre du PCF), et Deneuve plutôt réac' et en prime anti-féministe

à sauver, voire, ses arrangements pour Miles Davis, John Coltrane et Bill Evans, qui ne sont pas un phare de leurs discographie, et sans eux, Michel Legrand serait aux États-Unis un inconnu autant que Johnny Hallyday


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 080698
1958

1. The Jitterburg Waltz
2. Stompin' At The Savoy
3. 'Round Midnight
4. Django
5. Night In Tunisia
6. In A Mist
7. Blue And Sentimental
8. Don'T Get Around Much Anymore
9. Wild Man Blues
10. Nuages
11. Rosetta

John Coltrane (saxophone), Miles Davis (trompette), Michel Legrand (piano), Donald Byrd (trompette), Bill Evans, Herbie Mann (flûte), Paul Chambers (basse), George Duvivier (basse), Hank Jones (piano), Nat Pierce (piano)

il faut dire qu'avec un tel orchestre, difficile de rater son coup...

je me souviens vaguement, à la télé de ma jeunesse, de shows pour moi d'effroi. Ce n'est certainement pas lui qui m'aurait fait aimé le jazz, avec sa voix affectée, son style de piano bavard et sucré, swinguant moins encore que Dave Brubeck, et, cerise sur le gâteux : sa fausse modestie


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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Patlotch Sam 2 Fév - 6:01

j'importe de L'ACHRONIQUE À CÔTÉ un post du 30 novembre 2018

« Je voudrais que la Marseillaise d’Albert Ayler
sonne l’hallali d’un carnage terrible
»

et tiens si on foutait le bololo dans l'enfoirum, de la musique dans l'extime et de la France où elle n'est pas en jaune, de la divergence de buts dans les cons doléances, alors on écouterait Ayler et on lirait du Nabe

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 978-2-84263-170-3

Marc-Édouard Nabe a écrit:14  juillet 1989, j’écoute la Marseillaise d’Albert Ayler. La fête dehors bat son plein.
Par ma fenêtre, je vois les fusées tricolores qui zigzaguent dans la nuit. C’est ridicule. La France est lamentable. Je monte le son.

14  juillet 1989, j’écoute la Marseillaise d’Albert Ayler. La seule vraie marseillaise qui ne nous fasse pas honte, alors que l’intolérable commémoration touille un dernier fond de diarrhée dans le pot de chambre de l’Histoire.
Patrick Besson qui n'était pas encore un vieux con écrivait dans Le Figaro Littéraire « c'est une ode à la désobéissance civile », « un hymne à la désobéissance littéraire »


1965

Albert Ayler (saxophone ténor)
Donald Ayler (trumpet)
Charles Tyler (saxophone alto)
Henry Grimes (contrabass)
Gary Peacock(contrabass)
Sunny Murray (drums)
Call Cobbs (clavecin)

là tu peux être sûr, ya pas un nationaliste pour l'aimer, celle-là, bien pire c'est-à-dire bien meilleure provocation que celle de Gainsbourg qui faisait chier les paras et Michel Droit

Albert Ayler selon Saint Nabe
Ayler. Nabe. Deux génies du XXè siècle. Il fut évident qu'ils se rencontrassent. Pas physiquement bien sûr. Albert Ayler, nègre mystique, jazzman céleste, fou illuminé, est mort assassiné en 1970, à l'âge de 34 ans. Nabe avait alors onze ans, presque douze. Mais ce grand écrivain français, le seul en activité aujourd'hui, a rendu l'hommage qu'il fallait à Albert Ayler dans son opus La Marseillaise, publié aux éditions Le Dilettante en 1989, l'année du bicentenaire. Dans un chorus de 38 pages, Nabe ramène Ayler à la vie et écrit les plus belles pages consacrées à un musicien. C'est meilleur que son Billie Holliday. Aucune phrase n'est à jeter. Et je lui fait l'injure d'en jeter la plupart car vous lirez ici trois courts extraits de son poème en prose (comment le qualifier autrement ?) sur "ce geyser de larmes qui jaillissait du jazz".

Marc-Édouard Nabe a écrit:C'est vrai, au début, quand j'ai découvert Ayler, je l'adorais pour sa force fantastique de provocation. J'avais quatorze ans et le coup de knout que cette musique pouvait asséner à un bourgeois normal me réjouissait au plus profond de moi-même. Bien vite, Ayler ne m'apparut plus comme une arme contre les cons, mais une arme contre moi, le plus con de tous, celui qui allait plonger dans l'extase de cette folie. J'écoutais toute la journée Ayler, totalement transporté par cet anti-humour triste à en pleurer.

Qu'est-ce que c'est que cette musique ? Je n'en connais pas de plus subversive aujourd'hui où les jazz de Monk et de Parker sont récupérés, intégrés, "revisités" d'une façon vulgaire, en massacrant les thèmes et les tempos... Vous n'entendrez pas souvent Ghosts d'Ayler à la radio. L'aylerisme fait encore peur. Depuis que j'écoute ça, pas de progrès. Les femmes sortent immédiatement de la pièce, les vieillards ont une crise cardiaque, les jeunes gens ricanent et les chats sifflent. Ça ne passe pas. Les imbéciles sont persuadés qu'il s'agit d'un gag ou que mon pick-up est mal réglé, le disque rayé, que sais-je ?... Aucun ne peut reconnaître qu'il s'agit de la musique la plus céleste qui soit, des mannes sonores qui tombent délicatement sur nous. Des chérubins qui perdent leurs plumes ! Tant de joie grandiose dépasse ! Une musique sans notes qui s'adresse au Ciel. Une musique qui peut faire pleuvoir ! Un chaos joyeux ! La naissance de la Gaité ! Les Fleurs qui dansent ! Ça vous descend ainsi dans les membres, et ça vous les détache ! Vous êtes dans un état de purification spirituelle parfait. Vous participez au salut du monde. Vous jouissez dans une vive flamme d'amour de toutes les catastrophes que cette musique raconte.


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Message par Patlotch Mar 12 Fév - 23:39


bye bye et merci, "Monsieur Jazz" !

Hommage à André Francis
France Culture, 12 février 2019

Décès le 12 février du producteur, journaliste et organisateur de festivals de jazz

incontournable !

Entretien avec André Francis (juin 2009)
À l'occasion d'une exposition de ses dessins et peintures lors de "Place au Jazz-Bourgogne", André Francis a bien voulu accepter de répondre aux questions de Jean-Louis Derenne, Président de l'Association Ô Jazz, organisatrice de l'exposition précédemment mentionnée. Capturé par Pierre Nivan, voici 15 mn environ de bonheur avec un vrai passionné de jazz. Ne boudez pas votre plaisir !
les dieux du jazz savent qu'il m'irritait, et que je n'étais pas le seul. Pourtant, organisant comme producteur et présentant les Concerts de jazz de l'ORTF, c'est avec lui que j'ai partagé, hormis quelques concerts au Hot Club de Lyon, mes premières émotions « sur place, le jazz à déguster comme des bananes », disait Sartre, dont j'ignore s'il pensait vraiment aux bananes ou pas plutôt à Joséphine Baker, qui en faisait ceinture à sa nudité

son livre Jazz. L’histoire, les musiciens, les styles, les disques, de 1958, fut je pense mon premier, une édition vers 1965, bien avant qu'Albert Ayler n'en illustre la couverture. Il était tout sauf "sectaire", aimant tous les courants, toutes les "écoles", les Blanc.he.s comme les Noir.e.s, et pas le dernier à faire jouer sur scène les petits nouveaux qui deviendraient grands

c'est grâce à lui que j'ai pris la première fois la parole "en public", au Festival de Chateauvallon, pour un débat avec des musiciens et des amateurs comme j'en étais un, pour France culture donc, la première fois et la dernière que je suis passé à la radio. Il y a avait les journalistes de Jazz Magazine Philippe Carles, Francis Marmande, et l'adorable Jean-Robert Masson avec lequel j'avais sympathisé comme avec le photographe Guy Le Querrec

à ce festival et celui de l'année suivante, il y avait Dizzy Gilespie, Art Blakey, Tony Williams, Stanley Clarke, Stan Getz, Eddy Louiss, René Thomas, Bernard Lubat, Don Cherry et sa famille, Magma, Michel Portal avec Bernard Vitet, Léon Francioli et la chanteuse Tamia, John McLaughling Mahavishnu avec Billy Cobham, Jean-Luc Ponty, Joe Turner en solo, Paul Bley en solo, Helen Merrill, Phil Woods European Rhythm Machine avec Henry Texier et Daniel Humair et Gordon Beck (sauf erreur), Charlie Mingus avec son fils Eugene, Kenny Clarke, j'en passe, etc. et Gerry Mulligan qui nous avait joué du piano en privé... parce qu'il lorgnait sur ma copine. Quelle programmation !

à me ré-écouter je n'étais pas sectaire moi-même, ayant commencé par le début, Sidney Bechet en 1924, parce que je jouais de la clarinette, et enchaînant pratiquement toute "L'histoire du jazz" telle que l'écrivait, tant bien que mal car j'eus de plus en plus la dent dure avec eux qui m'avaient beaucoup appris et guidé dans ma quête du swing, du blues et autres incontournables, des passionnés tel qu'André Francis


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Message par Patlotch Dim 17 Fév - 15:39


repéré par Lola Miesserhoff, facebook


TERRES COMMUNES ET DE FEUX

parfois le Monde est petit, mais majuscule. On est plus près par les lectures communes. Ici avec Pierrepont, Leiris, Mingus... je suis chez moi plus près encore, et j'explique plus bas pourquoi avec le poète, critique de jazz, anthropologue, essayiste hors sentiers battus qu'est Alexandre Pierrepont, du même chant jazzistique que moi, plus loin que le jazz au cœur de ce qu'il est, avec ou sans son nom

Les mots en cérémonie
François-René Simon, En attendant Nadeau

On connaissait le « poète noir, blanc de visage » : Xavier Forneret. Voici maintenant « le poète nègre, blanc de visage » : Alexandre Pierrepont. « Nègre », adjectif honni, est bien sûr à entendre au sens où Aimé Césaire l’a dépouillé de son insupportable acception colonialo-raciste pour le magnifier et lui donner une dimension pourquoi pas universelle.


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 67355
Préface de Jean-Yves Bériou. Pierre Mainard, 90 p., 14 €
On ne sait pas où ranger les œuvres si bousculantes d’Alexandre Pierrepont : bibliothèque ou discothèque ? Anthropologue, auteur d’ouvrages de référence sur la permanence et les mutations du jazz jusqu’au plus inventif (Le champ jazzistique, La nuée, l’un et l’autre aux éditions Parenthèses), diseur de bonne aventure enregistré en compagnie de musiciens forcément aventureux (Maison hantée et Passages chez RogueArt, De fortune avec le groupe Bonadventure Pencroff chez MZ Records, Traités et accords chez Vents du Sud), fomenteur d’une association, « The Bridge », qui dresse un pont non de pierre mais de sons entre les États-Unis (principalement Chicago) et la France, il vient de publier son quatrième recueil de poèmes. Le premier, J’ai du bon tabac, écrit en collaboration avec Bertrand Schmitt, a paru en 1993 sous le label « éditions surréalistes » : à vingt ans, Alexandre Pierrepont faisait partie du groupe surréaliste de Paris, maintenu contre un soi-disant vent de l’histoire par feu Vincent Bounoure et quelques autres. Voilà pour la présentation.

Cinq longs poèmes – un sixième, plus court, nous attend par surprise derrière un dessin de Massimo Borghese dont la ligne claire donne existence à toute sa fantasmagorie –  dessinent les Frontières du Monde habité (on notera la majuscule), monde à la beauté duquel Pierrepont veut décidément s’unir corps et âme, alors même qu’elle ne cesse d’être souillée. Et il veut nous le faire savoir de mille et une façons pour nous inciter à une union identique, chacun selon son registre. Le sien, ici, se déploie dans une langue qui chante et surtout qui résonne. Votre oreille sera sa forêt. Car pour bien entendre, il est préférable de lire à haute voix, entendre les réverbérations, les échos, les doubles rugissants :

Je tourne ma langue dans le bec de la planète
Je tourne ma langue dans la bouche du monde
Et dans la boue du monde
dans la bouche du monde
dans la boue du monde
dans la bouche du monde
dans la boue du monde
dans la bouche du monde
dans la bouche du monde


Pour Pierrepont, ce n’est pas que les images balbutient, mais il n’a besoin que de tourner une seule fois sa langue pour la déployer tous azimuts. La répétition rythme la phrase ; la strophe, comme la cymbale high-hat d’une batterie, soutient le phrasé pour que le sens ou la vision apparaisse nettement :

Seule la pluie est réelle
La pluie qui tombe stridente
Stridente
Et s’arrête à quelques mètres du sol
Au-dessus
de nos têtes coupées
Seule la pluie est réelle
La pluie singe bleu
La pluie les bras ballants et stridente
De guerre lasse
De guerre lasse dans le monde envahi
La pluie seule qui ne porte pas de nom
Sur sa seule lèvre
Et toutes ses langues tournant dans le ciel
Stridentes
Le squelette de la pluie


(Notons en passant que l’avantage du livre sur l’enregistrement ou l’audition lors d’une lecture en public – que Pierrepont pratique assez souvent – est qu’on peut revenir en arrière, faire halte, rebondir et bien sûr se taire, laisser les mots parler en silence.)


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Pierrepont_2_article
Charles Mingus en 1976 ©️ Tom Marcello

La liberté est chez elle dans ce recueil : toutes les formes sont bonnes à prendre, toutes les tonalités sont les bienvenues, y compris dans la mise en page, dûment pensée sans être extravagante. Ainsi, la chambre 20 du premier poème, « Maison hantée », occupe deux colonnes, on croirait deux lits. Le troisième poème, « De fortune », au titre aussi vague qu’une échappée sur l’océan, joue avec le corps et la graisse des caractères pour suggérer la polyphonie de la parole (la version enregistrée fait tonner les cuivres !). Pierrepont ne néglige pas non plus la narration : il sait ne faire qu’un du poète et du griot. Cette liberté formelle, ces images trouvées au détour du laisser-aller, n’empêchent pas de penser qu’il y a préméditation : puisqu’il s’agit de (re)sacraliser le monde, rien comme le cérémonial des mots pour y parvenir. Le mot monde est ici omniprésent, tout autant que le mot mot (« Mau-Mau ? », s’interrogeait le contrebassiste Charles Mingus particulièrement africain dans son magnifique Passions of a Man, comme si nous l’étions tous). Malgré l’abondance d’images dont la provenance automatique fait peu de doute, telle

La longue rangée des visages
Dans la pleine maison en h
L’aile du g de l’aigle


le verbe d’Alexandre Pierrepont est sous le contrôle paradoxal d’une conscience qui revendique l’imaginaire comme sa source et son aboutissement, d’une lucidité où le poétique et le politique ne sont pas vécus contradictoirement. « Le jardin des crânes », dans sa forme journal de voyage, serait-il destiné à faire mentir, mais en toute complicité, André Breton et son péremptoire « L’acte d’amour et l’acte de poésie / Sont incompatibles / Avec la lecture du journal à haute voix » ? Pierrepont laisse parler la sienne, la laisse se nouer à d’autres langues, à la langue réitérative, lancinante et dansante venue d’Afrique, à la langue des cérémonies vaudoues, langue de chair et d’os autant que de mémoire et de savoir.

Je vois trouble
Je vois l’atome et le vautour
Je lis sur toutes les lèvres
Je suis saoulé par les Loas
Docteur-Feuilles à qui faut-il que je m’adresse
Puisque toute parole n’est possible qu’adressée
Porte-parole, parole-porte
Béquille de Legba, Nom-vaillant
Faut-il que je m’adresse


Michel Leiris cherchait le sacré au plus intime de sa vie quotidienne [Ah bon ? Je ne l'ai pas lu comme ça...]. Lieux, objets, faits de langage, personnes, tout pouvait franchir les frontières du monde ordinaire pour revêtir « un caractère sacré », comme il l’explique et le détaille dans L’homme sans honneur [1]. Alexandre Pierrepont fait exploser son moi ou plutôt son je en une multitude de nous, comme si le dedans n’était que le dehors retourné comme un gant. Comme si l’amour, c’était soi dans l’autre et réciproquement (le lyrisme de Pierrepont est en langage « pétrifié », il ne donne pas dans l’épanchement). Comme si ce qu’il y a en nous de plus singulier était pluriel. Voilà ce que tambourinent ces poèmes où le chiffre trois – je, nous, elle – se laisse deviner comme la pierre (ou la bière !) sous la mousse. Des poèmes qui tonnent, ressassent, s’enfuient, reviennent, se taisent, éclatent, s’apaisent. Des poèmes faits pour habiter sans frontières notre monde.

1. Le sacré dans la vie quotidienne, Allia, 2018.
dans les années 90, je lisais en premier, dans Jazz Magazine, les Terres de feu d'Alexandre Pierrepont, un encadré comme à l'écart de la ligne générale qu'il critiquait, comme je le ferai plus tard dans JAZZ ET PROBLEMES DES HOMMES, Livre, 2002 et son concentré JAZZITUDE. Il quitta la revue de Philippe Carles en claquant la porte. L'auteur, avec Jean-Louis Comolli en 1971, Free jazz/Black power, ce petit manifeste bien français du gauchisme esthétique alors en vogue, n'avait pas daigné lui me répondre à l'envoi de mes manuscrits, ce qui somme toute était de bonne guerre

je ne me souviens plus comment il en avait eu vent, peut-être par une revue underground de jazz et musiques improvisées où le second avait été livré en feuilleton. Toujours est-il que nous nous sommes rencontrés, que je lui ai donné des tirages de ces deux textes, le long et le court, qu'il a lus, lui. Il fut le seul critique de jazz à m'avoir renvoyé l'ascenseur, avec Christian Béthune (Le Jazz et l'Occident ; Adorno et le jazz, un déni esthétique...), à propos de Mingus, entre autres...

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Message par Patlotch Sam 9 Mar - 11:46


je rappelle que mon livre de 2002, JAZZ ET PROBLÈMES DES HOMMES, sous-titré l’éthique du jazz, par ses protagonistes, mêmes (et petite philosophie politique) les musicien(ne)s nous parlent, comportaient 600 citations de quelque 300 jazz(wo)men, classées selon le sommaire avec accès d'un clic

les douze ci-dessous de mémoire n'y sont pas toutes, mais relevant du même esprit (celui du jazz, du blues, de l'éthique musicienne face au public...), elles sont bien choisies


Voici douze de nos citations favorites à propos du jazz,
par les plus grands artistes qui ont fait du Jazz ce qu’il est aujourd’hui.

Jazz Radio, Jazz and Soul, 04 mars 2019
« Ce que nous jouons c’est la vie »
Louis Armstong

« Ne pas abandonner l`effort de faire ce que l’on veut vraiment faire. Là où il y a de l'amour et de l'inspiration, je ne pense pas que l`on puisse se tromper. »

Ella Fitzgerald

« La véritable musique est le silence et toutes les notes ne font qu'encadrer ce silence »
Miles Davis

« Ils vous enseignent qu’il y a une limite à la musique. Mais, il n’y a aucune limite à l’art »

Charlie Parker

« Ce sont les notes qu'on n'entend pas qui sont les plus importantes» [/i
]Count Basie

« Si je chante comme quelqu’un d’autre, alors je n’ai pas besoin de chanter tout court »

Billie Holiday

« Parfois j’aimerais écouter ma musique comme si c’était la première fois, comme si je ne l’avais jamais entendue auparavant. Etant une part importante de celle-ci, je ne saurais jamais ce que l’auditeur reçoit, ce qu’il ressent, et c’est dommage »
johnColtrane

[i]« La musique nettoie la saleté de la vie de tous les jours »

Art Blakey

« Ça m’embête quand les gens essayent d’analyser le Jazz comme si c’était un théorème intellectuel. Ce n’est pas le cas, c’est un sentiment »
Bill Evans

« La vie c’est comme le Jazz… C’est mieux quand tu improvise… »
George Gershwin

« Le Jazz est une des formes d’art les moins apprenable »
Keith Jarrett

« Je pense qu’il est plus facile de jouer vite que de construire quelque chose d’intéressant sur tempo lent »

Thelonious Monk[/i]

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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Invité Ven 31 Mai - 9:57


centenaire immortel
MONK, UNE SINGULARITÉ EXEMPLAIRE

UNE VIRTUOSITÉ UNIQUE
décryptée par Laurent de Wilde
1980-1991, mes poèmes en hommage à Thelonious Monk
Patlotch a écrit:j'ai récemment dit mon admiration pour l'intégrale de Thelonious Monk par le guitariste Miles Okazaki,  celui qui en respecte le plus l'esprit, dans une approche à la fois personnelle, originale et savante

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS A0434220547_10

j'ai souvent souvent conseillé la lecture du meilleur livre en français sur le jeu du pianiste, celui de Laurent de Wilde en 1997

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 61H3HlnBdiL

Laurent de Wilde aura attendu 20 ans pour enregistrer un disque en hommage au grand moine, et se produire en concert sur ce thème, comme au Festival Jazz sous les Pommiers, d'où il a donné une interview à Ouest-France le 28 mai

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS New-Monk-Trio
Laurent de Wilde, piano
Jérôme Regard, contrebasse
Donald Kontomanou, batterie
Votre concert s’inspire d’un jazzman que vous admirez : Thelonious Monk. Cela vous a pris comment ?

À cause d’un éditeur qui m’a demandé d’en écrire la biographie parce qu’il pensait que j’étais l’homme idoine. Avant d’écrire ce bouquin, j’étais un apprenti musicien jazzman à New York, avec une somme de connaissances à ingurgiter. Je devais comprendre Bill Evans, Herbie Hancock, Bud Powell, Art Tatum… Monk, musicien singulier, était plutôt dans le bas de ma pile d’étudiant.

Monk est un caillou venu du cosmos, qui est tombé dans notre jardin à notre grande surprise : avec ni ascendant, ni descendant dans le jazz. Il reste une source d’inspiration constante. Musicien, il nous a laissé aussi des compositions dont d’autres musiciens peuvent s’emparer. Reste que l’on ne peut pas sonner comme Monk. Quoi que l’on fasse. Des imitateurs de Monk, ça n’existe pas. Pour une très bonne raison : lui-même a mis sa vie entière à développer une technique qui correspondait à sa musique pas du tout académique. En écrivant sur lui, j’ai sorti le microscope et tout un monde s’est ouvert à moi. Monk est un condensé de tous les présupposés que l’on a sur le jazz et, en même temps, leur dénégation complète. C’est tout sauf un lieu commun du jazz.

Pourtant, si vous aviez déjà repris un ou deux titres, vous n’avez osé un album complet Monk qu’en 2017 ?

À l’occasion du centenaire de sa naissance, j’ai vu d’autres musiciens qui se risquaient à faire eux-mêmes des albums inspirés de Monk. Pourquoi pas moi qui avais commis sa biographie ? Autour de moi, on me tannait. Mais, pour tout dire, j’avais les jetons de m’attaquer au maître absolu. Passer vingt-cinq ans de sa vie à dire d’un mec qu’il est inimitable, ce n’est pas pour oser enfiler ses pantoufles… Finalement, je me suis décidé. D’où l’album et le répertoire joué sur scène: j’ai adopté une forme de spectacle où je parle un peu plus, pour expliquer les morceaux. Ceux que j’ai choisis sont ceux dans lesquels j’ai senti une brèche dans laquelle je pouvais me couler. Il y a des morceaux où je n’ai pas encore eu le déclic. La musique de Monk, on peut y passer sa vie à tenter de la réinventer : elle est infinie. Un autre album, ce n’est pas encore dans mon horizon immédiat, mais ce n’est pas à écarter.

dans cette vidéo, on retrouve ses explications lumineuses et convaincantes sur le jeu génie singulier du jeu monkien, avec, relativement au livre, l'avantage des exemples musicaux


par contre, je ne donne pas d'extraits de concerts de cet hommage de Wilde à Monk, pour moi, ça ne rend pas compte de ce qu'il explique pourtant si bien. D'autres vidéo de Wilde sur Monk compositeur, Monk sa technique

quand à mon hommage, il fut seulement poétique en mots, avant sa mort, une chanson sur le thème de Blue Monk, à sa mort en 1982, un premier poème, enregistré sur une cassette de mon trio en 1984, puis d'autres dans mon poème-roman en 1990-91


"I' sait mêm' pas jouer du piano" (Blue Monk)
Paroles sur la musique de Blue Monk, 12 blues (Thelonious Monk), juillet 1980
/ = barres de mesures. En italique : thèmes de Monk

T'as vu le Nègre / qu'est au piano / tu trouves pas / qu'il a l'air bizarre
Regarde son / drôle de chapeau / dans ses grosses lèvres  / un cigare Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

Avec sa barbe / ses yeux hagards / on dirait vraiment / le portrait d'un ermite
Regard' ses mains / de vrais battoirs / les noirs sont des gens / insolites Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

Thelonious Monk / quek' qu'cé qu'ce nom / Yen a même qui l'appellent / Sphere
Ecoute donc / ces demi-tons / j'y comprends rien à / c'qu'i veut faire Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

'tap des accords / comm'un marteau / yen a qui dis' que cette musique / est géniale /
J'suis pas d'accord / j'trouv' pas ça beau / et j'y perds toujours / les pédales Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

Comme l'oiseau compositeur / d'un' musique étrange / au goût venu d'Afrique
Mysterioso / Charlie Parker / c'est la honte de / l'Amérique Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

A c'qui paraît / c'est du be bop / lui on dit qu'il est le pro/phète du jazz
Ptêt que c'est vrai / mais les syncopes / c'est vraiment fait pour / les sauvages Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

Ces dissonnances / ce tintamarre / Autour de minuit sonne / l'heure de crime  
A l'évidence / 'cherch' la bagarre / avec sa musique / de déprime Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / i' sait mêm' pas jouer du pia/no... (bis)

(ad lib) Moi j'vais t'dire / Jean-Marie / j'ai envie d'tirer sur ce pianiste /  
J'aim' pas le blues / j'aim' pas les Noirs / on a le droit d'être / raciste Mais qu'est-ce qu'i /
Joue faux / et moi je préfère le disco... (bis)

30 mars 1982

Monk encor crie son crépuscule d'ivoire
Dans la sonnance d'un blanc frottant un noir
Arrachant au granit un bloc de mystère écorché
Rythme de falaise au bord effrité d'une croche en l'air
Qui prend le risque de la syncope fatale


(J moins 152)

Thelonious MONK

ACCROCHE AU CIEL TITAN TON REFUS  
SANS FAUTE TON REFUS SANS FILET
TON GÉNIE SANS ÉCLAT THELONIOUS
MONK THELONIOUS MONK THELONIOUS MONK
THELONIOUS MONK THELONIOUS MONK THEL
ONIOUS MONK THELONIOUS MONK THELO
NIOUS MONK THELONIOUS MONK THELONIOUS


(six cent trente-cinquième nuit)

Un bac à disques où t'as pas d'Monk... Même pas à M divers. M...!

Comme retourner au pays, tu cherches un arbre de ton enfance, tu trouves l'endroit, un trou ! M...! Ils l'ont... doit pas y avoir longtemps... t'as plus qu'à faire dedans.

Quand même trouvé une cassette. Je ne l'ai pas volée. 1971. A Londres. Avec Blakey. Le plus Monk des batteurs. Que j'dis. Evidence. Crepuscule with Nellie. Même que sur la notice c'est écrit Crepescule... De quoi jouer, mais moi, même moi, les mots, des fois, j'en ai marre. De Monk, jamais. Crepuscule with Nellie... Poignant. Quoi de plus beau ? Quoi de plus vrai ? Nellie c'est sa femme. Et sur ce thème, sur ce je t'aime, Monk n'improvise jamais.

1971. A Lyon, en quartet. Avec Charlie Rouse... All alone. C'est terrible un concert tout seul. T'as beau te dire la musique c'est chacun pour soi, fermer les yeux... c'est très douloureux cette solitude-là... devant le génie. Qu'importe mais je dois dire qu'en 1971, musicalement, je n'y comprenais rien...

(six cent trente-sixième nuit)


J'ai donc ce soir au menu :

Du pain. Du vin. Et du Monk.
Du pain de campagne. Du vin d'Aragon. Et du Monk.

Du pain de campagne de la ville.
Du vin d'Aragon non pas d'Aragon.
Et du Monk.

Du pain de campagne de la ville de Paris.
Du vin d'Aragon non pas d'Aragon Louis
il ne fait pas de vin d'Aragon lui.
Et du Monk

Résumons. J'ai au menu ce soir du faux pain de paysan de Paris
d'Aragon du vrai vin non pas d'Aragon
et du Monk réel qui ne tourne pas rond.

Résumons.
Monk qui n'avait pas un rond, ne faisait pas de pain.
Aragon qui en avait, n'était pas vain.
Je suis rond.
Je n'ai pu rin à ragonter.
Je Monk me toucher.
Dong.

(je suis le paysan de moi-même)



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Message par Invité Dim 7 Juil - 12:06

7:00, complété

Patlotch a écrit:il récusait le terme de bossa-nova, lui préférant samba, il n'était ni un chanteur ni un guitariste de jazz, mais il était pour moi dans ses guillemets depuis ce disque qu'on m'avait offert en 1968, avec Stan Getz et la compagne de Gilberto, Astrud, qui partira avec le saxophoniste... Le compositeur Antonio Carlos "Tom" Jobim est au piano et signe six des huit morceaux du 33 tours. Tout est là y compris les emprunts à l'"harmonie du jazz" et la filiation avec un autre grand mélancolique : Frédéric Chopin Insensitez basé sur le Prelude No.4)


je laisse à Jacques Denis le soin de présenter ce géant plus discret que ne le laisse entendre sa célébrité. Il y parle du « monumental album «blanc» enregistré à New York en 1973, une épure totale, à l’image de sa couverture immaculée », que j'achèterai aussitôt, un vinyl excellemment enregistré et d'une présence intime troublante, autant que la liberté et l'indépendance rythmiques entre la voix et la guitare qui n'ont cessé de me dissuader de jouer vraiment de la "bossa nova" avec son balancement spécifiquement brésilien et la mise en place tout sauf évidente de Gilberto, quelque chose d'un ailleurs hors d'atteinte, et rien à voir avec Ze Gueurle from Ipanema que nous massacrions en toute quiétude comme la plupart de ses interprètes de jazz, bien trop accordés pour qu'elle sonne Desafinado

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les enregistrements avec orchestre à cordes, je les découvrirai plus tard, en 1993, ma compagne en ayant apporté un CD du Japon, d'où l'on tient un de ses meilleurs enregistrements live, d'un concert à Tōkyō en 2003, encore un disque blanc

toute la presse française, hormis Le Monde et Libé ci-dessous, reprend le communiqué de l'AFP où l'on apprend que João Gilberto « a fini sa vie en solitaire et ruiné ». N'est pas Johnny Halliday qui veut... à chacun sa richesse, que ses héritiers emporte la mauvaise en enfer !


JOÃO GILBERTO, SAMBA TRISTE
Jacques Denis Libération 6 juillet 2019 à 22:44

Père récalcitrant de la bossa nova et chanteur de légende, le musicien brésilien est mort à 88 ans. La musicalité de son chant hypersensible ouvrit la voie au génie de Caetano Veloso, Gilberto Gil et Tom Zé, et son influence immense toucha jusqu'au jazz de Miles Davis.

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Joao Gilberto, en août 2008 à Rio de Janeiro Photo AFP  
Jacques Denis a écrit:Une bouteille d’eau, une guitare, un tabouret, il ne lui fallait rien de plus pour mettre l’Olympia à genoux. En ce soir de juillet 2001, João Gilberto enchaîna pendant près de deux heures trente les classiques. Les siens et ceux des autres, qu’il habitait comme nul autre. Pas un bruit dans le temple parisien transformé en une cathédrale de silence, et puis tout d’un coup, tous debout, dans un tonnerre d’applaudissements pour celui qui imposait l’écoute. Deux ans plus tard, ce sera un tout autre tintamarre, le boucan d’intermittents pas contents, qui vint gâter un éphémère moment qui aurait dû suspendre définitivement le temps : l’une des plus belles voix du siècle, seule dans le théâtre antique de Vienne. Samedi soir, on a appris la mort de cette légende absolue de la musique brésilienne à 88 ans par un message posté sur Facebook par son fils Joao Marcelo.

Rumeurs et fantasmes
La «rareté» – dans tous les sens du terme – de ses apparitions était déjà légendaire à l’époque, et les admirateurs n’hésitaient pas à faire des milliers de kilomètres pour le voir. Combien ont rêvé le rencontrer, lui poser mille questions, juste le remercier pour tout, et même le reste. Un journaliste allemand Marc Fischer en fera même un livre : Ho ba là là, à la recherche de João Gilberto, une quête à la façon de Sisyphe. Las, João Gilberto s’en est allé, et ce peut-être depuis un bail déjà. Ne nous avait-il pas prévenus dès 1960, en égrenant avec délice les paroles de Doralice : «Je préfère vivre seul, au son des lamentations de ma guitare.» Le fantasque fantastique Brésilien vivait reclus dans son appartement de la zone sud de Rio, n’ouvrant sa porte que quand il était sûr de ne trouver personne de l’autre côté.

Ces dernières années, plombé par des dettes, dépossédé de ses droits, miné par des procès à rallonge, notamment celui qui l’opposait à la maison de disques EMI, depuis que celle-ci eut l’idée de publier en 1987 sous CD des versions «indigentes» de ses enregistrements historiques, acculé par des histoires de famille où il fut même placé sous curatelle par ses deux premiers enfants, l’homme avait «disparu». Au printemps 2015, une vidéo sur Youtube le montrant, affaibli, fredonner avec sa jeune fille Luiza ne fit qu’alimenter le bruit médiatique. Où était-il ? Que faisait-il ? Comment allait-il ? Il sera dès lors le sujet de bien des rumeurs et fantasmes, mais ce n’était pas vraiment là de l’inédit. Restait le musicien, dont des proches assuraient qu’il continuait de se pencher sur cette six-cordes, objet d’une analyse. La sienne. Nul besoin de témoin pour cela, devait estimer celui qu’il serait trop aisé de qualifier banalement de misanthrope.  


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En 1988. (AFP)

João Gilberto était aussi avare de ses paroles en public que le chanteur savait distiller comme peu sa science superlative du phrasé. La mémoire numérique, qui traque dans les moindres recoins, n’en a d’ailleurs que peu de traces : dans une brève interview datée de 1967, le Brésilien reçoit dans sa petite maison du New Jersey, beaucoup de questions, peu de mots en retour, avant de converser avec Bebel sa fille, tout bébé. Une vingtaine d’années plus tard, quand il se retrouve face au présentateur vedette Amaury Jr, João Gilberto préfère laisser répondre ses musiciens qui l’enlacent. Grand moment de vide médiatique, mais avec à la clef quelques indices sur les choix esthétiques du maître, quand celui-ci consent à égrener quelques noms de chanteurs qui comptent à ses oreilles : outre ses deux disciples, Caetano Veloso et Gilberto Gil, il cite le «merveilleux» Roberto Silva, Emilio Santiago, Beth Carvalho… Soit trois sambistes pur jus.


«La bossa nova je ne sais pas ce que c’est. Moi je joue de la samba», avait-il assuré en 1961 au moment de publier son troisième album, où se retrouve justement une version de Samba da Minha Terra, le classique de l’un de ses maîtres chanteurs, Dorival Caymmi. Cette terre, c’est celle où il est né le 10 juin 1931 à Juazeiro, dans l’état de Bahia, c’est-à-dire bien loin des plages de Rio où il ne débarquera qu’en 1950. À la maison, la musique a sa place, le père tâtant en amateur de l’ukulele et du saxophone. Quant au petit João, il aiguise ses talents précoces à la chorale. La légende prétend qu’à sept ans il aurait pointé une faute d’accords de l’organiste à l’église ! Sept ans plus tard, il met les doigts sur sa première guitare, et forme un groupe vocal : Enamorados do Ritmo. Texto : les amoureux du rythme. Le rythme, une notion bien particulière chez lui, sera la base de la divergence de son style. En attendant, après un passage à Salvador de Bahia, où João Gilberto commence sa carrière à la radio, il prend la direction de ce qui est encore la capitale du Brésil et surtout la voie royale pour faire carrière.

La matrice de la bossa nova
À Rio, il va apprendre le métier, enregistrant des 78-tours avec Os Garotos da Lua, un groupe vocal dont il se fait virer, puis grave une première session en 1952 pour le label de Copacabana : la samba mélo et le bon vieux boléro sont alors à leur apogée, et le jeune João teinte son vibrato de ce vernis langoureux. C’est un bide. Du coup, tout en fréquentant les oiseaux de nuit dont João Donato avec lequel il va partager l’incompréhension des tenants du bon goût, il vivote de petits boulots à la radio, au théâtre, pour des réclames… Rien de bien glorieux pour ce caractère ombrageux, soumis déjà à des hauts et débats. On prétend même qu’il passe ses journées en pyjama, embrumé à la marijuana - à l’époque, on le surnomme Zé Maconha !

Le premier tournant se situe en 1955, lors d’un séjour à Porto Alegre où il croise le compositeur et pianiste Armando Albuquerque qui lui donne l’assise théorique, notamment les questions d’harmonie qui lui faisaient défaut. L’autre révélation, il l’aura en retournant vivre chez ses parents. «C’est la terre première, un exemple», insistera des années plus tard João Gilberto de retour d’un périple mondial devant le public bahianais au moment d’interpréter une chanson signée d’un jeune homme alors plein d’avenir Gilberto Gil : Eu Vim Da Bahia (je viens de Bahia) magnifie en quelques vers ce berceau. Loin de Rio, il s’attelle enfin à trouver son style. Ce sera Bim Bom, considéré comme la chanson matrice de la bossa nova, qu’il aurait composée en écoutant marcher les lavandières. «Bim bom bim bim bom bom…», cette chanson de trois fois rien (trois lignes de texte) est avant tout une histoire de rythme, celui qui va imprimer le reste de sa carrière. Au début de 1957, João Gilberto s’en retourne à Rio de Janeiro, cette fois pour de bon.



Plus question de s’en tenir aux figures de style imposées, le Bahianais va dès lors avoir le mérite de concrétiser les désirs sous-jacents d’un mouvement en gestation, la bossa nova à laquelle il apporte deux petits plus, de vrais défauts d’autodidacte qui feront les qualités de cette «nouvelle vague». D’abord le grain de voix, le canto falado, le chant parlé, murmure couleur pastel qui détonne au milieu des chanteurs de charme, intimisme feutré loin de toute vanité virtuose ; ensuite la batida, ce délicat décalage entre-temps forts et temps faibles, cette pulsation inédite qui va bientôt faire chavirer le monde entier. Ce seront la marque de fabrique de João Gilberto, et à sa suite de toute la bossa nova, qui souffle un air d’ambiguë mélancolie.

Mélodie faussement nonchalante

Le 10 juillet 1958, João Gilberto enregistre Chega De Saudade, paroles de Vinicius de Moraes, musique d’Antonio Carlos Jobim. L’histoire majuscule retiendra cette date. Pour la petite histoire, le titre avait déjà été enregistré par Elizete Cardoso quelques mois plus tôt. João n’était alors qu’à la guitare, mais Jobim, pas sourd, insiste pour qu’on lui offre sa chance. Son timbre de velours fera toute la différence : une nuance d’une indicible élégance. Le 10 novembre de la même année, Jobim et Gilberto remettent ça avec Desafinado - «désaccordé» ! Une déclaration d’intention, puisqu’il y est question d’anti-musique, comme certains sambistes qualifient cette bossa qui utilise la quinte diminuée, à l’image du be bop quinze ans plus tôt à New York. A ceux-là, le chanteur surdoué susurre une réponse : «Les sentiments et la voix que Dieu m’a donnés.»



Cette mélodie faussement nonchalante et cette rythmique vraiment pas évidente vont illico séduire une nouvelle génération d’un Brésil en plein désir de changement, à l’image de Juscelinho Kubitschek, Président bâtisseur et lui-même amateur de cette espèce de samba qui lorgne du côté du jazz de la côte ouest. Entre 1959 et 1964, toute la planète découvre puis décline la petite nostalgie de l’incertain Bonheur de vivre. Cinq ans pendant lesquels, aidé du producteur Aloysio De Oliveira, entouré de Jobim et compagnie, João Gilberto pose en une poignée de sessions des jalons aussi insurmontables qu’indispensables. Chaque syllabe colle au plafond, la moindre inflexion met le frisson, il a tout pour plaire aux âmes sensibles aux cordes subtiles. Les jazzmen ne seront pas les derniers, en pâmoison devant un chanteur qui se hisse dans les mêmes hauteurs – profondeurs, aussi – que le roi Nat Cole.

En 1962, la première dame Jackie Kennedy organise une soirée bossa nova à la Maison-Blanche, en préfiguration du grand raout au Carnegie Hall prévu le 21 novembre. Tout le gotha bossa est là. Miles, Dizzy et bien d’autres ont fait le déplacement. Malgré une relative incompréhension de part et d’autre, certains Brésiliens décident de demeurer aux Etats-Unis. João Gilberto en profite pour rejoindre le label Verve, et enchaîner avec le saxophoniste Stan Getz et Jobim, lui aussi resté à New York. À la clef : c’est un succès insensé (87 semaines de suite dans les charts pop !) pour la fille d’Ipanema, Astrud Gilberto, chanteuse amateur au registre limité. Pour le single radio, la voix de l’esthète brésilien est coupée et le nom de Jobim figure en tout petit. Pourtant, ce Getz/Gilberto réalisé à la mi-mars 63 ne vaut pas un real sans eux. «L’amour est une chose bien triste quand il s’efface», prédit la chanson. Si João Gilberto glanera un Grammy, il perd dans cette histoire sa femme, qui part avec le saxophoniste. Las, il convole avec une autre chanteuse, Miucha, la sœur de Chico Buarque et future maman de Bebel.  



Et comme si ce contresens historique ne suffisait pas, l’année 1964 voit un coup d’État mettre fin aux illusions du novo Brésil. C’est le début d’un éloignement pour le chanteur, qui va même un temps s’installer à Mexico, où il enregistre une session au tournant des années 1970 : au menu une version irréelle du génial O Sapo de son ami João Donato. «Bolobolo bolobolo bolo, badabada…» Dès lors, l’inaccessible personnage se donnera très peu en spectacle, se fera de plus en plus discret en studio. Peu de disques certes, mais pas une trace de médiocrité dans ce parcours. À commencer par le monumental album à son nom qu’il enregistre à New York en 1973, une épure totale, à l’image de sa couverture immaculée. Cet autre album «blanc», tout juste teinté des percussions de Sonny Carr, raffine à l’extrême vieilles sambas et nouvelles chansons. Comment ne pas tout lui pardonner, à l’écoute de É Preciso Perdoar, où il assume : «Je voulais l’illusion, désormais la douleur est en moi…» Au bord du silence, le chanteur donne à la moindre onomatopée un sentiment de plénitude. Quatre ans plus tard, il se retrouve bardé d’un grand orchestre de cordes qui fera pousser des cris d’orfraie à ses fans. Et pourtant, porté par les arrangements impressionnistes de Claus Ogerman, il transporte la désuète ballade Estate dans le domaine de l’irrationnel. La grâce d’une voix qui fait tout chavirer, tous chialer. «Oh, Brésil magnifique et coloré / Tu es mon Brésil brésilien / Terre de la samba et du tambourin…»

En 1980, alors que le Bahianais décide de rentrer au Brésil et entame une décennie où il visitera enfin des capitales d’Europe qui l’attendent depuis des lustres (Rome, Lisbonne, Paris, Bruxelles…), il choisit d’enregistrer une version d’Aquarela do Brasil, cette fois avec les cordes de Johnny Mandel. Pour cette version – là encore définitive – de l’antique composition du pianiste Ary Barroso, véritable second hymne national, le maître est secondé par deux de ses fidèles : Gilberto Gil et Caetano Veloso. Pour avoir été de turbulents tropicalistes, ils n’ont jamais manqué de saluer qui de droit. Caetano dont le timbre de voix le fait tutoyer pareils sommets n’aurait peut-être pas eu la même vie sans la découverte de João Gilberto en 1959. «João Gilberto fut le rédempteur de la langue portugaise, pourfendeur de l’immobilité sociale au Brésil – avec sa stratification inhumaine et grossière –, architecte des formes les plus raffinées et critique moqueur de toute stylisation qui les abaisserait», confie-t-il dans son autobiographie, Pop tropicale et révolution.

«Une émeraude qui se réfléchit à la lumière»
Les voir sur scène à Buenos Aires en 2000, alors que le cadet vient de produire l’ultime sommet en studio de l’aîné (Voz e Violão), reste un de ces moments d’exception. Quant au futur ex ministre, il saluait encore en 2014 les sambas de l’autre Gilberto. La génération, qui suivit les premiers pas de la bossa, ne cacha jamais ses affinités pour cet homme hors-norme. Ainsi, les hippies de Novos Baianos auront trouvé leur voie grâce à lui, quand ils enregistreront un second opus figurant en haut de la pile de toute discothèque brésilienne. Notamment pour cette version d’une vieille samba, Brasil Pandeiro, que leur avait indiquée João Gilberto.



«Il y a un avant et un après João Gilberto. Tout ce qu’il chante est une émeraude qui se réfléchit à la lumière», résumera un soir Tom Zé, autre visionnaire qui partage avec le Bahianais le sens de la mesure démésuée et du déséquilibre naturel. «Il peut bien sonner même en lisant un journal», dit un jour l’exigeant Miles Davis. C’est sans doute là, encore plus que tout le reste, que résidait le miracle de João Gilberto. Jamais pris en défaut de bon goût, toujours prompt à sublimer une comptine de quelques vers, le chanteur aura redonné ses lettres de noblesse au mot «interprète». Combien de titres demeureront pour l’éternité associés au nom de ce créateur qui n’eut de cesse de creuser les mêmes sillons en quête de l’ultime perfection : O Pato, Falsa Baiana, ’Wonderful, Desde Que O Samba É Samba… Comme lorsqu’il fait sien à tout jamais en 1991, Que reste-t-il de nos amours, où il décale légèrement son chant irradiant des arrangements clair-obscur de Clare Fisher. C’était tout cela João Gilberto, le sentiment tenace d’avoir un soir été convié à l’Olympe, un souvenir d’une caresse qui nous poursuivra sans cesse.


JOÃO GILBERTO
LES SECRETS D'UN "VIRTUOSITÉ" AFROLOGIQUE*
« l’invention de la voix et de la guitare comme un seul instrument »
Patlotch a écrit:j'emprunte le terme d'afrologisme au musicien George Lewis, tel qu'exposé dans Jazz supreme de Raphaël Imbert, 2014/2018, chapitre 2. Afrologie vs Eurologie, p. 43, qui « balaye toute ambiguïté en dénonçant, des deux côtés, les perspectives essentialistes, racialiste ou nationaliste qui classeraient les musiques « noires » ou « blanches » selon l'appartenance ethnique. » Je reviendrai sur ce livre important pour l'histoire du jazz...

j'ai rendu compte ici de la disparition de João Gilberto, en précisant qu'il récusait le terme de bossa-nova, lui préférant samba. Il n'était ni un chanteur ni un guitariste de jazz, mais il était pour moi dans ses guillemets

sa mort entraîne forcément un déluge d'articles de presse, la plupart reprenant les dépêches d'agences, mais aussi des commentaires de "connaisseurs" comme il en existait déjà à propos de ce qu'est vraiment la bossa nova, son harmonie, son rythme, et partant la "virtuosité" guitaristique de João Gilberto. Tout dépend de ce qu'on entend par virtuose, mais s'il s'agit de prouesses techniques, de vélocité, non, le "père de la bossa nova" était tout sauf un virtuose, en comparaison d'autres guitaristes brésiliens à l'époque, ou latino (Atahualpa Yupanqui...), et dans le genre Laurindo Almeida ou Charlie Byrd sont incontestablement mieux armés (écouter Byrd et Getz sur Desafinado, enregistré en 1962, avant le disque avec Gilberto, où la bossa est déjà jazzifiée contre ses spécificités brésiliennes)

première parenthèse, on cite Henri Salvador comme une des inspirations de l'initiateur musical de la bossa nova, le compositeur Antonio Carlos "Tom" Jobim, car Gilberto ne compose pas, il interprète. Il s'agit de "Dans mon île", chanson composée en 1957 par Salvador et découverte par les musiciens brésiliens en 1958 dans le film italien "Nuits d'Europe". Henri Salvador déclarait avec fierté : "Sergio Mendes (musicien brésilien) m'a raconté que quand (le musicien brésilien Antonio Carlos) Jobim a vu ça, il s'est dit : 'C'est ça qu'il faut faire, ralentir le tempo de la samba et mettre des belles mélodies'". source



seconde parenthèse, on voit discuter l'influence de l'harmonie du jazz sur la bossa nova en sus de celle, chez Jobim, de Chopin, Ravel, Debussy, Villa Lobos... avec un argument curieux : il aurait introduit dans les accords des extensions de 11e et 13e alors que le jazz n'aurait utilisé que des 9e, ce qui est vrai du jazz d'avant 1940, mais certainement pas du be-bop dont c'est une caractéristique reprise par les guitaristes dès la fin des années 40. Il est plus vrai que Jobim utilise des substitutions par tritons de cadences en quartes, donnant un mouvement de basses chromatiques avec des pédales supérieures (One Note Samba...), chères à Chopin, qui donnent une couleur à la mélodie réduite à quelques notes


il est indiscutable que la bossa nova a une influence sur le jazz plus que l'inverse, et c'est le cas de toutes les musiques afro-cubaines, d'une part dès les origines à la Nouvelle-Orléans, d'autre part avec Dizzy Gillespie et Cuba, qui modernise ce qui n'est pas encore nommé la Salsa. Elle ne passe par par Gilberto, mais essentiellement par Jobim dont nombre de compositions deviennent des standards. Il n'est pas indifférent que cela commence avec Stan Getz, à qui critiques et amateurs ont beaucoup reproché les "facilités" de son disque avec Jobim et Gilberto. Mais c'était sans reconnaître que Getz est un mélodiste hors pair, ce dont témoignent ses improvisations détournées de la mélodie des thèmes de Jobim dans un parfait écho aux voix de João et Astrud Gilberto

le génie de Gilberto est de porter au sommet cet assemblage de textes et de musiques, dans l'esprit de la samba (ou du samba, le mot étant masculin en portugais), en adaptant à la guitare les particularités rythmiques du jeu des tambours et percussions d'origine africaine, dans lesquelles les notes et particulièrement les basses sont jouées en décalage avec le temps, avant ou après, sans que soit perturbé le tempo. Disons que c'est le filon noir de sa musique dû à ses origines du Nordeste, ou la samba trouve principalement ses racines dans les traditions africaines restées vivaces par-delà les temps d'esclavage

l’invention de la voix et de la guitare comme un seul instrument
il est frappant par ailleurs que Gilberto joue et chante toujours en même temps, il n'y a jamais un solo, jamais une phrase mélodique en notes simples, mais toujours comme note supérieure des accords, les dissonances étant le plus souvent dans les notes intérieures et donc moins agressives pour une oreille récalcitrante, ce qui fait le charme subtilement désaccordé (Desafinado) de sa musique, dont la mélodie reste simple et chantante : l'audace harmonique à la portée d'oreilles populaires. Le décalage propre à ce qui est joué à la guitare, qui n'est pas seulement un accompagnement comme généralement chez un chanteur-guitariste (Brassens...), est redoublé par le placement de la voix et la grande attention à ce qu'elles soient au même niveau de volume, car Gilberto était un maniaque du son et de l'enregistrement (lire ce témoignage d'un ingénieur du son)

en résumé, objectivement, ce que fait Gilberto à la guitare est relativement facile du point de vue technique, mais sa mise en place rythmique voix et guitare est infernale, et sur les tempos les plus lents, les plus difficiles



depuis l'arrivée des mélanges afro-cubains et jazz, donc de deux façons différentes de penser le tempo (temps régulier ou clave), de grands progrès ont été faits, mais culturellement c'est une gageure. Dans mon premier trio avec un saxophoniste (de jazz) et un percussionniste colombien, nous avions toujours un problème, lui dans les rythmes "ternaires" du jazz, nous dans le "binaire" de l'afro-latin, culture qui est indéniablement celle de João Gilberto


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Message par Invité Dim 13 Oct - 10:05


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 001_100_JazzMag721_CompletBD_page-0001

signalé le dernier Jazz Magazine, précieux pour ceux qui aiment le jazz et Serge Gainsbourg, puisqu'on y trouve répertorié ses enregistrements de 1958 à 1964 avant qu'il n'abandonne la scène. Parmi ses accompagnateurs, à signaler mon professeur de guitare Pierre Cullaz en 1958 (Ce mortel ennui) avec l'incontournable Pierre Michelot (contrebasse), Eddy Louiss à l'orgue  en 1962 (Intoxicated Man), et Michel Portal en 1964 pour Percussions


Serge Gainbourg a écrit:J'aimais le jazz pur, moderne, archi-moderne, Mais le jazz moderne n'intéresse personne, ou alors une minorité, parce qu'il a tout ce côté érotique, dépravé, dégueulasse... Ce qui est vrai. Aa cinéma, ça passe : le public aime les films violents, terribles, méchants. Mais dans la chanson, c'est difficile. Il faut laisser les gens aimer ce qu'ils veulent. Il ne faut pas trop les torturer. Il faut que le public se reconnaisse dans le gars qui chante.

Gainsbourg tel quel
, à la télé, 1965



Intoxicated Man, 1962, avec Eddy Louiss


1964, avec Michel Portal, Eddy Louiss...

Eddy Louiss que l'on retrouvera en cette même année 1964 auprès de l'autre grand chanteur français de jazz...


Gainsbourg a continué à chanter, mais je ne m'y suis plus jamais reconnu

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Message par Invité Mar 24 Mar - 9:42


RIP MANU DIBANGO
victime à 86 ans du coronavirus


Patlotch a écrit:merde ! Je l'adorais, pionnier et locomotive du Jazz africain souvent en France, vu plusieurs fois sur scène y compris petites salles. Une présence, un charisme, une cœur énorme, une simplicité communicative, avec une musique simple et savante à la fois, et la joie de vivre !

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Message par Invité Mer 10 Juin - 6:44


bye bye Sister

POINTER SISTERS
BLACK SOUL MUSIC
from Soul to Blues and Jazz

Bonnie Pointer, Founding Member Of The Pointer Sisters, Dead At 69
npr, 9 juin
Elles étaient quatre sœurs, Bonnie, Anita, Ruth et June, et avec leur groupe de soul elles ont fait danser la planète dans les années 1970. Après June, décédée en 2006, Bonnie Pointer est morte le 8 juin à Los Angeles.

1973


1974


1975


1974
Herbie Hancock, piano
Ron McClue, bass
Gaylord Birch, drums

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Message par Invité Sam 27 Juin - 8:10

très certainement un de ceux dont je me sentais le plus proche, on va comprendre pourquoi en découvrant ses multiples cheminements croisés
« le jazz, une créativité qui a bouleversé le siècle comme le blues a révolutionné la poésie.
C’était donc là où il fallait être si comme moi on était concerné par la chose révolutionnaire»

« Parler de racisme, c’est parler de quelque chose ; parler de race, c’est parler de rien. »


Hommage à Jacques Coursil
France Musique, 26 juin 2020

Il s’est éteint cette nuit à Aix-la-Chapelle où il résidait depuis quelques années. Jacques Coursil, universitaire, chercheur, magnifique penseur de la négritude, émule de Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire, fut aussi un sublime trompettiste de jazz.

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 600x337_unnamed

Jacques Coursil est né en 1938 à Paris, de parents martiniquais nés à Fort de France. Etudes musicales, et autres, à Paris.  

En 1958-1961, Jacques Coursil voyage en Afrique de l’Ouest, précisément pendant la période de décolonisation. Il séjourne longuement à Dakar où il est accueilli dans l’entourage de Léopold Sédar Senghor. Retour en France où il enseigne la littérature et poursuit sa formation musicale.  

En 1965, Malcolm X vient d’être assassiné. Coursil part pour les Etats-Unis où il restera dix ans. Il débarque à New York dans l’agitation des Civil Rights, l’avènement du free jazz (new thing), des happenings en art, des protest et des mouvements hippies. Pendant toutes ces années, il va avoir l’occasion de côtoyer et de travailler avec les plus grands musiciens américains tant de la scène du Jazz que celle de la musique contemporaine. Il va devenir l’élève du pianiste Jacky Byard et surtout celui du trompettiste Bill Dixon avec lequel il part finalement en tournée pour jouer en duo. Il étudie également l’harmonie et la composition sous la direction du compositeur Noel Da Costa et participera avec lui à de nombreux concerts en musique contemporaine. A cette époque, sa technique instrumentale est très solide et son imagination fuse tout azimut ; c’est, sans nul doute, un des meilleurs trompettistes de sa génération. Il s’associe souvent avec Alan Silva, Sunny Murray, Marion Brown, Frank Wright, Arthur Jones, avec lesquels il gravera en 1969 des plages qui sont désormais des classiques du genre, notamment Black Suite, et Way Ahead. On sait aujourd’hui que les musiciens de cette époque « glorious sixties » appartiennent au plus grand élan créatif de la musique de jazz depuis la révolution du Be bop.

Pendant ses années new-yorkaises dominées par la musique, la littérature, les arts et l’agitation politique, Jacques Coursil va découvrir quelque chose d’autre qui, selon lui, est tout aussi passionnant : la linguistique et la logique mathématique. Il va se détacher petit à petit de la scène musicale, enseigner de nouveau et retourner à l’université. Rentré en France, il décide de se consacrer à une carrière universitaire, ce qui l’emmène à soutenir deux thèses, l’une en Lettres (1977) et l’autre en Sciences (1992). Il enseignera en alternance la littérature et la linguistique théorique, d’abord en France, puis en Martinique et enfin aux Etats-Unis à l’université de Cornell et enfin à l’université de Californie à Irvine. Ce cursus fait de lui une des voies les plus écoutées sur le corpus de Ferdinand de Saussure ou sur les théories générales de linguistique moderne, comme l’atteste la portée de ses articles et de son livre, La Fonction Muette du Langage, paru chez Ibis Rouge en 2000.




Pendant toute cette époque d’activités littéraires et scientifiques, la pratique de la musique ressemble pour Jacques Coursil à une rivière souterraine (ou à un laboratoire d’alchimiste). Il travaille en secret le souffle continu, les articulations, les « coups de langue » sans relâche jusqu’à ce que cette trompette qu’il aime se mette à chanter, à danser et à parler : obsession de clarté et d’émotion du timbre. Il y a du Clark Terry, du Jimmy Owens, du Hugh Masakela dans cette démarche : sans doute; les trompettistes de Jazz, Jacques Coursil les aime et les admire tous.

2005 marque le retour de Jacques Coursil à la musique avec l’opus intitulé Minimal Brass sorti sur le label new-yorkais de John Zorn, Tzadik. Projet salué par la critique pour son audace, sa singularité et sa musicalité.
(coursil.com)

Article de Jacques Denis dans Libération :
MORT DE JACQUES COURSIL, JAZZMAN GÉNIAL ET FIGURE MÉCONNUE DE LA MODERNITÉ NOIRE
Trompettiste de génie, chercheur en mathématiques et en philosophie et ami d'Edouard Glissant, le Martiniquais né à Paris s'est éteint cette nuit à l'âge de 82 ans.

Articles de l'Institut du Tout-Monde / Édouard Glissant

Jacques Coursil nous a quittés, vendredi 26 juin 2020. L'Institut du Tout-Monde perd un ami. Le monde de la culture, de la littérature et de la musique perd avec lui un être exceptionnel qui avait su mener à la fois un parcours de linguiste, de spécialiste des littératures caribéennes et de musicien de jazz accompli.

Nous rendons hommage à celui qui avait entamé avec nous en janvier dernier un cycle nommé « Poétiques d'écrivains ». Un cycle qui demeurera inachevé, dont l'amorce avait été pour nous une nouvelle preuve de l'engagement à nos côtés de cet intellectuel brillant, qui nous avait accompagné l'an passé pour notre colloque sur Le Discours antillais d'Édouard Glissant. Nous adressons nos sincères condoléances à sa famille.

un disque acheté à sortie en 1971, j'avais 20 ans
LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS R-514220-1473976979-5150.jpeg
Alto Saxophone – Arthur Jones
Bass – Beb Guérin*
Contrabass Clarinet – Anthony Braxton
Drums – Claude Delcloo
Executive-Producer, Photography By – Jacques Bisceglia
Piano – Burton Greene
Trumpet, Composed By, Arranged By, Liner Notes – Jacques Coursil





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Message par Invité Mar 30 Juin - 6:12


SOWETO KINCH

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 180208-soweto-kinch-bizarre-mt-1011-533x800
déjà croisé dans JAZZ, A SOCIAL CALL, je dois dire que je ne lasse pas de l'écouter jouer du saxophone, rapper, ou de le lire sur son compte [url=@sowetokinch]@sowetokinch[/url]

il y a des artistes qu'une fois rencontrés, écrivains, musiciens, peintres, poètes, on a envie de parcourir toute leur œuvre. Je l'ai longuement fait concernant le jazz de Louis Armstrong à Miles Davis en passant par Duke Ellington, de Bessis Smith à Abbey Lincoln par Billie Holiday ou Nina Simone. Aujourd'hui c'est Soweto Kinch, qui fêtera ses 42 ans le 10 juillet  
Rencontre szenikmag avec Soweto Kinch, enregistrée à Dudelange Luxembourg), au festival Like a Jazz Machine 2019, où il ferraillait avec Theo Crocker pour un concert mémorable.


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Soweto-kinch


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Message par Invité Jeu 2 Juil - 8:42

en hommage au compositeur Johnny Mandel, qui nous a quitté




Sarah Vaughan in Sweden, 1967
Bob James, piano
Herbie Mickman, bass
Omar Clay, drums


Arranged By, Conductor – Don Sebesky
   Bass – Bob Cranshaw
   Bongos, Congas – Candido Camero*
   Cello – Charles McCracken, George Ricci
   Design [Cover] – Michael Malatak
   Drums – Grady Tate, Helcio Milito*
   Guitar – Wes Montgomery
   Harp – Margaret Ross
   Liner Notes – Chuck Taylor
   Photography By [Cover] – Charles Stewart*
   Piano – Roger Kellaway
   Producer – Creed Taylor
   Viola – David Schwartz, Harold Coletta
   Violin – Arnold Eidus, Gene Orloff, Harry Lookofsky, Jos. Malignaggi*, Julius Held, Lewis Eley, Louis Haber, Paul Gershman, Sol Shapiro

Recorded at Van Gelder Studios, Englewood Cliffs, N.J. in
March 16, 1965, May 18,19,20, 1965.
Engineer – Rudy Van Gelder


Stockholm, April 21, 1971
Tenor Saxophone – Dexter Gordon
Piano – Lars Sjøsten
Bass – Sture Nordin
Drums – Fredrik Norén



overdubbing, 1967

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS OGLtdFSorfGVYXe8AXasPK4NhtMWA-NoZt1EHxYx_-xuLtsc_aoeBfGdwXRDQ0jwD6AKkoZnxI5WdQWP2amqSrCz




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Message par Invité Mer 8 Juil - 7:29


pépites retrouvées...


UN PETIT MONDE D'AVANT

Couvrant les années 1956 à 1962, un coffret de trois CD réunit les multiples facettes du pianiste, compositeur et arrangeur qui fit ses premières armes aux côtés de Boris Vian et de Serge Gainsbourg.
Le saviez-vous ? Boris Vian, dont ont fête le centenaire en 2020, fut directeur artistique des premiers efforts discographiques d’Alain Goraguer dont voici l’anthologie "sans parole".


Goraguer ? Il fut aussi le grand arrangeur des débuts de Serge Gainsbourg, puis de Reggiani, Bobby Lapointe ou encore Jean Ferrat. Récemment en 2008, le slameur strasbourgeois Abd Al Malik faisait appel à ses talents pour son album “Dante”

Mais le coffret que le l’on découvre ici s’intéresse au Goraguer pianiste et en version instrumentale. Les trois CD restituent les enregistrements d’Alain Goraguer de 1956 à 1962 : de ses débuts en trio où l’on entend sa version des “Lavandières du Portugal”, aux disques qu’il enregistrât sous le pseudonyme improbable de Laura Fontaine & son Quartette, en passant par le “Jazz à la Une” de Gainsbourg.



L’éventail est très large. Les grands thèmes sont présentés avec une finesse remarquable. On y retrouve la fantaisie désuète du “Hou-la-la-houp” mais aussi un grand nombre de standards signés Cole Porter, Duke Ellington, etc. des musiques de films, des génériques… Cette somme est saisissante et donne l’impression de revivre l’ambiance d’un cabaret de la belle époque. Du jazz grand public comme on n’en fait plus…

Alain Goraguer sous le pseudonyme de Laura Fontaine et son Quartette.




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Message par Invité Sam 18 Juil - 15:15

suite à un échange sur POUR NE PAS FAIRE UNE PHILOSOPHIE DE LA MUSIQUE, Caroline Delume me signale via twitter une excellente interview du philosophe Jean-Luc Nancy à propos du jazz, pour la revue Epistrophy (c'est le titre d'un thème de Thelonious Monk), le 8 juin 2017

tout y est très pertinent pour quelqu'un qui n'est ni "amateur de jazz" (ils sont assez insupportables, ai-je écrit en 2002), ni "connaisseur" du jazz, ce qui est "free" dans le "free-jazz", ce qui est "politique" dans le jazz...
Joana Desplat-Roger : Sur le jazz, vous dites que vous n’avez presque rien écrit, ou alors très peu, de manière anecdotique (vous m’avez signalé une interview dans « Improjazz » publiée en 2014, dans laquelle vous avouez n’écouter que très peu de jazz, surtout depuis que vous n’habitez plus avec Philippe Lacoue-Labarthe).

Mon travail de recherche consiste à interroger cet anecdotisme, ou plutôt ce qui ressemble à de l’anecdotique — même si bien sûr ce travail repose sur l’espoir que cette quasi-absence du jazz dans la philosophie continentale du XXe siècle ne soit pas réductible à un simple renseignement biographique (celui-là n’aimait pas vraiment le jazz, celui-ci n’y connaissait pas grand-chose…)

Sans doute avez-vous eu entendu parler de la curieuse mésaventure de Derrida participant au spectacle d’Ornette Coleman à la Cité de la musique en Juillet 1997 (« Joue — le prénom [1] »), et encore davantage de l’étonnante obsession d’Adorno à vouloir à tout prix exclure le jazz de la sphère de l’esthétique, au prix d’une certaine mauvaise foi (je dois préciser ici que si les écrits adorniens sur le jazz ne sont certainement pas « anecdotiques » en terme de volumes rédigés, ils le sont évidemment par la position excentrée qu’ils occupent dans le corpus d’Adorno, et sans doute encore davantage parce qu’ils s’expliquent par des éléments biographiques et historiques [2]).


Voici donc le présupposé de ma recherche : si avec le jazz se joue quelque chose comme un « impensé », ou encore un « raté » de la philosophie qui tente de s’en emparer, alors celui-ci doit avoir un sens philosophique — tant pis si je prends le risque d’« arracher » un sens à ce qui aurait pu ne pas en avoir en dehors de considérations biographiques.[/b]

Jean-Luc Nancy : Oui, alors disons que sur l’ensemble de votre questionnement, j’ai envie de dire quelque chose de préalable. C’est un préalable à plusieurs étages, et l’étage le plus large serait de savoir pourquoi se demander pourquoi la philosophie ne parle pas du jazz, ou a peu parlé du jazz, plutôt que de la cuisine par exemple. Parce que les philosophes ne parlent pas de la cuisine non plus ! À part ce que Nietzsche a dit sur l’alimentation des philosophes ; à part Onfray, qui, du temps où il faisait encore des trucs pas mal, avait écrit quelque chose sur la nourriture… Ou mille autres sujets d’ailleurs. Parce qu’en droit, il n’y a pas d’objet de la philosophie, elle peut parler de tout — même s’il est vrai qu’elle ne parle pas de tout expressément. Par exemple, moi j’avais fait un dossier conséquent sur le « nez », et je voulais en faire un livre. Alors je dis le « nez », mais on pourrait prendre n’importe quelle partie du corps, en fait je lance juste cette remarque comme horizon plus lointain.

À un deuxième étage, plus restreint cette fois, on peut dire la philosophie ne parle pas beaucoup de la musique en général. Alors maintenant, elle le fait un peu plus évidemment, surtout ces dernières années (je pense par exemple aux livres de Bernard Sève [3], ou plus récemment de Francis Wolff [4]). Et peut-être même, à côté de la musique, on pourrait dire ça de l’art en général, même si bien sûr, on peut avoir l’impression que la philosophie parle de l’art, car on trouve une quantité de choses depuis que l’art est entré, en quelques sortes, dans la philosophie — ce qui déjà en soi est une question importante. Mais est-ce que la philosophie ne revient pas toujours aussi à un moment donné à se taire devant l’art, que ce soit la peinture ou la poésie ? Qu’est-ce que la philosophie a jamais vraiment dit du roman ? On peut penser à Lukács, mais pour lui le roman est plutôt une forme d’expression sociale, c’est différent.

Alors moi, je mettrais toutes ces choses-là, derrière, à l’horizon. Cela dit, c’est vrai qu’avec le jazz, il y a une sorte de descente de marches particulière, qui tient certainement au fait que le jazz a apporté une rupture, un décalage tant dans la musique que dans les conditions esthétiques et sociales de notre rapport à la musique. Cependant, des ruptures tout à fait analogues ont eu lieu dans la peinture, et elles n’ont pas empêché les philosophes de parler de l’art abstrait, de l’art non-figuratif, etc. : il y a donc là quelque chose qui tient vraiment à la musique. Pour ce qui est de la musique, je dirais vraiment qu’on est encore en attente de quelque chose, ça j’en suis sûr. C’est-à-dire que l’irruption de la musique dans la philosophie, on voit très bien quand elle a eu lieu : elle arrive avec Schopenhauer, quand la musique devient un lieu métaphysique propre. Avant, elle ne l’est pas, ou alors elle l’est à son insu, elle a toujours été considérée dans ses qualités dynamiques et affectives. Platon par exemple ne se prive pas de parler de la musique et des modes musicaux, mais avec des intentions bien précises ! Pourtant à un moment donné, il n’est plus question des « effets » de la musique, et ce moment arrive avec Schopenhauer. Ce que fait Schopenhauer, c’est un renversement complet : la musique devient la forme fondamentale de la manifestation, de l’expression de l’être, du réel, du monde. Et il faudra, je pense — car j’ai l’impression que personne ne l’a jamais fait — se demander à quoi tient ce moment schopenhauerien, qui a lieu dans l’après-Kant (et l’après Kant c’est toujours très important à tous égards, alors même que ce que Kant dit de la musique n’a rien de très particulier…) Mais on peut dire au moins ça : avec la musique, le moment schopenhauerien est sans précédent. Enfin si, il a sans doute un précédent avec Rousseau, que je connais beaucoup trop peu pour bien en parler… Je pense qu’on peut dire que pour Rousseau, il y a dans la musique une puissance métaphysique, et là je ne crois pas que Rousseau ait de prédécesseurs. Il y a donc un virage qu’il y aurait à faire avec tout le grand tournant correspondant en partie au Romantisme — le Romantisme lui-même du point de vue musical c’est déjà un grand renversement — dans lequel la philosophie se met à affleurer quelque chose qui se manifeste aussi dans la musique, et qui a le motif d’une expressivité affective. Jusque-là l’expressivité affective dans la musique bien sûr qu’elle existe, mais elle est très incluse dans des formes, dans tout un travail musical sur les formes, un travail énorme et extrêmement complexe qui est allé depuis le grégorien jusqu’à la grande polyphonie, et encore après… Mais ensuite, il y a autre chose : tout à coup, dans la musique elle-même, ainsi que dans le climat général esthétique, social, etc., il se met à y avoir une demande, une attente d’affect pour laquelle la musique apparaît bien avoir une sorte de propriété, de qualité, qui est évidemment au moins très différente et au-deçà de celle de la peinture et de la poésie. Or je crois que tout ça globalement, philosophiquement, on devrait sans doute pouvoir, non pas le ramener, ni le réduire, mais le faire tourner autour d’une question de la signification. C’est un moment où il se met à y avoir du trouble dans la signification. À partir de Schopenhauer, puis avec Nietzsche… Mais c’est vrai qu’ils n’ont pas beaucoup de successeurs mis à part Adorno, en tous cas je ne crois pas… Et Bergson, il ne parle pas de musique ?

JDR : Non, très peu. Il me semble qu’il la convoque rapidement comme un exemple pour parler de la durée, mais justement elle n’est qu’un exemple, elle n’est pas traitée en tant que telle.

JLN : Bon, mais un peu, c’est un peu quelque chose quand même. Et Husserl aussi, mais la protention et la rétention, je dirais que ce n’est pas encore la sensibilité. Bon, mais j’arrête avec ça, on peut peut-être reprendre le fil de vos questions ?

JDR : D’accord. Alors vous, Jean-Luc Nancy, qui n’avez rien — ou presque — écrit sur le jazz, vous acceptez quand même de me recevoir pour parler de cette absence. Est-ce le signe que cette absence vous donne quelque chose à entendre ? Et, si c’est le cas, est-ce le jazz, ou bien plutôt son absence, qui vous a convaincu de me laisser vous questionner ?


JLN : En fait, je dirais : ni l’un ni l’autre ! Moi je suis toujours assez prêt à parler de rien et de tout, un peu par principe. C’est vrai qu’on était déjà en contact concernant un autre travail, mais vous auriez pu aussi bien être sortie de nulle part que ça aurait été sans doute à peu près la même chose. Et je ne peux même pas dire si c’est le jazz ou bien son absence... Comme vous le savez, j’ai déjà été interpellé là-dessus dans un entretien pour la revue Improjazz [5], et puis j’ai été dans une grande proximité avec Philippe Lacoue-Labarthe, qui lui avait une dévotion pour le jazz. À vrai dire je ne sais même pas ce qu’il a écrit sur le jazz, à mon avis il a peu écrit lui aussi. Mais ce que je peux vous dire, c’est que quand on était en vacances dans une maison dans l’Isère (celle de ma première femme qui est ensuite devenue celle de Philippe), on avait une pièce un peu à part de la maison dans laquelle on avait notre machine à musique, et Philippe il allait là, il fermait la porte, et il écoutait du jazz. D’autres musiques, on les écoutait souvent ensemble : ici à Strasbourg on écoutait énormément d’opéras ensemble, et je ne dis pas qu’il n’écoutait pas aussi de temps en temps d’autres choses tout seul, mais c’est vrai qu’il écoutait beaucoup de jazz. Pourquoi ? Parce que ça renvoie à beaucoup de choses, ça renvoie notamment au fait que dans le petit groupe qu’on était, il était le seul à avoir cette sensibilité particulière au jazz. Moi je ne l’avais pas, nos deux femmes non plus. Après il y avait des amis bien sûr. Par exemple il partageait cette passion pour le jazz avec Moussaron. Moussaron n’était pas philosophe, et d’ailleurs je n’ai pas un souvenir bien précis de ce qu’il a écrit, mais je sais qu’il était extrêmement savant en jazz, même si je ne suis pas sûr qu’il ait produit beaucoup de développements de pensée sur le jazz. Alors, qu’est-ce qui se passait avec le jazz pour Philippe ? On pourrait presque dire : l’envers d’Adorno, parce que par ailleurs Philippe aimait Wagner mais dans un rapport extrêmement contrasté de rejet (un peu comme avec sa lecture d’Heidegger, ou comme Nietzsche faisait avec Wagner). Concernant l’opéra, il y avait un grand clivage entre nous : moi j’aimais beaucoup Verdi, et lui il supportait assez mal Verdi. Mais avec le jazz, je pense que pour Philippe il y avait une composante politico-affective, ou plutôt un affect fondamental avec une forte expression politique. D’ailleurs on s’engueulait aussi sur la politique, dans la mesure où moi je trouvais qu’il était « naïvement » révolutionnaire alors même qu’on ne cessait de voir la révolution foutre le camp. Donc ça, ça peut expliquer quelque chose, et peut-être qu’on là touche à quelque chose qui peut avoir de l’intérêt. C’est-à-dire que pour Adorno, la révolution vient d’un tout autre horizon (un horizon plutôt marxiste), tandis que pour Philippe, la révolution était plutôt de l’ordre de la révolte, de l’insurrection romantique. Et je pense qu’Adorno se défendait contre ça, il ne voulait pas avoir grand-chose à faire avec ce truc-là, avec cette révolte noire. Il faudrait peut-être compter avec ça aussi : l’affrontement direct d’Adorno avec les flammes du fascisme. Ça donne un certain recul je crois sur les textes d’Adorno.

JDR : Oui c’est très juste, d’ailleurs il y a des textes très étonnants dans lesquels Adorno décrit le jazz comme une musique se prêtant bien au fascisme, ou encore comme un « pogrom inversé », une mauvaise blague dégénérant en cruauté [6].

JLN : Ah oui ? C’est drôle parce que justement j’allais dire que pour Philippe tout cela se liait aussi à la question de l’antisémitisme, qui était une question très importante pour lui, et je dirais même qu’elle compliquait grandement les choses. Il avait épousé une femme juive, et ce n’était pas un mariage réussi, parce que c’était un mariage qui au fond pour lui correspondait à une sorte de devoir, de dette. Je parle de ça parce que je voudrais travailler maintenant sur l’antisémitisme, entre autres choses à cause de la publication des Cahiers Noirs d’Heidegger. Or Philippe a été le premier à dire que « l’antisémitisme est historial » : il a écrit ça dans sa thèse dans les années 1980, et quand Peter Trawny, il y a deux ans, a employé le même terme pour décrire l’antisémitisme d’Heidegger, alors il s’est fait tombé dessus à bras raccourcis par tout le monde, comme si ça voulait dire que c’était une sorte d’excuse ou une manière de laver Heidegger. Il faut dire que Trawny n’est pas toujours tout à fait net, mais pour Philippe c’était net, et je sais bien où est cette phrase chez lui, il parle d’un « antisémitisme historial et spirituel ». Je ne sais pas pourquoi il n’est pas allé plus loin dans cette direction. Si, en fait je le sais un peu : c’est qu’il ne voulait pas aller examiner d’un peu plus près le christianisme parce qu’il le détestait trop, or il faut aller dedans pour toucher à l’antisémitisme. Bon, mais ça c’est une autre composante, mais je dirais que dans cette chose affectivo-politique, juifs et noirs c’était un peu le même combat — bien sûr avec toutes les différences que vous voyez, ce n’est même pas la peine de préciser ! Bon, mais il faut que vous m’arrêtiez car moi quand je pars, et je ne sais plus où je m’arrête…

JDR : Bien, alors juste une parenthèse : en préparant cet entretien, je suis tombée sur le texte de Danièle Cohen-Levinas publié dans Figures du dehors, Autour de Jean-Luc Nancy, dans lequel elle imagine un entretien fictif avec vous sur la question de la musique (à partir de vos écrits et d’un échange avec vous qui n’a pas été publié), qui commence de la manière suivante : « J’entends tout d’abord une voix, la tienne, comme une exclamation au milieu de ce qui n’a pas été encore prononcé, une sorte de précaution ou de mise en garde dirons-nous, un envoi qui précède la question elle-même, quelque chose comme : “Mais la musique, c’est l’affaire de Philippe !” [7] »


JLN : Oui c’est vrai, c’est évidemment une manière pour moi de me défiler… ! [Rires] On pourrait déplier cette remarque dans deux directions : d’abord dans mon rapport à Philippe, il y avait beaucoup de choses comme ça entre nous qui donnait lieu à « c’est son affaire ». Comme par exemple Philippe lui pouvait répondre « Non Kant, c’est l’affaire de Jean-Luc, Hegel, c’est l’affaire de Jean-Luc… », tandis que lui c’était plutôt Rousseau, Schelling… Mais il y a autre chose là-dedans. C’est que pour des raisons à lui, Philippe avait un pied, ou même plus qu’un pied, dans ce monde réservé du jazz. Et le jazz a aussi cette propriété : il a constitué un monde du jazz, un monde des amateurs du jazz, des connaisseurs en jazz, il y a une sphère du jazz qui est une sphère à l’intérieur de la sphère musicale en général qui est quand même très particulière. D’une certaine façon, je crois qu’il n’y a que le jazz dans lequel il y a ou il y a eu (car je pense que c’est un peu perdu maintenant) tout une culture propre du jazz. Moussaron en est un exemple, et il y en a d’autres : Jean-Christophe Averty à la Radio par exemple… Comment faudrait-il dire ? Le jazz est un lieu de « spécialité spécialissime » ! Chez les amateurs de jazz, qu’est-ce qu’on fait ? On dit : « vous avez entendu cet enregistrement live de Duke, dans un bled perdu de l’Alabama… » Et comme on a eu les enregistrements de ça, ensuite on récite par cœur la composition de l’orchestre. Ça c’est tout à fait typique du jazz aussi ! Bien sûr c’est possible parce qu’il n’y a pas beaucoup de monde, c’est pas comme dans un grand orchestre. Mais pour les petites formations de musique classique, c’est assez rare qu’on récite les membres d’un quatuor, d’un quintet, ou d’un sextuor. Tandis que dans le jazz c’est très important de dire « ce jour-là, il y avait untel à la batterie, untel à la basse… » Et ça, j’ai entendu Philippe avec Moussaron, ou avec d’autres aussi, énoncer un défilé de noms… Même Michel Deutsch, écrivain et metteur en scène qui était un grand ami de Philippe, était lui aussi assez là-dedans. Mais moi, je n’ai jamais vraiment été amené là-dedans. Je ne sais même pas pourquoi, on pourrait bien sûr invoquer les origines familiales mais ça ne vaut pas pour Philippe, car ses parents n’écoutaient pas plus de jazz que les miens. Pour quelqu’un qui est plutôt philosophe, ça suppose une certaine sensibilité, une disposition qui se trouve à la fois du côté, comme je l’évoquais, politico-affective ; mais de l’autre côté aussi un goût pour… comment faudrait-il appeler ça ? Un caractère de chapelle, de société secrète, quelque chose d’initiatique. Et pourquoi ça, je ne peux pas en dire plus… Je sens bien qu’il y avait de ça. Et aujourd’hui, c’est sans doute quelque chose qui s’est un peu perdu. Mais il serait intéressant de savoir pourquoi le jazz a donné lieu à ce phénomène. Parce que c’est peut-être ça aussi qui fait une des raisons cachées de votre question : vous dites le jazz, mais pourquoi le jazz ? Je crois que plus loin dans vos questions vous évoquez le rock, or le rock est un terme générique pour désigner un ensemble énorme de choses, qui a à la fois suivi le jazz, mais qui a aussi commencé en même temps qu’un certain moment du jazz. Mais le rock a presque un caractère opposé au jazz. Il y a bien entendu des choses qui restent : par exemple la composition des groupes, les noms des musiciens, tel concert avec son caractère particulier, son enregistrement, etc. Mais en même temps le rock a été presque d’emblée dans la veine de la mondialisation. Moi j’ai souvent dit, une fois j’ai même fait une conférence à la Cité de la musique à Paris sur cette question, que le rock était le premier phénomène esthétique mondial, qui d’un coup — parce que ça va quand même très vite — a traversé le monde entier. Bien sûr on pourrait dire par exemple que tout ce qui a été autour du surréalisme a aussi été diffusé très vite à travers le monde, mais quand même… On voit bien que le surréalisme était d’emblée plutôt le fait d’une élite. Donc avec le rock il y a autre chose, c’est populaire, même si cela ne concerne pas toutes les couches sociales. Tandis que le jazz a eu plusieurs aspects : il a eu des aspects assez populaires ; des gens qui jouaient des trucs de jazz dans les années 1930, et qui étaient assez loin des cercles raffinés jazzophiles. Par exemple, moi j’ai connu Sydney Bechet lorsque j’étais petit, je l’ai entendu alors que mes parents n’écoutaient rien de tout ça… C’est le seul nom que j’ai entendu à l’époque, et je ne sais pas pourquoi lui en particulier.

JDR : On retrouve dans ce que vous dites la division interne au jazz entre un jazz considéré comme populaire, et un jazz appartenant à la musique savante. Or aujourd’hui encore les études sur le jazz (musicologiques, anthropologiques, sociologiques) se livrent à ce que j’appellerais moi une « guerre de récupération » du jazz comme authentiquement populaire d’un côté, et du jazz comme répondant à des canons spécifiques qui sont ceux de la musique savante.

JLN : Oui, moi je pense qu’on touche peut-être là à quelque chose de très important. Moi j’ai envie de répondre d’abord par le nom du saxophone. Je veux dire que le saxophone n’a pas été inventé dans le jazz, pourtant c’est un instrument majeur du jazz — tout comme la clarinette d’ailleurs. Mais le saxophone a la particularité d’être un instrument très tardif, inventé par M. Sax, et ce que le saxophone veut dire, ça appartient bien sûr à la longue histoire des inventions d’instrument. Et qu’est-ce qui se passe avec les inventions d’instruments ? Il se passe des choses d’une ampleur considérable : ce sont des transformations de sensibilités. Quand on est passés au piano, la sonorité du piano était complètement absente de toute la musique jusqu’à Bach : écoutez Monteverdi vous n’entendez aucun piano ! Et qu’est-ce qu’il y a dans le piano ? Et bien il y a toute cette résonnance rendue possible par le système de la frappe des cordes, à la différence du pincement, puis tout ce qui a été développé dans le piano romantique… C’est un exemple, mais il y en a 36000 exemples dans toute l’organologie, qui est à mon sens toujours une part absolument considérable de la musique. Donc, le saxophone, je le prendrais comme symptôme, comme symbole mais aussi comme une chose réelle qui est apparue dans la musique la plus classique, la plus savante ; comme un signe d’une transformation de sensibilité dont il faut rendre compte à l’intérieur de la musique classique — qui est ensuite employé par Wagner, par Mahler, par Schonberg… Et d’autre part qui devient un instrument majeur du jazz. Après, il y aussi le piano bien entendu, et puis le violon… Donc, je dirais que ce qui est très important dans le jazz, c’est qu’il procède de tout ce qu’il est juste de dire (les Noirs, les esclaves, etc.), mais aussi d’une transformation interne à la musique classique, que la musique classique ou savante, d’une certaine façon, n’était pas capable de reconnaître vraiment elle-même. Ou alors elle l’a reconnu, mais en l’intégrant immédiatement à ses modes, etc. Je crois donc que l’affaire du savant/non-savant est extrêmement compliquée. Évidemment qu’il reste un partage, qui fait aussi que la musique dite savante a bien pris ses chemins à elle. Après bien sûr, il y a eu des rencontres, notamment dans ce qu’on appelle aujourd’hui encore la musique contemporaine, et dans laquelle on retrouve régulièrement des traces de jazz… Et ça marche aussi dans l’autre sens, car il me semble qu’il y a aussi des musiciens de jazz qui sont devenus curieux de choses de la musique contemporaine. Enfin, il y a aussi la musique électronique qui s’est fourrée là-dedans…

JDR : Oui, ça c’est très clair. Mais c’est pour ça que, comme je vous le disais, il me semble que cette question est moins un problème pour le jazz et les musiciens de jazz eux-mêmes, que pour ceux qui cherchent à l’étudier ! Il me semble que les musiciens assument complètement de jouer avec des influences mélangées (musique contemporaine, rock, etc.), mais c’est plutôt dans l’approche réflexive sur le jazz que ces questions deviennent conflictuelles. Ma question plus précise serait au fond de savoir si en tant que philosophe on a un rôle à jouer dans tout ça, si on doit interroger, critiquer les appellations de « vrai » jazz, de jazz « authentique », etc. Même cette distinction musique populaire/musique savante, je dois dire que je ne la trouve pas satisfaisante, mais en même temps je n’ai pas trouvé par quoi la remplacer…

JLN : Évidemment que là vous avez votre rôle à jouer ! De toute façon, nous on a notre rôle à jouer partout… et nulle part. Si c’est bien un « rôle » d’ailleurs, en réalité on ne sait même pas ! Mais là, il y a vraiment quelque chose en effet. Cette distinction musique savante/musique populaire, il faudrait d’abord bien la préciser — si c’est possible ! Parce qu’il n’y a pas de musique populaire qui ne soit plus ou moins savante. Même « Au clair de la lune », ça se chante avec certaines notes, ça suppose une certaine gamme… D’autre part, il faudrait savoir pourquoi et comment il y a cette distinction entre musique savante et populaire. J’ai un peu de mal à le dire, mais à la Renaissance j’ai l’impression qu’il y avait déjà des musiques savantes très élaborées, mais si vous vous transportez au XIIe siècle, est-ce qu’il existait déjà un écart si grand entre les deux ?

JDR : Je n’ai pas de réponse à ça, mais ce qui est sûr c’est que cette distinction véhicule une hiérarchie entre les deux, et donc une suprématie de la musique savante.

JLN : Oui, bien sûr ! D’ailleurs on peut trouver une trace philosophique de ça chez Platon, qui faisait une distinction entre les effets de tel mode musical et les effets de tel autre : on peut se demander si ce qui peu à peu s’est distingué comme « non populaire » ne suppose pas une façon de mettre d’un côté les effets. C’est-à-dire que la musique populaire est d’abord une musique plaisante, entraînante… Attention cela ne recoupe pas forcément les séparations de Platon, car pour Platon il y a les « bons effets » (ceux qui font marcher en cadence), et de l’autre il y a les « mauvais effets » (ceux qui font larmoyer). Or justement la musique populaire fait l’un ou l’autre ! Beaucoup des danses populaires, qu’on appelle maintenant folkloriques, sont très cadencées, très rythmées (les bourrées, les sardanes…) : ce qui est impressionnant c’est que c’est quand même assez cérémoniel. Et d’un autre côté, la musique savante se définit plutôt comme ce qui semble s’écarter de la production médiate des effets, et dont le premier effet serait plutôt un calcul sur soi-même : comment je vais écrire ma mélodie, et avec quelle harmonie, etc. La polyphonie est sans doute, en tous cas dans l’histoire de notre musique, le moment où l’on voit le plus les deux musiques s’écarter l’une de l’autre, parce que quand vous avez des musiciens qui se mettent à composer des motets, certains allant je crois jusqu’à 45 voix ou quelque chose comme ça…

Alors évidemment ce n’est pas populaire du tout, ni pour le composer, ni même pour l’exécuter. Et d’ailleurs c’est un exercice tellement savant qu’il finit par s’étouffer lui-même. C’est-à-dire que ça n’a pas une grande postérité… De même que des prodiges d’organologie ont produit certains orgues qui peut-être ont atteint des limites de possibilités, d’exécution et d’intérêt : ces grands orgues sont certes magnifiques, mais ils n’auront pas été tellement joués. Alors que l’orgue est justement un instrument un peu étrange en ce qu’il se situe à la jonction des deux, du moins il est parti de petits instruments portables qui à l’origine étaient faits pour faire chanter le bon peuple chrétien ! Vous savez bien que, comme on le voit dans les Western, il y a toute une histoire de l’harmonium (l’histoire de l’harmonium dans le Western : je suis sûr qu’il y a un sujet de thèse à faire !) Or l’harmonium je ne sais même pas comment ça marche, le son est assez moche, assez pauvre, dans lequel on retrouve manifestement un héritage du choral luthérien, mais surtout on ne cherche sûrement pas l’« effet ». Voilà une musique qui ne doit pas trop emballer le bon peuple, mais qui doit le faire prier. Et pourtant c’est de la musique ! Alors avec le jazz, il est évident aussi qu’il est apparu quelque chose qui faisait rupture avec ce que j’appelais tout à l’heure « l’intérêt pour soi-même » de la musique savante. Parce que d’emblée — et c’est peut-être pour ça qu’ensuite on réinvestit sur les Noirs, les esclaves, etc. — on réinvestit quelque chose qui est une projection, non pas au sens cinématographique du terme, disons plutôt une éjection d’affects. Et ça évidemment c’est toujours présent dans la grande musique savante : dans n’importe quelle sonate de Beethoven, vous entendez bien que ce qui est en question c’est un mouvement d’affects, c’est une saisie…

Mais il s’agit de s’entendre aussi sur ce qu’on appelle « affect », car l’affect ce n’est pas seulement les larmes ou le rire ! Mais c’est sûr qu’avec le jazz on a entendu, ou plutôt on a ressenti peut-être même plus qu’entendu, on a ressenti dans l’écoute quelque chose qui se détachait comme affect. Ça ce sont aussi ses origines dans le blues et dans le spiritual, parce que ce qu’on appelait autrefois le « Negro Spiritual », est une musique qui dit quelque chose de la plainte, de la supplication, de la mélancolie, du deuil… etc. Et quelques fois aussi quelque chose de l’allégresse ! Alors, est-ce que ce n’est pas « simplement » ça (enfin, je dis « simplement » mais ce n’est pas simple), comme s’il y avait eu un détour par lequel la musique dans l’Europe classique s’était divisée par une organisation de mur entre d’un côté musique populaire, avec l’accordéon etc., et de l’autre côté grande musique. Alors qu’en réalité, dans les formes les plus savantes et les plus élaborées de la musique, parmi tous les grands musiciens du XIXe et du début du XXe, rares sont ceux qui n’ont pas eu recours à des formes populaires : Verdi, Liszt, Wagner, Mahler… Vous savez une fois en Suisse, Mahler a rencontré une forme de berger qui faisait sonner son aisselle, que Mahler a voulu enregistrer. Je ne sais plus la suite de l’histoire, mais je crois qu’il a voulu reproduire ce son qui l’avait tellement frappé, non seulement parce que c’était populaire, mais parce qu’il n’y avait pas d’instrument, et que c’était peut-être la seule fois qu’on entendait parler d’un son produit par le corps qui ne soit pas la voix. Moi je pense qu’il y a de ça qui est en jeu là-dedans, et qu’à la fois la séparation, la méfiance, et ensuite la séparation dont vous parlez à l’intérieur des études sur le jazz, cela vient toujours de là. On veut, ou on ne veut pas reconnaître que dans la musique elle-même il y a une double disposition qui est peut-être très profondément indémêlable, et qui est justement ce que Platon aimerait bien démêler. Encore faut-il ne pas comprendre la communication d’affects uniquement de manière sentimentale, car c’est aussi une communication de mouvement… Par exemple, ça c’est frappant aussi, et il faut reconnaître ça à Platon, c’est que pour lui la musique fait forcément bouger, elle est liée à un mouvement : elle danse, elle marche... Et nous, quelques fois, on oublie un peu ça, et s’il y a une musique qui fait bouger le plus visiblement, c’est le jazz. Mais moi je trouve toujours qu’on bouge en écoutant n’importe quoi — sauf quand ça devient trop métronomique je dirais, je pense à Scarlatti par exemple, ou bien Vivaldi : ça ne me fait pas beaucoup bouger. Mais Mahler, oui ! Mozart aussi — encore qu’avec lui, des fois…

Je crois que toutes ces choses sont vraiment liées au fait que la musique se passe dans l’espace, elle n’est pas orientée (comme le regard vers la peinture), et qu’elle sollicite le corps en totalité. Et du coup, avec la musique on est forcément en-deçà, au-delà de la signification, mais jamais vraiment exactement dessus — même si on la traverse… Donc, moi je dirais que les mots populaires, savants etc. vont souvent avec des significations qu’on veut plaquer sur quelque chose qui les déjouent d’avance. Parce que la musique, je pense qu’il faudrait toujours avoir en tête son commencement : la première émission de son et de cadence est forcément inséparable d’une danse. Qui sait, peut-être même que c’est d’abord une certaine cadence de piétinement qui entraîne une émission de son ! Parce que dans l’émission de son, il y a quelque chose qui est là à la naissance, avec ce fameux cri… Vous avez lu la petite conférence de Philippe sur la musique [8] ? Je me demande s’il ne parle pas de ça là-dedans… Dans la naissance, comme le dit Hegel, une respiration interrompt la lente maturation [9] : mais il se passe là la communication avec le monde, ce qui est considérable ! Peut-être qu’on ne s’est pas encore assez arrêtés là-dessus : le fait que l’air, le souffle, la respiration aérienne est ce qui fait qu’il y a de la sonorité chez tous les animaux aériens (il y en a même chez certains animaux sous-marins comme la baleine, mais justement la baleine est un mammifère…) Mais l’élément aérien : là je crois qu’il faut être complètement Naturphilosophie, comme Schelling, comme Hegel, ou comme Novalis. C’est-à-dire qu’il ne faut pas croire — comme on a l’impression maintenant quand on relit tous ces gens-là — qu’ils font symboliser la nature et d’autres choses. Non, ils ne font pas symboliser, ils entrent dans quelque chose, dans une dimension de pensée et d’expérience que nous, nous avons un peu trop perdu de vue parce que nous pensons qu’il y a des sujets et des objets — ce qui déjà d’entrée de jeu est une mauvaise chose. L’élément aérien, c’est l’élément par lequel à la fois la distance entre les choses, entre les êtres, est posée, ouverte ; et elle est traversée. Tandis que la vue traverse la distance, mais elle la maintient en même temps ; elle la pose. Donc là, il y a quelque chose qui, certainement, rend compte d’abord du fait de l’absolu, de l’universalité de la musique. Et bien sûr on peut en dire pratiquement autant des formes graphiques, mais les formes graphiques elles ont quand même toujours ceci que, justement, elles viennent devant, elles sont présentées à partir d’un geste et il faut qu’elles soient posées sur quelque chose. Dans ce cas, on est peut-être déjà plus en direction de l’objet, mais avec la musique, non. De même avec le son, avec l’émission du son.

JDR : En lisant votre livre À l’écoute, j’ai trouvé la phrase suivante : « Le sens s’ouvre dans le silence. Il s’agit bien, il doit s’agir jusqu’au bout, d’écouter ce silence du sens [10]. » N’est-ce pas là un des problèmes de la philosophie avec le jazz, en tous cas avec ce type de jazz qui s’épanouit dans le bruit et non dans l’écoute silencieuse ? (Lorsque je travaille la philosophie, j’ai besoin d’un silence complet. Mais je ne peux pas écouter un concert de jazz dans une salle silencieuse, cela me met mal à l’aise. C’est pourquoi je ne vais jamais écouter du jazz dans les salles françaises prestigieuses, d’ailleurs depuis mon retour d’un séjour à la Nouvelle-Orléans je n’écoute plus de concerts en France, à cause de ce silence que je trouve mortifère.) Le silence, qui abrite le respect d’une bonne écoute ici, « neutralise » pourtant un autre type d’écoute. N’est-ce pas ce que vous voulez dire, lorsque vous écrivez que le philosophe est celui qui « neutralise en lui l’écoute, et pour pouvoir philosopher [11] » ? Ce qui expliquerait pourquoi il a tant besoin de silence, et pourquoi il écoute si mal le jazz bruyant ?

JLN : Oui, d’accord : si le silence est le silence dans lequel du discours s’enchaîne, s’enfile. Alors d’accord, le silence serait le lieu de la signification. Mais en même temps, un philosophe ne peut pas ne pas être — on peut le montrer d’une quantité de manières — sensible au silence, c’est-à-dire aussi à la limite de la possibilité de signifier. Cette limite au fond est toujours là. Regardez ce qui se passe chez Platon, quand le philosophe sort, lorsqu’il monte : il ne dit plus rien, il est ébloui par le soleil et puis c’est fini. Là tout commence, mais tout finit aussi. Je vous fiche mon billet que vous pouvez trouver un point de silence dans toute grande philosophie. Prenez celui qui allait avec le père de l’énoncé fondateur : Descartes. Descartes dit : ego sum ego existo. Et il dit : combien de temps cela est-il vrai ? Autant de temps que je le prononce, que je le conçois dans mon esprit. Mais quand je ne le prononce pas, qu’est-ce qu’il y a ? Il n’y a rien, il y a du silence. Et qu’est-ce que c’est que ce silence ? Ce silence, Descartes le dit tout à fait ailleurs, lorsqu’il dit à la princesse Elisabeth que pour comprendre l’union de l’âme et du corps, il vaut mieux ne pas y penser, et faire ce qu’on a à faire. Donc là c’est silencieux, ou c’est silencieux mais dans le bruit du monde.

JDR : En réalité ma question précédente était intimement liée à mon expérience personnelle de la Nouvelle-Orléans… Pour vous donner un exemple très concret, il y a là-bas une rue qu’on appelle la « rue du jazz », la Frenchman Street, qui se compose de petites boites de jazz un peu comme chez nous, mais contrairement à chez nous celles-ci sont directement ouvertes sur la rue. Cela engendre bien entendu une joyeuse cacophonie, à laquelle se rajoute la musique des Brassband (les fanfares de rue), qui eux s’installent dans la rue. Cela donne lieu à une superposition, à une surenchère de sons, et c’est justement ça qui m’a plu d’emblée — même si je conçois que cela peut être vécu de manière très agressive pour certains. Le promeneur doit donc faire l’effort de bien tendre l’oreille pour choisir son concert, et dans ce cas précis il n’y a véritablement aucun silence, puisque même entre deux morceaux c’est la cacophonie de la rue qui recommence à se faire entendre. Cela me semble rendre possible une écoute particulière, qui implique une certaine frénésie, et qui s’accompagne de danse, de rires, d’exclamations, d’allers et venues (je vais vérifier que le concert d’à côté n’est pas encore meilleur, etc.) Et c’est là ma question : je me demande si ce type d’expérience n’est pas profondément dérangeante pour le philosophe, qui a besoin du silence pour écouter… Alors que cette écoute « bruyante » semble viscéralement liée au corps, et provoquant aussi une joie saisissante.

JLN : Oui, vous connaissez bien Hegel : « le vrai est le délire bachique dans lequel il n’y a aucun membre qui ne soit ivre [12] ! ». J’ai écrit un tout petit livre qui s’appelle Ivresse [13], dans lequel je cite ça. On pourrait dire que c’est un livre qui est une sorte de vacarme continuel de citations, ce n’est pas vraiment de la philosophie. Or Hegel dit ça, mais il faut être honnête : il dit immédiatement après que le vrai est le repos absolument égal à soi-même, qu’il compare avec la surface d’un lac. Quand vous racontez votre expérience de la Nouvelle-Orléans, je remarque quand même une chose, vous dites : j’écoute, je tends l’oreille. Il faut donc faire un certain choix d’écoute, et du moment que vous écoutez, vous discernez. Vous discernez que ce sont tels instruments qui jouent telle mélodie, et ça se déroule de telle ou telle manière. Si vous n’entendez plus rien de ça, si c’est trop coupé par un Brassband qui passe dans la rue, alors vous n’entendez plus rien ! Donc il faut un minimum de distinction, de même que si dans un tableau il n’y a plus de limite à aucune couleur, toutes les couleurs vont se fondre, et ce sera de la bouillasse… Là il faudrait savoir de quel silence on parle : je suis tout à fait d’accord avec ce qu’on disait avant, à savoir le silence comme lieu d’élaboration du discours, comme lieu de la parole silencieuse de l’âme avec elle-même, qui en effet de Platon jusqu’à Husserl, on pourrait dire peut-être qu’elle bouche l’horizon. Ça on peut le dire, c’est vrai. Jusqu’au point où Derrida a dit, à propos de la voix silencieuse de Husserl, puisque Husserl parle d’un instant (Augenblick), et Derrida écrit : oui, mais cet instant a une durée. Aussi brève, aussi instantanée qu’elle soit, cette durée sépare l’émission de la voix de sa réception. C’est ce que Derrida appelle la « différance » avec un a. Je dirais presque, à partir de cette ressource de Derrida, que dans la différance, il y a forcément un silence, qui est un silence non signifiant : il est ce qui sépare le différent de lui-même, ce qui fait que quoi que ce soit ne peut pas être ce qu’il est sans différer de soi. Alors si vous voulez, je suis quand même frappé car vous avez aussi parlé de la syncope dans l’une de vos questions, or dans le jazz, il y a une présence particulièrement sonore du silence. Il y a une présence presque claquante, pas seulement des syncopes, mais aussi des interruptions, des reprises, des manières dont un saxophoniste, un trompettiste, un clarinettiste peut tout à coup s’arrêter pour savoir reprendre son souffle : quelques fois c’est extrêmement impressionnant. Il y a des choses de Miles comme ça, où tout à coup le silence est complètement dans son jeu. Il est sans doute aussi très souvent dans la musique savante d’ailleurs…

JDR : En fait, je pensais plutôt au silence comme signe de respect de l’écoute : j’écoute silencieusement comme signe de respect. C’est quelque chose qui ne marche pas très bien je crois avec un certain jazz, mais c’est la même chose pour un certain nombre de musiques populaires comme le rock… etc.

JLN : D’accord. Le respect oui, mais à la limite faut-il avoir du respect pour le respect ? Je comprends bien de quel respect vous parlez, quand je vous parlais tout à l’heure de Philippe qui allait religieusement écouter du jazz tout seul, il avait plus que du respect, c’était de la dévotion. C’est vrai qu’il y a là des choses qui sont presque indémêlables. Moi je n’aime pas du tout le concert de manière générale. Ça m’énerve, c’est lent, c’est long, c’est lourd… Je dirais ça surtout du fait d’être à Strasbourg, parce que je vais surtout au concert à Strasbourg, notamment lors du festival Musica. Alors vous commencez par voir tout Strasbourg, vous passez votre temps à saluer tout le monde, toujours les mêmes : rien que ça déjà pour moi c’est mal barré. Et puis après, vous êtes dans des fauteuils, le musicien arrive, on applaudit… Évidemment ça ne va pas. Maintenant, pendant le concert, s’il y a trop de gens qui toussent, alors on commence à s’énerver. Et s’il y a quelqu’un qui est vraiment enrhumé alors on le fout à la porte. En revanche, j’aime beaucoup, et je dois dire de plus en plus, parce qu’ils le font de mieux en mieux, voir les musiciens filmés. Parce qu’on voit des choses qu’on ne voit pas bien dans des salles de concert, parce que c’est aussi quelque chose qui m’énerve dans les salles de concert : on ne voit pas bien parce que c’est loin, et alors il y a une sorte de distraction qui se produit. En fait, moi je trouve que le concert est trop distrait, parce que je regarde comment se comportent les gens, etc. Alors que curieusement, avec la télé, on montre un gros plan de violoniste, un gros plan du piston, mais ça ne me distrait pas. Or qu’est-ce qui se passe dans le jazz ? Moi il m’a toujours semblé que dans les concerts de jazz, du moins ceux dans les boites de jazz, on est plus dans cette proximité avec l’instrumentiste, ce qui fait qu’on les voit de près. Or ça, ça m’avait toujours paru faire partie du jazz — bien qu’il faut dire maintenant que la plus grande partie de ce que j’ai entendu je l’ai entendu en disque, et non en concert. Or je pense qu’il faut beaucoup accorder d’importance aux disques parce qu’une grande partie de notre culture musicale passe par le disque. Or, en disque, j’ai un souvenir de jazz particulièrement saisissant, c’est le premier disque d’Albert Ayler que j’ai entendu — mais je ne pourrais plus vous dire lequel c’était. C’était aussi la première fois que j’entendais du free jazz, et c’est une expérience où il y a beaucoup de silence dans le morceau. J’ai le souvenir d’une espèce de grande déchirure sortant complètement de la mélodie, comme dans un cri… Et tout ce qu’on entend du souffle, de la reprise du souffle, du coup sur l’instrument. C’est tout cela je pense — et je redis ici ce que j’ai déjà dit à propos du saxo mais dans un autre registre — que le jazz a fait revenir dans la musique, ouvertement, à la surface, et évidemment à distance de toutes les élaborations savantes de l’écriture musicale, de la composition, etc. Il a fait revenir tout un caractère physique et corporel de la musique, qui au fond avait toujours été là. Car je crois qu’on ne se rend même plus compte de ce que ça pouvait être qu’un concert d’une petite formation dans un salon au XVIIIe siècle : nous quand on voit ça, c’est dans des scènes de cinéma, le son y est traité — à moins justement qu’on veuille montrer quelque chose qui se passe dans l’histoire, et alors on voit que les gens font un peu de bruit, un fauteuil grince, les gens toussent... Je suis certain que dans un salon du XVIIIe siècle, c’est comme si on était ici, dans mon salon, et qu’il y avait un trio… Ce n’est pas comme dans une salle de concert : vous percevez, vous entendez, il y a du bruit de fond, et il y a aussi tout ce qui appartient aux gestes des musiciens, au frottement des archets sur les cordes, etc. Je pense que le jazz a en effet fait ressurgir quelque chose dont on nous avait fait perdre le sens, mais qui était aussi revenu de l’intérieur de la musique savante par d’autres voies : Wagner, Bruckner, Mahler…
(à suivre ci-dessous)


Dernière édition par Florage le Sam 18 Juil - 15:17, édité 1 fois

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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Invité Sam 18 Juil - 15:16

suite, notes et bibliographie
JDR : Comme vous évoquiez tout à l’heure le free jazz, et je voudrais revenir sur une dimension essentielle qu’on a peu évoquée pour l’instant, à savoir la dimension politique et contestataire qui est indéniable dans le jazz en général, et dans le free jazz en particulier. Cette dimension politique semble trouver une réalité esthétique notamment dans le fait qu’il s’agisse d’une musique qui « dérange » l’oreille (usage des dissonances, etc.). Vous-même vous racontiez avoir été saisi par un « cri », une « déchirure » provenant du saxophone d’Albert Ayler : cette dimension politique du free jazz et du jazz en général vous a-t-elle interpelé, vous interpelle-t-elle encore aujourd’hui ?

JLN : Je dois vous dire d’abord que je suis d’une méfiance extrême envers le mot « politique ». Je comprends qu’on l’emploie, mais je trouve qu’on lui fait dire tout et rien à la fois. On est dans un moment où en fait il n’y a pas de politique. Il se passe des effervescences, que ce soit avec Trump, avec Macron, mais on sait bien que la réalité profonde de ces choses elle n’est pas… Bon, bien sûr qu’elle est politique, parce que les peuples réagissent, les peuples vont mal, mais nous savons aussi que nous sommes dans une énorme machine où la politique elle est d’abord toute entière technique et économique. Alors le free jazz, moi je dirais que bien sûr c’était politique, mais comme tout le rock a été politique, et la pop l’a été… Enfin tout ça a eu des aspects politiques, mais je dirais en même temps que tout ça était aussi — je ne sais pas comment il faudrait dire — « métapolitique » ou « ultra-politique ». Ou alors il faut s’entendre, et il faut dire qu’on appelle politique tout ce qui concerne la totalité de l’existence des gens, surtout en tant qu’ils sont des peuples, des communautés, des groupes, c’est-à-dire en tant qu’ils ne sont pas des individus — et encore que ! Mais alors on ne sait plus ce qu’on dit avec politique. La grande affaire avec la politique — mais ça remonte au jeune Marx — c’est qu’à un moment on a dit : il ne faut plus que la politique soit séparée.

Mais quand la politique est séparée, elle n’est plus politique ! Si on se représente les tribus amazoniennes à la manière de Pierre Clastres, alors là on peut dire il n’y a pas de politique, il n’y a pas d’Etat, il n’y a pas de séparation. Moi je dirais plutôt que concernant le free jazz, si on veut dire « politique », alors je dirais déjà qu’il représente quelque chose de politique à l’intérieur du jazz. C’est évidemment marqué par le mot « free », car c’est quand même tout à fait stupéfiant qu’on dise « free-jazz » ! Le jazz était lui-même une sorte de symbole — plus qu’un symbole, une réalité ! — de liberté, de libération, et puis il faut encore se libérer. Il faut se libérer de quoi ? Oui, il faut se libérer de quelque chose : on sait bien ce que c’était que le jazz symphonique, les orchestres de jazz, et bien d’autres choses encore. Le free jazz a donc correspondu à une libération à l’intérieur du jazz. De même, je pense que dans le rock il y a eu aussi une libération de ce qui était ressenti comme pouvant tourner en rond, dans la pop et dans la country… En laissant de côté la question de l’électrification qui est extrêmement importante mais qui participe aussi sans doute de ça. Et donc, moi je crois que ce qu’il y a eu là-dedans, ce sont plutôt des signes d’une rupture très profonde dans les grands protocoles de sensibilité qui était reçus à ce moment-là. C’est d’autant plus vrai dans le cas du jazz, puisque les grands orchestres de jazz faisaient danser tout le monde, toute la bonne bourgeoisie dansait, sans plus aucun rapport avec la libération des esclaves. Mais le jazz appartient sans doute intégralement à un moment de l’histoire dans lequel on peut suivre ça à tous les égards : révolution politique, technologique, esthétique…

Par exemple le jazz est contemporain de Dada, et alors ? Quel rapport ? Tzara n’est pas un fils d’esclave… De même, le jazz est contemporain de Joyce, qui lui-même est contemporain de Proust… Ce sont des contemporanéités qui sont compliquées et difficiles à apprécier, mais en même temps je crois qu’on ne se rend déjà plus compte de la rupture qu’était Proust. Pourtant c’était une telle rupture, d’ailleurs au début ça ne s’est pas vendu du tout ! C’est donc de tout ça que le jazz participe. Et c’est peut-être ça qui fait que sur un Adorno ça a des effets extrêmement violents, contrastés : moi je me demande si ce n’est pas parce qu’Adorno sent qu’il y a là quelque chose qui fait bouger vraiment profondément, tellement profondément que c’est trop pour lui. Et je le comprends parce que — là je parle pour ce que je ressens moi-même aujourd’hui de plus en plus — j’ai l’impression que je sens à quel point ça craque, ça bouge, ça se déplace, et qu’évidemment c’est déjà forcément trop tard ou trop tôt pour moi. Et c’est toujours trop tard ou trop tôt pour tous les gens qui sont là au présent, car au présent on ne sait pas, on ne sait jamais ce qui est en train de se passer. En revanche, il y a par moments des sensibilités qui s’emparent de quelque chose, et ça je trouve ça absolument sidérant…

Parce qu’on ne peut pas expliquer Proust : à un moment donné dans la société, qu’est-ce qu’il se met à faire, qu’est-ce qu’il se met à écrire comme phrases impossibles ? Et pas loin vous avez Joyce qui finit par écrire Finnegans Wake, et même Ulysse : mais qu’est-ce qui se passe là ? De même dans le free jazz, je ne connais pas bien son histoire mais le free jazz est apparu dans les années 1960, c’est ça ? Je suis incapable de vous dire moi, car je ne l’ai pas vu arriver ! Je vous parlais de ce disque de Ayler… Ah oui, et il y avait aussi Pharoah Sanders… J’en ai un très grand souvenir. Mais d’où c’est venu ? Je ne sais pas du tout. Je dirais que ça m’est tombé dessus. C’est comme 1968 : 1968 c’est extrêmement difficile de dire d’où c’est venu. Bien sûr vous pouvez dire des quantités de choses : des choses sociales, des choses politiques, vous pouvez dire la guerre du Viêt Nam, le fait que la guerre d’Algérie soit terminée, dans toutes les histoires des libérations coloniales il y a un mouvement comme ça où vraiment ça pivote, et d’une certaine façon on peut dire ça y est c’est fini, c’est complètement admis la décolonisation. Mais en même temps, il y a plein d’autres choses : c’est le début du commencement d’une fin de contentement de soi-même de l’ensemble de la société occidentale. C’est ça qui se passe, et ça craque, ça craque complètement, et ça craque de beaucoup de manières différentes. Alors pourquoi d’un côté il y a le free jazz, et de l’autre côté il y a les diverses formes de mai 68 ? Pourquoi il y a les situationnistes ? Mais, en tous cas, il est certain qu’à l’intérieur du jazz ça représente quelque chose d’extrêmement remarquable, d’abord parce que la même chose sera ensuite répétée dans la descendance du rock, c’est-à-dire que ça n’arrête pas de se casser en punk, en métal, en Heavy métal…

Maintenant je ne sais plus où on en est ! Ce que je veux dire, c’est que tout ça appartient à une sorte de torsion générale des modes de sensibilité. A quoi il ne faut pas oublier qu’en même temps, il y a l’importance de l’informatique et de la musique électronique. C’étaient des choses peu audibles durant les périodes dont on parle, mais il ne faut pas oublier qu’il y a des gens qui travaillent avec leurs ordinateurs, et c’est aussi dans ce temps-là qu’arrivent les idées de musique concrète. Par exemple Pierre Schaeffer, qui a écrit le Traité des objets musicaux  : pour moi c’est absolument contemporain du free jazz, et de 1968… Or évidemment ça ne fait pas beaucoup de bruit, ce sont des choses qui ont l’air parfois aussi un peu ridicules : Variations pour une porte et un soupir de Pierre Henry, maintenant ce sont des vieilleries ! Il n’y a pas longtemps j’ai vu un festival « Mémoire de Pierre Schaeffer », et bon ça a vraiment l’air d’être des vieilles lunes. Certes, mais ça a représenté quelque chose…

JDR : Si vous en êtes d’accord, j’aimerais maintenant qu’on en vienne à la question de la syncope. Je suis tombée sur cette question en lisant votre interview que vous avez accordé au magazine « Improjazz » en 2014.

JLN : Pourquoi, parce que j’y parle de la syncope ?

JDR : Non pas vraiment, mais c’est justement ce que je trouve très amusant : à trois reprises on vous pose la question de savoir si le jazz a eu une influence sur votre écriture, et par deux fois vous refusez d’y répondre. Et enfin, la troisième fois, vous finissez par dire : « Sans doute du côté, toujours, de la naissance, du son/de la phrase qui vient, et de la pulsation. Dans le surgissement et le passage, la syncope… [14] » Alors je suis partie de là, et j’ai cherché des traces de la syncope dans votre œuvre… Et je dois dire que j’en ai trouvé beaucoup ! D’ailleurs je n’ai pas eu besoin de chercher bien loin puisque vous avez écrit un livre intitulé Le discours de la syncope [15].

JLN : Ah oui évidemment, vous vous êtes dit « il est gonflé le mec ! », il dit ça alors qu’il a écrit Le discours de la syncope… [Rires] Oui, c’est ce que vous avez décrit là qui me permet de bien voir : je comprends très bien pourquoi d’abord j’ai dit que non, le jazz n’avait pas d’influence sur mon écriture. Parce que la syncope, je dirais qu’elle ne m’est pas venue du jazz comme tel, même si évidemment que le jazz n’était pas non plus complètement absent… D’autant que Le discours de la syncope est un livre en deux volumes dont il n’est jamais paru que le premier volume dans le début des années 1970. Je dirais que la syncope, elle m’est venue de tout ce climat de sensibilité, de pensée dont je vous parlais tout à l’heure. Si c’était possible, si on cherchait, peut-être qu’on trouverait dans des textes — philosophiques ? je ne sais pas — de l’époque des endroits où le mot syncope a pu me parler… Mais il pouvait aussi bien me venir de la musique, pas forcément du jazz d’ailleurs parce qu’il y a de la syncope dans d’autres musiques… Moi-même je serais curieux de savoir d’où ça m’est venu. Mais je sais en tous cas que si j’avais pris ce titre Le discours de la syncope, c’était dans une intention très marquée, qui est encore bien présente dans mon esprit, qui était : à partir de Kant — mais « à partir » ne veut pas dire « d’après Kant » — Kant représentant le moment des grandes séparations, et de la séparation à quelques égards de la philosophie d’avec elle-même, enfin l’ouverture de quelque chose qui prend la forme qui chez Kant n’est jamais résolue — ce que Hegel lui reproche ensuite en disant il a fait une statue admirable mais elle n’a pas de vie, il faut lui mettre du sang à cette pauvre statue. Donc l’idée — et ça je sais que c’est quelque chose qu’on partageait aussi beaucoup avec Philippe — toute proche de la syncope, c’est l’idée du suspens. Et le suspens lui-même, sous les espèces de l’allemand schweben, qui signifie « être en suspens », « être suspendu » — et qui a donné le fameux alles schwebt (tout est suspendu) que Philippe adorait et qui je crois vient du musicien Webern. Et la syncope pour moi ça s’inscrivait là-dedans, c’était en fait le projet ultra ambitieux de faire toute une philosophie qui serait sans résolution. Cette idée de la syncope, moi je dirais que certainement elle m’est venue par des chemins totalement étrangers au jazz (non, je ne peux pas dire totalement « étrangers » bien sûr, mais je pense pas du tout que j’ai eu le jazz comme première référence). Mais d’abord « syncope » était un mot qui me plaisait bien, peut-être plus par l’allusion à l’évanouissement. Il y avait sans doute une attirance un peu pour ça : dans l’évanouissement, il y a aussi un certain silence, une perte de parole. Mais ça appartenait à un ensemble dans lequel il y avait le suspens, le schweben, et puis en général la discontinuité, la différence, etc.

JDR : C’est intéressant parce que j’entends bien que cela ne vous vient pas forcément du jazz, mais malgré tout il y a quand même quelque chose du jazz dedans.

JLN : Ah oui, mais ça bien sûr ! Moi ça me venait de tout un climat, dont je donne ici des caractéristiques philosophiques, mais qui a toutes sortes de caractéristiques, dont le jazz, ça c’est certain.

JDR : Et donc si je comprends bien, quand vous dites que la syncope constitue ce moment de décalage nécessaire, vous la pensez un peu comme une respiration, non ? En tous cas c’est comme ça que je le comprends.

JLN : Oui, comme une respiration, mais il y a la respiration comme reprise simplement du souffle, mais il y a aussi la respiration comme incertitude, comme inquiétude… D’ailleurs c’est peut-être ça chaque fois que l’instrumentiste ou le chanteur reprend son souffle : peut être qu’on n’est pas sûr de pouvoir arriver à le reprendre, ou alors on n’est pas sûr qu’on n’est pas déjà allé trop loin, que c’est trop tard et qu’on va rater la reprise… C’est ce qui arrive quelques fois quand on entend certaines notes tenues extrêmement longtemps. Et en même temps, ça a affaire avec le caractère physique, organique. C’est-à-dire que quand le corps est mis en mouvement, ce n’est pas une simple mécanique, ce n’est pas le mouvement perpétuel, ça se met pas à tourner comme ça et puis ça tourne sans arrêt, pas du tout ! Au contraire, la vie organique d’un corps vivant quel qu’il soit, même végétal, c’est une vie qui suppose des suspens, des reprises, la nuit, le jour, manger, digérer, excréter, etc. Le sommeil est une grande syncope ! J’ai écrit un petit livre là-dessus [16], car le sommeil c’est quand même quelque chose d’extrêmement fascinant. On pense que c’est tellement nul, qu’il ne se passe rien : on n’est pas là alors… Or, même si on laisse les rêves de côté — parce que moi j’ai une méfiance du sommeil avec rêves, parce que c’est comme de la veille — dès qu’on a dormi, on n’est pas le même ! À chaque fois qu’on se réveille, le fait que ce soit un autre jour, c’est quelque chose de très fort. Enfin, en même temps, c’est tous les jours : oui, d’accord ! Mais c’est tous les jours un autre jour complètement autre. Bon, alors avec la syncope je trouve qu’il y a quelque chose de ça. Et tout ça, je dirais encore une fois c’est quand même quelque chose que la musique savante, classique, d’une certaine façon a toujours connu ! Et bien sûr vous pouvez trouver des syncopes dans la musique savante. Et puis si ce n’est pas exactement des syncopes, ce sont des arrêts, des reprises… Si vous écoutez certains chants grégoriens, c’est incroyable comme par moments il y a des silences, la voix s’arrête, il y a un blanc dans la partition. Et puis il ne faut pas oublier que le mot « syncope » veut dire attacher et séparer en même temps. C’est un mot formidable, maintenant comment il a été fabriqué, quelle son histoire musicale, comment est-ce qu’il arrive dans le jazz… ? Ça, je n’en sais rien…

JDR : Pour finir, ce n’est pas vraiment une question mais j’avais relevé dans votre livre À l’écoute cette phrase : « Si “entendre”, c’est comprendre le sens […], écouter, c’est être tendu vers un sens possible, et par conséquent non immédiatement accessible [17]. » Je trouve qu’elle va bien à la question du jazz, vous ne trouvez pas ?

JLN : Ah, oui… Et même, je dirais que cette phrase est insuffisante car « non immédiatement accessible », c’est comme si ça disait qu’on pourrait peut-être y accéder, alors qu’on ne peut pas. Ou plutôt, il ne s’agit pas d’accéder : là je discuterais ma propre phrase. Il y a un passage de Bataille que j’ai toujours en tête, dans L’impossible [18] il dit, en jouant sur les mots : « à la vérité nous accédons ». Dès que nous accédons, immédiatement ça nous échappe. Et comme il l’écrit sous cette forme : « à la vérité » (il faut dire le vrai) nous accédons, il ne dit pas à quoi nous accédons. Donc « nous accédons », c’est comme avoir un accès, tel un accès de fièvre. Comme si on faisait dire au verbe accéder le fait d’avoir un accès. Et peut-être que ça c’est quelque chose qui est particulièrement présent dans la musique, que dans la musique c’est une toujours une affaire d’accès. À la fois, on accède à une dimension qui est étrangère justement à la dimension de l’objet, de la signification, etc. Et en même temps, c’est toujours aussi comme un accès, comme accès de fièvre, comme accès de rire, ça fait bouger. Et ce qui est intéressant justement, c’est que dans la musique, ça peut se suivre dans le détail des instruments. Là on revient à la question du saxo mais chaque instrument de musique est une manière d’accéder justement à une dimension de sensibilité qui n’était pas donnée. Vous connaissez le livre de Schaeffner, Origine des instruments de musique [19] ?

Et bien ça j’aime beaucoup parce qu’il montre que chaque instrument est issu d’une intensification de quelque chose, comme souffler dans un tuyau, pincer quelque chose, taper sur quelque chose… Je retrouve vraiment ce double caractère de l’accès : frottez une corde tendue, à un certain degré de tension, avec un certain mode de frottement etc., et il se produit quelque chose qui est complètement étranger à la corde et à ce qui la frotte, et qui fait entrer dans une autre dimension. Et cette dimension a toujours comme caractéristique d’une certaine façon d’être virtuellement infinie, parce que ça commence, mais on sent que ça peut aller jusqu’à une certaine limite physique, qui peut-être aussi seulement parce qu’on n’entend plus, nous, avec notre système. Et c’est ça qui est remarquable, c’est que chaque instrument permet comme une certaine intensification qu’elle-même on peut faire varier, on peut faire baisser, on peut faire remonter… Et il y a aussi là toutes les possibilités de virtuosité, que le jazz aussi utilisait. Ils ont tout fait peut-être les jazzmen : faire claquer sa langue contre l’embouchure de l’instrument…

Tout ça c’est parce qu’ils sont dans une organicité physique avec l’instrument — que dans la musique savante apparemment on avait perdu de vue, parce que je pense que les grands instrumentistes et musiciens eux ne l’ont jamais oublié. Ecoutez la Grande Fugue de Beethoven : c’est une manière de pousser à la fois le violon, l’instrument, la mélodie, et la musique elle-même ! L’écriture musicale elle-même a une sorte d’extrémité où on a le sentiment que ça se casse, que ça se perd. Et pourtant ça a été écrit il y a tellement longtemps : dans les premières années du XIXe siècle, c’est presque impensable une chose pareille…

D’ailleurs c’est comme un truc un peu suspendu, un peu à part. Et alors, tout ça évidemment nous ramène à votre question initiale : tout cela est très difficile pour le discours. Parce qu’on voit bien que quand on en parle comme ça tendanciellement, c’est comme si on revenait vers l’instrument. Alors on aimerait mieux se mettre à jouer de l’instrument, à chanter ! D’ailleurs moi je n’ai jamais joué d’un instrument, mais j’ai beaucoup chanté. Maintenant je ne peux plus chanter, mais je dirais que chanter, oui je sens très bien que c’est complètement hors philosophie. C’est-à-dire que je ne peux pas chanter et philosopher. En philosophant, je peux parler de chant, mais si je chante, pfff… la pensée s’en va, il n’y a plus de pensée. Elle est toute dans le chant, pensée chantante.


Notes

[1] Coleman et Derrida, 1997.
[2] Voir sur ce point le livre de Christian Béthune, 2003.
[3] Sève, 2002.
[4] Wolff, 2015.
[5] Nancy, 2014.
[6] Adorno, 2003, p. 89.
[7] Cohen-Levinas, 2012, p. 207.
[8] Lacoue-Labarthe, 2005.
[9] « De même que, chez l’enfant, après une longue nutrition silencieuse, la première respiration interrompt un tel devenir graduel de la progression de simple accroissement — c’est là un saut qualitatif —, et voici que l’enfant est né ». Hegel, 2006, p. 64.
[10] Nancy, 2002, p. 51.
[11] Nancy, 2002, p. 13.
[12] Hegel, 2006, p. 90.
[13] Nancy, 2013.
[14] Nancy, 2014, p. 40-41.
[15] Nancy, 1976.
[16] Nancy, 2007.
[17] Nancy, 2002, p. 19.
[18] Bataille, 1971, p. 114.
[19] Schaeffner, 1936.


Bibliographie

Adorno W., Theodor, « Über jazz », in Moments musicaux, trad. Martin Kaltenecker, Genève, Éditions contrechamps, 2003.

Bataille, Georges, L’impossible, in Œuvres complètes Tome III, Paris, Gallimard, 1971.

Béthune, Christian, Adorno et le jazz, analyse d’un déni esthétique, Paris, Klincksieck, 2003.

Cohen-Levinas, Danielle, « Le neveu de Nancy, Entretien sur la musique », in Gisèle Berkman et Danielle Cohen-Levinas (dir.), Figures du dehors, Autour de Jean-Luc Nancy, Nantes, Éditions nouvelles Cécile Defaut, 2012.

Coleman, Ornette et Derrida, Jacques, « La langue de l’autre » (entretien par Thierry Jousse et Geneviève Peyrègne), Les Inrockuptibles, n° 115, Paris, 20 août–2 septembre 1997, p. 37-43.

Hegel, Georg Wilhelm Friedrich, La Phénoménologie de l’Esprit (Préface), trad. Bernard Bourgeois, Paris, Vrin, 2006.

Lacoue-Labarthe, Philippe, Le chant des muses : petite conférence sur la musique, Paris, Bayard, 2005.

Nancy, Jean-Luc, Le discours de la syncope, I. Logodaedalus, Paris, Flammarion,1976.

Nancy, Jean-Luc, À l’écoute, Paris, Galilée, 2002.

Nancy, Jean-Luc, Tombe de sommeil, Paris, Galilée, 2007.

Nancy, Jean-Luc, Ivresse, Paris, Payot et Rivages, 2013.

Nancy, Jean-Luc, « La musique… », Improjazz, Magazine d’information musical, n° 201, Blois, janvier 2014, p. 40-41.

Schaeffner, André, Origine des instruments de musique. Introduction ethnologique à l’histoire de la musique instrumentale, Paris, Payot, 1936.

Sève, Bernard, L’altération musicale (ou ce que la musique apprend au philosophe), Paris, Éditions du Seuil, 2002.

Wolff, Francis, Pourquoi la musique ?, Paris, Fayard, 2015.

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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Invité Mar 10 Nov - 6:20


Ô TRISTESSE ENNEMIE !

il disparaît en silence nombre de mes musiciens préférés. Je pense récemment à l'attachant guitariste Marc Fosset, mais peu m'ont touché autant que celle du merveilleux congero Candido Camero, compagnon de Dizzy Gillespie, Art Blakey, Duke Ellington, Tito Puente, Sonny Rollins ou Elvin Jones, Kenny Burrell ou Wes Montgomery... Il était un des plus authentiquement relié à la tradition africaine des tambours, proche en ceci de Chano Pozo et Mongo Santamaria. Son jeu se caractérisait par un son très chantant et une approche aussi mélodique que rythmique des congas


avec Dizzy Gillespie et son orchestre (probablement 1956)





autres vidéos

et d'un de mes disques préférés, 1962,
un des plus formidables échanges entre une saxophoniste et une percussionniste




"pur" Cuba, 1971
avec Cachao (bass) et Bebo Valdés (piano)





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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Invité Dim 29 Nov - 3:36


Jazz et Philosophie
'CE QUE LE JAZZ FAIT AU TEMPS'
Christian Béthune

une leçon d'écoute au long cours
Christian Béthune est un des seuls, avec Alexandre Pierrepont, à s'être intéressé à mes écrits sur le jazz. Dans sa pensée, il l'explique, jazz et philosophie sont inséparables, et rares sont ceux qui ont la double érudition pour en parler avec pertinence. Il est un auteur singulier dont je retiens : Charles Mingus, 1996; Adorno et le Jazz. Analyse d'un déni esthétique, 2003; Le Rap. Une esthétique hors la loi,2003; Le Jazz et l'Occident : Culture afro-américaine et philosophie, 2008; Blues, féminisme et société, 2018

ses réflexions sur le rapport au temps dans la musique de Charles Mingus sont des plus intéressantes, sur le plan musical d'abord avec la tentative d'explicitation du trouble concept de Rotary Perception du contrebassiste et compositeur

cette émission, dans laquelle Keith Jarrett n'est qu'un prétexte, permet de saisir les rapports du jazz au temps dans la relation entre improvisation et répétition/reprise, entre passé, souvenirs, maintenant et présent. À écouter au-delà pour le rapport au temps passé de toute activité au présent
Ce que le jazz fait au temps
Confinés avec... Keith Jarrett (4/4) / Les chemins de la philosophie, Adèle Van Reeth
Dans l’improvisation, qui comprend la notion de répétition, quelle superposition y-a-t-il entre le passé et le présent ? Quel est l’aspect mémoriel dans le jazz ? Quelle expérience du temps nous propose la musique de Keith Jarrett ?

Christian Béthune, philosophe, professeur associé au CIREC (centre interdisiplinaire d’études et de recherches sur les expressions contemporaines), attaché à la faculté de Saint-Etienne et de Lyon, professeur associé à la faculté des sciences de l’éducation de Sao Paulo au Brésil et membre de l'Association des Musicologues d'Auvergne

Le jazz c'est l'idée de communauté
Le jazz c’est un ancrage dans la tradition, toute improvisation est un moment de partage en commun d’une tradition assumée à la fois par les musiciens et par le public. C’est dans ce passage et ce partage, d’une version à une autre, que se constitue l’intérêt, la révérence pour le jazz. Le jazz c’est l’idée de communauté, de mise en commun.    

Christian Béthune

Le jazz est-il messianique ?
Ce que Adorno a très bien vu à propos du jazz c’est que son processus historique n’est pas dialectique : il procède par étape. Le temps du jazz est cyclique, le présent et le passé se confondent dans un maintenant de l’improvisation. C’est le temps du conteur tel que le décrit Walter Benjamin. L’idée que l’histoire n’est pas écrite une fois pour toute mais qu’elle peut se relire de façon messianique, cela choquait Adorno. Et d’une certaine manière, il y a une forme de messianisme dans le jazz. Les vaincus de l’histoire ont contaminé l’histoire du 20ème siècle alors que habituellement ce sont les vaincus de l’histoire qui subissent la suprématie culturelle de leurs vainqueurs…  

Christian Béthune

Texte lu par Denis Podalydès :
Extrait de La Répétition, de Søren Kierkegaard, 1843, éditions Payot-Rivages, traduction de Jacques Privat

Sons diffusés :
Chanson de Yves Montand, Les feuilles mortes
Extrait de Autumn Leaves, dans l'album Keith Jarrett At The Blue Note, disque 3, 1995, ECM records, avec Keith Jarrett au piano, Gary Peacock à la contrebasse et Jack DeJohnette à la batterie
Extrait de Prismes : Critique de la culture et société, de Theodor W. Adorno, article Mode intemporelle : à propos du jazz, 1955, éditions Payot, traduction de  Geneviève et Rainer Rochlitz, lu par Vincent Schmitt
Extrait de God Bless The Child, dans l'album dans Standards 1, 1983, ECM records, avec Keith Jarrett au piano, Gary Peacock à la contrebasse et Jack DeJohnette à la batterie
Extrait de Beginning, dans l'album The Survivors’ Suite, 1977, ECM records, avec Keith Jarrett au piano, Gary Peacock à la contrebasse et Jack DeJohnette à la batterie
Archive de Keith Jarrett, interview du 11 octobre 2000 avec Lionel Esparza
Archive de Keith Jarrett du 13 juin 2013, dans une table ronde modérée par Frank Madlener, directeur de l’IRCAM, au Centre Pompidou
Chanson de fin : Sarah Vaughan, Autumn Leaves
la version d'Autum leaves par Sarah Vaughan est extraite de l'album Crazy and Mixed Up, 1982, avec Roland Hanna - piano, Joe Pass - guitar, Andy Simpkins - double bass, et Harold Jones - drums



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LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Empty Re: LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS

Message par Invité Ven 18 Déc - 10:41


compagnon de Roland Kirk, Marion Brown, Max Roach, Bobby Hutcherson, Clifford Jordan, Harold Land, Sonny Rollins, Stan Getz, Larry Coryell, Abbey Lincoln... un pianiste sous l'influence de Art Tatum, et toute l'histoire du jazz qui défile sous ses doigts

petite sélection... Ayant joué avec de telles rythmiques d'enfer, il mérite bien le paradis


2013


1991
Stanley Cowell : piano
Billy Harper : tenor saxophone
Reggie Workman : bass
Billy Hart : drums



1988
Buster Williams, bass
Billy Hart, drums



1978
Art Pepper - alto
Cecil McBee - bass
Roy Haynes - drums



1971
Charlies Tolliver,trumpet
Wayne Dockery, bass
Alvin Queen, drums



1969
Flora Purim - Vocal
Stan Getz - Tenor Sax
Miroslav Vitous - Bass
Jack Dejohnette - Drums

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Message par Invité Sam 9 Jan - 4:35


A FEW NOISE

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tout le monde ne peut pas être Claude Bolling, certains jazzmen ont eux inventé quelque chose, c'est sans doute pourquoi si peu de monde les connaît, et qu'ils peuvent disparaître sans bruit

à classer entre Thelonious Monk, Randy Weston et Duke Ellington dans la galaxie des magnifiques pianistes
Ami d’enfance d’Albert Ayler, issu d’une famille de musiciens, Bobby Few étudie le piano et l’orgue dès l’âge de sept ans, et donne cinq ans plus tard son premier récital classique. Après des études d’harmonie et de composition au Cleveland Institute of Music, il étudie le vibraphone et joue dans des orchestres de danse avec son cousin, le contrebassiste Bob Cunningham.

Engagé par Hiawatha Edmondson, puis par Dick Shelton, il retrouve Ayler qui l’incite à venir à New York (1958), où il rejoint le Free Jazz Workshop de Bill Dixon, et se produit avec Frank Wright (qu'il a connu en 1956 à Cleveland) et Booker Ervin. Il constitue un trio éphémère avec Wilbur Ware et Leroy Williams (batterie), travaille comme pianiste et directeur musical pour le chanteur Brook Benton (1968), puis accompagne Frank Foster et Roland Kirk. En 1969, après avoir enregistré avec Ayler, il s’installe en Europe, constituant avec Wright,  Noah Howard et Muhammad Ali, le groupe Center of the World (également compagnie de production et d’édition). Fixé à Levallois-Perret, il se consacre à l’enseignement et, après avoir collaboré au Celestrial Communication Orchestra d’Alan Silva participe aux groupes de Steve Lacy (1980-94). Dans les années 2000, il poursuit en Europe une activité exemplairement ouverte.


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image ajoutée

Pianiste virtuose, Bobby Few aime à faire sonner l’instrument d’arpèges torrentiels, soulignés par la pédale forte. Fin connaisseur des ressources du piano jazz, d’Art Tatum à Cecil Taylor en passant par Thelonious Monk, et de l’harmonie, il construit son discours sur des modulations inattendues. Parfois chanteur, il s’exprime, d’une voix un peu frêle de ténor léger, dans une veine intimiste ?
[In Le Nouveau Dictionnaire du Jazz - Xavier Prévost]




2013


1969
Albert Ayler (Sax, bagpipes, vocals, Bobby Few (Piano),
Henry Vestine (Guitar), Bill Folwell, Stafford James (Bass),
Muhammad Ali (Drums), Mary Maria (Vocals)



The Song Written-By [Poem - After Abu Nuwas] – Brion Gysin

Soprano Saxophone, Composed By – Steve Lacy
Alto Saxophone – Steve Potts
Bass – Jean-Jacques Avenel
Piano – Bobby Few
Vocals, Violin, Cello – Irene Aebi
1987


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photo Christian Ducasse


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Message par Invité Ven 12 Fév - 6:08


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Chick Corea est mort. Avec sa disparition, et l'arrêt des enregistrements par Keith Jarreth, c'est toute une époque du jazz qui entre définitivement dans l'histoire. À vrai dire, je préférais le second, et le plaçait bien plus haut dans mon panthéon des jazzeurs et des pianistes. J'ai vu et entendu Chick Corea une seule fois sur scène, en 1969 à Lyon, avec Miles Davis (cf en bas, à Paris), la période charnière avant l'électricité, une fulgurance. À quelques exceptions près, j'ai beaucoup moins aimé les choix esthétiques qu'il a faits plus tard, mais disons que c'était dans sa nature joyeuse...

pour lui rendre hommage, j'ai sorti trois disques de ma collection



1968
chick corea (p)
miroslav vitous (b)
roy haynes (d)

intégral

Une chanson inspirée apparemment par la mélodie de 'The Wind Cries Mary' d'Hendrix,
et dont le titre est un hommage à la fiancée de Miles à l'époque, Betty Mabry (qui est sur la pochette)

un de mes disques préférés de Miles Davis



1969
Miles Davis - trompette
Wayne Shorter - saxophone ténor
Chick Corea - piano électrique
Dave Holland - contrebasse
Tony Williams - batterie

dans ce morceau, Corea remplace Herbie Hancock,
de même qu'en tournée en Europe, Dejohnette remplacera Tony Williams



1976
avec Jean-Luc Ponty, violon
et Stanley Clarke, contrebasse

intégral

« Joue simplement ce que tu entends.
Si tu n'entends rien, ne joue rien.»
(Miles au pianiste)


1969
Miles Davis (trompette)
Wayne Shorter (saxophones ténor et soprano)
Chick Corea (piano électrique)
Dave Holland (basse)
Jack DeJohnette (batterie)

premier solo de Corea à 5:43

on peut aussi écouter Corea dans le disque phare du jazz fusion,
Bitches Brew


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Chick-Corea-2019-cr-Mikoaj-Rutkowski-billboard-1548


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Message par Invité Dim 7 Mar - 11:16


HODEIR DES DERS
né le 22 janvier 1921 et mort le 1 novembre 2011
le compositeur et écrivain aurait eut 100 ans


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 600x337_hodeir_1

l'occasion de rappeler une des plus belles œuvres écrites de jazz
L'Orchestre national de jazz célèbre le centenaire du compositeur André Hodeir avec son chef-d'œuvre "Anna Livia Plurabelle" à la Maison de la Radio. À l'occasion du centenaire de la naissance du compositeur André Hodeir, l'Orchestre national de jazz (ONJ) présente son œuvre somptueuse et fascinante pour deux voix et orchestre, composée sur un texte de James Joyce, sous la direction de Patrice Caratini. À suivre en direct sur France Musique samedi 6 mars à partir de 19 heures.



sur la première, de 1966, c'est mon professeur, Pierre Cullaz, qui tient la guitare

c'est encore celle que je préfère, peut-être pour les musiciens de mes 20 ans... quant aux chanteuses, dès le début par rapport à la version d'hier soir, ya pas photo... Où sont Nicole Croisille et Monique Aldebert ? En traduction française, que j'ai également lue, ça ne le fait pas : où est Joyce ?






Alto Saxophone – Michel Portal
Bass – Guy Pedersen, Pierre Michelot
Clarinet – Hubert Rostaing
Conductor / Composition – André Hodeir
Contralto Vocals – Nicole Croisille
Drums – Christian Garros, Daniel Humair, Franco Manzecchi, Roger Fugen
Flugelhorn – Roger Guérin
Flute – Raymond Guiot
Guitar – Pierre Cullaz
Saxophone – Armand Migiani, Georges Grenu, Michel Portal, Pierre Gossez
Soprano Vocals – Monique Aldebert
Trombone – Camille Verdier, Christian Guizien, Raymond Katarzinski
Trumpet – Christian Bellest, Maurice Thomas
Vibraphone – Bernard Lubat, Michel Lorin
Violin – Jean-Luc Ponty

Rec. in Paris (F) in June 1966 at "La Maison de l'O.R.T.F." by Jacques Boisse & Philippe Pélissier and produced by  Jeanne De Mirbeck, won the "Grand Prix du Disque 1972", Liner notes by Pierre Lafargue

pour le reste j'ai étrillé l'occidentalo-centrisme d'André Hodeir critique de Jazz, qu'il voulait sauver par l'écriture et "l'improvisation simulée" (sic), dans mon livre de 2002 JAZZ ET PROBLÈMES DES HOMMES, qui détournait et retournait le titre de son livre de 1954 Hommes et problèmes du jazz

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Md30785912543

arrangement sur un thème de Thelonious Monk


André Hodeir (arr, dir), Roger Guérin, Jean Liesse, Buzz Gardner, Donald Byrd, Idrees Sulieman (tp), Nat Peck, André Paquinet, Frank Rehak (tb), Jean Aldegon, Hubert Rostaing, Hal McKusick (as), Raymond Guiot (fl), Bobby Jaspar, Georges Grenu (ts), Armand Migiani (bs), Martial Solal, Eddie Costa (p), Sadi, Jean-Pierre Drouet (vib), Pierre Michelot, George Duvivier (b), Jacques David, Christian Garros, Kenny Clarke, Bobby Donaldson (d), Christiane Legrand, Annie Ross (vcl)



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Message par Invité Jeu 18 Mar - 5:39


GEORGE "THUMB" BENSON

un musicien, quand il vieillit bien, c'est comme un bon vin dont la bouteille n'est jamais vide. George Benson va avoir 78 ans. Il se fait connaître des amateurs de jazz en 1964 avec The New Boss Guitar, héritier direct de Wes Montgomery qui en fait l'éloge. Le maître disparaîtra en 1968, à 45 ans, et difficile de savoir comment aurait évoluer sa musique

mon premier disque de Benson est une compilation hollandaise sortie en 1973 d'un enregistrement de 1966 avec Ron Cuber (baritone saxophone), Lonnie Smith (organ), et Jimmy Lovelace (drums)


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 51WVC%2BY6ZvL._SX355_


j'en parle là parce que Miles Okazaki a commenté hier sur twitter un solo de Benson à Londres en 2007, à propos d'une extension de 6 cases à 1:57
Miles Okazaki a écrit:I mean, he grabs this six fret Fmi6 (F,D,Ab,C), in the middle of a line like it’s nothing
source

LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Ewr_0KdW8AkXxey?format=jpg&name=900x900


ce qui est véritablement impressionnant, c'est sa dextérité au pouce, qui était devenue bien supérieure à celle de Wes Montgomery, et quel son !

son dernier album, en 2019, Walking To New Orleans était un hommage à Fats Domino et Chuck Berry, pas très convainquant côté guitare




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Message par Invité Sam 20 Mar - 12:54

À l'occasion de la réédition de « Bremen & Stuttgart 1961 » du Jimmy Giuffre trio, initialement sortis sur Hat Art, le label anglais Emanem nous gratifie de six inédits. Plus deux plages de la séance studio pour Verve du 3 mai 1961 qui n'avaient pas été rééditées par ECM.

L'existence du Jimmy Giuffre 3, avec Paul Bley et Steve Swallow, clarinette, piano, contrebasse, ne dépassa guère une année, d'août 1961 à octobre 1962. Mais il eut une influence considérable. Manfred Eicher, le patron du label ECM, avoua par exemple que c'est cette musique qui changea le cours de son existence et le décida à fonder un label autour du concept de musique de chambre et de la liberté. Effectivement, l'approche des trois hommes, oscillant entre les racines du blues et l'improvisation collective hors tempo, allait ouvrir portes et fenêtres et rendre possibles d'autres univers sonores.

Ce double CD rassemble les deux seuls concerts correctement enregistrés dont on ait conservé la trace. Ils furent réédités une première fois en 1992-93 sur le label suisse hat ART (6071/2). En prime, Martin Davidson, le boss britannique d'Emanem (distribution Orkhêstra), offre six inédits du concert de Brême, trois trios (Jesus Maria, Carla et Venture) et trois duos piano-contrebasse (Ba-Lue Bolivar Ba-lues Are, I Can't Get Started et Compassion For P.B.). Plus deux pièces de l'album "Fusion" (3 mars 1961) qui n'avaient pas été reprises dans la réédition qu'en fit le label allemand ECM en 1992 dans un double album qui incluait aussi le disque "Thesis" (4 août 1961) : "Jimmy Giuffre 3, 1961" : une nouvelle prise de Trudgin' et Used To Be.

Après ces deux concerts de Stuttgart (7 novembre 1961) et Brême (23 novembre), les trois hommes entreraient une dernière fois en studio pour les séances de "Free Fall", en octobre 1962. Ce qui se joue-là est l'art du trio au sens de ceux de Schubert : trois voix égales, qui tissent des entrelacs où chacun est mélodiste, chacun rythmicien, mais surtout chacun est membre d'un trio et ne tire jamais la couverture à lui. Ils avancent à pas feutrés ou toutes griffes dehors, mais du même élan. La musique y est suspendue ou étincelante, suggérée et évidente, exploratoire et enracinée. Aussi vif, joyeux et décoiffant qu'une sortie en bord de mer sous le vent de janvier.

Alex Dutilh, France Musique, 11 janvier 2017
1990



"Sensing" (Jimmy Giuffre) – 4:12
"Monique" (Paul Bley) – 3:25
"The Giant Guitar and the Black Stick" (Giuffre, Steve Swallow) – 5:58
"Industrial Suite" (Bley, Giuffre, Swallow) – 3:15
"Sanctuary Much" (Bley, Swallow) – 3:47
"Tango del Mar" (Bley, Giuffre, Swallow) – 5:32
"The Hidden Voice" (Giuffre) – 3:06
"Mephisto" (Bley) – 4:04
"Where Were We?" (Carla Bley) – 4:50
"Sweet Song' (Bley, Giuffre) – 3:25
"Scrambled Legs' (Bley, Swallow) – 2:02
"Play Ball" (Swallow) – 7:45
"Fallen Statue" (Bley, Swallow) – 1:25
"Things" (Bley, Swallow) – 3:35
"Two Singers" (Giuffre, Swallow) – 3:52
"The Life of a Trio" (Bley, Giuffre, Swallow) – 6:25


1992



Fly Away Little Bird 6:35
Fits 3:37
I Can't Get Started 4:48
Qualude 5:38
Possibilities 6:38
Tumbleweed 6:20
All The Things You Are 6:30
Starts 3:14
Goodbye 4:32
Just Dropped By 0:28
Lover Man 5:12
Postlude 4:50
Sweet And Lovely 6:25
Bats In The Belfry 11:26


Giuffre on Soprano Sax, Clarinet & Vocal


1993



00:00​ Conversation with a Goose
05:10​ The Flock Is In
07:08​ Echo Through The Canyon
07:54​ Three Ducks
09:11​ Watchin' The River
14:19​ Campfire
17:05​ Cobra
27:16​ Among The High Rocks
29:01​ White Peaks
34:27​ Calls In The Night
40:38​ Lonely Days
46:17​ Jungle Critters
54:49​ Restless


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Trio-1


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Message par Invité Mer 14 Avr - 10:19


L'AUTRE SONNY

Francis Marmande pour Le Monde
Saxophoniste au timbre rageur, compositeur, un temps proche des Black Panthers,
il aura croisé la route des plus grands, de Coltrane à Rollins. Il est décédé le 8 avril, à l’âge de 87 ans.


Sonny Simmons, Fiercely Independent Alto Saxophonist, Dies At 87
Martin Johnson, NPR, April 13, 2021


LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS Gettyimages-519695306_wide-0208ace5343dc6b1357944e0ed89c7d9c899b241-s800-c85
Sonny Simmons performs on May 30th 1997 at the Bimhuis in Amsterdam, Netherlands.
Frans Schellekens/Getty Images
Saxophonist Sonny Simmons left an indelible impression on fellow alto player Steve Lehman, who vividly remembers the first time he heard Simmons live: It was 1997, Lehman was assisting drummer Pheeroan akLaff – on the faculty at Wesleyan University at the time, where Lehman was a student – who had a gig with Simmons that Lehman attended. The impact was immediate.

"He was somebody who could bring people to their feet and make them shout, just with his sound," Lehman writes in an email. "You hear it right away and there's no faking it. That kind of clarity and vision for what you want your instrument to do. And to move people in that way — with just your sound and phrasing and the nuances of inflection — that's something I'm still striving for."


"... to move people in that way — with just your sound and phrasing and the nuances of inflection... "



Simmons died last week at the age of 87. The cause of death remains unknown, but his life is cause for considerable celebration. Although jazz has established a place in academic and cultural institutions, it was and largely still is an outsider's music, and Simmons was an outsider's outsider. With two notable exceptions, his entire discography as a leader took place on small, independent labels that were often based overseas, yet he also played on Iron Man and Conversations two of Eric Dolphy's masterpieces.

As documented in Robert Brewster's 2003 film, In Modern Time, Simmons spent a decade homeless, sleeping in a box and playing on the streets of San Francisco. Yet he rebounded, catching the attention of executives at Qwest Reords and putting out his best-known recordings, Ancient Ritual in 1994 and American Jungle in 1997, which featured a stellar ensemble of pianist Travis Shook, bassist Reggie Workman and drummer Cindy Blackman Santana. He also connected with saxophonist and composer Michael Marcus and formed the Cosmosamantics, which released nine albums from 2001-13.



"I loved his connection to Bird, and his innovative 'new way' to phrase lines with a strong blues base, similar to Ornette Coleman's approach to improvisation," said Marcus. "Sonny's style is so true to the blues along with freedom, harmonic knowledge and an undeniable pure tone with beauty."

Sonny Simmons was born Aug. 4, 1933 in Sicily Island, La. His parents were forced at gunpoint to abandon their property when Sonny was six – in the documentary, he describes his father hiding him behind a tree to avoid possible gunfire. His family later moved to Oakland, California where Simmons took up music, first playing the English horn then turning to alto saxophone at 16, thanks to the aforementioned inspiration of Charlie Parker. Simmons began playing professionally shortly thereafter, but his career truly took off when he moved to New York. He did sideman dates with Prince Lasha and both men performed with Dolphy on his superb 1963 recordings, Iron Man and Conversations. He also joined drummer Elvin Jones and bassist Jimmy Garrison on Illumination in 1963.

Of Simmons work with Lasha, notably Firebirds, Lehman says, "It's sort of smack-dab in the middle between the sound of Ornette Coleman's small groups and Jackie McLean's small group recordings with Bobby Hutcherson."

Simmons later began recording as a leader, too. He released Staying on the Watch (ESP) in 1966 and Music from the Spheres (ESP) in 1968. Both were innovative musically and socially, as they featured his wife Barbara Donald on trumpet, a rarity back then. Label Manager Steve Holtje said of the recordings, "They're tonal but pushing tonality to its limits, and using freer structures; they also have a soulfulness that, if not 'spiritual jazz,' is in the next neighborhood over."

Following his Qwest recordings, Simmons recorded regularly and gained some recognition as a crucial voice during one of jazz's most innovative times. Holtje said of Simmons lasting importance, "he could be held up as an example to anti-free naysayers. He clearly had a strong bebop background and could blow on changes when he wanted to. In that sense he extended the legacy of Eric Dolphy, with whom he played, of sounding free while also displaying solid standard techniques, and of playing at the edge of harmony in his improvisations."

Marcus added, "Sonny's contributions to the music are enormous. He lays in the pantheon with the great innovators and masters of the music," he said. "Sonny was more than just a musician, he was (and is) a messenger of universal sounds that always had a prayer included."





documentaire 2003

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la première fois que j'ai entendu Sonny Simmons, c'est avec Dolphy, dans ce merveilleux disque
sur sa composition





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Message par Invité Dim 18 Avr - 8:02


JOËLLE, TRÉSOR NATIONAL MONDIAL


Bâle, Gare du Nord,  11.01.2019

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Les grands entretiens de France Musique
du 12 au 16 avril 2021

Joëlle Léandre, contrebassiste (1/5)

Cap sur Aix-en-Provence, la ville de naissance de Joëlle Léandre : un quartier populaire, un père cantonnier, une mère d’origine paysanne. Quand Joëlle Léandre dit qu’elle veut faire de la musique, la mère lui répond d’abord « c’est pas pour nous », puis elle cède...

En 1969, c’est dans un Paris post-mai 1968 qu’elle arrive, une période bénie pour cet esprit rebelle.



Pendant ses années d’étude au CNSMdP, Joëlle Léandre est prise d’une boulimie de musique destinée à compenser l’étroitesse du répertoire classique de la contrebasse : elle découvre la musique dite contemporaine (celle écrite par les compositeurs vivants), le jazz afro-américain, le free jazz…

Elle fait son premier solo de pièces contemporaines non pas à Paris mais à New York où elle obtient une bourse en 1976 : elle a 25 ans, et se remet tout juste d’un grave accident qui lui fait prendre conscience de l’urgence d’être au monde.



Dans le Paris des années 1970, Joëlle Léandre fait ses premiers pas comme compositrice, en autodidacte complète, avec pour guide le Traité d’Orchestration de Berlioz ! Elle écrit pour le théâtre, pour la danse. Son activité est plurielle, embrasse toutes les disciplines artistiques.


Joëlle Léandre joue beaucoup à l’étranger, rencontre beaucoup de musiciens et observe ce qui se joue dans l’univers du jazz d’un regard critique : trop peu de femmes sur les routes, et une solidarité masculine qui n’a pas son équivalent dans une sororité encore timide.

John Cage lui dédit deux pièces... Elle le retrouve en Angleterre avec le chorégraphe Merce Cuningham. Elle joue avec Derek Bailey. L’improvisation devient pour la musicienne  LE mode d’expression premier.



Joëlle Léandre est musicienne, mais aussi artiste et poète à ses heures : pendant toute une période elle a réalisé des encres de Chine, des tableaux, qu’elle photographiait et envoyait à Scelsi.

A presque 70 ans aujourd’hui, Joëlle Léandre est resté fidèle à deux principes de vie, le premier énoncé par sa mère quand elle avait 17 ans : « Que tu te suffises à toi-même » et « Do it ! Be your self », leçon de vie apprise aux Etats-Unis lors de ses différents séjours.





Joëlle Léandre & Jon Rose ‎– Les Domestiques, ''La Toilette'', 1988 Germany








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Message par Invité Jeu 13 Mai - 7:50


RIP
CURTIS FULLER
est de sortie
Jouer de la musique était pour vous une façon d’échapper à tout ça…

C’est ça; j’ai écrit une chanson, je l’ai appelée «Sortie»; c’est un mot français. Je ne savais pas comment exprimer ce que je voulais dire, alors j’ai dit : «Sortie». Il y a toujours une issue. Avec la musique, j’ai trouvé un pays imaginaire où m’évader.
interview Jazz Hot 680, été 2017
dans l'actu

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solo à 5:12






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Message par Invité Jeu 10 Juin - 13:13



«Another Land»

Dave Holland (contrebasse, guitare basse),
Kevin Eubanks (guitare),
Obed Calvaire (batterie)
incontournable, solide et durable sommet du jazz récent, avec les doigts magiques de Kevin Eubanks, qui me fait l'honneur d'être abonné à mon compte Twitter

je me fendrai ultérieurement d'une chronique pour ce CD foisonnant, du  niveau de Gateway en 1975, avec John Abercrombie et Jack Dejohnette



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Message par Troguble Sam 14 Aoû - 11:28


CYRILLE SANS RIDES BUT RIDE

« I'd like to play the ride beat differently and still play the music »
Interview 2002

La ride est une des cymbales courantes, répandue depuis les années 1930, d'abord via les batteurs de Jazz puis intégrée aux configurations standard en batterie. Son diamètre varie de 18 à 24 pouces. le nom « ride » dérive de la manière la plus courante de la jouer, avec l'olive (extrémité) de la baguette sur le corps de la cymbale, au-dessus, produisant une sorte de « galop » sur la cymbale. On peut également la jouer comme une cymbale crash, frappée sur la tranche, ou sur le dôme central, appelé la cloche, afin d'obtenir différents sons.

Andrew Cyrille s'est distingué, dans les années 60, par un jeu de cymbales particulièrement riche et foisonnant de textures et sonorités



LE "JAZZ" ET MOI ÉMOIS 5961
Hidden hands ... Andrew Cyrille. Photograph: Arianna Tae Cimarosti

The 81-year-old drummer deploys crisp cymbals, hushed snares and even brushes on newspaper for this entrancing set alongside Bill Frisell, Ben Street and David Virelles

It would be tempting to say that, at 81, Andrew Cyrille has probably forgotten more than most drummers have ever learned about stretching tempo and creating space for improvisers to thrive in – that is, if it didn’t do such a disservice to the Haitian-American master’s respect for his fellow players. Over six decades with stars from swing-sax pioneer Coleman Hawkins to Carla Bley and uncompromising piano virtuoso Cecil Taylor, Cyrille has learned all about jazz’s rich complexities – and then sought to distil them into ever simpler essentials in projects of his own.


Cecil Taylor Unit, Jimmy Lyons, Andrew Cyrille ‎– Châteauvallon Jazz Festival, 1973
vidéo ajoutée. J'y étais

Artwork for The News
The News is a follow-up to Cyrille’s sonically subtle quartet album The Declaration of Musical Independence from 2016, but with imaginative Cuban New Yorker David Virelles joining guitarist Bill Frisell and double bassist Ben Street on keys. Cyrille’s hidden-hand presence is glimpsed in taps, ticks and quietly crisp cymbal grooves, hushed snare rolls and offbeat accents – and the whisper of brushes on a newspaper spread over the drumheads on the title track. Frisell’s delicious country-chiming Mountain has its chord melody and luminous harmonics slowly dissolved into Virelles’ darkening low tones. Leaving East of Jordan develops a walking groove and then a Spanish tinge after its slowly anthemic opening, and Go Happy Lucky (one of three very songlike Frisell tunes) is a dissonant blues. The brushes-on-paper title track turns from caustic free-improv pluckings to fluid trills and ambient hums, while With You in Mind – introduced by the leader’s sonorous spoken-word recitation – confirms this unusual band’s slow-burn lyricism. Quiet, this News may be – but it’s right up there among ECM Records’ entrancing understatements.

Also out this month
The 10-year-old Berlin-founded jazz/rock/punk/electronica quartet Kuu! take no prisoners with Artificial Sheep (ACT), on which Serbia-born singer Jelena Kuljić, two blistering electric guitarists, and brilliant free-jazz/avant-rock drummer Christian Lillinger grippingly churn through fast improv, snarlingly punky vocals, Arcade Fire and Beastie Boys covers, and intimately ghostly ballads. New York drummer/composer Donald Edwards, a musician steeped in southlands soul/blues, hip early-Miles swing and the fiery hard-bop of Art Blakey, warps straight-ahead horn grooving with the raw guitar sound of David Gilmore and a little urgent preacherly vocalising on The Colour of Us Suite (Criss Cross Jazz). And fine former Miles Davis saxophonist Kenny Garrett, a blender of soul-sax partying and John Coltrane’s spirituality, releases a characteristic mix of hot riffing, neo-soul and post-bop with added brass, vocals and Cuban percussion on Sounds from the Ancestors (Mack Avenue).





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Message par Troguble Dim 26 Sep - 9:55


In Memoriam GEORGE MRAZ
9 September 1944 – 16 September 2021

« Le son exquis de la basse de George Mraz est imprégné de couleurs riches et profondes. Mraz joue de l’âme à l’âme - les sons qu’il produit venant du plus profond de lui-même et atteignant le même endroit chez l’auditeur. Sa formation au Conservatoire de Prague mettait l’accent sur l’expressivité, le contrôle et la chaleur; Mraz les a en abondance. »


Round Midnight
George Mraz - Tommy Flanagan - Alvin Queen
1991 - Jazzfestival Bern - Switzerland



In a Sentimental Mood
Jim Hall, Don Friedman, Lewis Nash



1. In A Sentimental Mood
2. Nica's Dream
3. Mercy, Mercy, Mercy
4. Oleo

Hank Jones - piano
George Mraz - bass
Billy Kilson - drums



2014
Camilla Mraz and drummer Anthony Pinciotti


autres

Arnaud Quittelier, RTbf
C’était un des meilleurs contrebassistes de la scène jazz mondiale. En juillet 2016, il avait subi une longue intervention chirurgicale entraînant d’importantes complications. George Mraz s’est éteint ce 16 septembre 2021 à l’âge de 77 ans.

Originaire de la République tchèque, George Mraz est né en 1944. Il a commencé ses études musicales de violon à l'âge de sept ans et a commencé à jouer du jazz au lycée. Il fréquente le Conservatoire de Prague en 1961, étudie la basse et obtient son diplôme en 1966. [il quitte alors Prague en même temps que son compatriote, autre grand de la contrebasse, Miroslav Vitous, cofondateur de Weather Report]

"Le premier jazz que j'ai entendu était celui de Louis Armstrong quand j'avais environ douze ans. Puis la voix étrange de Satchmo chantant fut un choc. En l'écoutant, j'ai pensé : "Comment peut-il s'en tirer avec une voix pareille ?". Ce jour-là, j'ai commencé à m'intéresser au jazz".

"J'ai vraiment été influencé par tout ce que j'ai entendu, mais bien sûr, j'ai prêté une attention particulière à Ray Brown, Scott LaFaro, Paul Chambers et Ron Carter."

Gillespie, Peterson, Hancock…
Après avoir obtenu son diplôme du Conservatoire de Prague, George est allé à Munich et a joué dans des clubs en Allemagne et en Europe avec Benny Bailey, Carmel Jones, Leo Wright, Mal Waldron, Hampton Hawes, Jan Hammer et d'autres. Durant l’hiver 1969, George reçut un appel de Dizzy Gillespie pour rejoindre son groupe à New York. Après quelques semaines avec Dizzy, George est parti sur la route avec Oscar Peterson pendant environ deux ans. Après cela, il a travaillé avec le Thad Jones/Mel Lewis Orchestra pendant les six années suivantes.

George Mraz a également enregistré avec Tommy Flanagan, Roland Hanna, Hank Jones, Charles Mingus, Lionel Hampton, Woody Herman, Toshiko Akioshi, Kenny Drew, Barry Harris, Tete Montoliu, Jimmy Rowles, Kenny Barron, Larry Willis, Richie Beirach, McCoy Tyner, Adam Makowicz, Jimmy Smith, Stan Getz, Zoot Sims, Pepper Adams, Art Pepper, Warne Marshe, Phil Woods, Grover Washington Jr., Archie Shepp, Dave Leibman, Joe Lovano, Jim Hall, John Abercrombie, John Scofield, Kenny Burrell, Larry Coryell, Chet Baker, Art Farmer, Lew Soloff, Jon Faddis, Jimmy Knepper, Bob Brookmeyer, Jon Hendricks, Carmen McRae, Helen Merrill, Elvin Jones et bien d'autres.

George Mraz admet qu'il n'a jamais hésité à aborder des projets en tant que leader. "J'ai toujours voulu faire des projets par moi-même", insiste Mraz, "Je n'y suis jamais parvenu."

Après avoir joué avec les plus grands noms du jazz, George Mraz s’est ensuite concentré sur son travail avec sa femme, Camilla Mraz au piano.

Troguble

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