POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
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POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
« Dans une société communiste, il n’y aura plus de peintres,
mais tout au plus des gens qui, entre autres choses, feront de la peinture »
Marx, Manuscrits de 1844
j'ai prétendu renverser Debord en ce qu'il ne s'agit pas de dépasser l'art, mais la posture artiste, ce qu'il est bien le dernier à avoir su faire. Et l'on peut retourner la chose comme on veut, ce dépassement est impossible dans le capitalisme, parce que l'art ne peut y exister qu'à travers sa valeur marchande, et non pour sa valeur poétique. Même la destruction de l'art a un prix, et c'est l'ironie du sort de l'artiste anarchiste Banksy d'en avoir administré la preuve à l'insu de son plein gré
Avec l'autodestruction de son œuvre,
"Banksy va marquer l’histoire de l’art pendant très longtemps"
Juliette Campion franceinfo 06/10/2018
"Banksy va marquer l’histoire de l’art pendant très longtemps"
Juliette Campion franceinfo 06/10/2018
Pour Nicolas Laugero Lasserre, spécialiste du street-art contacté par franceinfo, ce canular du mystérieux artiste britannique est un "coup de génie".
L'œuvre Girl with balloon de l'artiste anglais Banksy, lors de l'exposition "Guerre, capitalisme et liberté"
au Palazzo Cipolla, à Rome (Italie) le 23 mai 2016. (VINCENZO PINTO / AFP)
"Il semblerait que nous venions d'être 'banksiés'." Dans un communiqué (en anglais), Alex Branczik, directeur du département d'art contemporain à Sotheby's, ne cache pas sa surprise face à l'incroyable mise en scène orchestrée par Banksy vendredi 5 octobre. Lors d'une vente aux enchères à Londres, une version sur toile de sa Fille au ballon est sortie de son cadre en passant par une déchiqueteuse, dissimulée dans celui-ci. Stupéfait, le public a mitraillé le dispositif, pour tenter d'immortaliser le moment. Pour Nicolas Laugero Lasserre, directeur de l'Icart et spécialiste du street-art, Banksy "va devenir l'artiste le plus coté au monde".
Franceinfo : Pour vous, est-ce un coup de pub réussi ?
Nicolas Laugero Lasserre : Ce n'est pas un coup de pub, c'est un coup de génie ! Cela fait quinze ans que Banksy mène une critique au vitriol du marché de l'art. La plupart de ses performances sont une satire du marché de l'art, dont il dénonce la marchandisation.
Ce marché est devenu incroyablement spéculatif. On se demande si on vend encore de l'art ou une marchandise comme une autre. L'art, c'est le seul marché non régulé, dans lequel le délit d'initié n'est pas prohibé mais recommandé.
Banksy contribue à casser cet ancien monde, avec un marché de l'art très spéculatif pour, enfin, considérer l'art pour ce qu'il est. C'est cela que Banksy dénonce à travers cet incroyable coup de maître.
La sidération était totale dans la salle…
Il faut imaginer la scène. Sa toile la plus iconique, Girl with balloon, vient d'être adjugée à un prix record : 1,2 million d'euros. Et d'un coup, une petite sirène retentit et broie la toile en lamelles : c'est fou. Les gens étaient stupéfaits ! Le commissaire-priseur a improvisé une déclaration en quelques mots : "Il semblerait que nous venons d'être 'banksiés'."
Banksy a construit cette mécanique plusieurs mois à l'avance. C'est drôle et c'est en même temps une véritable performance artistique. Il a littéralement intégré dans le cadre de la toile une broyeuse à papier comme celles que l'on trouve dans les bureaux, qu'il a ensuite déclenchée à distance par une télécommande.
Beaucoup se demandent s'il n'était pas lui-même dans la salle à ce moment-là. On ne peut pas l'affirmer mais c'est tout à fait possible.
Banksy avait-il réalisé une performance comparable auparavant ?
Oui. Il y a trois ans, il avait mené une grande résidence à New York pendant un mois. Il avait produit une vingtaine d'œuvres originales estimées à des centaines de milliers d'euros chacune. A la fin de cette résidence, il a confié les œuvres à un vieux monsieur qui tenait une petite échoppe à Central Park. Personne n'avait été mis au courant, c'était une opération totalement secrète. En une journée, le monsieur a péniblement vendu quatre œuvres.
La vidéo de cette performance est devenue virale. Son message, c'était de dire : "Regardez bande d'imbéciles. Quand ça vaut 200 000 euros, vous vous battez pour acheter et quand c'est à la portée de tous, ça n'intéresse plus personne." Qu'est-ce qu'on achète dans l'art finalement ? Personnellement, cette prise de recul me donne une grande bouffée d'oxygène dans un monde où on perd la notion de la réalité.
Est-il vraiment possible que Sotheby's n'ait pas été mis au courant, comme la maison d'enchères l'affirme dans son communiqué ?
C'est certain : Sotheby's ne savait rien. Ce serait beaucoup trop de responsabilités à porter vis-à-vis des acheteurs. Le risque juridique est trop important pour la maison. Elle est cotée en bourse et le client, qui était prêt à dépenser plus d'un million d'euros, pourrait se retourner contre eux.
Banksy, c'est un anarchiste au départ. Il vient du graffiti vandale. Je n'ai aucun doute sur le fait qu'il ait préparé son action de manière totalement secrète pour prendre tout le monde de court.
Est-ce qu'il ne risque pas de devenir persona non grata des acheteurs ?
Non parce que le système est tellement bien huilé qu'à l'inverse, il va devenir l'artiste le plus coté au monde. Celui qui casse le moule est souvent celui qui devient la nouvelle référence. Si on voulait calculer le coup pour se faire le plus d'argent possible, on ne ferait pas mieux.
Ironiquement, cette satire de la spéculation va entraîner une spéculation encore plus forte sur son œuvre.
La grande question maintenant, c'est : l'œuvre est-elle considérée comme détruite ? Ou, au contraire, va-t-elle prendre plus de valeur encore ? La moitié est en lambeaux, l'autre est intacte puisque la déchiqueteuse n'a pas tout broyé. Est-ce que l'acheteur va la conserver ou renoncer ? Et si elle est remise aux enchères, à quel prix ? Clairement, Banksy va marquer l'histoire de l'art pendant très longtemps. C'est ce genre de coup qui crée une carrière, qui fait un artiste.
Banksy = banque si !
L’œuvre «autodétruite» de Banksy pourrait avoir doublé de valeur 20 minutes, 7 octobre 2018
posséder cette œuvre n'a aucun sens, car réalisée en pochoir sur les murs, elle ne perd rien à être vue en photo, gratuitement, sur Internet, puisqu'il ne s'agit que d'une image reproductible, non d'une peinture unique où importent la matière et la lumière. Par conséquent, le fait même qu'un de ses exemplaires se retrouve en vente aux enchères, nonobstant sa destruction ou pas, ne relève que d'un geste marchand, au sens ou Philippe Soupault avait forgé l'anagramme Salvador Dali = Avida Dollars, en le taxant de « marchand de lui-même ». Contrairement à la prétention de Banksy, c'est le contenu poétique de son œuvre qu'il a détruit, non sa valeur marchande. Et comme le dit cet article, c'est bien le résultat obtenuMais cette fois, cet épisode va sans doute propulser le tableau - et son cadre déchiqueteur – vers d’autres sphères. Banksy pourrait bien avoir « ajouté au moins 50 % à la valeur de son tableau », estime un expert auprès du Evening Standard. Voire plus : selon lui, la valeur pourrait même atteindre les 2 millions de livres (2,3 millions d’euros).
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
« je suis un ouvrier de la peinture, mais je ne suis pas un artiste ! »
Jean Renoir : "Mon père était un révolutionnaire parce qu'il voyait la nature autrement"
France Culture 04 septembre 2018
1958 | Septième entretien avec le cinéaste Jean Renoir qui poursuit l'évocation de son père, le peintre Auguste Renoir. On y apprend ainsi que Renoir aimait peindre en forêt de Fontainebleau, entouré d'animaux, et qu'il refusait de se préoccuper de politique tel "un bouchon sur l'eau qui suit le courant".
"Le Peintre Jules Le Cœur dans la forêt de Fontainebleau" (1866)
par Auguste Renoir. 1866, 106x80 cm. Crédits : C.C.
extraits de ce passionnant témoignage, 23mn51s
Jean Renoir, dans ce septième volet d'entretiens enregistrés en 1958, continue de raconter des anecdotes au sujet de son père, Auguste Renoir. Il relate ainsi combien son père aimait aller en forêt de Fontainebleau pour peindre "sur le motif".
1875
Mon père, tous les matins, partait avec sa toile, son chevalet et sa boîte de peinture dans la forêt et il peignait. Il s'identifiait tellement avec le paysage qui l'entourait, il en devenait tellement une partie, il était surtout tellement silencieux et tellement immobile, tellement tendu dans son travail que les animaux de la forêt avaient pris l'habitude de vivre avec lui et l'entouraient. Très souvent, mon père se retournait en sentant une présence... c'était un cerf qui avait posé sa tête sur son épaule ! Il se trouvait entouré de cerfs, de lapins, un sanglier passait...
Les événements politiques ne l'ont jamais extrêmement intéressé. Commune, pas Commune, guerre, pas guerre : mon père peignait. Il a peint toute sa vie, il a peint quand il était malade à mourir, il a peint lorsqu'il était en bonne santé, il a toujours peint.
Et de poursuivre sur son père peu enclin à prendre partie sur des sujets politiques, la peinture l'accaparant entièrement :
A propos de politique, une des raisons pour lesquelles mon père ne prenait pas part activement à des discussions, ça n'est pas que ça ne l'intéressait pas... ça l'intéressait beaucoup, mais il croyait dans la division du travail. [...] Il avait l'impression qu'il savait qu'il était un révolutionnaire en peinture mais il savait également qu'il était un révolutionnaire, pas avec la volonté d'être un révolutionnaire, mais parce que son tempérament le poussait à faire quelque chose de nouveau, parce qu'il voyait la nature autrement et qu'il pensait que son devoir était de l'exprimer comme il la voyait, ou plutôt de la traduire car il n'a jamais cru à la copie directe.
Jean Renoir conclut sur son père, immense peintre qui se voyait pourtant en "artisan" :
Mon père n'avait absolument pas du tout le culte du mot artiste, d'ailleurs il refusait qu'on l'appelle un artiste. Il disait : "Moi je suis un peintre, je suis un ouvrier de la peinture, un artisan de la peinture, un fonctionnaire de la peinture, mais je ne suis pas un artiste !"
22.9 x 30.5 cm
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
pour prolonger l'ouverture du sujet, à propos de Banksy détruisant une de ses œuvres reproductibles, la clairvoyance de Debord et Marcel Duchamp (Dada)
L'art contemporain serait une sorte fake news et de fausse critique permanente et uniquement performative. Tout peut se vendre et être suspecté d'appartenir à l'art capitaliste. Mais tout n'a pas été produit dans le cadre de la vente, dans le processus de reconnaissance par le marché.
dommage que Debord se soit noyé comme artiste lui-même dans le Spectacle de son auto-marchandisation, mais pouvait-il en être autrement, dès lors qu'il avait esthétisé sa critique, dès Potlatch et jusque dans La Société du spectacle ?
Banksy vu par Guy Debord
Thierry Briaut, Club Médiapart, 8 octobre 2018
Thierry Briaut, Club Médiapart, 8 octobre 2018
L'art contemporain serait une sorte fake news et de fausse critique permanente et uniquement performative. Tout peut se vendre et être suspecté d'appartenir à l'art capitaliste. Mais tout n'a pas été produit dans le cadre de la vente, dans le processus de reconnaissance par le marché.
L'art contemporain serait une sorte de fausse critique artistique permanente, et uniquement performative. Et la pseudo critique rentable ne vaut que si la reconnaissance par le marché permet d'esthétiser cette critique interne, et ceci comme son plus sûr soutien. Guy Debord avait dénoncé cela dès les années 1980. Maintenant que l'art est mort disait-il, il est extrêmement facile de déguiser un supplétif de l'Etat en artiste, etc., les fous des rois de la pacotille... Néo-dadaïsme retourné :Debord a écrit:Depuis que l’art est mort, on sait qu’il est devenu extrêmement facile de déguiser des policiers en artistes. Quand les dernières imitations d’un néo-dadaïsme retourné sont autorisées à pontifier glorieusement dans le médiatique, et donc aussi bien à modifier un peu le décor des palais officiels, comme les fous des rois de la pacotille, on voit que d’un même mouvement une couverture culturelle se trouve garantie à tous les agents ou supplétifs des réseaux d’influence de l’État. On ouvre des pseudo-musées vides, ou des pseudo-centres de recherche sur l’œuvre complète d’un personnage inexistant, aussi vite que l’on fait la réputation de journalistes-policiers, ou d’historiens-policiers, ou de romanciers-policiers. Arthur Cravan voyait sans doute venir ce monde quand il écrivait dans Maintenant : « Dans la rue on ne verra bientôt plus que des artistes, et on aura toutes les peines du monde à y découvrir un homme ». Tel est bien le sens de cette forme rajeunie d’une ancienne boutade des voyous de Paris : « Salut, les artistes ! Tant pis si je me trompe ».
Tout peut se vendre et être suspecté d'appartenir à l'art capitaliste. Mais tout n'a pas été produit dans le cadre de la vente, dans le processus de reconnaissance par le marché. D'autant que certains artistes n'ont pas leur véritable équivalent sur le marché.
C'est aussi la question que se posait Derrida entre le juste prix et le sans prix.
Le street art est un problème en soi. Il n'apporte rien plastiquement. Il reprend les illustrations en les déplaçant in-situ par une sur-dimensionnalité qui ne peut tenir à l'échelle de l'architecture.
Et l'on se garde bien de rappeler que les pochoirs de Banksy ne coûtent pas grand chose en travail, et sont facilement reproductibles par définition. A fortiori leur destruction complète ou partielle ne sort pas de la logique marchande, puisque l'iconoclastie ekphrastique en fait partie [exactement ce que je soulignais en ouvrant ce sujet]. Comme pour tout art conceptuel et non-plastique.
Sur le « néo-dadaïsme » dont le terme, d'abord proposé par Duchamp, a justement fait l'objet d'un refus général par tous les tenants du Pop art, ce néo-dadaïsme, voilà ce qu’il faut très précisément entendre, car il ne faudrait pas non plus oublier que Duchamp a désavoué tous ces courants artistiques lancés dans les années 1960 et qui se réclamaient pourtant de lui.Duchamp a écrit:Ce néo-dada qui se nomme maintenant nouveau réalisme, pop art, assemblage etc. est une distraction à bon marché qui vit de ce que dada a fait. Lorsque j’ai découvert les ready-made, j’espérais décourager le carnaval d’esthétisme. Mais les néo-dadaïstes utilisent les ready-made pour leur découvrir une valeur esthétique. Je leur ai jeté le porte-bouteilles et l’urinoir à la tête comme une provocation et voilà qu’ils en admirent la beauté esthétique.
Le « néo-dada à bon marché », qui règne en concentrant maintenant tous les pouvoirs, en jouant désormais au social à la façon dont le social est arboré dans tous les noms des partis de droite ou d’extrême-droite du Brésil, ce néo-dada que nous avons baptisé du nom de dadaocapitalisme, peut d’autant plus facilement être dénoncé par Duchamp que celui-ci avait les idées claires en matière d’art. Malgré la créature Frankenstein de l’anti-peinture qu’il a créée et qui lui a échappé.
Elles peuvent s’énoncer en un certain nombres de thèses.
7 Thèses de Duchamp sur l’art contemporain
1 - Il savait que "le cubisme [était] un mouvement de peinture ... exclusivement. C'était plastique en tout cas. Toujours". "Tandis que le surréalisme est un mouvement qui englobe toute sorte d'activités n'ayant pas grand chose à voir avec la peinture, ou les arts plastiques". (Entretien Georges Charbonnier).
2 - « Ce néo-dada qui se nomme maintenant nouveau réalisme, pop art, assemblage etc. est une distraction à bon marché qui vit de ce que dada a fait. Lorsque j’ai découvert les ready-made, j’espérais décourager le carnaval d’esthétisme. Mais les néo-dadaïstes utilisent les ready-made pour leur découvrir une valeur esthétique. Je leur ai jeté le porte-bouteilles et l’urinoir à la tête comme une provocation et voilà qu’ils en admirent la beauté esthétique. »
3 - « Vous prenez une boîte de soupe Campbell's [Wahrol 1962] et vous la répétez cinquante fois, c’est que l’image rétinienne ne vous intéresse pas. Ce qui vous intéresse, c’est le concept qui veut mettre cinquante boîtes de soupe Campbell's sur une toile. »
4 - « Le Verre en fin de compte n'est pas fait pour être regardé (avec des yeux "esthétiques"); il devait être accompagné d'un texte de "littérature" aussi amorphe que possible qui ne prit jamais forme; et les deux éléments, verre pour les yeux et texte pour l'oreille et l'entendement, devaient se compléter, et surtout s'empêcher l'un l'autre de prendre une forme esthético-plastique ou littéraire. » (lettre à Jean Suquet)
5- « Les happenings ont introduit en art un élément que personne n'y avait mis : c'est l'ennui. Faire une chose pour que les gens s'ennuient en la regardant, je n'y avais jamais pensé ! »
6 - Duchamp trouva «emmerdatoire» une manifestation de BMPT (nom du groupe formé par Daniel Buren, Olivier Mosset, Michel Parmentier et Niele Toroni)
7 – Dada : un nihilisme plutôt littéraire et anti-pictural : « Dada fut la pointe extrême de la protestation contre l’aspect physique de la peinture. C’était une attitude métaphysique. Il était intimement et consciemment mêlé à la « littérature ». C’était une espèce de nihilisme pour lequel j’éprouve encore une grande sympathie. C’était un moyen de sortir d’un état d’esprit – d’éviter d’être influencé par son milieu immédiat, ou par le passé : de s’éloigner des clichés – de s’affranchir. La force de vacuité de Dada fut très salutaire »
Duchamp explique comment l’affect poétique ou ce que nous dénommerons ainsi esthétise tout ce qu’on veut : on s’habitue à n’importe quel objet, il suffit de vivre à côté de quelque chose vous lui trouverez des qualités esthétiques. On finit par aimer n’importe quoi, selon lui. (Entretien Philippe Collin). Ici esthétique et poétique convergent = le collectionneur surréaliste selon Benjamin « le kitsch onirique ». Ou habitus et imagination liés. On s’habitue à tout.
La combinatoire des Nouveaux réalistes et du pop consiste à associer dans un recyclage du réel les formes toutes faites et à les « poétiser ».
« Il y a le danger d'en faire trop, parce que n'importe quoi, vous savez, aussi laid que ce soit, aussi indifférent que ce soit, deviendra beau et joli après quarante ans, vous pouvez être tranquille… Alors, c'est très inquiétant pour l'idée même du ready-made »
Philippe Collin : « Est-ce que vous n'êtes pas arrivé, depuis l'époque où vous avez fait vos premiers ready-made, à cet attachement esthétique que vous craignez, ou est-ce qu'ils sont restés parfaitement indifférents pour vous ? »
Marcel Duchamp : « Pour moi, oui ! A moi, oui ! Mais enfin, je comprends très bien que les gens cherchent souvent un côté agréable, et ils le trouvent par habitude. Si vous regardez une chose vingt fois, cent fois, vous commencez à vous habituer, à l'aimer ou à la détester, même. Ça ne reste jamais tout à fait indifférent. Donc c'est un problème difficile. Surtout, pour moi, ils ne m'intéressent pas du tout à regarder, comprenez-vous. »
Philippe Collin : « Mais comment doit être regardé un ready-made ? »
Marcel Duchamp : « Il ne doit pas être regardé, au fond. Il est là, simplement. On prend notion par les yeux qu'il existe. Mais on ne le contemple pas comme on contemple un tableau. L'idée de contemplation disparaît complètement. Simplement prendre note que c'est un porte-bouteilles, ou que c'était un porte-bouteilles qui a changé de destination. »
Deux, voire trois « kantismes » anti-plastiques
Thierry De Duve : (Duchamp avec Kant) la maxime : « Fais n’importe quoi », nominalisme assumé.
Clément Greenberg : ou la critique rétinienne auto-réflexive de la peinture réduite à son médium et au pauvre vieil aplat. Même si Greenberg s’est un peu amendé à la fin de sa vie.
Le risque d’un jugement de goût kantien arbitraire en philosophie, par association libre qui ne s’arrime pas à la beauté libre : « Pense n’importe quoi ».
Alors que la peinture n’est ni « medium » ni « tableau ». Elle est un immense champ d’expérimentation visuel, sans doute le plus vaste.
L’art contemporain a toujours existé. Si l’on considère la phénoménologie de Roman Ingarden (et son epochè picturale) comme la plus appropriée et si l’on pense que Nicolas de Stael se reconnaissait en Descartes… : l’art contemporain est le mauvais génie de la peinture, du cogito pictural. L’art contemporain est donc un art autre dont les modes d’appréciation non plastiques se sont objectivées. Il faut le désaffilier de la peinture et de la sculpture. Il est l’esthétisation de tout ce qui reste extérieur à la peinture, et de tout ce qui n’intéresse pas le peintre (le non plastique bien délimité par Duchamp que nous avons vu plus haut par opposition à « l’esthético-plastique » que Duchamp voulait abolir).
Encore une fois la critique spectacliste, critique interne au Spectacle selon Guy Debord, est bien le principal ressort de l’art contemporain. Et cela fait image selon lui : « Le spectacle est le capital a un tel degré de concentration qu’il devient image ». Ou dispositif poétique en lieu et place de la peinture. Littérature visuelle, poésie objectivée et complice. Performatif d'objet.
La pseudo critique rentable ne vaut que si la reconnaissance par le marché permet d'esthétiser la critique interne.
dommage que Debord se soit noyé comme artiste lui-même dans le Spectacle de son auto-marchandisation, mais pouvait-il en être autrement, dès lors qu'il avait esthétisé sa critique, dès Potlatch et jusque dans La Société du spectacle ?
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
vrai moment du faux
LA DÉNONCIATION MARCHANDE DE LA MARCHANDISE ARTISTE
par sa célibataire même
Patlotch a écrit:une mise en scène spectaculaire qui n'est pas sans rappeler l'auto-destruction d'un Banksy en salle de vente accompagné de son discours... En quoi ce qu'il reste est-il encore une œuvre d'art et pas seulement une marchandise ? Artistes, faites votre job et fermez vos gueules, mais ne venez pas pleurnicher d'être des vendus de vous-mêmes. Pas de sitôt que les artistes verront leur statut social comme une contrainte extérieure à abolir...
"J'ai pété les plombs pour tous les artistes qui n'osent pas le faire" :
Élisa Tovati fait la lumière sur la vidéo qui agite les réseaux sociaux
Jérôme Vermelin LCI 13 juil.
Élisa Tovati fait la lumière sur la vidéo qui agite les réseaux sociaux
Jérôme Vermelin LCI 13 juil.
MISE AU POINT - C’est la vidéo virale que tout le monde commente sur les réseaux sociaux depuis 24 heures. Dans une interview accordée au "Parisien", Élisa Tovati révèle que son coup de sang dans un restaurant de la capitale est en réalité une mise en scène destinée à son nouveau clip. Mais que les images ont été mises en ligne à son insu.
Gros canular ou vrai coup de colère ? Depuis vendredi, les internautes s’interrogent sur la vidéo où l’on voit la comédienne et chanteuse Élisa Tovati saccager le Shirvan, un restaurant branché du VIIIe arrondissement de Paris, jeudi 11 juillet, suite à un différend avec des représentants de sa maison de disques.
"Je ne suis pas une glace Miko, je suis une artiste. Allez vous faire foutre avec votre musique de merde. Moi, j'ai donné ma vie pour la musique", s’emporte l’ancienne candidate de "Danse avec les stars" en apprenant que son label va donner sa nouvelle chanson à la Belge Angèle, plus jeune et plus populaire.
Je dénonce la brutalité avec laquelle les artistes sont parfois traités
Dans une interview accordée au Parisien ce samedi Élisa Tovati révèle que ce coup de sang, "c’est du cinéma". Elle tournait en réalité le clip d’un nouveau single intitulé "La Machine", extrait de l’album Le cœur est la locomotive des filles émotives. Le montage final est disponible depuis quelques heures, sur Youtube...
"Je dénonce la brutalité avec laquelle les artistes sont parfois traités. Comme des produits de consommation. En ce moment, quand tu fais de la chanson française ou de la variété, que tu as dépassé les 40 ans, surtout une femme, les médias, les réseaux sociaux et parfois les maisons de disques te font comprendre que tu as dépassé la date de péremption."
"Je connais d'excellentes chanteuses qui ont été remerciées du jour au lendemain", poursuit Élisa Tovati. "Je voulais que ce clip soit aussi violent que cette réalité, pour marquer les esprits. J'ai pété les plombs pour tous les artistes qui n'osent pas le faire."
La chanteuse explique par ailleurs qu’elle a tourné ce clip sans prévenir sa maison de disques. Et que c’est l’un des figurants qui a filmé l’extrait qui fait le buzz sur les réseaux sociaux. "Cette vidéo m'a été volée", déplore-t-elle. "Et j'avoue que l'ampleur que cela a pris me dépasse un peu et me bouleverse."
Invité- Invité
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
POUR SUPPRIMER LA CULTURE D'ÉTAT, IL FAUT SUPPRIMER L'ÉTAT,
ET POUR SUPPRIMER L'ŒUVRE MARCHANDISE, ABOLIR LE CAPITAL
Patlotch a écrit:pitoyable critique étatiste du libéralisme culturel alors que cette politique est précisément le fait de l'État dans une geste quasi monarchiste, et que son mécénat avec l'argent public n'a jamais soutenu de projets qui se distingueraient par leur qualité artistique du mécénat privé. Il en est de même dans le soutien des municipalités de gauche aux artistes, il n'y a qu'à voir les "sculptures" des artistes copains des camarades dans les municipalités communistes, autant de merdes que celles du « 1 % artistique » ou « 1 % culturel » sur les autoroutes concédées. Au 19e siècle, ce n'est pas dans les Salons officiels que s'est ré-inventée la peinture, et sans les grands marchands d'art, que seraient les avants-gardes ?
l'art ne se porterait pas plus mal si l'on supprimait le Ministère de la Culture, ce qui supposerait, au fond, de supprimer l'État, pour qui il n'est qu'une marchandise idéologique, la fabrique officielle des académismes successifs, Centre Pompidou en tête. Que veulent les artistes protestataires évoqués ci-dessous : des subventions ! Ils ne sont que des marchands d'eux-mêmes, comme disait de Salvador Dali/ Avida Dollars, Philippe Soupault
Soixante ans après Malraux, vers la privatisation de la culture
Cécile de Kervasdoué France Culture, 24/07/2019
Cécile de Kervasdoué France Culture, 24/07/2019
Le ministère de la Culture, rue de Valois, à Paris. Crédits : Olivier Boitet - Maxppp
Pour son 60e anniversaire, le ministère de la Culture est sous le feu de critiques virulentes qui lui reprochent son tournant libéral. Syndicat du spectacle, artistes, chercheurs dénoncent la mise à mort d'un ministère public de la culture au profit des industries culturelles et du mécénat privé.
Il y a dix ans, l'ancien ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon avait posé la question de l'existence de son ministère. Question posée avec encore plus de force aujourd'hui par les syndicats du secteur, des artistes, des militants et des chercheurs qui fustigent un ministère privé de moyens publics, des institutions culturelles vendues aux entreprises et aux fortunes privées et des "expériences culturelles" devenues "produits culturels".
On est aux antipodes de ce que prônait André Malraux notamment dans son discours de 1966 quand il a inauguré la maison de la culture d'Amiens. Il fustigeait les industries culturelles qu'il appelait les "usines à rêves". Parce que les usines de rêves ne sont pas là pour grandir les hommes, disait-il, elles sont là très simplement pour gagner de l’argent. Aujourd'hui, le ministère de la Culture n'est plus le garant de l'art et de la culture, il s'est vendu aux industries culturelles et au mécénat. L'anti-Malraux, c'est le Pass Culture.
Claude Patriat, politologue, professeur émérite de l'Université de Bourgogne
Ecoutez l'interview de Claude Patriat, spécialiste de la politique culturelle.
La culture doit être rentable
Ce glissement vers la productivité de la culture n'est pas nouveau. Catherine Tasca, la première, a fait rentrer les industries culturelles dans le giron du ministère de la culture. Nicolas Sarkozy ensuite avait exigé que le principe de la RGPP s'applique en premier à la culture (le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux).
C'était tuer le principe même de la culture tel qu'édicté par Pompidou ; c'est-à-dire qu'on donne de l'argent pour la culture sans se préoccuper de savoir si ça marche ou si ça ne marche pas, parce que ça ne marche pas à tous les coups ! On a une obligation de moyens, pas une obligation de résultats avec les finances publiques en matière de culture.
Claude Patriat, politologue, professeur émérite de l'Université de Bourgogne
Claude Patriat, politologue spécialiste de la culture. Le ministère de la culture d'aujourd'hui est aux antipodes de ce qu'avait voulu Malraux : il incarne l'échec absolu de la démocratisation culturelle.
Crédits : Cécile de Kervasdoué - Radio France
C'est ce qu'il expliquait notamment dans son ouvrage La Culture : un besoin d'Etat. Le ministère de la Culture a été créé pour faire survivre la culture cultivée et la culture populaire dans un environnement économique qui ne lui était pas favorable. Il ne devait pas s'occuper de culture de masse (qui est la culture de la satisfaction immédiate et de la consommation) mais de la culture cultivée c'est-à-dire celle qui fait appel au symbolique et qui est l'instrument du collectif.
Contrairement à l'industrie culturelle, incarnée aujourd'hui par la plupart des contenus diffusés sur internet, l'art et la culture ne se cantonnent pas aux plaisirs immédiats du sexe, de l'argent et de la mort. Le propre de l'art est de faire appel au symbolique qui seul peut nous sortir de notre condition. Or aujourd'hui, le pays est plongé dans une immense misère culturelle faite de jugements et de prises de positions sommaires et cet appauvrissement culturel, incarné par les réseaux sociaux, produit les gilets jaunes.
Claude Patriat, politologue, professeur émérite de l'Université de Bourgogne
Les dangers du mécénat
A la décentralisation culturelle s'est ajoutée la baisse continue des dotations publiques ; et ce n'est pas fini, comme en témoigne la lettre des professionnels du spectacle à Franck Riester, le ministre de la Culture, intitulée : 60 ans, l'âge de mourir ? Aujourd'hui, les institutions et les politiques culturelles sont gérées sans moyens supplémentaires par des collectivités territoriales obligées de se tourner vers des financements privés.
La loi Aillagon de 2003 offre de tels avantages aux entreprises (60 % de déduction fiscale pour les dons, contreparties et allègements fiscaux pour les fondations) que le mécénat s'est largement développé ; les fondations culturelles des grandes entreprises se sont multipliées. A tel point qu'un rapport de la Cour des comptes révélait en novembre 2018 que les dépenses publiques en la matière - dues à la défiscalisation du mécénat - coûte chaque année près d'un milliard d'euros à l'Etat. Mais sur 70 000 entreprises qui pratiquent le mécénat, une trentaine seulement (les plus grosses) bénéficie des trois quarts de ces allègements fiscaux.
Autre point gênant pour ce dispositif mécénat : le cas de la fondation LVMH qui appartient à Bernard Arnault, l'un des hommes les plus riches du monde, et dont la construction du musée a coûté 7 fois plus que prévu et a été supportée à 60% par de l'argent public. Pour lutter contre ce qu'il appelle un manque à gagner fiscal, le gouvernement prévoit donc de revoir les règles du mécénat et notamment la défiscalisation des dons qui passerait de 60 à 40%. La nouvelle loi est prévue à l'automne.
Ce sont des cas isolés. La grande majorité des actions de mécénat se passe très bien. Le rôle social de l'entreprise est aujourd'hui très bien installé. 9% des entreprises étaient mécènes en 2017 pour un budget dépassant 3 milliards et demi d'euros.
Admical, le portail du mécenat en France.
Philanthropie toxique, contreparties douteuses
L’exposition Louis Vuitton au Grand Palais à Paris en 2015. Crédits : Arnaud Castagné - Maxppp
Pourtant, de plus en plus d'affaires sortent qui mettent en doute le mécénat culturel et surtout ses contreparties. Dans le domaine de la culture, l'entreprise mécène fait un don d'intérêt général défiscalisé à 60% et peut prétendre à des contreparties à hauteur de 25% de son don. Ainsi, certains mécènes voient par exemple leur nom gravé en lettres d'or sur les murs de certains musées ou peuvent monter des expositions à la gloire de leur marque dans les locaux de ces musées. Surtout, avoir leur nom magnifié par une institution culturelle de renom est une manière très efficace de conquérir de nouveaux marchés ou de redorer son image.
En 2010, la firme Perenco avait organisé au musée du Quai Branly une exposition sur le Guatemala alors qu'elle était mise en cause pour l'exploitation controversée du pétrole dans ce pays. Au Grand Palais en 2015, LVMH organisait une exposition publicitaire sur Vuitton juste à côté de celle sérieuse et scientifique sur Picasso. Le public n'y comprenait plus rien.
Ces publi-expositions se multiplient dans les institutions culturelles publiques. A tel point que les visiteurs s'y laissent prendre parce qu'à aucun moment il n'est précisé, comme c’est le cas dans la presse, qu'il s'agit non d'une exposition scientifique mais bien d'une publicité. C'est la même chose avec la location de salles. Rien n'empêche de louer la salle d'un musée à un mécène mais si le musée fait la promotion des expositions qui s'y tiennent, cela s'appelle de la publicité déguisée. Et tout cela est parfaitement légal. Il est là le scandale.
Bernard Hasquenoph, bloggeur fondateur du Louvre pour tous.
En 2014, Bernard Hasquenoph avait révélé qu'un photographe amateur sud-coréen, nommé Ahaé, milliardaire poursuivi dans son pays pour corruption et notamment pour la mort de 300 adolescents dans un naufrage, aurait blanchi de l'argent via un mécénat de 2 millions et demi d'euros au Château de Versailles et de plus d'un million d'euros au Louvre. La contrepartie : des expositions de ses photos de piètre qualité dont les deux institutions, mondialement reconnues, faisaient largement la promotion. Le photographe a été retrouvé mort en 2014 et une instruction judiciaire est toujours en cours en France, la Corée du Sud demandant que les sommes versées aux institutions culturelles françaises soient récupérées.
Cela a montré combien les musées, les théâtres ou les opéras publics ne contrôlent absolument pas la provenance des fonds privés qu'ils reçoivent. C'est ce système-là qui est en train de craquer. On ne peut pas laisser la culture à l'argent du crime.
Mathis, porte parole de PAIN, le collectif qui s'oppose à la famille Sackler
Le 1er juillet, le collectif PAIN a manifesté devant le Louvre où, comme à la Portrait Gallery de Londres ou au Musée Guggenheim de New York, il demande que le nom de Sackler soit retiré de l'institution culturelle. Sackler est le nom de la famille milliardaire responsable de la crise des opioïdes, qui chaque année tue 45 000 personnes par overdose aux Etats-Unis. Une crise sanitaire similaire arrive en France, or suite à une don de 10 millions de francs en 1996, le Louvre avait baptisé son aile d'antiquités orientale du nom de Sackler.
Le 1er juillet au 2019 au Louvre, des militants de l’association PAIN manifestent pour que le musée débaptise l’aile Sackler. Crédits : Stéphane de Sakutin - AFP
La manifestation et ses retombées médiatiques semblent avoir poussé le directeur du Louvre à débaptiser en urgence l'aile Sackler provoquant un grand retentissement dans le monde.
Cela participe à un mouvement de la société civile qui n'accepte pas de voir la culture entachée par la philanthropie toxique. Récemment, aux États-Unis, huit artistes ont boycotté la Whitney Biennal d'art contemporain, retirant leurs œuvres pour protester contre un partenariat avec un vendeur d'armes. En France, le ministère de la Culture vient aussi de rembourser au groupe Lafarge, mis en examen dans le financement du terrorisme, le mécénat offert au musée de Cluny. De son côté, la mairie de Paris a refusé le partenariat de Total pour les JO de 2024. Chaque fois, c'est la peur de la mauvaise publicité (le fameux "name and shame", nommer pour faire honte) qui a été la plus forte.
Reste la question de fond énoncé par le directeur du Centre des monuments nationaux Philippe Bélaval :
Les gens ne veulent pas payer plus d'impôt pour la culture. Ils ne veulent pas non plus du mécénat culturel parce qu'ils lui reprochent ses contreparties. Alors qu'est ce qu'on fait ?
Patlotch a écrit:qu'est-ce qu'on fait ? Je ferais une réponse communisatrice : on laisse les artistes devenir des prolétaires comme les autres, jusqu'à ce qu'ils remettent en cause leur statut social comme contrainte extérieure
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Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
EST-CE BIEN LA QUESTION, DE L'ART ?
Patlotch a écrit:pourquoi interroger le "statut de l'artiste" plutôt que ce qu'est et fait une œuvre d'art ? celle de l'art comme rapport entre qui le produit et qui le regarde, l'écoute, en jouit, est touché, transformé... ? De ce qui est le sujet de l'art : l'artiste ou l'œuvre ? C'est très certainement, comme le pose la sociologue Nathalie Heinich, en relation avec la montée du récit personnel et de l'autofiction, de l'exhibition de soi jusqu'à la « starification », où il devient « licite pour un auteur d'exposer sa vie privée » et de faire sa propre promotion (exemple des Tulipes de Jeff Koons, "offertes" à la Ville de Paris)
il est tout de même dit que le mot artiste est "galvaudé", a glissé de sens : aujourd'hui, un footballeur, un grand cuisinier sont considérés comme des artistes, témoignant de l'ignorance de ce qui distingue l'œuvre d'art de l'exploit personnel quel qu'il soit. Il est souligné que ce n'est que vers 1450, à l'aube de la modernité, que des peintres et sculpteurs apposent leur signature sur leur œuvre, et que cela ne se généralise qu'au 18e siècle avec le système marchand. La signature devient en quelque sorte un copyright, sur le modèle marchand de la propriété et qui doit se vendre
ainsi a été créé le néologique d'artification, où il suffit de signer son produit pour lui conférer un statut d'œuvre d'art, renversant sa définition : c'est de l'art puisque c'est fait par un artiste
en résumé, est donc symptomatique cette question et qu'elle soit posée à une sociologue et une commissaire d'exposition plutôt que celle de l'art à des artistes, à un public, ou à des philosophes. Elle n'est certes pas illégitime, mais en elle-même entérine l'évacuation de l'art au profit de la figure sociale de l'artiste, et de ceux qu'il enrichit, en un mot de l'art comme marchandise (quitte à la dénoncer) au détriment de l'œuvre-sujet comme valeur (artistique et humaine)
la perspective de renversement de cette réalité capitaliste réside dans la formule de Marx dans l'Idéologie allemande : « Dans une société communiste, il n’y a pas de peintres, mais tout au plus des hommes qui entre autres choses, font aussi de la peinture », une idée centrale de ce sujet
si, un jour, la valeur économique est abolie, alors le problème de la propriété de l'œuvre d'art ne se posera plus, elle deviendra "immédiatement sociale". C'est en quelque sorte ce sur quoi j'attire l'attention en refusant de vendre mes œuvres, ainsi privées de valeur marchande et littéralement d'"exposition", ce qui en retour m'ôte dans cette société le statut d'artiste, mais parce que je le refuse
À quoi reconnaît-on un artiste ?
France Culture 13/09/2019
France Culture 13/09/2019
Comment devient-on un "artiste" ? Quelle image l'artiste donne-t-il à voir de lui-même ? À l'occasion de l'exposition "Le rêve d'être artiste" au Palais des Beaux-Arts de Lille, nous interrogeons les différentes facettes de la figure de l'artiste.
Le Désespéré (1843-1845)Crédits : Gustave Courbet
L'exposition "Le rêve d'être artiste" au Palais des Beaux-Arts de Lille interroge la manière dont s'est construite la figure de l'artiste à travers les arts. À cette occasion, nous recevons ce vendredi Nathalie Heinich, sociologue de l'art et directrice de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), et Bruno Girveau, directeur du Palais des Beaux-arts de Lille et commissaire général de l’exposition du 20 septembre 2019 au 6 janvier 2020.
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Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
DE LA GUITARE DE JAZZ
DU TEMPÉRAMENT ET DE LA NÉCESSAIRE SOLITUDE ARTISTE
suite à mon auto-bannissement du JazzGuitarForum*, j'ai écrit ceci à une amie
* vu l'impossibilité de se désinscrire et l'administration refusant de le faire, je l'ai contrainte à me bannir
je crois que ceux qui veulent s'exprimer comme artiste, peu importe leur "niveau", je parle de la position relativement au travail de l'œuvre, de la concentration à y porter, doivent se persuader d'une nécessaire solitude, non pas sociale ou affective, mais d'un certain retrait où la socialité ne perturbe pas l'isolement indispensable à la création
en y songeant, c'est peut-être ça que je n'ai pas trouvé dans le forum, personne qui me ressemble de ce point de vue, c'est-à-dire en fait personne n'exprimant, pour lui-même, cette nécessité. On la trouve pourtant chez de grands musiciens de jazz, malgré leur vie tumultueuse, et bien sûr chez les poètes, les peintres, écrivains... Tous en témoignent. Je me sens proche d'eux par le fait qu'ils ont écrit ou dit ce que j'ai toujours ressenti dans mes périodes les plus créatrices. Ne le prenez pas pour prétentieux, je parle de la position, pas de la qualité du produit, mais du caractère artiste
le paradoxe est que la participation à ce forum de guitare de jazz m'a éloigné de la guitare, du jazz, et du travail de création dans ce domaine. On peut raisonnablement penser que la plupart des participants, dont une poignée de bons guitaristes, professionnels ou non, sont dépourvus de ce tempérament propre aux artistes. Ce sont de plus ou moins bons gratteurs, comme il est de bons, médiocres ou mauvais interprètes et acteurs. On ne sent chez eux aucune urgence artistique, et pour tout dire aucun art vivant et personnel, obsédés qu'ils sont non de créer leur œuvre, mais de reproduire, cloner tel style, tel maître. Même dans le cas où ils y parviendraient "parfaitement", ils seraient l'équivalent des faussaires, dans la peinture
on ne saurait leur reprocher, bien sûr, mais la confusion règne parce qu'ils ne font pas cette distinction. Ils se sentent appartenir à la même "communauté", en vérité inexistante, que les Django Reinhardt, Charlie Christian, Jimmy raney, Wes Montgomery... Pat Metheny... En même temps, les professionnels se préoccupent davantage de management économique de leur musique que de qualité de leur œuvre, qu'ils déterminent en conséquence : plaire au public devient l'objectif premier, pour ne pas crever en prolo du jazz. Voir DE L'ART OU DU COCHON ?
corrolaire : s'ils étaient poussés par la nécessité de créer, et donc de la solitude dont je parle plus haut, ils ne fréquenteraient pas ce forum aussi assidûment, pour certains tous les jours depuis 10 ou 20 ans
c'est la première raison pour laquelle je l'ai quitté moins de deux mois après m'être inscrit, ne plus y perdre mon temps ni entretenir cette confusion
PS : publiant ceci dans Pour l'art, contre l'artiste, il y a une contradiction apparente. revoir le sens que je donne à ces mots, elle disparaît. Un artiste qui n'est pas entièrement à son œuvre n'en est pas un
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Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
du 3 mars, et débat chez dndf, extraits chronologiques dessous
il peut paraître étrange que "l'art et la culture" dessinent comme un frontière dans l'analyse du capitalisme même, mais plus étrange encore que s'y laissent prendre ceux supposés les plus attentifs à décrypter partout la lutte des classes, quand ils sautent sur la phraséologie gauchiste d'une auteure en vue s'exprimant au nom de "la lutte entre dominés et dominants". Et pourtant, ça tourne...
en laissant de côté la critique théorique de l'économie politique et me concentrant sur l'art, la musique, la poésie, la poétique... je faisais le pari d'y retrouver ces clivages au plus haut niveau de l'exigence contre le Capital. pari gagné
sur Tweeter, le texte de Virgine Despentes est plébiscité et retweeté par Mathilde Larrere ("ce texte est... une bombe"), Amandine Gay @OrpheoNegra, Edwy Plenel, Stéphane Guillon, Feiza Zerouela, et tout le petit gratin démocrate pas toujours radical de la tweetosphère, ceux-là même que les partisans de la communisation considèrent comme des "ennemis"
L'HOMME ET L'ARTISTE, AU FEU !
« Désormais on se lève et on se barre » V. Despentes
encore faut-il être entré.e, s'être assis.e, avoir pu, avoir voulu
3 mars« Désormais on se lève et on se barre » V. Despentes
encore faut-il être entré.e, s'être assis.e, avoir pu, avoir voulu
si je devais prendre parti dans la polémique autour des César et du prix attribué au film J'accuse de Polanski, je ne soutiendrais ni le texte de Virginie Despentes dans Libération, Césars : « Désormais on se lève et on se barre », ni celui de Jean-Paul Brighelli pour Causeur dans Le degré zéro de la littérature et du cinéma, Despentes et les César
"séparer l'homme de l'artiste" n'a effectivement pas grand sens, ou plutôt n'en a un que dans le contexte où l'œuvre, l'œuvre-sujet comme disait Meschonnic, est passée à la trappe, se voit attribuée un prix au double sens de celui de sa production et de sa distribution, donc la réduit à une marchandise ; et d'un prix de concours dans une compétition entre artistes autant qu'entre capitalistes de l'art-marchandise. Je laisse là de côté les fouille-merde de la critique qui cherchent les liens entre la vie de l'auteur et les événements de l'œuvre, roman, poème, film... car il y a bien évidemment un rapport complexe mais insécable entre l'homme et l'auteur, , et je ne serais pas loin d'affirmer que le roman moderne, la "littérature", sont un produit du capitalisme en tant qu'il a produit l'individu d'exception qu"est "l'artiste". Alors, pensez-vous tout ce "cinéma" (sic), et ses "auteurs-réalisateurs, acteurs"...
la puissance ou l'impuissance performatrice d'une œuvre d'art ne s'apprécie pas dans une compétition de type sportif ou la distribution des prix aux premiers de la classe, par la classe des assassins de l'art comme tel, artistes compris. Qu'ils brûlent tous ensemble dans leur enfer, celui du capital
Patlotch a écrit:04/03/2020 à 06:25 | #2
« Désormais on se lève et on se barre » Virginie Despentes
Encore faut-il être entré.e, s’être assis.e, avoir pu, avoir voulu. Un.e dissident.e, toujours et encore là, ne peut jamais partir, quitter, fuir… el.le ne peut que dénoncer son monde, qui l’a fait.e. J’apprécie le bémol de dndf : « même s’il nous manque, là, une bonne critique du monde du spectacle, de la création, des auteur.e.s… Mais là n’était pas le propos. » Un propos qui serait radical, selon moi, le voilà : (copie de mon post plus haut)
Anonyme a écrit:04/03/2020 à 14:46 | #3
Roboratif, et dans une langue politique à la portée du commun ( bien qu’avec ses limites stratégiques, déjà citées ). Tout est dit dans ce passage : “La différence ne se situe pas entre les hommes et les femmes, mais entre dominés et dominants, entre ceux qui entendent confisquer la narration et imposer leurs décisions et ceux qui vont se lever et se casser en gueulant.” oui, il faut gueuler contre celles et ceux qui entendent confisquer la narration ( et qui le font, comme la chose la plus naturelle du monde, la plus banale ), qui sont-ils-elles ? C’est là que commence la lutte, la vraie.
Patlotch a écrit:5 mars dans la nuit
Anonyme : « entre dominés et dominants, entre ceux qui entendent confisquer la narration et imposer leurs décisions et ceux qui vont se lever et se casser en gueulant.” [...] C’est là que commence la lutte, la vraie.»
ce serait nouveau, dans le milieu partant de la lutte des classes, et plus spécifiquement de l'exploitation capitaliste, et davantage un éloge de la fuite qu'un appel à la lutte là où elle se pose et s'impose, d'abord comme résistance, aux dominations, à l'exploitation
mais force est de constater que ce n'est pas ce que dit Despentes, ou si elle le dit, c'est au nom d'autres dont elle n'est pas - ceux et celles d'en-bas sur le plan justement de la parole, de la "narration". Car elle ne s'est pas "cassée", elle est entrée, ou reste depuis toujours, en dissidence, ce qui est tout à son honneur mais fait une différence : elle se casse à l'intérieur du 'Spectacle' et c'est sur sa scène qu'elle le fait savoir. Les "dominés" on ne les entend pas, et même moins qu'en pleine action des Gilets Jaunes
plusieurs l'ont relevé. Claude Askolovitch dans Slate.fr : "Virginie Despentes et la saleté des riches" 3 marsIl est une autre étrangeté chez Virginie Despentes, qui la sépare des révolutionnaires de nos enfances. Elle tient dans son titre, «Désormais on se lève et on se barre», et dans la démarche qu'elle célèbre : le retrait désormais iconique d'Adèle Haenel de la fête des César, quand Roman Polanski fut couronné.
Autrefois, on ne se barrait pas. On luttait, on s'asseyait, on séquestrait, on bousculait, le mandarin, le notable, le patron, on occupait le terrain. Beate Klarsfeld, qui était une badass avant que le mot ne soit inventé, giflait le chancelier allemand, l'ancien nazi Kiesinger. On avait les gestes graves et brutaux que la gravité des faits exigeait. C'était une époque où l'on payait de sa personne.
il y a tout de même quelque chose qui n'est pas acceptable, du point de vue du milieu radical partisan de l'autonomie et/ou de l'autoorganisation, dans le soutien à l'expression de vedettes de cette autonomie/autoorganisation, qu'ils soient des leaders politiques (Mélenchon, Ruffin, la candidate LFI à Paris... prétendent l'organiser), ou du "monde des arts et de la culture" comme ici. C'est déjà bien assez lourd et compliqué d'assumer cette petite contradiction en tant que comme forte voix du courant autonomiste ou communisationniste
comme par ailleurs il ne manque pas de monde pour se réjouir avec "nous", mais pas forcément pour les mêmes raisons, de cette sortie de Despentes, ceci bien au-delà de personnes partageant a minima cette analyse du capitalisme, je pense que l'exigence de débat ici commence à partir de cette réserve du chapeau : « même s’il nous manque, là, une bonne critique du monde du spectacle, de la création, des auteur.e.s…», et l'on pourrait surtout ajouter "du capital", comme préciser que le Spectacle selon Debord, c'était aussi le Capital, avec toutes les limites de sa critique réduite à celle de la marchandise, y compris de la marchandise culturelle et artistique, celle que vend Virginie Despentes comme lutte des dominé.e.s contre les dominants
Invité- Invité
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
suite postée chez dndf « Désormais on se lève et on se barre », cette nuit
LES MISÉRABLES DE LA CRITIQUE,
du cinéma comme du capital
ou la gestion "enragée" de l'art comme marchandise
LES MISÉRABLES DU CINÉMA
par Un collectif de régisseurs enragés, lundimatin#233
sans insister lourdement, car pas d'intérêt ici d'asséner ma vérité sans en débattre, il me semble que la véritable distinction, en matière d'art, est celle entre l'artiste-homme/femme et l'œuvre. Corollaire, c'est ce qui distingue une critique radicale, c'est-à-dire incluant voire partant de celle de l'économie politique de la culture et de "l'art", d'une critique réformiste, qui veut l'art et la culture dans un capitalisme propre, dont il veulent faire le plein contre le "vide politique du cinéma français"
force est de constater que les articles et réactions, même les plus critiques, se focalisent sur la distinction entre "l'homme et l'artiste", ce pont-aux-ânes de la "résistance-artiste"
c'est encore le cas, hier dans lundimatin#233, de LES MISÉRABLES DU CINÉMA par Un collectif de régisseurs enragés [sic, régisseur : Personne qui administre, qui gère (une propriété)]
ce collectif peut bien écrire : « Les temps sont donc obscurs pour ceux qui ont un désir de cinéma loin des sentiers balisés de l’économie et qui y voient encore un lieu de résistance et de politique », il n'y a pas dans le capitalisme de cinéma, d'art, ou de culture "loin de l'économie", tout simplement parce que l'art, en tant que produit par des artistes, EST une marchandise, et que c'est seulement ça qui lui permet d'exister, d'être reconnu, en tant qu'œuvre. Ce qui ne se vend pas ou n'est pas acheté, c'est-à-dire échangé, n'a par définition pas de valeur d'échange, pas de valeur marchande, et sa valeur, "humaine", "artistique"... est niée. C'est d'ailleurs pourquoi tout est focalisé sur la personne-artiste, elle doit être une vedette ou rien. Même Rimbaud fut et demeure vedestarisé, alors pensez donc, quand l'œuvre est reproductible* et reproduite en masse, de Polanski à Banksy, que l'artiste soit ou non un violeur n'y change rien
* "L'Œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique", de Walter Benjamin, est de 1935 !
il n'y a pas à en sortir, ou plutôt si, alors comment ? on ne sait pas, mais sûrement pas en l'ignorant
Invité- Invité
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
MISÈRE DE "L'ART ENGAGÉ"
ou
l'artiste en électeur
Mon art, mon engagement
France Culture, 1er août 2020
Un homme, une femme, deux artistes pour qui l'imaginaire, les larmes et le rire sont aussi des armes pour dire le monde.
Pierre Kroll a écrit:Au lieu d’un classique, « laissez la voiture au garage pour quelques minutes à pied » « baissez le chauffage » ou « passez-vous de shampoing » je préférerais dire « Votez bien ! », réfléchissez un peu à qui vous donnez une part de pouvoir de responsabilité... on est en démocratie représentative… il faut mandater des politiques qui prendront les décisions qu’il faut, qui parfois ne le font pas parce qu’ils ont peur que vous ne les ré-éliserez pas, etc...
Utilisez votre voix pour ceux qui ne parlent pas. Crédits : PeopleImages - Getty
Pionniers, avant-gardistes, alerteurs, historiquement les artistes ont souvent joué un rôle dans l’évolution de nos sociétés ; et sur le terrain de l’environnement, ils ne sont pas absents. Leur art rejoint alors leur engagement, et en citoyens impliqués, ils mettent à leur manière leur talent au service de la planète. Il en va ainsi de nos deux invités qui ont commencé très tôt à exposer leurs idées, et qui continuent aujourd’hui à prendre part au mouvement.
Avec Coline Serreau, cinéaste, metteur en scène, auteure, comédienne, clown-trapéziste, musicienne..., (de nombreuses casquettes…) son inspiration vient en partie de la nature, et elle nous livre quelques clés de compréhension dans son dernier livre « #colineserreau » paru chez Actes Sud ; avec nous aussi Pierre Kroll, dessinateur de presse (attitré du quotidien belge Le Soir, de quelques autres et de la RTBF) et humoriste, architecte de formation et licencié en sciences de l'environnement, il fait paraître aux éditions Les Arènes un beau livre avec nombre de ses dessins, intitulé « Des signes qui ne trompent pas ».
Et aujourd'hui, à mi-parcours, c’est Simon Roger qui entrera dans la danse pour le regard de la rédaction des pages Planète du journal Le Monde.
Dessin de Pierre Kroll Crédits : Pierre Kroll
Les phrases mantras de nos invités :Je crois qu’Egard Morin dit « Nous sommes tous des Terriens » J’y pense très souvent et surtout en ces temps de repli sur soi, nationalismes et autres ... Mais une phrase m’obsède, celle de Henri Queuille « Il n'est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout. » Elle est à la fois drôle, juste, dans un certain sens, et dramatique au fond ! Je la croyais peu connue et j'ai vu dans le n° du 1 spécial Chirac qu’elle était aimée de jacques Chirac. En la reprenant, je veux dire ici qu’on s’est trop longtemps dit ça et on n'a rien fait ou/et, avec ironie et humour noir, qu’effectivement si on ne fait rien ça va dans un sens s’arranger tout seul : on va disparaître !
Les conseils lectures de nos invités :
Pierre Kroll : « Les Racines du Ciel » de Romain Gary
Les conseils cinés de nos invités :Pierre Kroll a écrit:Il y a évidemment des incontournables que je ne citerai même pas et des documentaires nouveaux qui sortent tous les jours comme par exemple « The Last Male on Earth » mais je conseillerais, sorti il y a très peu de temps, le très beau film « Le garçon qui Dompta le Vent » de Chiwetel Ejiofor en anglais The Boy Who Harnessed the Wind, entièrement tourné au Malawi : écologie ET pauvreté
Les gestes écolos de nos invités :Pierre Kroll a écrit:Au lieu d’un classique, « laissez la voiture au garage pour quelques minutes à pied » « baissez le chauffage » ou « passez-vous de shampoing » je préférerais dire « Votez bien ! », réfléchissez un peu à qui vous donnez une part de pouvoir de responsabilité... on est en démocratie représentative… il faut mandater des politiques qui prendront les décisions qu’il faut, qui parfois ne le font pas parce qu’ils ont peur que vous ne les ré-éliserez pas, etc...
Les Liens en plus
Le site de Pierre Kroll
Le site Worldometers qui donne les statistiques mondiales en temps réel. Statistiques mondiales en direct sur la population, l'éducation, l'environnement, l'alimentation, l'énergie et la santé : "Pour un coup d'œil édifiant sur le monde"(Pierre Kroll)
Le Magazine GoodPlanet pour comprendre l’environnement et ses enjeux
Illustrations sonores
Musique : Raphaël - L'année la plus chaude de tous les temps
Extraits du documentaire « Solutions locales pour un désordre global » - Coline Serreau
Extrait de René Dumont dans Radioscopie du 02/02/1977
Reportage de France 3 : Environnement : qui sont les militants écologistes qui bloquent Paris ?, P-L. Monnier ; C. Cormery ; A. Etienne 10/10/2019
Invité- Invité
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
26 novembre
24 novembreen réaction à ce qui suit, Geoffroy de Lagasnerie @gdelagasnerie m'a bloqué sur Twitter. Il préfère plastronner sur les plateaux télé et sur le terrain idéologique de l'ennemi, en application de ceci :« J’assume le fait qu’il faut reproduire un certain nombre de censures dans l’espace public,
pour rétablir un espace où les opinions justes prennent le pouvoir sur les opinions injustes.»
je n'en démord pas, ce parrain de Mélenchon à la présidentielle de 2022 est tout sauf qualifié et armé, même intellectuellement en dehors de toute pratique, qu'il n'a pas, pour parler de l'art, dont il veut faire dépendre le contenu des rapports sociaux-politiques, en quoi le rapprocher de Jdanov est tout sauf une insulte. C'est une totale ignorance des débats sur le "réalisme socialiste" en milieu révolutionnaire depuis les années 30, très en retrait des positions d'Aragon sur le sujet dès 1968 : le plus stalinien n'est pas celui qu'on pense. En définitive, sa position revient à dicter aux artistes ce qu'ils devraient faire d'un point de vue révolutionnaire, et ceci dans le contexte capitaliste où c'est impossible, alors que dans un contexte révolutionnaire ce n'est pas même souhaitable : on ne va pas recommencer !
UNE IMPOSTURE CRITIQUE DE L'ART
le nouveau bréviaire du gauchisme esthétique
L’art et son heure de peine : Geoffroy de Lagasnerie (L’art impossible)le nouveau bréviaire du gauchisme esthétique
l'art, en temps que création d'une œuvre-sujet (Meschonnic) est évidemment toujours possible, à ne pas confondre avec la posture sociale de l'artiste, ce que fait allègrement le philosophe chouchou de l'extrême-gauche à la lecture de cet article. Je n'ai vu nulle part que cet intellectuel distributeur de leçons révolutionnaires connaîtrait quoi que ce soit à ce que sont l'art et la création artistique, vaguement mise dans le panier intellectuel de la culture
nous voilà ramené au niveau du gauchisme artistique des années 68, càd, in fine, pas très loin du réalisme socialiste avec Djanov
il serait sans doute possible, à travers ce dernier ouvrage, de lire les dernières prises de position de Lagasnerie comme une forme d'idéalisme ultragauchiste, au demeurant étonnamment relayé et apprécié dans des milieux politiques des plus réformistes, comme supplément d'âme "radical". Cela ne donne bien sûr pas raison à tous ses détracteurs d'en face, cette réciprocité faisant partie du problème
Invité- Invité
Re: POUR L'ART, CONTRE L'ARTISTE
retour à la phrase en exergue au début du sujet, avec une autre qui le traverse
« Dans une société communiste, il n’y aura plus de peintres,
mais tout au plus des gens qui, entre autres choses, feront de la peinture »
Karl Marx, Manuscrits de 1844
« La poésie doit être faite par tous. Non par un. »
Lautréamont, Poésies II, 1870
mais tout au plus des gens qui, entre autres choses, feront de la peinture »
Karl Marx, Manuscrits de 1844
« La poésie doit être faite par tous. Non par un. »
Lautréamont, Poésies II, 1870
on relira l'analyse d'Isabelle Garo Marx, théoricien de l’art ?, à laquelle à peu de choses près je souscrisIsabelle Garo a écrit:Ainsi, la question de l’art semble-t-elle ainsi constituer un passage à la limite qui permet à Marx à la fois de tester et d’enraciner concrètement la perspective d’une émancipation du travail et du travailleur sans verser dans l’utopie. Considérée sous cet angle, la question de l’art, pour demeurer discrète, n’est nullement secondaire, si l’on s’avise qu’elle permet à Marx de corroborer sa définition du communisme sous l’angle du « libre développement de chacun » comme « condition du libre développement de tous », et l’affirmation que « l’histoire sociale des hommes n’est jamais que l’histoire de leur développement individuel ».
je me pose toutefois une question. Étant donné ce que suppose la création artistique à partir d'un certain niveau, je me demande si la situation envisagée par Marx serait de nature à rendre possible l'apparition de génies artistiques tels qu'en a produit l'histoire de l'humanité
je ne parle pas ici de professionnalisme ou non, et quand je parle de métier ce n'est pas de profession mais de travail, d'auto-apprentissage, de temps, de concentration, de relative libération de contraintes sociales et matérielles
je ne connais dans aucun domaine (la musique, la peinture, l'écriture...) de grand artiste qui n'ait été un bourreau de travail. Plus et mieux de travail que les autres dans un double sens quantitatif et qualitatif
mon expérience est que si l'on veut réellement atteindre et dépasser ses propres limites, il faut se consacrer entièrement à la création au point de ne plus faire que ça, et que je progresse plus vite si je me concentre sur ce qui peut me faire dépasser mes limites, mais c'est le plus difficile, car il faut les repérer et trouver les moyens de leur dépassement
alors, « faire de la peinture entre autres choses », c'est bien joli, mais Marx lui-même, à quoi s'est-il consacré d'autre que son œuvre, pour autant qu'elle soit comparable à une œuvre d'art ?
quant à la phrase de Lautréamont dont j'ai longtemps fait un manifeste poétique : « La poésie doit être faite par tous. Non par un. », il me semble que plus qu'à une démocratisation de la création artistique, elle renvoie au procédé de collages et détournements dont il fait usage dans son œuvre : le tous est ce dont s'inspire et s'empare le un. Cela me semble compatible avec la compréhension d'Aragon en 1967 dans Lautréamont et nous, comme avec l'analyse de Vanessa Theodoropoulou, La poésie par tous et pour tous, où il est question de Ducasse, des surréalistes et de Debord. Toujours est-il que quoiqu'ils en aient dit, aucun de ceux-là n'a dépassé les limites de la création artistique individuelle, ou de l'individu collectif qu'est le groupe, dans les cadavres exquis par exemple. S'il n'y a pas de Lautréamont, pas d'œuvre de Lautréamont
voici ce que j'en disais en juillet 2020, dans par tous, NON, par unpeut-être prendrai-je ici le contre-pied de ce que j'ai longtemps soutenu avec la phrase culte de Lautréamont, intégrée à mes peintures-transferts et irriguant mes positions en théorie communiste. En tout cas, en tant que poète, c'est très indirectement que j'écris, et seul, de la poésie faite par tous qui, parfois, s'y expriment en disant "je", un autre que moi, donc
Patlotch, autoportrait
peinture à l'œil, 1993NON
féminin NONNE
celle qui se refuse,
en principe, à l'homme,
et à la femme incluse
au couvent recluse
mais religieuse
ment
FoSoBo, 18 juillet 2020, 11:50, sonku
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