PATLOTCH


Rejoignez le forum, c’est rapide et facile

PATLOTCH
Derniers sujets
» VII. 8 STRINGS GUITAR f#beadgbe, CELLO POSITION & PIN, Resonance Box
RACISME et ANTIRACISME EmptyJeu 15 Sep - 13:22 par Troguble

» BIEN CREUSÉ, VIEUX TOP ! Histoires d'une mare
RACISME et ANTIRACISME EmptySam 20 Aoû - 14:29 par Troguble

» IRONÈMES, poésie minimaliste, depuis 2018
RACISME et ANTIRACISME EmptyMar 19 Oct - 13:03 par Troguble

» MATIÈRES À PENSER
RACISME et ANTIRACISME EmptyLun 11 Oct - 13:30 par Troguble

» CRITIQUE DE L'UTOPIE, DES UTOPIES, communistes ou non
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 10 Oct - 12:38 par Troguble

» I 2. TECHNIQUES et MUSIQUES pour guitares 6, 7 et 8 cordes, IMPRO etc.
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 10 Oct - 7:52 par Troguble

» ET MAINTENANT, LA POLITIQUE RESTRUCTURÉE EN MARCHE
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 10 Oct - 7:08 par Troguble

» PETITES HISTWEETOIRES IMPRÉVISÉES
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 10 Oct - 6:29 par Troguble

» HOMONÈMES, du même au pas pareil
RACISME et ANTIRACISME EmptySam 9 Oct - 11:41 par Troguble

» LA PAROLE EST À LA DÉFONCE
RACISME et ANTIRACISME EmptyMer 6 Oct - 19:14 par Troguble

» KARL MARX : BONNES FEUILLES... BONNES LECTURES ?
RACISME et ANTIRACISME EmptyMar 5 Oct - 12:24 par Troguble

» IV. COMBINATOIRE et PERMUTATIONS (tous instruments)
RACISME et ANTIRACISME EmptyMar 5 Oct - 11:22 par Troguble

» CLOWNS et CLONES des ARRIÈRE- et AVANT-GARDES
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 16:10 par Troguble

» VI. À LA RECHERCHE DU SON PERDU, ingrédients
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 9:48 par Troguble

» CAMATTE ET MOI
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 8:00 par Troguble

» III. LA BASSE et LES BASSES À LA GUITARE 8 CORDES
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 7:18 par Troguble

» L'ACHRONIQUE À CÔTÉ
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 6:54 par Troguble

» LA CRISE QUI VIENT
RACISME et ANTIRACISME EmptyDim 3 Oct - 6:08 par Troguble

» MUSIQUE et RAPPORTS SOCIAUX
RACISME et ANTIRACISME EmptyMer 29 Sep - 13:05 par Troguble

» PETITE PHILOSOPHIE PAR LA GUITARE à l'usage de toutes générations, classes, races, sexes...
RACISME et ANTIRACISME EmptyLun 27 Sep - 11:06 par Troguble

Mai 2024
LunMarMerJeuVenSamDim
  12345
6789101112
13141516171819
20212223242526
2728293031  

Calendrier Calendrier

Le Deal du moment :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à ...
Voir le deal

RACISME et ANTIRACISME

Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Dim 14 Juin - 10:53

pour le début sur ce forum, je renvoie au sujet
dessous le point de vue d'Achille Mbembe

POURQUOI BLACK ET PAS BEUR ?
parce qu'ils font moins peur aux Français
devant l'événement franco-mondial de la lutte réveillée à la fois contre le racisme et les violences policières, je m'interroge sur ce qui a pu permettre au Comité Traoré de prendre la tête du mouvement français, au succès sans proportion avec les rassemblements initiés ces dernières années par les "décoloniaux", le PIR, le CRAN et Amal Bentounsi avec le collectif Urgence notre police assassine

j'avance une hypothèse à risque : en France le racisme anti-Noirs est moins fort que le racisme anti-Arabes, et c'est donc paradoxalement ce qui a permis, dans le contexte mondial créé par le meurtre de George Floyd et Black Lives Matter aux États-Unis, de changer les figures porteuses de l'antiracisme français. Les "Noir.e.s" ne portent pas le soupçon d'islamisme collé à tous les Arabes ou Musulmans, ni celui de communautarisme du fait d'une relative meilleure intégration politique, via les Outre-Mers davantage que la diaspora africaine surtout d'immigration récente. Ils ne portent pas aux yeux des Français une claire identification à une "religion", moins encore à la plus "anti-occidentale", l'Islam

c'est pourquoi le pouvoir et les identitaires français au sens large, des fachos aux souverainistes de droite auront plus de mal à leur coller les critiques adressées aux "décoloniaux" (Camp "interdit aux Blancs", etc.)

le Comité Traoré est aussi plus représentatif et porteur des réalités sociales des banlieues, que le PIR, Parti des indigènes d'Houria Bouteldja, des intellectuels universitaires peu implantés, ou que le FUIQP, Front uni des immigrations et des quartiers populaires, groupe politique d'héritage trotskiste à l'anti-impérialisme vieillissant malgré des analyses pertinentes de son leader, le sociologue Saïd Bouamama

bref, ceux-là n'avaient pas la bonne tête, ni dedans ni de face, pour que ça marche, et les temps ont changé, d'autres questions se sont greffées auxquelles la jeunesse française est plus sensible et entre lesquelles elle ne voit pas de contradictions de principe...
du 13 juin, modifié
ET SOUDAIN "ISSUS DE" CHERCHE ISSUE
les manifestations "Traoré" contre le racisme et les violences policières
on dirait qu'il se passe quelque chose d'important, en France, qui couvait depuis 2005, écrasé par l'Idéologie française transpolitique de l'extrême-droite à l'ultragauche en passant par tous les centres commerciaux des idéologies unies sous le signe des Lumières, celles de Voltaire qui posa les bases du racisme scientifique

avec l'Affaire Traoré en poupe, c'eût pu être une autre, l'Idéologie française s'est mise en rang de bataille, de la flicaille d'État systémiquement raciste au Président Macron sur les pas de Manuel Valls et Gilles Clavreuil contre "les discours racisés" (sic)

Macron a écrit:“le monde universitaire a été coupable. Il a encouragé l’ethnicisation de la question sociale en pensant que c’était un bon filon. Or, le débouché ne peut être que sécessionniste. Cela revient à casser la République en deux”.

la République française n'est pas la Démocratie américaine, fondée sur la distinction raciale dans une économie esclavagiste, mais c'est en son nom que la France s'engagea dans l'aventure coloniale dès le début du 19e siècle pour n'en sortir qu'à grand peine dans la deuxième moitié du 20e, en sortir mal puisqu'en continuant le néo-colonialisme de la Françafrique, et en instaurant sur le territoire national un racisme systémique d'État et de police contre les populations "issues de..."

on attend la suite et à défaut d'une issue en France, une issue mondiale !

Les 54 pays africains demandent un débat sur le racisme à l'ONU
et dénoncent « les violations actuelles des droits de l'homme d'inspiration raciale, le racisme systémique et la brutalité policière »

il fut un temps où je disais les choses en poésie mieux que je ne le ferais aujourd'hui

SORTIS DES SOUTES

rap à deux voix et percussions
(voix 1, voix 2, ensemble, ou distribution libre)

TEMPS BASCULÉS, 10 janvier 2012


Des siècles des poussières
dix-sept ans sur les routes
aux présents des hiers
quand il sortait des soutes
une lumière
noire à percer l'avenir

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Vous les jetez d'un geste
aux enchères
aux marchés


Vous les laissez sans reste
et plus chers
épluchés

À pourrir dans vos cages
où mûrissent leurs rages
de vos temps indigestes


On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Ils en ont dans le chou
ils déjouent les tabous
de vos livres d'histoire
Ils ont eu les déboires
versé toutes les larmes
ils ont toutes mémoires
ils auront toutes armes


On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Ils sont partout ils vont par milles
ils sont parmi le nombre
Ils sont sortis de l'ombre
ils n'ont pas le nombril

à la place du cœur ni leur nom brille
place de la concorde
Ils coupent court
au virage à la corde


au cou rage Un langage
leur manque les mots
pas le souffle
ils sont le vent levé

Volent haut comme au
devant
des dangers comme
oh !
des anges contre vous
Démons !

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Forçats des esclavages
des soutes soulevés
ils sont nos vents en poupe

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Et surgissent vos peurs
qu'ils ne soient pas qu'on gère
managés en voleur

qu'ils ne soient pas pépères
à voile et à vapeur

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Voilà votre terreur
être rien qu'ils soient tout
Et voici votre fin
qu'ils ne soient plus valeurs

On dit ces temps de doute
poussière sur la route

Qu'ils soient pis, contre vous
pis qu'ils soient tous contre vos sous
pis qu'ils vous nettoient vous vos dessus vos dessous vos sourires
Telle est votre panique qu'ils vous niquent

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Ils vous déborderont
sabordant vos encombres
Ils vous débonderont
démontant vos démondes

Ils vous déborderont
espèces de cons combles
Ils vous débonderont
espèces de cons combles

Ils vous débonderont
espèces de cons combles

On dit ces temps de doute
poussière sur la route


Arrow

Achille Mbembe
... pendant très longtemps, la France a pu se donner l’illusion selon laquelle et l’esclavage et la colonisation, c’étaient des choses qui concernaient un ailleurs, l’outre-mer, des régions, des contrées lointaines […] et qui ne se passaient pas en métropole. Or, la nouveauté aujourd’hui, c’est qu’en cette période post-esclavagiste, postcoloniale, des minorités raciales sont présentes désormais à l’intérieur du territoire métropolitain. Par conséquent, les risques d’une américanisation de la situation française sont réels.

« Cette violence n’a pas besoin de raison, de justification, elle est fondamentalement gratuite et fondamentalement impunie », soutient l'historien Achille Mbembe. L’élargissement du cercle de la réprobation et du deuil suite à la mort tragique de George Floyd participe d’une conscience planétaire en évolution. Il faut, selon lui, arrimer l'antiracisme à l'action écologiste.
L'historien et philosophe d’origine camerounaise vit actuellement en Afrique du Sud, où il est chercheur à l’Université de Witwatersrand, à Johannesburg. Il a également vécu pendant une quinzaine d’années aux États-Unis, agissant comme enseignant à la Duke University, en Caroline du Nord.

Théoricien du post-colonialisme, Achille Mbembe s’intéresse à l'histoire et à la politique africaines ainsi qu’aux sciences sociales. Il a à son actif de nombreuses publications, dont la dernière, Brutalisme.


RACISME et ANTIRACISME 9782348057496

Dans cette résurgence des démons raciaux aux États-Unis, l'intellectuel pointe l’impunité des brutalités infligées aux boucs émissaires et constate que ces derniers ne trouvent plus protection dans la justice et la police.

Mettant en garde contre la militarisation croissante de la police partout dans le monde, le philosophe se félicite de voir se diversifier les rangs des protestations contre les violences policières. De cette conscience planétaire devrait naître, pense-t-il, une convergence salutaire.
RACISME et ANTIRACISME Minneapolis-manifestation-george-floyd-2
Des policiers antiémeute forment une ligne devant des manifestants qui affrontent les policiers
devant le commissariat de police où travaillaient les quatre agents impliqués dans la mort de George Floyd

PHOTO : RADIO-CANADA / JEAN-FRANÇOIS BÉLANGER
On a l’impression que l’histoire se répète aux États-Unis. Comment se fait-il qu'une telle violence policière puisse se reproduire ainsi ?

Les États-Unis, à mon sens, constituent une espèce de démocratie sacrificielle, qui a besoin constamment de se nourrir du sang de ses boucs émissaires. Depuis leur fondation, les Noirs ont été ces boucs émissaires, c’est-à-dire une catégorie de la population fondamentalement frappée d’ignominie.

Ce qui veut dire que la violence qui leur est faite apparaît toujours comme un accident, alors qu’au fond elle est consubstantielle à la structure même de cette société.

Cette violence n’a pas besoin de raison, de justification, elle est fondamentalement gratuite et fondamentalement impunie. C’est tout cela qui explique la répétition des tragédies du genre qu’on a vu sur les trottoirs de Minneapolis.

La mort de George Floyd a eu un retentissement particulier aux États-Unis et ailleurs aussi dans le monde. Qu’est-ce qui explique cet écho presque planétaire ?

À mon avis, ça s’explique par le fait que c’est un acte sacrificiel qui a eu lieu alors que sévit un peu partout dans le monde la pandémie du coronavirus. Je ne pense pas qu’on aurait assisté à la sorte de mobilisation en cours à peu près partout sur la planète en ce moment si le coronavirus n’avait pas amplifié la sorte de menaces auxquelles nous faisons tous face.

Soudain, beaucoup se sont rendu compte du fait qu’ils n’étaient pas à l’abri de cette sorte de traitement qui, pendant longtemps, a été réservé uniquement aux Noirs dans les systèmes formellement esclavagistes. Ni la loi ni l’État national ne constituent désormais des remparts contre cette sorte de menace.

Cette universalisation tendancielle de la condition nègre, la prise de conscience du fait que ce qui n'arrivait qu'aux nègres risque de nous arriver ou nous est déjà arrivé, je crois que c’est ce qui explique la colère planétaire à laquelle on assiste.

Ce n’est pas uniquement une colère, c’est aussi un deuil. En privant de respiration cet individu, George Floyd, c’est toute l’humanité qui perd quelque chose. On le voit très bien dans les soulèvements qui ont cours ici et là aux États-Unis, mais aussi en Europe et ailleurs.

RACISME et ANTIRACISME Manifestants-minneapolis-george-floyd
Des manifestants demandent que cesse la « suprématie blanche » après la mort de George Floyd. PHOTO : RADIO-CANADA / JEAN-FRANÇOIS BÉLANGER

Vous parlez de prise de conscience. Est-elle porteuse d’espoir de changement, d’autant plus que les manifestations actuelles sont diversifiées, les Blancs y prennent part aussi ?

Je crois que c’est important, cette irruption de la présence blanche dans des tragédies qui, pendant très longtemps, n’ont concerné que les Noirs tout seuls. Il faut y voir un certain nombre d’éléments d’espérance. Mais tout dépendra bien entendu des capacités d’organisation à la fois locales, mais surtout transnationales, parce que le système auquel on a à faire face est un système global, transnational. On ne peut pas riposter à ce système uniquement par des mobilisations locales.

Je crois que cela participe également de la montée progressive de ce qu’on pourrait appeler une conscience planétaire. Cette conscience planétaire, on la voit émerger à la faveur des préoccupations d’ordre écologique, de la prise de conscience du fait que c’est notre planète qui est menacée, et dont le défi est de faire converger la lutte contre le racisme, la lutte contre la racisation de certaines catégories de la population, et la lutte pour la survie de l’humanité par le biais d’un nouveau rapport entre l’humanité et le reste du vivant.

RACISME et ANTIRACISME Manifestation-boston-george-floyd-photo-pancarte
« Pas de justice, pas de paix », lit-on sur une pancarte brandie lors d'une manifestation contre la brutalité policière à Boston. PHOTO : ASSOCIATED PRESS / STEVEN SENNE

La répétition de ces événements crée une vive tension dans les rapports entre, d’un côté, les communautés noires et, de l’autre, les services de police et la justice. Le lien de confiance s’en trouve fragilisé…

Ce n’est pas seulement les communautés noires. Depuis à peu près 20 ans, la majorité de la population de la planète vit sous un régime d’exception ou un autre. Cela veut dire que quand on fait la comptabilité de tous les États du monde aujourd’hui, on se rend compte que la majorité vit sous un état d’urgence.

L’état d’urgence qui a été rythmé par deux événements. Un : évidemment ce qui s’est passé en 2001, le désir de sécurité, les lois sécuritaires qui ont été adoptées partout dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Deux : l’état d’urgence qui est devenu sanitaire depuis l’apparition de la COVID-19.

Un état d’urgence qui s’est traduit, en partie, par le déplacement d’un certain nombre de pouvoirs du côté de la police et par la militarisation croissante de la police, pas seulement aux États-Unis, mais partout. Je veux dire que, les démocraties y comprises, la plupart des États au monde aujourd’hui sont des États policiers, en tout cas des États où les dispositifs policiers occupent une place absolument centrale, où les dynamiques policières ont abouti à l’émergence d’un antagonisme tout à fait aigu entre, d’un côté, les libertés individuelles et publiques des populations et, d’un autre, la sécurité de l’État.

Les gens se révoltent justement parce qu’on dirait qu’il n’y a pas plus de remparts. La loi n’est plus un rempart, la justice non plus. Il n’y a plus de refuge, il n’y a plus de protection. Ces risques auxquels ils sont exposés atteignent maintenant y compris les fonctions élémentaires du corps, telles que la respiration.

Donc le phénomène policier, aujourd’hui, prend des formes tout à fait létales. Vous parlez des communautés racisées. Je suis tout à fait certain que dans la plupart de ces communautés, le policier est perçu soit comme un voyou ou alors comme un assassin potentiel.

Lorsque le rapport entre les citoyens et la police atteint ce point, atteint un point où on ne perçoit la police désormais que sous l’angle de l’éborgnement, d’une main arrachée lors d’une manifestation, de tonnes de gaz lacrymogène déversées sur des manifestants pacifiques, le déploiement d’une violence généralement impunie, lorsqu’on en arrive à ce point, évidemment, il y a une rupture presque irréversible sur laquelle il faudrait se pencher.

Je pense que le futur de notre démocratie dépendra, en partie, des rapports qui seront institués entre les populations et la police.

Ce racisme et cette violence envers les Noirs ne sont pas l’apanage des États-Unis, comme semblent le démonter les manifestations à travers le monde, comme en France.


À mon avis, il y a quatre grandes matrices du racisme moderne : les Caraïbes, les États-Unis, le Brésil et l’Afrique du Sud. Évidemment, derrière ces quatre matrices du racisme moderne, il y a la figure de l’Europe. Vous citez le cas de la France : pendant très longtemps, la France a pu se donner l’illusion selon laquelle et l’esclavage et la colonisation, c’étaient des choses qui concernaient un ailleurs, l’outre-mer, des régions, des contrées lointaines […] et qui ne se passaient pas en métropole.

Or, la nouveauté aujourd’hui, c’est qu’en cette période post-esclavagiste, postcoloniale, des minorités raciales sont présentes désormais à l’intérieur du territoire métropolitain. Par conséquent, les risques d’une américanisation de la situation française sont réels.

On le voit à travers des choses telles que le profilage racial, la brutalité policière, la multiplication des décès de personnes racisées aux mains de la police, la représentation disproportionnée des minorités racisées dans les lieux d’incarcération, les discriminations ordinaires qui font que, petit à petit, une espèce de nanoracisme, de racisme au quotidien, fait désormais partie de la structure même des rapports sociaux. Donc, oui, le racisme anti-noir n’est pas une exclusivité des États-Unis.

RACISME et ANTIRACISME Manifestation-montreal-racisme-george-floyd-2
Sur cette vue plongeante d'une rue de Montréal on voit une marée humaine brandissant des pancartes.
Des milliers de personnes ont manifesté le 7 juin 2020 à Montréal pour protester contre le racisme et la violence policière.
PHOTO : THE CANADIAN PRESS / GRAHAM HUGHES

Qu’en est-il de la situation en Afrique du Sud, où vous vivez ? Les Noirs, majoritaires, sont désormais au pouvoir, mais il semble que la violence policière à leur égard n’a pas disparu pour autant. Pourquoi ?

Cette violence est fondamentalement économique et ceci est l’héritage de siècles d’exploitation fondée sur l’extraction des richesses minières et le bradage de la force de travail des Noirs. Ces inégalités, elles sont inscrites non pas dans la Constitution, mais dans les rapports économiques : logement, nutrition, transport, éducation, santé, etc.

Mais il reste une violence de type raciste qui frappe encore les citoyens noirs sud-africains, surtout pauvres, qui sont brutalisés effectivement par la police. Nous avons, au cours du dernier mois en particulier, au moins deux cas de tuerie de pauvres noirs sud-africains par une police qui est elle aussi noire, [sous] un gouvernement qui est dirigé par des Noirs.

Deuxième observation : une partie de l’avilissement qui est typique du fonctionnement raciste, une partie de l’abjection et de l’avilissement autrefois portés contre les Noirs sud-africains se voit aujourd’hui reportée sur des émigrés venus d’autres pays africains, en quête soit de refuge ou de sécurité économique. Les émigrés en Afrique du Sud, notamment ceux en provenance d’autres pays africains, sont, je dirais, les plus exposés à la brutalité policière aujourd’hui, dans un contexte paradoxal de libération du joug racial.

Vous écrivez sur votre page Facebook que « le racisme anti-noir prospère sur le dos d’une Afrique à genoux et qui ploie sous le joug combiné de prédateurs internes et externes ». Pourriez-vous être plus explicite ?

Ce que je voulais dire, c’est que tant que l’Afrique ne sera pas debout, tant qu’elle est à genoux, tant qu’elle sera l’objet d’une exploitation intensive, unilatérale de ses ressources de tout genre, tous les Noirs, tous les descendants de l’Afrique, quel que soit le lieu où ils se trouvent, payeront le prix de cet asservissement.

Le racisme anti-noir ou anti-nègre dans le monde commencera à reculer le jour où l’Afrique deviendra sa force propre, une puissance parmi les autres nations. Donc, on a beau être Noir américain, Noir français, Noir britannique, on a beau rien à voir avec l’Afrique, l’Afrique hante tous ces gens partout où ils se trouvent.

Vous suggérez aussi une espèce de droit de retour en Afrique pour les descendants africains. Croyez-vous à un retour massif au bercail des Afro-Américains, par exemple ? Le projet est-il faisable ?


Je ne pense pas que ce soit souhaitable déjà, mais je pense qu’il nous faut projeter notre imagination pour rêver quand même d’un lieu sur cette Terre, qui est toute petite au fond, où les gens d’origine africaine n’auraient pas à se justifier, n’auraient pas constamment à expliquer pourquoi ils sont là, d’où ils viennent, quand est-ce qu’ils vont repartir, etc.

Il nous faut imaginer un endroit sur la surface de la Terre où il fait bon d’être Africain, où il fait bon d’être Noir, parce qu’on n’a rien à justifier en tant qu’habitant, parmi d’autres, de cette planète. Pour le moment, un tel endroit ne peut être que l’Afrique.

Il faudrait donc commencer par donner à tous ceux qui, Noirs ou non, veulent lier leur sort à l’Afrique la possibilité de s’implanter ici, de vivre ici sereinement, sans être menacés de perdre un morceau, d’avoir un genou sur la nuque, étouffé par un policier blanc. C’est une proposition tout à fait utopique, mais je pense qu’on a besoin d’utopie en ces temps totalement dystopiques.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mar 16 Juin - 19:15

l'actualité contraint d'y revenir. Je déplace ce sujet dans les principaux de la rubrique
Stuart Hall fut, après WEB Dubois et en même temps que CLR James, et Raymond Williams pour les Cultural Studies référencées à Marx, un jalon important de mon parcours théorique, dont j'ai rendu compte dans les années 2013-2016 (ces pages ont été englouties). Un livre est traduit en français dont Maxime Cervulle @Maxxxpod signale ce compte-rendu
« La race n’est pas qu’une articulation sémantique,
elle a une existence historique, sociale
et des conséquences matérielles bien réelles
. »


RACISME et ANTIRACISME EY8tCQ2VcAEkbMR?format=jpg&name=900x900

Stuart Hall, Race, ethnicité, nation. Le triangle fatal,
Paris, Amsterdam Editions, 2019, 203 p., traduit de l'anglais par Jérôme Vidal,
préface de Henry Louis Gates Jr., édition de Kobena Mercer, ISBN : 978-2-35480-200-4.
lecture par Tristan Boursier
1
Il n’est plus question aujourd’hui de remettre en cause l’inexistence biologique de la race chez l’humain. Pourtant, comment expliquer la prégnance des comportements qui se réfèrent à la race que cela soit pour dénoncer la perpétuation des blackfaces ou l’utilisation du terme « contrôle au faciès » pour parler de profilage racial dans le contexte français ? Même si nous savons que la race n’est qu’une construction politique, comment se fait-il que nous ayons toujours l’impression que nos yeux ne nous trompent pas quand nous remarquons la couleur d’un corps, que nous la comparons et catégorisons, consciemment ou non ? Nous aimerions ne plus utiliser le mot « race », mais il est si prégnant pour comprendre nos sociétés actuelles qu’on ne peut s’en passer. Dans cet ouvrage qui réunit pour la première fois la traduction française de trois conférences prononcées initialement en 1994 par Stuart Hall, sociologue britannique, ancien directeur du Centre for Contemporary Cultural Studies de Birmingham et professeur à l’Open University de Londres, répond à cette tension en cherchant à appréhender comment fonctionnent les significations sociales de la race, de l’ethnie et de la nation.

2
Ces trois conférences approfondissent un article écrit en 1980 par Hall1, en ajoutant une dimension relationnelle entre la race, la nation et l’ethnie. Hall systématise une des idées majeures de son œuvre : la race, l’ethnie et la nation sont des signifiants flottants, dont le sens n’est jamais complètement fixé ; celui-ci dépend des contextes spatio-temporels, socio-économiques et politiques. Le travail présenté dans ces conférences émane ainsi d’une analyse discursive et généalogique de la compréhension de la race, de l’ethnicité et de la nation en fonction des contextes socio-historiques.

3
Dans la première conférence, Hall dialogue avec W.E.B. Du Bois sur les ambiguïtés de la race. Pour Hall, la déconnexion qu’a subi la race de tout fondement biologique, puis sa déconstruction socio-historique, ne suffisent pas pour se débarrasser du sens qu’a porté ce mot durant des siècles. Le racisme est un langage porteur de sens et la race est au sein de ce langage un signifiant glissant, désarticulé du signifié auquel il était à l’origine associé. Pour autant, ce signifiant a des effets réels et une existence socio-historique, rendue possible par une volonté de puissance (p. 42). L’acte de resignification des populations afro-caribéenne et asiatique est au cœur des conflits politiques lorsqu’elles subvertissent le sens du mot « race », ou l’utilisent dans des sens positifs et détournés, comme lorsque les expressions « niger » ou « brother » sont utilisées par des Afro-Américains pour s’interpeller tout en signifiant qu’ils sont membres d’une même communauté qui à l’origine n’a pas été choisie. Hall met en avant la situation critique des États-nations engagés dans le processus de mondialisation. Reprenant Butler, Hall réaffirme que le « naturel a toujours une histoire »2 et que la race ne peut être comprise ni comme un système auto-référencé, détaché de toute considération matérielle, ni comme un système avec pour seule dimension la dimension biologique ou matérielle. Elle résulte d’une perception déjà sociale et politique des corps.

4
Dans la seconde conférence, Hall discute de la proposition d’Anthony Appiah de se débarrasser de la race au profit de l’ethnicité3. Cette solution est problématique pour Hall, car l’ethnie est utilisée pour désigner une appartenance à un groupe en fonction d’une langue, de coutumes, d’une religion et de croyances. Cette appartenance est construite autour de deux modalités. La première repose sur les « formes fermées », constituées par un fort sentiment d’appartenance ancré dans la géographie et les liens du sang et de parenté. Cette modalité est aussi essentialisante que la race. La seconde modalité semble plus acceptable, car elle repose sur des « formes ouvertes » d’appartenance : l’identification collective y est sujette à des circonstances historiques variables. Dans ces formes, les frontières de l’identité sont perméables. Ainsi, le retour de l’utilisation du mot « ethnicité » dans les démocraties libérales témoigne d’un retour en force des identités particulières, propres aux « formes fermées » de l’appartenance, qui étaient pourtant présentées comme vouées à la disparition au profit d’un universalisme civique et rationnel, propre aux « formes ouvertes ».

5
Dans la troisième conférence, Hall déstabilise un peu plus le terme d’ethnicité en le confrontant à ses contradictions. Pour cela, il le lie avec le concept de nation. Les deux concepts entretiennent une relation ambivalente et complexe. L’accélération des migrations mondiales vient déstabiliser les imaginaires nationaux, mais n’affaiblit pas pour autant la puissance des fantasmes nationaux et la prégnance des identités particulières. La nation tient son succès de sa capacité à traduire « les confusions et les échecs de la contingence historique en quelque chose qui devient intelligible » (p. 137). Hall décrit l’importance du récit qui est pour lui un médium indispensable dans la construction des États-nations modernes, car il permet de convaincre des personnes disparates de se reconnaître dans une identité partagée. L’identité a besoin de coordonnées spatiales et temporelles afin de créer un sentiment d’appartenance. Quant à la culture, l’étude de l’histoire caribéenne permet à Hall de la voir comme une articulation d’éléments culturels divers, hiérarchisés dans des cadres fermés, imposés par le pouvoir colonial. Cette articulation et les coordonnées des identités qui y sont rattachées sont mises à mal par la mondialisation, qui déstabilise les cadres fermés imposés par le pouvoir colonial. La centralité de la nation s’affaiblit au profit de la diaspora comprise « comme un réseau polycentrique de trajectoires transculturelles donnant à la culture noire son dynamisme transnational » (p. 180). Malgré ses analyses pessimistes, Hall ouvre sur une espérance : la promesse de créer d’autres façons de gérer la différence par des processus d’hybridation qui conduisent à une transculturation.

6
La traduction française de ces trois conférences, prononcées il y a près de 25 ans, renforce l’assise francophone du concept d’intersectionnalité de Kimberlé Crenshaw, qui reste toujours l’objet d’une percée prudente en France, notamment par la prévalence des approches matérialistes fondées sur la classe. Cependant, les arguments de Hall pourront séduire les plus matérialistes : ils rappellent que la race n’est pas qu’une articulation sémantique, qu’elle a une existence historique, sociale et des conséquences matérielles bien réelles. Il est également important de noter que l’ouvrage s’adresse à un public déjà familier avec les analyses discursives. Enfin, le propos de l’auteur est parfois sibyllin lorsque ses analyses abstraites réfèrent à des contextes qui ne sont pas toujours clairement identifiés, une limite importante si l’on considère l’objectif de Hall de rendre compte des variations socio-historiques de la signification sociale de la race.

NOTES
1 Hall Stuart, « Race, Articulation and Societies Structured in Dominance », in Unesco (dir.), Sociological theories: race and colonialism, Paris, Unesco, 1980, p. 305-345.

2 Butler Judith, Ces corps qui comptent : de la matérialité et des limites discursives du sexe, Paris, Amsterdam, 2018, p. 26.

3 Appiah Anthony Kwame, « The Uncompleted Argument: Du Bois and the Illusion of Race », in Henry Louis Jr. Gates, Anthony Kwame Appiah (dir.), « Race », Writing and Difference, Chicago, University of Chicago Press, 1985, p. 36.
4ème de couverture
L’identité s’est imposée comme une question politique centrale de notre époque, mais les débats qui s’y rapportent demeurent le plus souvent posés dans des termes caricaturaux. Pour les clarifier, Stuart Hall étudie ici la construction discursive de trois de ses formes principales : la race, l’ethnicité et la nation. Car si chacune de ces formes est le produit de longs processus de sédimentation historique, leur caractère construit ne doit pas nous conduire à croire qu’il serait possible de se débarrasser de ces catégories comme on dissipe une illusion. Au contraire, il est impératif d’appréhender les ressorts de leur persistance, et notamment leur inscription dans le fonctionnement du langage, afin de comprendre comment elles configurent notre quotidien et le cours de l’histoire, ainsi que d’envisager les modalités de leurs usages susceptibles de nourrir une pratique émancipatrice.

Dans un contexte où la mondialisation et les migrations tendent à scinder l’identité de son lieu concret d’origine, et alors que le racisme prolifère sur fond de déni de sa genèse coloniale, Stuart Hall expose de manière vive et concise les enjeux contemporains d’une approche politique de la différence, tout en proposant une introduction éclairante au champ des cultural studies.

RACISME et ANTIRACISME 9782354801564_1_75
2017
À l'heure où se développent en France les premiers cursus d'études culturelles inspirés des cultural studies anglophones et où les politiques de l'identité et des représentations suscitent un intérêt croissant, la publication de ce recueil de quatorze essais classiques du sociologue britannique Stuart Hall constitue un détour nécessaire par les origines multiples et complexes de ce champ de réflexion. Intellectuel de renom international, Stuart Hall nous livre ici une généalogie critique des cultural studies, de leurs fondements théoriques marxistes et gramsciens à leur redéfinition des notions de « culture » et de « populaire », en passant par leur résistance aux disciplines classiques. Mettant en relief les préoccupations théoriques et politiques majeures des études culturelles, il interroge le concept d'« identité » et ses déclinaisons (ethnicité, race, classe, genre, sexualité) et développe une théorie qui situe la culture au coeur même du processus de construction identitaire. Qu'il analyse la formation des cultures diasporiques, les politiques noires britanniques, les situations postcoloniales ou le concept de « multiculturalisme », Hall éclaire d'une lumière singulière nombre d'enjeux centraux de la scène politique internationale contemporaine.
RACISME et ANTIRACISME 9782354801939_1_75
2019
Stuart Hall, sociologue britannique et figure centrale du champ des culturales studies, a profondément reconfiguré les façons d'appréhender le rapport entre culture, identité et capitalisme. Il nous invite dans ce recueil à réfléchir aux modes d'identification et à la construction de la différence - en particulier raciale - dans le contexte de la mondialisation et des diasporas. Le dialogue critique qu'il établit entre les œuvres d'Antonio Gramsci, de Jacques Derrida et de Paul Gilroy, mais aussi ses réflexions autour du cinéma et de la culture visuelle, mettent au jour l'irréductible hybridité des identités contemporaines.

Sommaire
1. Les moi assiégés. 2. Le local et le global : mondialisation et ethnicité. 3. Anciennes et nouvelles identités, anciennes et nouvelles ethnicités. 4. Diasporas, ou les logiques de la traduction culturelle. 5. La « race » : un signifiant flottant. 6. Race, articulation et sociétés structurées « à dominante ». 7. La pertinence de Gramsci pour l'étude de la race et de l'ethnicité. 8. La modernité et ses autres : trois « moments » dans l'histoire d'après-guerre des arts de la diaspora noire. 9. Le cinéma européen au bord de la crise de nerf. 10. Race et cinéma : entretien avec Paul Gilroy et Lizbeth Goodman.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mer 17 Juin - 16:34

désolé, ça va un peu vite, beaucoup de lecture... C'est avec grand plaisir que je retrouve Paul Gilroy, avec en tête ses échanges passionnants avec Stuart Hall, et ici encore, à propos de Raymond Williams. Plaisir redoublé, Paul Gilroy, auteur de L'Atlantique noir: modernité et double conscience, 2003, est aussi un grand connaisseur de la guitare de jazz, et guitariste lui-même, d'où la photo...

Ruth Wilson Gilmore (née le 2 avril 1950) est une abolitionniste de la prison et enseignante dans les prisons. Elle est directrice du Center for Place, Culture, and Politics et professeure de géographie en sciences de la Terre et de l’environnement à la City University de New York. [5] Elle a été créditée de "plus ou moins seule" inventant l’étude de la géographie carcérale. Elle a reçu le Lifetime Achievement Award 2020 de l’American Association of Géographes.
RACISME et ANTIRACISME Paulgilroy56v2lr RACISME et ANTIRACISME 846_5936-crop

Ruth Wilson Gilmore in conversation with Paul Gilroy (2020)
This conversation was recorded on 7th June 2020 – Soundcloud here


RACISME et ANTIRACISME 9781642594140-52cdd6d760387a8f9f10a58e5603996e  RACISME et ANTIRACISME 819F4kxU7aL

(see also: Ruth Wilson Gilmore, Makes the Case for Abolition and Prisons and Class Warfare and Is Prison Necessary?)
Paul Gilroy: Well hello, I’m Paul Gilroy, I’m the Director of the Sarah Parker Remond Centre for the study of Racism and Racialisation at University College, and today I’m going to be talking to Ruth Wilson Gilmore who is Professor of Earth and Environmental Sciences and Director of the Center for Place, Culture and Politics at the CUNY Graduate Center in New York. Ruthie is a co-founder of the California Prison Moratorium Project and perhaps most importantly of all, of critical resistance, and she’s the author of the prize-winning book that will be very familiar to you, Golden Gulag: Prisons, Surplus, Crisis, and Opposition in Globalizing California. And Ruthie and I have been collaborating, editing, bringing together Stuart Hall’s writings on race which will be published – well I hope soon, given the situation we’re in. Maybe you should correct anything that I haven’t said about you Ruthie that you want to have said, and I want to make a point about Stuart – Stuart’s work.

Ruth Wilson Gilmore: No, that introduction’s lovely, let’s leave it exactly as it is.

Paul: Good, well, what I wanted to say was I’ve been really struck in the last few days, I try not to spend time on social media, but one of the things that’s very striking to me about the way these two crises – three crises – have come together amongst a large formation of activist communities all over the world, is that people really seem to want to read. And they’re circulating booklists and PDFs and links to different kinds of material and I felt very touched by that desire; firstly, I suppose as an indictment of the educations that they’ve had but also as a sense… I mean I fear that this mobilisation may not become a movement, I want it to be a movement maybe you think it a movement already I don’t really know. But I wonder where that desire for reading, that desire for information, that desire for knowledge, the desire for wisdom, even where this hunger for better information, for better concepts, better perspectives, you know, what that says about the moment we’re in right now.

Ruth: That’s a great question Paul, thank you for having me as part of your Centre and participating in this discussion. Very happy to do it. I have been thinking about the same questions that you just raised and thinking back along my own intellectual and political development from 35 years ago, and thinking how then a lot of us who had been raised in movement work who had been extremely experienced in organising had found ourselves at an impasse and tried to settle down and hunker down and do some reading while continuing our work so that our work could become better. And I feel like I’m recognising a similar kind of impulse now although much broader and it probably seems broader to me because the social media that exists now certainly didn’t exist then. What we tried to do in the late-eighties early-nineties was listen as closely as we could to what we could read in people’s work – especially but not exclusively the work of Stuart Hall, but also you and Hazel Carby and many other people – to try to hear in the arguments that people made and the kinds of cases that writers put forward how their understanding of the social and political and economic dimensions of struggle at that difficult time could inform what we thought we were doing and how we can talk across time and space in order to strengthen our efforts. So I wonder if that’s what’s going on now – part of it is an indictment of the educational system, I think that’s true, but also they’re coming across these things somehow which means that somebody’s learning about it some way. And also, maybe part has to do with the enforced stillness that a lot of people have experienced because of Covid. People have had to slow down somewhat – not everyone, but many people had to slow down – spend time thinking, spend time at home, spend time doing things sort of different from the daily madness of ordinary life and perhaps that too has added to an interest and hunger for an expectation of reading and learning that could list the activities people are involved in in order to build into a movement.

Paul: Well that’s very interesting; I’m going to push back a little bit. I want that to be true and I’m not saying it isn’t because I just don’t know. But I also wonder about, I mean I think that’s true absolutely of some folk, people who haven’t been, you know, whose experience of the last few months has not really been dominated by going out to work. But we also really know that one of the amazing elements of the disproportionate risk and vulnerability experienced by African American peoples and other peoples of colour elsewhere, certainly in this country this is really evident, is something that has to be addressed through not this alone but has to be addressed through the idea that these are people who don’t have the chance not to go out of the house; that they are still in a way on the tempo of work because they don’t really have any choice except to go on working and when we look at where they work and the work they do, you know the mystery of their vulnerability is less mysterious. I know that for hundreds of years racial scientists have been yearning for the body to divulge it’s secret racial differences and they’ve cut and experimented and investigated and surveyed the body and yet the body hasn’t really revealed that particular truth and I would be very very surprised now if it was about to do so. So the question of you know who’s vulnerable, how they’re vulnerable, where work and particular kinds of work fit into that vulnerability, is interesting too, although of course I don’t follow the American situation terribly closely but I do know that enormous numbers of people in your country have become unemployed, very very rapidly, and that that too is a factor in that sort of volatile situation that we find ourselves in right now.

Ruth: Oh, that’s absolutely true and I don’t think that what you have just said necessarily speaks against the rather modest point I thought I was making about people reading and learning. But it is absolutely the case – or and it is absolutely the case – that the distribution of vulnerability to premature death in the United States, the distribution of unemployment and under employment in the United States and the specificity of state violence in the United States in response to it have all come together. They’ve come together so strongly that I actually think, one, some people can’t not see any more what they could not see earlier. But also to go back to the question of why are people studying or reading or saying they’re going to read, I think that for some people trying to put all of these things together in a way not that makes better sense but that finally demystifies the situation in which we’ve been struggling under neo-liberalism for decades might be a motivating factor as well.

Paul: Absolutely right. I don’t disagree at all I’m just, things are moving so quickly that’s the other thing, I mean I know you know in as much as you’ve ever been trained in anything, I think of you as a geography person because you taught geography for many years, you invested in the idea of black geographies and other kind of theoretical and political debates that are, well actually, were once maybe on the edge of geography but are now absolutely central to the life of geography a discipline. So I’m curious about the political geography of this mobilisation and in the same way maybe that Covid itself has been a planetary phenomenon; there are real signs that this movement – this mobilisation rather –  is taking off and resonating and speaking to the experience of inequality and injustice and powerlessness in every corner of the planet. How do you feel about that, what do we have to do to keep up with that possibility?

Ruth: I’m actually surprised and mostly inspired by how widespread the response to Covid on the one hand, to the murder of George Floyd on the other and all of the things in between have been. And one thing that interests me in particular is how the expectations of a kind of even distribution of vulnerability under Covid have of course not been borne out and some of us could have said all along, well no, it’s not going to be that way. And yet at the same time in the early days in March and April a lot of people predicted who worldwide was vulnerable to Covid death based on what was happening in the United States especially to black people, and that hasn’t been true either. People would say things like ‘oh Africa is a ticking time bomb’, phrases that just make my blood boil, but people on the left would say things like that, ‘obviously if black people in the United States are vulnerable to premature death that means the black people on the planet are’. So what’s so interesting to me now is that there is a certain kind of flowering as it were of consciousness about black vulnerability and anti-black racism, but it’s not required that all black people have the same experience for that understanding to unfold which is a great thing.

Paul: Yeah it is, and I think here we’ve had it underlined for us in the way that the demographic differences, the age structure of African descended populations – I mean we’re already dealing in a category there which needs a lot more elaborating and unpacking – and Caribbean heritage populations have shown quite different levels of risk in relation to Covid death. And maybe although there are many interests and many forces alive in the world that want to maintain the integrity of the concept of black as a political category, it’s taking a little bit of a – I would say it’s been dented little bit by this, if we’re going to follow what the data tells us, and that’s an if actually at the moment when we don’t have enough data to really speak with the kind of authority and clarity that’s going to be required when we when we look back on this and it’s passed – when we do that the categories, the habits, that we have acquired for thinking about race politics will have to be amended to take what this Covid crisis is telling us about the nature of our connectedness and our shared being in the world. I don’t know if you’ve come across the things that Achille Mbembe has been writing from South Africa in the last few weeks, but he has been talking a lot about what he calls ‘the Universal Right to Breathe’, and I was very struck by that, I haven’t had a chance to discuss it with him yet at length but I think this whole question of a more universalistic orientation – can I even say that I don’t even know if that’s the right word – I suppose I would want to say not universalistic because that sense of big, a common – a common vulnerability, a common sense of humanity. I mean maybe some of the things that are going on in this mobilisation, some of the things we’re learning from Covid, and here’s my utopian hat going over my head, maybe they speak to the possibility of a different future for the human than the one that we feared is coming towards us. I mean, am I going too far?

Ruth: Oh I hope not, I hope you’re not going too far and in fact one thing I’ve been thinking about a lot lately is how there’s a bit of a divergence these last few weeks between what you just described – a different future for the human – as against a path that worries me very much which is one that is in the recapitulating a certain kind of apartheid thinking in the name of undoing the effects of apartheid in the world scale. And by that I mean the tendency that’s got me worried is the one in which people are insisting that only certain demographics of people are authorised to speak about  – speak from or speak against – certain kinds of horrors, and other people have already existing assignable jobs based on their demographic – let’s call it a caste system  – that they’re supposed to do, so white people are supposed to fix white supremacy and so on and so forth. That path, which is actually a pretty strong path, doesn’t excite me. I’m 70 years old, I’m done with it, I’ve been done with it a very long time. The path however which some of the young Black Lives Matter people named 5 years ago in that year of uprising in the United States, after the death of Mike Brown and Freddie Gray and so forth, the one in which they said quite simply ‘when black lives matter everybody lives better’ –  that’s the path that is of interest to me. So, I for one would like very much, I endorse completely, reinvigorating the notion of universal; I don’t know what to call it, if the word universal is the problem that people stumble over.

Paul: Wow. I mean that’s so interesting that you’d put it like that because when you were speaking, I was thinking about Du Bois and about Du Bois’s sense of double consciousness and the resolution, the dialectical antagonism between being a negro and being an American. And I was thinking I haven’t seen his ghost yet today, but when I was watching just before I began this call with you, I was watching the video coming from phones in Bristol as the mob –  the motley crew – the tide of young people of all kinds tore down the statue of the slave trader Edward Colston, rolled it through the streets of the city, and dumped it into the waters of the harbour from where his slave ships had set sail a little while ago speaking geologically. So I was very moved by that and I know that one thing you and I share is that we’ve given a lot of our lifetimes to struggling to bring about a more democratic distribution of premature deaths in our countries amongst other things that we could list: a different sense of justice, a different sense of citizenship, a different opportunity to belong, to signify belonging, a different demand for recognition as part of the life of a particular polity, all of these things. So when you spoke a moment ago I began to think well maybe it’s not just universality or a universalistic way of thinking, it’s also a different – and this is an awful word, I choke on it so often when it comes out of my mouth – a different conception of democracy, actually, that’s also at stake here and one that hasn’t yet found its institutional form, has not yet found it’s kind of political vectors. I mean there again you know maybe it’s just watching those scenes from Bristol that affected me, though I mean these things are going to become harder to avoid and if we think of this Covid crisis and the way it’s combined with the murder of George Floyd and the political responses to this as a kind of rehearsal for the forms of political action and mobilisation that will inevitably emerge with climate change as it intensifies its hold on our societies, on our economies –  maybe those things that we thought was so far out of reach will move not only move closer but move closer at great speed actually, so fast maybe that we will have to jump out of the way.

Ruth: You’ve made me think of a couple of things, let me see if I can piece them together. One is thinking from, with, through Du Bois and double consciousness. I’ve thought a lot over the years about the astonishing gift double consciousness is; the ability to be alien to oneself is a good thing not a bad thing, to be cherished rather than mourned. And I actually think, I imagine, I project, that Du Bois felt the same way whatever it was he wrote a hundred and some odd years ago. And in that sense – that sense of being alien to oneself – one already understands that the fundamental unit of society is already two at least, not one, so two as in double consciousness, but that means it has to go out beyond that individual, whether the individual’s a person or a group. And therefore there is the possibility and the intensity of being able to as you said rehearse the future, rehearse the social order coming into being, as against recite the complaints or the demands for that other path, the one that I don’t want to take anymore, is I think fundamental to where we’re at now. I think that what people are doing in the streets now is rehearsing all kinds of things, some of which are going to be really quite miserable in where they end, but they’re rehearsing things like the possibility of retaking the streets as public space and then thinking about what does that mean – what does public mean if not some ability to continually do and do again what we are demanding in the short run we need to be able to do for ourselves. So that’s one thing. Another has to do with what you raised also and that is the question of how the entire livingness of this planet is so imperilled. And if we’re talking about redistributing the distribution of premature death that means it has to be really deeply articulated with the planet’s entire life in all of its forms, and the essential thing water that makes it possible for us to be water beings on the water planet.

Paul: Yeah absolutely, I wonder a lot about that planetarity and about what that means and about where the divisions between the over developed parts of the planet and the developmentally arrested parts of the planet are also becoming more porous, breaking down, achieving new spatial and social expressions and where the crisis around Covid, the crisis around state violence and the articulation where it feeds that. And again I don’t know, I don’t have enough in front of me to be able to see it clearly but I remember in the last sort of ten years or so conversations with people who are based in in Africa mostly, based in the global south also, and people who were saying ‘well your societies are evolving towards ours in some way’ and that the linear assumptions of social theory and political theory over the last century or so have got to be abandoned to accommodate that possibility. Now I know in the States that’s a complicated thing for me to say, I’m not trying to offend anybody in saying this, but you know I lived in the United States of America long enough to know there was no public health, and to visit parts of the country where you know life was like to life in a what we used to call a third world situation. So I’m wondering about that sense of progress, I’m wondering about that sort of linear pathway and what detours and loops and new roads are going to be forced upon this mobilisation becoming a movement by the pressures of the next crisis which will come, which has to come quicker and mesh with the effects of the things we’re dealing with today.

Ruth: Well, you raise so many things that, well I’ll just talk. One has to do with what Stuart Hall called them ‘global maldistribution of symbolic and material resources’ – I think that was in a talk he gave in the mid-nineties somewhere. And that global maldistribution of symbolic and material resources is of course as true if not truer today than when Stuart wrote those words some decades ago. And that maldistribution is as you suggest not congealed within the borders of nation states; so, the United States has enormous and vast poverty, and enormous and vast vulnerability because as you mentioned there is no public health service in the United States. In the rural part of the United States, the non-urban part of the United States, the district hospitals – most of which were established during the last great deep economic crisis which was the Great Depression of the 1930s – those rural all hospitals have crumbled. They’ve either been abandoned completely, or they’ve been transformed into prisons – that’s what happened to the rural hospitals. Indeed for a while in many parts of rural America, local elites, city or village planners and county executives look to prisons to try to bring back some of the resources that might spread around to vulnerable communities – not only in the form of jobs at the prisons but also an emergency room that would be available for non-prison related residents to have access to. These things give a pretty extensive view in the rural context what is also true in the United States and the urban context, which is to say the deepening inequality – that’s the hot word of the last decade – the deepening inequality in rural areas is completely concentrated, neighbourhood by neighbourhood, grouping by grouping, job category by job category. So to go back to what we were talking about earlier, most of the people in the United States, designated essential workers who have not been able to stay home during Covid, are also people with no health coverage who live in neighbourhoods that are far from where they were, which means they have a long and expensive commute and therefore are vulnerable to Covid and every other kind of malady going to and from work, who if they become unemployed either don’t receive any kind of insurance – which is to say temporary wage supplements or wage replacement – or get nothing at all. So all of this unevenness we’ve been talking about completely characterises the entire landscape of the United States – a country that is about to produce the world’s first trillionaire in Jeff Bezos, whose company that produces the trillions, employs the very kinds of vulnerable workers that I was talking about who live in the communities that I was talking about, whose warehouses are in the rural communities that I was talking about, who link the world. But I want to say one other thing about this so that my comments are not too crudely associated with problems and opportunities based in the United States and that is to say that all of the connectivity that makes the inequality in the United States work well enough depends on extractive forces and damaging practices throughout the rest of the planet. So that for example, for us to have this conversation and to record on our phones and for Amazon to work requires extractive economies in the Democratic Republic of the Congo to move forward or the kinds of things that Achille was talking about in the universal right to breathe means that right down the road from where he’s talking certain kinds of extractive practices have to happen. All of this connects us and therefore underlying that connection is again the possibility for these global uprisings to articulate into movements or at least chunks of movement I think; but only if this awareness, so consciousness, about what makes it possible for us to talk electronically or ship long distance becomes central to our discussion.

Paul: Well I mean it’s very interesting to hear you make that forceful argument. One of things I wanted to raise with you because of your activism and your leadership role alongside the other things you do really, you began to kind of get to that area just a moment ago and that’s really about what abolitionism in its current manifestation can teach us about the way these crises are connected to one another and how to act against them. I suppose I’m thinking that, I know it’s corny to say things have been joining up but they’re also falling apart, that things are becoming more connected but also somehow more separated and I’m thinking about locality and the local nature – the unevenness of those sort of local struggles. If you were to look at the data map of Covid vulnerability in our city here in London, it pretty much follows the same patterns that you would derive from looking at maps of socio-economic indications of inequality, so that sense of a deepening inequality is absolutely fundamental to the way this crisis is being lived out. And our government have shown themselves to be complete – not just callous and cruel – but completely kind of indifferent to or maybe let’s be generous to them – completely bereft really of any understanding of how ordinary people who work for a living actually live their lives and the scale on which their lives are lived, the intensity on which their lives are lived, their habits, the rhythm, the tempo of work and travel and exploitation. So, I’m wondering about locality, I’m thinking about the local and what an abolitionist perspective has to say about precisely those local things because you talked a lot about a moment ago in an interesting way about what’s happened to those local communities. And my sense of my own very limited exposure to the Deep South of the United States is really that political structures of segregation are essentially intact but that now if you’re in a white county your fate is likely to be one thing and if you’re in a black county your fate is something else. So there’s a layer of people who administer the political life of the black county who perhaps wouldn’t have been there in an earlier time but who are certainly there now and making decisions and choices about all kinds of things really and one wonders also – maybe this is not, this isn’t, I’m not speaking about those areas when I raise this question, it’s adjacent, it’s not the same point – one wonders too about, it’s not only black celebrities that wear ‘Make America Great Again’ hats, do you know what I mean? There are layers – look our government, our cabinet, the centre of our government is quote unquote ‘more diverse’ than any other cabinet government in history. So, in a sense some of the expectations we have about what race will do for us are not being borne out by this geometry of power. Someone was circulating something they’d seen on social media of some very high up – I think African American General in the Air Force or something – who was presenting himself as a victim of American apartheid and sharing his injuries in a public way on social media. I mean that doesn’t surprise me that he’s had those injuries and it doesn’t surprise me that given the opportunity to share that sense of victimhood he’ll take that opportunity – the victim is a mainstream figure in our culture and people are victimised, people really really are victimised. So I don’t have a problem with that but I do wonder about the limits of that as a politics really and about the vulnerability of this sort of declarative political culture, this affective political culture, to a kind of – what would it be – a sort of managerialism, which is the latest tool to remove what St. Clair Drake used to cool the ‘racial blemish’ on the countenance of America – so we get rid of the racial blemish you know the racial blemish is George Floyd this week or whatever and then business as usual resume because the blemish is – maybe we have some surgery to get rid of that blemish – but then the blemish will be gone and we can go back to the things that we are used to, the habits we’ve acquired. Well I see those crowds, when I look at those crowds in some quite unexpected places I must say, I don’t see a sense that their hopes for the future can be reduced to removing the racial blemish from the countenance of the United States or, I must say, from the countenance in my country. Their demands are deeper than that, they’re more disturbing than that – the language of structural racism is very visible here so we have to see what that really does mean in this context as the mobilisation starts to congeal – that was the word that you used, wasn’t it?

Ruth: Congealed. That’s fantastic. I think that the widespread calls throughout the United States now to defund the police is an example of what you’re talking about it. There is nothing in that call that says ‘oh if we just tweak a little bit the representation of black people or white women in the police then the blemish will be resolved’ or ‘if we just have a lot of police attended George Floyd’s funeral on Tuesday the blemish will have been masked’. The demands to defund the police and to abolish the police, however thought through or not thought through they are by people holding the signs and making the call and repeating it over and over again, are I think demands on the part of people in the street and the people who are supporting them from home for whatever reasons that they’re not in the street, are demands to say this society absolutely does not work. And we’re sick of it’s not working resulting in murder after murder after murder, resulting in the abandonment of people to a mysterious and deadly disease that can’t be treated or vaccinated against, to the ongoing anxiety associated with the highest level of unemployment and under employment that has happened in the United States in anybody’s memory – I mean I’m 70 and the Depression was a long time before I was born. So, all of these things I think mean that people without necessarily having worked through everything, all of the possible consequences of the demands they are making, are making demands that refuse a fix. As a result of which, people like this military general and many others of his ilk who have been absorbed into the professional managerial classes of the United States, from my generation forward, are stepping up to say ‘wait wait wait, there are these terrible things, they’ve happened to me, we acknowledge it, now we will have some kind of ceremony and some kind of again Armageddon tweaking that will enable us to get back to some kind of normal and go ahead’. There is no back, you know. There is no back. But it is really hard now. I keep looking at the cabinet in the Johnson government and thinking ‘my god the United States could not imagine having such a colourful government of people arrayed against us’.

Paul: Yeah and maybe those crowds in the streets are being exposed to a sort of accelerated learning that the kind of colour matching and corporate tinkering that involves the rearranging of the deck chairs on the sinking ship, that these things are of limited utility to the kind of existential perils that police murder and their particular demands and stresses of the Covid, of the Covid epidemic, these things lose their appeal in that context. I think people have been – I know it is mostly young people, but it isn’t only young people actually – I think the people have been emboldened by recovering their proximity to death. That the proximity – I mean our government has been much much more able to control the flow of images out from those emergency rooms and the pile of body bags and the health care workers who work in those environments are being bullied and intimidated into silence, gagged, and their phones – they don’t shoot that footage on the phone that we saw coming out of New York, that we saw coming out of Italy. So we don’t have the visual record and in a way that serves their purposes because it helps them to contain the narrative, but on the other hand the existential, the anxiety – anxiety is the master word in our situation – those anxieties are intensified in the absence of that visual record in a society that’s so dependent on visual stimuli, and I think those anxieties are really active in the daring, in the boldness of the young people who are out on the streets. And yes they know, they know they don’t want to take the virus back to the communities and endanger their elders – they are perfectly appraised of that – but they also know that the value of their own lives is already compromised and that’s what they learnt from looking at that video – the latest of these videos which is endlessly repeated and shared and circulated. So, I think their sense of vulnerability, their sense of anxiety compounded by the very limited and intense channel of visual images that they can access, and this makes them bolder. I won’t say it makes them reckless, I don’t think I’ve seen any recklessness yet, maybe – that has to be there in that demographic you know, we were all reckless troublemakers at one point – but there’s something about that existential anxiety which makes the people more bold, makes people more daring, makes them calculate the difference between their own desire to be safe and secure, and the security and safety of the larger communities to which they affiliate, which is very very striking and which I find very moving.

Ruth: I think you’re absolutely right. I’m going to say something I’ll probably take back later, but I’ll say it: I think that in many instances over the years, the constantly circulating images of particularly, although not exclusively, black people being murdered, dying, lying dead in the street, have elicited very strong responses. But I think if we were to analyse those responses, we’d find a lot of pity and a lot of contempt – to use my friend Daryl Scott’s words – pity and contempt. But not necessarily this strong sense of that that I’m watching is somehow an expression of how I feel – how I feel that I can’t necessarily say – and I can’t go down the rabbit hole of affect theory because I don’t understand it. And I don’t want to. But there is, well let’s go to our friend Raymond Williams: that people are living through a gargantuan shift in the narrative arc of structure of feeling. And it happened because of Covid and plus because of under employment and unemployment and plus because of how governments are differentially responding and how news of that circulates visually and then other ways. And that creaking infrastructure is making people I think turn and start in a direction they might not have ever gone in before, and they feel like their feet are on some ground that they’re just gonna have to try out even if they can’t see it through the smoke and the tear gas. I think I pulled off the metaphor. So, I think I think that. I’m not gonna take it back yet.

Paul: No don’t take it back. And thank you. Maybe we can have another conversation like this in a few weeks’ time and see where we are then. There’s so much more to learn and so much more to think about and it’s been a very extraordinary extraordinary period. So, I’m really really grateful to you Ruthie for making the time to have this conversation and I look forward to hearing what you have to say in the future. It was really very much appreciated thank you so much.

Ruth: Thank you, thank you Paul.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mer 17 Juin - 17:34


¿Qué pasa?

l'universalisme abstrait antiraciste comme l'universalisme prolétarien occidental
héritent ensemble de l'universalisme abstrait des Lumières
qui a inspiré celui de la Révolution et de la République françaises

dessous, La contre-offensive raciste, par João Gabriel
et le grand retour de l'Idéologie française

je ne suis pas le seul à voir quelque chose de nouveau émerger en France dans le sillon de l'événement "George Floyd" aux États-Unis. Un peu tôt pour savoir ce qu'il en sortira, mais manifestement, l'héritage colonial français est de plus en plus sur la sellette, et les manœuvres pour résister à cette vague profonde et puissante vont bon train

tant il est vrai qu'il ne fait pas bon être considéré comme raciste, c'est à qui verra dans l'antiracisme actuel "un nouveau racisme", à fronts renversés. Faites vos jeux !

tournant aussi dans le septennat, puisque Macron semble avoir tourné la page de sa dénonciation en Algérie en février 2017, de la colonisation : « C'est un crime. C'est un crime contre l'humanité. C'est une vraie barbarie, et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant aussi nos excuses à l'égard de celles et ceux vers lesquels nous avons commis ces gestes. » Des ratés dans le "en même temps"... mais il n'était pas encore élu de la "République française", qui doit honorer son glorieux passé
Mouvements antiracistes : un tournant dans l’histoire ?
Guillaume Erner avec Françoise Vergès, France Culture


RACISME et ANTIRACISME 838_000_1te5lz-min
Des manifestants lèvent le poing lors d'un rassemblement dans le cadre des manifestations mondiales "Black Lives Matter"
contre le racisme et la brutalité policière, à Marseille le 13 juin 2020. Crédits : CLEMENT MAHOUDEAU - AFP
« Nous serons intraitables face au racisme, à l’antisémitisme et aux discriminations ». Attendu dans son allocution dimanche sur la question de la lutte contre le racisme, Emmanuel Macron a affirmé son soutien à ce combat tout en condamnant le « communautarisme ». [à vrai dire renommé "séparatisme", utile nuance pour voir "la République coupée en deux" et relancer l'Union sacrée de la France de toujours, dont on aimait toutes les statues, et le statut de champion de l'Universel]

Alors que des réflexions débutent dans plusieurs pays sur le sort des statues d'esclavagistes, suite à leurs dégradations, le président français a affirmé son refus que la République « déboulonne des statues ». Comment traiter la mémoire de l'esclavage et de la colonisation dans l'espace public ? Après les manifestations massives aux États-Unis et les rassemblements en France, assiste-t-on à un renouveau des mouvements antiracistes ?  

Notre invitée est Françoise Vergès, politologue, historienne, autrice notamment de “Un féminisme décolonial” paru en 2019 aux éditions La Fabrique.

RACISME et ANTIRACISME 150x200_61gse2fqqvl

Le déboulonnage des statues
"Quand le Président dit qu'il sera intraitable sur le racisme et les questions d'égalité, les demandes de retrait les statues est une question d'égalité. Il n'y a pas de justice dont la façon la France présente les monuments. (...) En réalité, il n'y a pas de récit figé. La République pourrait se demander les récits qu'elle voudrait mettre en avant (...).  Quelles sont les statues que je vois quand je me promène à Paris ? Essentiellement des hommes blancs, dans des postures guerrières (..). Il n'y a pas d'égalité mémorielle".

La fin de non-recevoir pousse aux actions (...).Je ne comprends pas sur quoi s'appuie cette fin de recevoir. Dire que l'on ne revisite pas, que ça reste fixe et rigide est assez étonnant.

Une demande d'égalité
" Plus profondément, c'est la question d'une plus grande égalité, de l'anti-racisme. Quels sont les récits valorisés ? Qu'est-ce qui est enseigné à l'école ? Qu'est-ce que les enfants de France apprennent ? La question des statues est prise dans un contexte."

C'est une question d'égalité et de dignité pour l'histoire de plein de femmes et d'hommes qui sont dans la République française, qui sont des citoyens français.

L'histoire de l'anti-racisme
"La question de l'anti-racisme est à placer dans l'histoire. En 1983 la marche pour l'égalité revendique une autre forme de lutte contre le racisme. Il ne s'agit pas de dire que le racisme est une opinion, mais de comprendre que c'est structurel (...). Ça s'oppose à l'anti-racisme moral, c'est une question plus profonde."

La France s'est fondée sur l'idée d'une certaine supériorité. On ne fait pas disparaître des siècles d'histoire ainsi.

La question de l'universalisme

"L'universalisme ne protège pas quand il est abstrait. Il n'est pas réellement universel, il ne tient pas compte de toutes les histoires, de toutes les mémoires, de tous les imaginaires. Il dit qu'il est universel mais part d'une expérience singulière".

La question du racisme structurel s'est encore observée avec la pandémie. Quel a été le département le plus touché, c'est le 93. Qui ont été les personnes qui remplissaient les métiers essentiels ? Ce sont les personnes que l'on dit racisées, c'est-à-dire les personnes stigmatisées par le pouvoir à cause de leur origine, de leur nom ou de leur couleur de peau.

Transformer la question raciale en question sociale ?

"La racialisation se croise avec la question sociale, par exemple le fait que les personnes racisées occupent toujours les emplois les moins qualifiés et le plus sous-payés. C'est à ce croisement que se pose la lutte anti-raciste".

Quand on dit race, on pense en France que ça n'existe pas, ce qui est vrai. Mais la race n'existe pas mais le racisme tue, donc il est très concret. C'est pour cela que l'on préfère parler de racialisation, de processus par lequel une personne va être discriminée à cause de la perception qu'elle n'est pas exactement comme il faudrait. Il faut se pencher sur la manière dont les français ont été inventés comme blanc.

Le privilège blanc, essentialisant ?
"La question n'est pas de s'excuser mais de déconstruire. Qu'est-ce que vous faites chaque jour contre le racisme ? En tant que personne blanche, qu'est-ce que je fais pour déconstruire une société qui me donne des privilèges ?"

Toutes les luttes sont portées par les personnes les plus touchées par les discriminations. Le fait que les luttes anti-racistes soient rejointes est très important (...).

Une concurrence des victimes ?

"Il y a eu des divisions, le pouvoir divise, qu'il faudra surmonter. Le défi est de lier toutes les luttes, pour que le monde se transforme. Il faut trouver un terrain commun. On trouve des points de rencontre".

Le capitalisme peut absorber la critique qui lui est faite pour en faire une marchandise. A la fois, les systèmes libéraux de tradition anglo-saxonne sont plus ouvertes du point de vue des individus. Mais la justice sociale ne se fera pas. Pour un jeune issu des catégorie populaire, aller à Londres sera plus libératoire que de rester à Paris, mais cela ne veut pas dire que la société est plus égalitaire que la société française.
@blogjoaogabriell a écrit:LA CONTRE-OFFENSIVE RACISTE, 15 juin

Le problème posé par la manifestation impressionnante du 2 juin contre les violences policières et l'impunité qui en découle, était, nous disait-on, que des noirs avaient traité de « vendu » un policier, lui aussi noir. Scandale. Condamnations fermes, proliférations d'articles, débats à la télévision. Surtout, plainte de l'intéressé et même de la Préfecture de police. La République se dressait alors contre le « racisme » des noirs entre eux-mêmes, avec, in fine, cette conclusion : les noirs se traitent mal entre eux, pourquoi donc reprocher à la police les mauvais traitements, fussent-ils mortels, qu’elle leur inflige ?

Une semaine plus tard, le problème posé par la mobilisation du 13 juin, toute aussi impressionnante, c'est, cette fois que quelqu'un a proféré l’insulte suivante : « sale juifs ». Valeurs actuelles, torchon raciste et notamment antisémite crée la polémique, relayée de nouveau par la Préfecture de Police. Scandale bis. Là encore, nous sommes invités à une conclusion similaire : ceux qui manifestent contre les violences policières sont antisémites – ou du moins les tolèrent - pourquoi donc, là encore, faire le procès de la police ?

Dans un cas comme dans l'autre en somme, le « vrai » racisme, ce serait « eux », les manifestants, et notamment, les noirs, arabes et banlieusards qui les composent. Pas la police.

Comment analyser ces polémiques ?
La République découvrirait-elle les insultes qui fusent en manif ? Et uniquement dans ces manifs-là d'ailleurs ? Pas dans celles des policiers, par exemple ? Pourquoi pas.  La responsabilité des propos tenus en manif incombe difficilement aux organisateurs, dès lors qu'ils n'ont pas été prononcé au micro. Mais soit, les insultes d'individus c'est pas bien. Sauf que la République, elle, ne veut toujours pas voir les coups et insultes (aussi en manif d’ailleurs), portées par sa police. Sans oublier la mort qu’elle inflige. Non, c’est le racisme d’individus, et ce, à l’intérieur de ces manifestations-là qui intéresse prétendument nos grands universalistes républicains. Pas le racisme d’institutions qui structurent la société. Faire d’insultes en manif une affaire d’Etat, incarné notamment par la Préfecture de police, tout cela n’a évidemment rien d’anodin.  Ces polémiques de bas étages n'ont qu'un but : défendre la police, donc la République, et donc surtout la classe au pouvoir. Encore un rappel (pour ceux qui sauront le voir) que la lutte des classes se joue bien là, sur ce terrain-là qu'est le conflit racial, et pas « à côté ».

Ici les deux figures – le « bon » noir, assimilé à la République par sa fonction policière, et le juif – sont utilisées pour disqualifier le mouvement en cours, mais au-delà réaffirmer la légitimité de la fonction policière, et donc de l’ordre social raciste. Que reste-t-il donc dans la panoplie des armes pour discréditer le mouvement, et au-delà de lui, toute l’organisation politique contre le racisme républicain, à la fois comme structure d’Etat, mais aussi comme idéologie spécifique (universalisme français, etc) ? La médiatisation d’une insulte sexiste à une prochaine manif, et la fois d’après, d’une insulte homophobe ? Pas vraiment de suspens, le scénario est connu d’avance, et cette séquence tourne en boucle : l’antiracisme n’aurait pas lieu d’être car ceux qui le portent et qu’il défend concentrent à eux seuls toutes les tares sociales (appétit pour la violence physique, la délinquance, et incarnation de l’antisémitisme, du sexisme et de l’homophobie). Ces polémiques sur des insultes en manif sont là pour nous redire que l’antiracisme doit être combattu.

Le discours prononcé le 14 juin par Macron est à ce titre clair et peut se résumer comme suit : la République doit « intensifier » son combat contre le racisme, mais les antiracistes du genre de ceux qui mettent en cause la police sont des « séparatistes ». Contre qui va donc « s’intensifier » la version d’antiracisme de la République ? Contre ceux qui mettent en cause le racisme de ce régime et de ses institutions. Loin d’être un message d’apaisement, il s’agit d’une déclaration de guerre froide contre cet antiracisme que nous portons ; elle n’est pas nouvelle mais elle va, nous dit-il, s’intensifier.
16 juin
le grand retour de l'Idéologie française
alors que la première moitié du septennat de Macron avait marqué une accalmie du discours français sur le "communautarisme" des banlieues "racisées", après la vague agressive sous l'impulsion de Manuel Valls largement soutenu par les sionistes, le double événement du meurtre de George Floyd / Black Lives Matter et des manifestations contre le racisme et les violences policières relance comme jamais l'hystérie française d'un universalisme qui serait encore piloté par l'esprit des Lumières, celui de Voltaire préfigurateur du racisme scientifique

il est intéressant de constater que cette idéologie ratisse large dans l'ensemble du champ politique français, regroupant les racistes de toujours à l'extrême-droite, et les marxistes attardés du prolétariat universel des "nations civilisées" (Marx, AIT), comme les défenseurs d'un République française ayant accouché du colonialisme, contre le "séparatisme"
quand l'ultra-européisme d'ultradroite
rejoint le strict prolétarisme des "antiracialisateurs" d'ultragauche
ça donne leur commune haine raciste des "immigrés fer de lance de la contre-révolution"
et l'apologie des Gilets Jaunes "classe dangereuse"

Guerre civile raciale  ou  Guerre sociale radicale
Francis Cousin
(vidéo 13 juin 2020)

RACISME et ANTIRACISME 9k=

la caricature en "séparatistes" des manifestations contre le racisme et les violences policières
impulsé par le Comité Traoré est la même que celle du pouvoir macroniste

comme dit il y a 5 ans dans L'Idéologie française,
ces gens-là sont, d'ultragauche ou d'ultradroite,
la cinquième colonne du pouvoir politique

"complicité entre le Comité Adama et le pouvoir politique sur le dos du prolétariat exploité", une argumentation que l'on retrouve jusqu'à la nausée dans le magazine Causeur ces derniers jours, de Jérôme Leroy (La fausse opposition dont rêvait Macron), Cécile Pina (Quand la manif pour Traoré fait chou blanc), Aurélien Marq, Arno Klarsfeld, Paul Godefrood (Du confinement à la claustration raciale)...

rien qui n'ait été confirmé par le discours de Macron dimanche soir : sus au "séparatisme" ! Un séparatisme que ne porte aucun des mots d'ordre dans ces manifestations. En un mot la même idéologie française

'illes' sont revenus, 'illes' ressont tousses là

Selon Manuel Valls,
« la lutte des classes disparaît au profit de la guerre entre "races" »

vous avez bien lu, Valls est le nouveau Lénine français
Pour l’ancien Premier ministre, la mort d’Adama Traoré est « instrumentalisée par (sa) sœur, Assa, et le collectif de soutien », et « l’idée de l’existence d’un privilège blanc est absurde et dangereuse »
Elisabeth Badinter :
Privilège blanc, racisés..."C'est la naissance d'un nouveau racisme"

"un crachat à la figure des hommes des Lumières".


déluge dans l'hebdo Marianne

Valls inspiré par Jean-Loup Amselle, 29 novembre 2014 :
« Vous avez aimé la lutte des classes, vous allez adorer la lutte des races ! »
Doit-on l'émergence de ces théories du côté des jeunes Français à ce soft power américain ? Oui mais pas seulement, selon Jean-Loup Amselle, anthropologue, directeur d'études à l'EHSS et auteur de "Les nouveaux rouges-bruns : le racisme qui vient". "Cet antiracisme politique qui nous vient des Etats-Unis et de l'Amérique latine, qui substitue la lutte des races à la lutte des classes sociales, répond à une situation. Même si je ne crois pas en un racisme systémique, qui irait de la base jusqu'au sommet de l'Etat, il y a du racisme en France. Ces jeunes ne sont pas si réceptifs sans raison. C'est bien que cela correspond à certaines situations rencontrées", note-t-il. Pour autant, peu enthousiaste face à ce "nouvel antiracisme", qu'il voit comme une "déviation" des questions de "privilèges de classe" et de "l'exploitation capitaliste à l'égard des prolétaires et des ouvriers" pour créer des "ressentiments" en invitant chacun à "checker ses privilèges en fonction de sa 'couleur' et de sa 'race'", l'anthropologue s'inquiète du "vide politique" offert à cette génération. "Cette idéologie s'ajoute à l'absence d'organisation politique capable de créer du lien. Aucun parti n'est capable de proposer un cadre à une jeunesse qui s'est politisée par ses propres moyens et qui finit par superposer sur leur quotidien des faits et des récits qui se passent de l'autre côté du globe, que cela soit fondé ou pas."
Blanchité, privilèges, alliés… Pourquoi les jeunes adhèrent-ils tant à "l'antiracisme" racialiste ? : Marianne 11 juin 2020
notons qu'ils ne font pas preuve d'une grande originalité, ressortant les arguments des années 2015-2017, qui auront du mal à convaincre étant donné les caractéristiques nouvelles des mouvements actuels, et leur ampleur mondiale. Déjà dit : Assa Traoré n'est pas Houria Bouteldja... En France, c'est comme ça, il est plus facile d'ostraciser les Arabes et Musulmans, toujours soupçonnées d'être à deux doigts de verser dans l'islamisme, voire le terrorisme, que la communauté noire des Antilles ou de l'immigration africaine

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Jeu 18 Juin - 5:47

existait dans l'ancien forum un sujet fort documenté sur la "blanchité", "Whiteness", et le "privilège blanc". Je ne vais pas le reconstruire. Cet article est un excellent condensé, avec l'avantage d'une critique opportune de l'usage du concept de privilège blanc
dessous :
- La couleur de la peau, à l’origine du racisme, cnrs 2004
- livre : Un monde en nègre et blanc, Aurélia Michel 2020


vous avez dit "privilèges" ?
réalités de la chose et limites du concept


« Checker les privilèges » ou renverser l’ordre ?
Kaoutar Harchi, Ballast, 15 juin 2020

RACISME et ANTIRACISME 1136_maxpeopleworldtwo002826
écrivaine et sociologue
Chercheure post-doctorante (Labex CAP, département de la recherche du Musée du Quai Branly). Son dernier ouvrage, « Je n’ai qu’une langue et ce n’est pas la mienne - Des écrivains à l'épreuve », a paru en 2016 aux éditions Fayard.
checker : contrôler, vérifier
RACISME et ANTIRACISME 6cef7dd51834d85be967e841148d8b0a--white-privilege-poster-series
image ajoutée
« Check Your Privilege » : le mot d’ordre est désormais fameux. On trouve même, sur Internet, des tests visant à calculer son niveau précis de privilège — en fonction des remarques que l’on reçoit sur son accent, du logement que l’on occupe, des tentatives de suicide que l’on a ou non commises ou encore de l’existence d’un lieu de culte honorant sa religion dans la ville que l’on habite. On dénombre ainsi un « privilège masculin », un « privilège hétérosexuel », un « privilège de classe », un « beauty privilege » ou bien un « privilège blanc ». C’est ce dernier, mobilisé aux États-Unis depuis les années 1970, qui retient ici l’attention de la sociologue et écrivaine Kaoutar Harchi. Si l’on ne saurait nier, avance-t-elle, toute pertinence théorique à ce concept, son succès académique et militant fait question : il dépolitise les luttes pour l’égalité et se conforme aux attendus de l’individualisme libéral. Car c’est la structure de l’ordre dominant (capitaliste, raciste, sexiste) qu’il s’agit bien plutôt de penser — autrement dit, de démanteler.

Ici, aux États-Unis, une petite fille blonde tient à la main une pancarte : « Privileged. #BlackLivesMatter ». Là, des centaines de personnes blanches se rassemblent et, mains levées, clament en chœur qu’elles renoncent à leur « privilège blanc ». Il y a de quoi sourire, oui. Au même moment, en France, dans une « lettre adressée à ses amis blancs qui ne voient pas où est le problème », l’écrivaine Virginie Despentes, réaffirmant son soutien au combat mené par le Comité Adama Traoré, écrit : « [L]e privilège, c’est avoir le choix d’y penser, ou pas. Je ne peux pas oublier que je suis une femme. Mais je peux oublier que je suis blanche. Ça, c’est être blanche. Y penser, ou ne pas y penser, selon l’humeur. En France, nous ne sommes pas racistes mais je ne connais pas une seule personne noire ou arabe qui ait ce choix. » Décidément, tout cela va trop loin : alors, du Figaro au Monde, d’émissions télévisées en émissions radiophoniques, on pousse des petits cris.

Retour sur un concept

« On dit des Noirs qu’ils sont Noirs par rapport aux Blancs, mais les Blancs sont, tout court. Il n’est d’ailleurs par sûr que les Blancs soient d’une quelconque couleur. » Par ces mots, la sociologue française Colette Guillaumin suggère la nécessité de penser le pendant relationnel de la condition minoritaire, soit la condition majoritaire dite « blanche ». En ce sens, la « blanchité » (de l’anglais « whiteness ») désigne, en sciences sociales, une position sociale dynamique, historiquement produite, et continument traversée par d’autres principes de hiérarchisation — au premier rang desquels la classe et le genre. Elle se caractérise par une perception précise : celle de se croire, en tant qu’individu rattaché à la « condition blanche », irréductible à des stéréotypes fixes et immuables, a fortiori négatifs, tandis que les autres, non-blancs, le seraient — et, de ce fait, le sont.

À la fin des années 1980, une chercheure étasunienne, Peggy McIntosh, s’est saisie du concept de blanchité pour en approfondir l’aspect avantageux. Dans son article « Privilège blanc : vider le sac invisible », elle note ainsi : « Je pense que les Blancs ont été consciencieusement éduqués pour ne pas reconnaître le privilège de la peau blanche, tout comme les hommes ont appris à ne pas reconnaître les privilèges masculins. C’est ainsi que j’ai commencé à chercher (de manière intuitive), ce qu’est un privilège de la peau blanche. J’en suis arrivée à percevoir ce privilège, comme un paquet invisible obtenu sans aucun mérite, et contenant des provisions sur lesquelles je peux compter chaque jour, paquet qu’on me signifierait de toujours oublier. Le privilège de la peau blanche, c’est en fait un sac à dos invisible et sans poids, rempli de fournitures spéciales, cartes, passeports, carnets d’adresses, codes, visas, vêtements, outils et chèques en blanc. » Ce que décrit ici McIntosh pourrait se comprendre, plus simplement encore, comme le fait, pour les individus de condition blanche, d’être exempts de toute expérience raciale pénalisante et stigmatisante1. Autrement dit, d’être inconscients de tout bénéfice racial — quelles que soient leur position de classe et leur appartenance de genre.

Le concept de « privilège blanc » s’est imposé, via la constitution des « Whiteness Studies » aux États-Unis au début des années 1980, comme un outil opératoire de désignation des rapports de pouvoir que le déni des inégalités raciales occultait alors. C’est que ce concept a pour force de briser ce que Roland Barthes, à propos du rapport social de classe, a désigné par l’expression d’« ex-nomination » : soit cette aspiration de la bourgeoisie à se percevoir et à être perçue comme société anonyme. Et le philosophe de préciser : « Comme fait économique, la bourgeoisie est nommée sans difficulté : le capitalisme se professe. Comme fait politique, elle se reconnaît mal : il n’y a pas de parti bourgeois à la Chambre. Comme fait idéologique, elle disparaît complètement : la bourgeoisie a effacé son nom en passant du réel à sa représentation, de l’homme économique à l’homme mental : elle s’arrange des faits, mais ne compose pas avec les valeurs, elle fait subir à son statut une véritable opération d’ex-nomination ; la bourgeoisie se définit comme la classe sociale qui ne veut pas être nommée2 ». Rapporté au rapport social de race, l’ex-nomination est cette pratique symbolique et matérielle de production d’une identité blanche innommée, réclamant pour elle tous les noms et se rêvant, de là, universelle : une identité que le concept de « privilège blanc » nomme, tout à coup, c’est-à-dire définit, particularise et met in fine à nu. Le concept voyage durant les années 2000 : il quitte l’îlot académique et s’ancre au sein des mondes militants, finissant par atteindre les rives françaises3.

« Renoncer » : un idéal individuel

Mais nommer ne suffit pas. Et, à y regarder de plus près, le succès de ce concept, aisément mobilisable sous régime libéral, ne nous aide pas à travailler collectivement au renversement de l’ordre social. En 2016, déjà, la féministe Mirah Curzer publiait l’article « Let’s Stop Talking So Much About Privilege ». Elle y développait l’idée selon laquelle la focalisation, bien que légitime, des débats autour du « privilège blanc » réduisait mécaniquement les possibilités de développer une approche en termes de droits. En ce sens, le risque est grand de lutter — et de se donner à voir comme luttant — pour moins de privilèges alors qu’un enjeu politique bien plus radical consisterait à lutter, matériellement et symboliquement, pour l’accès de tous et de toutes à la justice sociale. Un critique plus frontale encore a été formulée un an plus tard par Arielle Iniko Newton, essayiste et co-organisatrice de Movement for Black Lives, dans l’article : « Why Privilege Is Counter-Productive Social Justice Jargon ». Elle lance : « Le privilège est un notion limitante qui accorde la priorité aux comportements individuels au détriment des failles du système, et suggère que changer nos comportements serait une manière suffisante d’éradiquer l’oppression. […] Personne ne peut abandonner ses privilèges mais nous pouvons faire en sorte que l’oppression soit remise en cause. » Ainsi, Arielle Iniko Newton plaide pour une reconsidération révolutionnaire des forces sociales historiques qui structurent, de part en part, le suprématisme blanc — appelant, par suite, à sa destruction totale.

Ces derniers jours, en France, à la faveur de mouvements internationaux antiracistes d’une ampleur rarement égalée, ont fleuri des appels lancés par ou à destination des personnes blanches afin qu’elles travaillent à la reconnaissance de leur privilège blanc. Dans certains cas, ces initiatives ont pu prendre l’apparence de ce que Joao Gabriel, blogueur, militant panafricaniste et doctorant en histoire, a qualifié de « forme politisée de développement personnel » susceptible d’induire « un militantisme-performance et déclaratif ». La réduction des rapports sociaux de pouvoir à un régime de ressources possédées par les uns — et donc à l’origine de la dépossession subie par les autres — confine effectivement à croire que des choses attribuées de telle manière devrait l’être de telle autre. De là découlerait une injustice qu’il conviendrait de réparer par la transformation des modalités originelles d’attribution. Mais comment redistribuer la valeur du travail bien fait en situation de blanchité quand, dans d’autres situations, le travail n’est jamais qu’arabe ? Importe-t-il de redistribuer la valeur construite de la beauté féminine blanche afin que les cheveux à la frisure serrée des femmes racisées cessent d’être associés à la sauvagerie et à la laideur ? Comment redistribuer la valeur sociale et politique des vies blanches quand celles, non-blanches, sont perçues comme un ensemble informe de vécus interchangeables et traités comme de moindre importance ? Comme le suggère la militante communiste, féministe et antiraciste Mélusine, « parler des choses qu’on a, et non des choses qu’on est, empêche de remettre en question l’existence même des catégories ». Pourtant source primordiale des violences.

Ne pas changer les règles du jeu : en bâtir un autre
Vaut-il vraiment la peine de changer les règles du jeu, de s’épuiser à vouloir jouer mieux, de s’exténuer à jouer dans telle équipe plutôt que dans telle autre, de tenter de changer de capitaine de jeu, de se rêver être ce capitaine, de changer de terrain de jeu, quand on ne sait que trop bien que ce jeu est toujours perdant pour ces mêmes-là, toujours gagnant pour ces mêmes autres ? Et si même ce jeu finissait par rendre victorieux ne serait-ce qu’un individu que le destin social prédestinait à perdre, jamais cela n’effacerait l’injustice qui continuerait à frapper le destin de tous les autres. Et cela, qui peut s’y résoudre ? Concentrons, bien davantage, nos forces à nous retirer de la partie pour mieux détruire le jeu. Réinventons-en un, tout autre, égalitaire et autonome, révolutionnaire, inconditionnellement juste. Ce que l’essayiste et militante afroféministe Fania Noël-Thomassint4 formule en ces termes : « Nous ne sommes pas intéressé·es par le changement de places. Ce que nous voulons, c’est qu’il n’y ait plus personne au bas de l’échelle ; que l’échelle disparaisse, d’ailleurs. »

Le recours intensif au concept de « privilège blanc » signe l’avancement sinueux du néolibéralisme jusqu’au cœur des pratiques politiques de résistance. Il individualise la question politique raciale et, de là, la dépolitise. Plus encore : ce sont les possibilités d’émancipation des groupes dominés que l’on indexe et conditionne, paradoxalement, au bon vouloir autocritique des groupes dominants. Comme il importe de travailler à une société sans classe — entendre sans domination de la classe capitaliste sur le reste de la société —, il importe de travailler à l’édification d’un monde libéré des catégories sociales de race. Cela, seules l’organisation, la mobilisation et l’action collectives le permettront.


1. À ce propos, la chercheure Lissel Quiroz note : « Comme toute étude pionnière, celle de McIntosh souffrait de quelques lacunes, notamment celle consistant à confondre privilège blanc et privilège de la classe moyenne. Dans un article intitulé Expliquer le privilège blanc à une personne blanche et pauvre, Gina Crosley-Corcoran montre comment plusieurs exemples dans la liste de McIntosh renvoient davantage au statut de l’auteure en tant que personne de classe moyenne, qu’à son statut en tant personne blanche, le mot classe pouvant se substituer de nombreuses fois à celui de race. »
2. Roland Barthes, Mythologies, Seuil, 2014 [1957], p. 145.
3. On pourra, par exemple, consulter le podcast Kiffe ta race de Rokhaya Diallo et Grace Ly : « Check tes privilèges blancs ».
4. Voir son podcast « En finir avec les privilèges ».

Découvrir d'autres articles de Kaoutar Harchi

à lire

- « Angela Davis et Assa Traoré : regards croisés », mai 2020
- abécédaire de James Baldwin, juin 2019
- entretien avec Angela Davis : « S’engager dans une démarche d’intersectionnalité », décembre 2017
- « Femmes noires et communistes contre Wall Street », Claudia Jones, décembre 2017
- « Anarchisme et révolution noire — par Lorenzo Kom’boa Ervin », novembre 2017
- « Black Panthers : le pouvoir au peuple », Bobby Seale, décembre 2015
RACISME et ANTIRACISME 9782720215490-001-T
A tous ceux qui écrivent en français sans appartenir à la nation française, l’institution littéraire rappelle, de façon parfois violente, que la littérature est une expression nationale. Les écrivains francophones ont la langue française en partage, mais ce partage n’est le plus souvent reconnu que par exotisme, folklorisme, créant des sous-ensembles touristiques de la littérature française.
Cette ambivalence, les écrivains algériens en ont fait et continuent d’en faire l’expérience jusqu’au paroxysme. Parce que, à la différence de la Côte d’Ivoire, du Maroc, du Liban, mais aussi du Canada, de la Suisse, de la Belgique, l’Algérie fut française.
Suffit-il d’écrire dans la langue de Molière pour être  reconnu comme un « écrivain français » ? Ou la littérature entretient-elle, en France, un rapport trop étroit avec la nation pour que ce soit si simple ? Amoureuse de sa langue, la France en est aussi jalouse. Pour tous ceux qui l’ont en partage ailleurs dans le monde, elle devient alors un objet de lutte, de quête et de conquête.
Retraçant les carrières de cinq écrivains algériens de langue française (Kateb Yacine, Assia Djebar, Rachid Boudjedra, Kamel Daoud et Boualem Sansal), Kaoutar Harchi révèle qu’en plus de ne s’obtenir qu’au prix d’authentiques épreuves, la reconnaissance littéraire accordée aux écrivains étrangers n’est que rarement pleine et entière. Car si la qualité du style importe, d’autres critères, d’ordre extra-littéraire, jouent un rôle important.
Souvent pensée en termes de talent, de don, de génie, la littérature n’est-elle pas, aussi, une question politique ?

La couleur de la peau, à l’origine du racisme
Philippe Testard-Vaillant, Le Journal du CNRS n° 173, juin 2004
le titre est un raccourci. Comme il est dit, c'est l'esclavagisme des Africains aux Amériques qui est la cause première, la couleur de la peau permettant la différenciation des esclaves noirs
Les quelques milligrammes de mélanine qui déterminent la couleur de la peau sont à l’origine d’immenses formes d’exclusion. De quand date, en Occident, la naissance du rejet ou de l’assujettissement de l’Autre en raison de la couleur de sa peau ? Pour le philosophe et historien des idées politiques Pierre-André Taguieff, rattaché au Cevipof, c’est au XVIIIe siècle, dans la société esclavagiste, aux Antilles et dans les deux Amériques, que « la différence des couleurs de peau est devenue l’indice visible de différences invisibles porteuses de qualités inférieures ou supérieures. Réduit à son statut de dominé et d’exploité, dont sa couleur de peau prend le sens d’un marqueur naturel, le Noir africain peut être méprisé, traité comme un sous-homme, une marchandise ordinaire. Il y a là une réinvention de la catégorie de l’esclave par nature ».

Perçu à l’époque comme une évidence, l’« anti-négrisme » prospèrera d’autant plus facilement outre-Atlantique que de nombreux esprits européens, à l’instar de Voltaire, le cautionneront sans discernement : « À ses yeux, commente Pierre-André Taguieff, les “Nègres” semblent n’avoir pas été “conçus”, par “le maître du monde”, pour “la civilisation”. Ils sont “les esclaves des autres hommes” en raison de l’infériorité qu’ils tiennent de la nature, c’est-à-dire de la volonté de Dieu ». Et ce n’est pas tout… Le « sang noir » est imaginé comme « le support de la transmission héréditaire de l’infériorité intellectuelle et morale, sous la supposition qu’“un peu de sang noir” suffit pour que la “race” ou la lignée soit irrémédiablement “souillée” ».

Conséquence directe de cette doctrine inacceptable : le métissage, en particulier le croisement entre Blancs et Noirs (entre les maîtres européens et leurs esclaves africains) « doit être proscrit comme une déviation monstrueuse du désir de procréation et comme une violation des lois de la nature. L’argument fondamental et récurrent est qu’il produit une dégradation de la “race supérieure” sans pour autant améliorer en proportion la “race inférieure”, celle-ci étant jugée imperfectible, poursuit notre expert. Du constat empirique de la noirceur de la peau, un philosophe comme Kant croit pouvoir inférer directement une absence d’intelligence, ou une déficience irrémédiable des facultés de l’esprit ». Même son de cloche, enfin, chez Hegel, dans son Introduction à la philosophie de l’histoire. Fermez le ban. Diffusées par une littérature de voyageurs et d’observateurs, les représentations des « différentes espèces ou races d’hommes » vont être réinscrites dans des classifications hiérarchiques des races humaines pensées comme des variétés de l’espèce humaine par les grands naturalistes (Buffon en 1749, Linné en 1758), puis par les premiers anthropologues (Blumenbach, Camper) à la fin du siècle des Lumières. « Toutes les taxinomies raciales postulent alors une inégalité multidimensionnelle entre trois ou quatre variétés d’hommes au minimum, dit Pierre-André Taguieff. Dans la dixième édition de son "Système de la Nature" (1758), Linné distingue ainsi l’homme européen (blanc), l’homme américain (rouge), l’homme asiatique (jaunâtre) et l’homme africain (noir). Et la couleur de la peau continuera de jouer le rôle d’une caractéristique somatique fondamentale dans les systèmes racialistes du XIXe siècle », dont l’Essai sur l’inégalité des races humaines (1853-1855) de Gobineau constitue la plus célèbre illustration (la blancheur de la peau y est corrélée avec la beauté physique, la supériorité intellectuelle et la moralité)…

Reste une question : le vieux racisme fondé sur la couleur de la peau a-t-il régressé ? « Malgré des survivances, le racisme classique, hiérarchisant les groupes humains selon des caractéristiques somatiques ou phénotypiques, a globalement reculé. Il a perdu toute légitimité scientifique, et, depuis 1945, est condamné universellement. Seulement, nous sommes passés d’un racisme biologique ou bio-racial à un néo-racisme culturel, qui consiste à absolutiser les différences culturelles (notamment les différences religieuses) en les essentialisant, pour en faire de nouveaux marqueurs d’altérité radicale ou d’infériorité irrémédiable » Aujourd’hui donc, les quelques milligrammes de mélanine ne sont plus les seuls responsables du fléau ambiant que représente le racisme.

Source : Le Journal du CNRS, Philippe Testard-Vaillant

________________________________________________________________

Dans cet éditorial du Journal du CNRS, Philippe Testard-Vaillant retrace l’origine du racisme, car si le racisme est aujourd’hui perçu comme une marque d’obscurantisme régressif et irrationnel, il était jadis et malheureusement étroitement lié à la science, ce qui en y réfléchissant bien, n’est pas si paradoxal étant donné qu’il se base avant tout sur des critères physiologiques, somatiques. Ce qui frappe particulièrement est la présence de grands philosophes brillants et éclairés dans la contribution au racisme : Kant, Hegel eux aussi affirmaient la supériorité intellectuelle et morale de l’homme blanc sur les autres « races » dans leurs essais, et ces idées ont d’ailleurs été plus ou moins reprises dans la politique colonialiste menée par des personnalités de gauche comme Jules Ferry, Léon Gambetta ou Georges Clemenceau qui prônaient les « missions civilisatrices ». On voit comment le racisme était avant hélas appuyé par des théories scientifiques prises au sérieux par des intellectuels, et qu’il a fallu l’électrochoc de la Seconde Guerre Mondiale et de la Shoah pour qu’il perde cet appui perçu comme solide et rationnel.
le racisme fondé sur la couleur de la peau existe encore, même si plutôt à titre individuel, et s'il peut se mélanger avec un racisme sociétal ou politique dans tel contexte. Il semble que tel soit le cas de l'assassin de George Floyd et de la plupart des actes racistes commis en France par des policiers. C'est pourquoi il est triplement stupide, faux et négationniste d'affirmer comme Jean-Louis du Prolétariat Universel : Le meurtre de George Floyd n'est pas un crime raciste, ou comme le théoricien de la communisation Carbure Ce n’est pas en tant que Noir ou femme qu’on subit l’oppression. Pas plus qu'on ne résoud le problème en théorisant Le kaléidoscope du prolétariat, (Théorie Communiste n°26, 2018), ce qui, in fine, revient au même négationnisme des spécificités du racisme

car le capitalisme comme mode de production/reproduction n'a pas absorbé (subsumé) toutes les causes du racisme contemporain, et pas plus elle ne disparaîtraient avec lui. C'est pourquoi se justifie toujours un combat antiraciste avec ses spécificités et adaptations à tel ou tel contexte. L'obsession du seul prolétariat "universel" sujet de la révolution communiste conduit à des aberrations et à des fautes impardonnables et à leurs justifications "révolutionnaires"
Ainsi, la chronologie du mot « race » nous donne déjà quelques indications : d’une part, l’idée de race est d’origine européenne, plus particulièrement latine (le mot anglais « race » vient du français « rasse » ou « race » et n’est pas utilisé avant le XVIIIe siècle), d’autre part, la race dans son usage contemporain apparaît lorsque l’esclavage disparaît, c’est-à-dire lors d’une longue séquence de la fin du XVIIIe à la fin du XIXe siècle. Il faut donc considérer que l’idée de race ne précède pas l’esclavage européen ni ne le justifie. Autrement dit, comme l’a formulé un jour simplement un de mes étudiants noirs assez surpris : « Ce n’est donc pas parce qu’ils étaient racistes que les Européens ont mis les Africains en esclavage. » Comme nous le verrons, il faut même inverser la proposition : c’est bien parce que les Européens ont mis les Africains en esclavage qu’ils sont devenus racistes. Il faudra donc, pour comprendre le racisme, reconstituer les éléments qui ont conduit les Européens à la traite en Afrique. Or, ces raisons sont bien antérieures à l’idée de race et n’ont même strictement rien à voir avec la couleur de peau.
RACISME et ANTIRACISME EO_l9b6X4AIlckC?format=jpg&name=large

RACISME et ANTIRACISME 01c32cd_G5HM92LXmzmr3IX0uaeMsj0w

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Sam 20 Juin - 6:51

dessous, Angela Davis, vidéos : "Race and Privilege", Black Lives Matter and Palestiniens

des siècles plus tard
une idée neuve en Europe
un jour à marquer d'une pierre blanche


Le Parlement européen reconnaît l'esclavage comme "crime contre l'humanité"
Outre-mer la 1ère, 19 juin 2020

Ce vendredi 19 juin, les députés européens ont voté une résolution symbolique pour reconnaître la traite transatlantique comme "crime contre l'humanité". Cette résolution adoptée à une large majorité est plus globalement une ferme condamnation du racisme et débute ainsi : "la vie des noirs compte".

La résolution votée ce vendredi 19 juin au Parlement européen pour faire reconnaître l'esclavage comme "crime contre l'humanité" est lourde de symboles, alors que le monde entier s'interroge sur le racisme après la mort de George Floyd aux États-Unis. Elle a été adoptée à une large majorité : 493 voix pour, 104 contre et 67 abstentions. Voici le texte adopté :
Le Parlement européen invite les institutions et les États membres de l’Union européenne à reconnaître officiellement les injustices du passé et les crimes contre l’humanité commis contre les personnes noires et les personnes de couleur ; déclare que la traite des esclaves est un crime contre l’humanité et demande que le 2 décembre soit désigné Journée européenne de commémoration de l’abolition de la traite des esclaves ; encourage les États membres à inscrire l’histoire des personnes noires et des personnes de couleur dans leurs programmes scolaires.

Le 21 mai 2001, le France avait voté la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité au travers de la loi Taubira, du nom de la députée guyanaise Christiane Taubira qui était à l'origine de la proposition de loi, avant d'en être la rapporteure à l'Assemblée nationale.

Résolution contre le racisme
Sur proposition de l'eurodéputé d'origine réunionnaise, Younous Omarjee, elle a été intégrée à la résolution sur les manifestations contre le racisme, étudiée ce jour à Bruxelles.

Selon le député européen Younous Omarjee, Emmanuel Macron a "commis une faute" en passant à côté d'un mouvement historique.

Le texte de onze pages a été porté par 5 des 7 groupes du Parlement et débute par une affirmation : "la vie des noirs compte". Une reprise du slogan "Black lives matter", scandé à travers le monde dans toutes les manifestations anti-racistes.

"Il est important que le Parlement européen fasse un acte de civilisation", a expliqué Younous Omarjee à France Télévisions, avant le vote. "Dans ce moment, la mémoire et les actes symboliques ont une grande importance". Lors d'une prise de parole dans l'hémicycle mercredi 17 juin, l'eurodéputé avait évoqué la nécessité de regarder l'histoire européenne "avec lucidité" et d'avoir "le courage des actes et des symboles".

Younous Omarjee, député européen a écrit:Nous devons voir que cet événement renvoie à des siècles de domination des Noirs aux Etats-Unis et d'inégalité des conditions en Europe. Gardons à l’esprit que notre histoire européenne a toujours oscillé, comme une pendule, entre la barbarie et la civilisation. Que c’est en Europe, malgré la raison, malgré les Lumières, que les pires théories de hiérarchisation des races sont nées pour justifier les conquêtes, pour justifier l’esclavage, pour justifier la colonisation et pour justifier l’Holocauste.

Au total, vingt-huit points sont abordés dans la résolution adoptée à une large majorité. Elle invite notamment les institutions et les États membres de l'Union européenne "à reconnaître officiellement les injustices du passé et les crimes contre l’humanité commis contre les personnes noires et les personnes de couleur". Cela devra passer, entre autres, par l'inscription dans les programmes scolaires de "l'histoire des personnes noires et des personnes de couleur". La résolution propose également de faire du 2 décembre une Journée européenne de commémoration de l'abolition de la traite des esclaves.
l'ineffable théorisation de la communisation Carbure écrivait hier : « Tout ceci [ce processus de racisation] ne peut être compris en dehors de l’histoire de la colonisation française. Les américains ont l’esclavage, nous avons la colonisation. » Vrai en France métropolitaine, faux pour les Territoires d'Outre-Mer et tous les descendants d'Afrique sub-saharienne en France. Mais comme l'écrit Mélusine : « Affirmer que, contrairement aux États-Unis, la France n’a pas connu l’esclavage et la ségrégation est une position négationniste. La France a connu l’esclavage et le commerce des esclaves, la colonisation, la ségrégation et les lois raciales. »

sans parler du très français Code noir (1685), Carbure a-t-il entendu parler du Commerce triangulaire, qui débute au XVIe siècle, et qui existait donc avant que les États-Unis ne deviennent les États-Unis, construits pas des émigrés européens dont les colons esclavagistes français ? Avant la colonisation le commerce triangulaire n'a fait que s'accroître précédant l'arrêt des importations d'esclaves, puis les abolitions successives. Des fortunes françaises se sont construites sur l'esclavage, conditionnant l'accumulation de capital permettant à des familles de devenir des ténors du capitalisme naissant. Après l'abolition, les conditions d'exploitation de la main-d'œuvre africaine par les Européens, jusqu'à la décolonisation à partir des années 1950 (!), n'ont rien à envier à l'esclavage

l'Europe a eu la mémoire courte, Carbure pas de mémoire du tout, et pour cause

Angela Davis:

ABSURD to Call Criticism of Israel Anti-Semitic, Palestine Taught Us About Resistance!


"There has been this very important connection between the two struggles for many decades,
I am hoping that today's young activists recognize how important Palestinian solidarity
has been to the Black cause and that they recognize we have a profound responsibility
to support Palestinian struggles as well."


Dans sa récente interview donnée à Democracy Now, une émission politique aux États-Unis, Angela Davis est revenue sur le lien étroit qui unit les Palestiniens et les personnes noires dans le combat contre le racisme.
In the full interview, Angela Davis discusses the Black Lives Matter protests that have taken over the world following the murder of George Floyd at the hands of police in the USA, the 2020 Presidential election, why she believes Joe Biden is a better candidate despite both the Democrats and Republicans being tied to corporate capitalism, the need to break the two-party system, police brutality, calls to defund the police, the extent of COINTELPRO and how long it will take for radical anti-racist change to be made, her own experience of persecution by the FBI along with the Black Panther Party, the militarization of US police, the connection between alleged Israeli brutality against Palestinians and police brutality in the United States, what has changed for the better in the US regarding activism and racism,  and more!
A Conversation on Race and Privilege with Angela Davis and Jane Elliott

A Conversation on Race and Privilege with Angela Davis and Jane Elliott is the latest installment of the student-led Social Justice Solutions series. Each year, we invite activists, thought leaders, and the community to explore action-oriented strategies to affect social change. This year we are honored to host two luminaries who have long been on the front lines of pushing the national conversation on race and racial justice forward.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Lun 22 Juin - 5:06


il vaut mieux s'adresser aux bons Blacks sans blanc singe
parler "des Noirs", des Noirs Américains du Nord ou du Sud et de la Caraïbe, Français en métropole, Africains en Afrique ou immigrés, ne s'improvise pas à la faveur de telle ou telle révolte. Les questions de l'esclavage et de la colonisation n'ont pas été découvertes, telle l'Amérique par Collomb en 1492, par les théoriciens décoloniaux de la dernière génération ni par des marxistes français penchés dessus... depuis le meurtre de George Floyd

quand on découvre l'esclavage français en 2020, on ne la ramène pas en grande sentences communisatrices, pour se raviser dans une formule tout aussi simplificatrice : Carbure, 21 juin, oubliant cette fois rien moins que la ségrégation après l'esclavage au États-Unis : « Suivant la remarque de @JoaoGwadloup ("La France a évidemment aussi l'esclavage"), j'ai introduit cette modif : « Les Américains ont l'esclavage, la France a l'esclavage ET la colonisation". » À  quoi bon pondre des phrases aussi simplificatrices ? Pour qui et pour quoi faire, sinon encore de la propagande ramenant tout à la révolution prolétarienne qui n'en peut mais ne peut accueillir toute la misère du monde ?


RACISME et ANTIRACISME E06bffe656935333693c4f8dc3151762

RACISME et ANTIRACISME A7c493c48b795015310f1046cbdf051a

ces théoriciens communistes dont les plus jeunes ont découvert la théorie de la communisation à l'occasion du Mouvement de 1995, mais que lisaient-ils dans ces années-là à l'occasion du bicentenaire de la Première abolition française en 1994 ?

perso, c'est à partir de 1999 que je fouillais les rayons de Présence Africaine et l'Harmattan Rue des Écoles, et commençais à surfer sur les sites des Universités américaines. Voici mes lectures sur ces questions extraites de la BIBLIOGRAPHIE DE "JAZZ ET PROBLÈMES DES HOMMES", on y vérifie que la "whiteness" n'était pas une nouveauté...
Afrique et Afriqu'Amérique
AUSTIN Ben S. The african tradition interview, 2001, Internet/Afr-Am.English
AYDOUN Ahmed La musique africaine : le sens du rythme, Temps du Maroc, 2000
BACHARAN Nicole Histoire des Noirs Américains au XXème siècle, Complexes, 1994
BOYCE DAVIS Carole L’Autre Afrique « la centricité pose problème », Internet/africana
BRANDILI Monique Introduction aux musiques africaines, 1997, Actes Sud, 2001
BUSCA Joëlle Perspectives sur l’art contemporain africain, L’Harmattan, 2000
CARTER Sandy Jazz and Race, Zmagazine, feb. 1995
CÔTE Gérald Des premières formes musicales afro-américaines aux styles modernes, Internet
CROWLEY Daniel J. Folklore africain en Amérique (1977) Ed. Caribéennes, 1988
DAVIDAS Lionel Chemins d’identité : Leroi Jones et le fait culturel africain-américain, Ibis Rouge Ed., 1997
DUVELLE Charles Musique d’Afrique noire, Trad. musicales, E. U. 1988
FANON Franz Peau noire, masque blanc
FLAKE Marcella MONK The Role of Black Religious Music in the Struggle for Freedom, Yale-New-H Teech.I, 1997
GOMEZ Michael A. Exchanging our country marks : the transformation of african identities in the colonial and antebellum South, Univ. No Carolina, 1999
GOODHEART Matthew Freedom and Individuality in the Music of Cecil Taylor, Evolving Door M, 1996
HENDERSON Errol A. Black Nationalism and Rap Music Black Studies, 1996
HENRY Matthew The Harlem Renaissance and Leftism, Internet, 1999
JONES Leroi / Amiri BARAKA interview by Lazaro Vega, 1999 Internet/ Allabout jazz
KOTCHY B. Nguessan Fonction sociale de la musique traditionnelle (africaine), Présence Africaine n°93, 1975
KWAHULE Koffi Entretien avec -, Cassandre, 1997
MCCLARY Susan § WALSER Robert Theorizing the Body in African-American Music, Black Music Research Journal, 14, 1994
MCMICHAEL Robert Black Moral Authority, Jazz, and the changeable Shape of Whiteness, American Music, 1998
MEYER Jean Esclaves et Négriers, Gallimard Découv, 1986
MINNE Pierre Une résurgence de la mentalité africaine aux USA, La musique de la Nouvelle Orléans, Prés. Africaine 77, 1971
MUFWENE Salikolo English in the diaspora Develop. § identity, Internet/UnivChicago
MULLEN Harryette African Signs and Spirit Writing, Internet , 1996
OBENGA Theophile Le sens de la lutte contre l’africanisme eurocentriste, L’Harmattan, 2001
PARAIRE Philippe Les Noirs américains, généalogie d’une exclusion, Hachette, 1993
PERRY James A. African Roots of african-American Culture, iMinorities, Inc, 2001
RATH Richard Cullen Drums and Power: Way of Creolizing Music... Internet extrait
RICKFORD John § Russel Spoken soul: Story of Black English, Int2001, AfAmLit
SUNDSTROM Ronald Laughing to keep from crying, Resisting « Race » through Irony Internet, usc.edu, 2000
YAI Olabiyi Babayola Survivances et dynamismes des cultures africaine dans les Amériques, History of slavery,1996
ce sont les années où Christiane Taubira impose sa "loi" du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage (français) en tant que crime contre l'humanité et celles qui succéderont verront les ports français du commerce triangulaire engager un "travail de mémoire". Nul besoin d'être coco pour le savoir, mais l'ignorer en tant que coco, c'est pas jojo. Voir France Culture, 21 juin 2020 : Comment les anciennes villes négrières françaises travaillent sur leur passé (Nantes, Bordeaux, La Rochelle et Le Havre)

RACISME et ANTIRACISME 838_000_1t95su

il n'y a aucune honte, quand on est jeune, à découvrir les choses après les anciens, mais à 40 ans passés, prétendre théoriser l'émancipation, entre autres, du racisme (sic : par le prolétariat universel...) avec moins de connaissances qu'un livre d'histoire de 4ème du Collège aujourd'hui, voire en retard sur l'État français même, ça la fout mal...

nous avions en France, dès les années 60, d'excellents spécialistes de ces questions. Je me souviens particulièrement d'Yves Benot (1920-2005), rencontré à l'occasion d'une conférence-débat sur Les marronnages avec Marcel Dorigny, spécialiste de l’histoire de l’esclavage, de la colonisation et des mouvements indépendantistes et abolitionnistes (livres). Une idée avec ses ouvrages :

Idéologies des indépendances africaines, Paris, Maspero, 1969.
Indépendances africaines. Idéologies et réalités, Paris, Maspero, 2 vol., 1975.
Diderot, de l’athéisme à l’anticolonialisme, Paris, Maspero, 1970.
Histoire philosophique et politique des deux Indes, Paris, Maspero, 1981.
Les Députés africains au Palais-Bourbon, Paris, Chaka, 1989.
Massacres coloniaux. 1944-1950 : la IVe République et la mise au pas des colonies françaises, Paris, La Découverte, 1994.
La Révolution et la fin des colonies, Paris, La Découverte, 1987.
La Démence coloniale sous Napoléon, Paris, La Découverte, 1992.
La Guyane sous la Révolution ou l’Impasse de la Révolution pacifique, Paris, Ibis rouge Éditions, 1997.
Comment Santo Domingo n'a pas été occupé par la République française en 1795-1796 (An III-IV), Annales Historiques de la Révolution française, 1998, no 1(79 à 87)
La Modernité de l’esclavage. Essai sur l’esclavage au cœur du capitalisme, Paris, La Découverte, 2003.
Les Lumières, l’esclavage et la colonisation, Paris : Éditions La Découverte, 2005.

40 ans après, les ultragauchistes en étaient encore à ânonner « nous ne sommes pas antiracistes, nous ne sommes pas anticolonialistes...», alors concernant la question du racisme, définitivement, oubliez l'ultragauche et ses théoriciens blancs-français, fermez leurs bouquins modèles de Color blindness, allez aux sources. Aujourd'hui, ce n'est pas difficile, en quelques clics sur Internet, on a tout sous la main : esclavage France

un communiste ignorant est un con plus qu'un autre
car il n'a pas d'excuse

et quant à faire le lien avec le capitalisme, ce livre de 1998


RACISME et ANTIRACISME 9782130495956-475x500-1

La constitution du salariat recèle quelques énigmes théoriques de taille. En généralisant le travail salarié, le capitalisme se présente par rapport aux systèmes qui l'ont précédé comme porteur de liberté. Mais il consacre une dépendance sur le plan économique, même si elle s'opère entre des personnes " libres " juridiquement. La tension entre capitalisme et démocratie se manifeste dès l'accumulation primitive et réapparaît sans cesse.

Historiquement, le salariat libre n'est du reste que la pointe émergée de l'iceberg du travail dépendant. L'esclavage des plantations, le second servage, le travail sous contrat des migrants, le travail forcé colonial, ou concentrationnaire, sont des anomalies récurrentes ou durables. Le Mouvement Ouvrier ne réclama-t-il pas dans ses statuts l'abolition de l'esclavage du salariat ? Comment peut-on expliquer que l'essor du capitalisme œuvre tout à la fois à la construction du contrat " normal " de travail et aux dispositifs contraires de l'esclavagisme ?

Ce livre propose une réponse : la recherche du contrôle de la fuite des serfs, des esclaves, des engagés, des pauvres représente l'élément majeur qui a déterminé la naissance du marché du travail aussi bien libre que non libre. La fuite des travailleurs est le ressort de la création et de la destruction des institutions du marché du travail, mais aussi celui de la concurrence capitaliste et de l'accumulation. La rupture unilatérale de l'engagement de travail apparaît comme le point sensible à explorer si l'on veut comprendre les véritables sujets collectifs de l'histoire comme de l'économie, et réintégrer l'âge classique dans l'histoire globale du capitalisme et de l'économie-monde. Reconstruite à partir de l'analyse économique, l'histoire raisonnée du marché, de la liberté, de l'Etat moderne et des politiques publiques à l'égard des pauvres ou des migrants qui se trouve reconstruite s'avère très différente du tableau de la Grande Transformation de Polanyi.

Certains concepts cardinaux de l'économie politique, certains repères de l'histoire et du droit du travail se trouvent ainsi profondément réinterprétés : la rente foncière, le mouvement des clôtures, la prolétarisation, l'abolition des corporations, le sens des lois sur les pauvres, la " frontière " américaine, l'apparition du marché du travail, la pertinence de " l'armée industrielle de réserve ", l'articulation des modes de production. Les fondements du contractualisme du XVIIIe siècle, la déduction de la liberté à partir de la propriété, et du sujet politique à partir du contrat n'en sortent pas indemnes non plus.

Sommaire
De la politique migratoire à la question du contrôle de la mobilité : premières hypothèses fondamentales
Le salariat bridé ou l'économie de l'exception : la déviation du travail dépendant
Liberté du travail dépendant et constitution du salariat
Les chemins de la liberté du travail dépendant.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mer 24 Juin - 11:38


L'ONG prend en exemple la Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France métropolitaine, avec une part importante de population immigrée et où "le nombre de contraventions pour infraction au confinement a été trois fois plus élevé que dans le reste du pays".
Violences, contrôles d’identité discriminatoires, mesures de mise en quarantaine forcée, contraventions, les minorités ethniques ont été visées "de manière disproportionnée", par la police en Europe dans le cadre du contrôle du respect des mesures de confinement, révèle Amnesty International dans un rapport publié mercredi 24 juin (en anglais). Le rapport consacré à la situation dans 12 pays européens dont la France "met en évidence une tendance préoccupante aux préjugés racistes au sein des forces de police, également soupçonnées d’exercer un racisme institutionnel".

Un confinement beaucoup plus sévère dans les quartiers pauvres
"Les violences policières et les inquiétudes liées au racisme institutionnel ne sont pas nouvelles, mais la pandémie de Covid-19 et le contrôle coercitif de l’application des mesures de confinement qui en découlent ont révélé leur ampleur", selon Marco Perolini, chercheur d’Amnesty International pour l’Europe de l’Ouest : « Il faut de toute urgence lutter contre la triple menace que représentent la discrimination, l’utilisation illégale de la force et l’impunité de la police. »

Selon le rapport d'Amnesty International, "la police a exercé son contrôle du respect des mesures de confinement de manière disproportionnée dans les régions les plus pauvres, où la proportion de personnes appartenant à des minorités ethniques est souvent plus élevée". L'ONG prend en exemple la Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France métropolitaine "où une part élevée des habitants est noire ou d’origine nord-africaine." Ici, "le nombre de contraventions pour infraction au confinement a été trois fois plus élevé que dans le reste du pays", alors que selon les autorités locales "le respect des mesures de confinement y était semblable à ce qu’il était ailleurs en France".

À Nice, plusieurs quartiers dont les habitants appartiennent majoritairement à la classe populaire et à des minorités ethniques ont été soumis à des couvre-feux plus longs que le reste de la ville.

Au Royaume-Uni, "la police londonienne a enregistré une augmentation de 22 % des opérations de fouille entre mars et avril 2020. Sur cette période, la part de personnes noires soumises à des fouilles a progressé de près d’un tiers".

L'étude d'Amnesty International a été réalisée pendant le confinement et donc à distance, mais l'ONG "a vérifié 34 vidéos de toute l’Europe montrant des agents de police utiliser la force illégalement, alors qu’elle n’était souvent pas nécessaire". Ces vidéos, partout en Europe, ont un point commun, note Nicolas Krameyer, responsable du programme liberté pour Amnesty International France : "un grand nombre de vidéos montrant un usage illégal de la force par les forces de l'ordre, proviennent de quartiers défavorisés avec une population d'origine étrangère extrêmement forte".

Une mère voulant protéger son fils handicapé reçoit un coup de matraque

Ainsi, dans une vidéo mise en ligne le 29 mars, deux agents des forces de l’ordre arrêtent un jeune homme, apparemment d’origine nord-africaine, dans une rue de Bilbao, en Espagne. Il ne semble pas représenter de menace, mais les policiers le poussent violemment et lui assènent un coup de matraque. Alors qu’ils le maintiennent contre un mur, les mains derrière le dos, sa mère arrive sur les lieux et informe les policiers que son fils est atteint de troubles mentaux. Elle reçoit alors un coup de matraque, avant d’être plaquée au sol par trois agents.

Amnesty International
demande aux pays européens de réformer en profondeur les pratiques policières, en interdisant notamment l’emploi de la force sauf ultime recours et en mettant en place des statistiques pour étudier le racisme dans la police. Les 11 pays concernés par le rapport sont, outre la France, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, l’Espagne, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Serbie et la Slovaquie.[/b]

POLICING THE PANDEMIC
HUMAN RIGHTS VIOLATIONS IN THE ENFORCEMENT OF COVID-19 MEASURES IN EUROPE
1.3 FRANCE

Human rights observers and NGOs have been documenting instances of harassment, intimidation and the arbitrary use of force against people on the move in Calais for several years.52 Amnesty International has also documented the harassment and intimidation of human rights defenders who provide humanitarian and other support to people on the move in Calais and Grand-Synthe.53 According to organizations on the ground, up to 1,500 people including 160 unaccompanied minors, in Calais, and up to 600 people including 35 families and 80 to 100 unaccompanied minors, in Grande Synthe (northern France), are being denied equal access to health services, water and sanitation, and food, and are living in inadequate housing.

The latter puts them at particular risk during the COVID-19 pandemic.54 Following the declaration of a health-related state of emergency in France on 17 March 2020, people on the move living in temporary makeshift tents in Calais and Grand-Synthe continued to be subjected to the human rights violations documented prior to the health crisis, namely evictions, harassment and arbitrary or excessive use of force by law enforcement officials. The authorities continued to implement a policy of preventing so-called “attachment points” to deter people on the move from coming to and staying in the area. In practice this involves the authorities routinely demolishing new camps, removing tents and leavingthose living in them without adequate emergency shelter or essential services such as water and sanitation.55

The French authorities have not only failed to provide people on the move with access to water, sanitation and adequate housing, but have also prevented human rights defenders from providing humanitarian support to migrants, asylum-seekers and refugees, and have carried out dozens of forced evictions. Between 18 March and 22 April, human rights observers reported 13 cases of excessive or arbitrary use of force by law enforcement officials against people on the move.56 In a number of these instances, several Eritreans reported that law enforcement officials harassed or used force arbitrarily against them. For example, on 27 March at about 2pm, police arbitrarily used force against two Eritrean men who were going to a food collection point near the football stadium. One of the men as a result suffered a fractured arm. The two men filed a complaint with the French Ombudsperson and the Inspection générale de la Police nationale (IGPN), the body tasked with investigating allegations of excessive use of force by police.57 When this report went to press (mid-June 2020), the investigation was ongoing.

53 https://www.amnesty.org/en/latest/news/2019/06/the-jungle-may-be-gone-but-solidarity-lives-on-in-calais/,
https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/nord-de-la-france-calais-droit-des-migrants-covid-19
54 Information collected by Utopia 56 and Human Rights Observers.
55 See https://www.amnesty.org/download/Documents/EUR2103562019ENGLISH.PDF section 1.2.
56 Amnesty International phone interview with human rights observers in Calais, 5 May 2020.
57 Amnesty International has access to some written testimonies collected by NGOs in Calais to document these cases. Moreover, an open
letter written by the Eritrean community is available at http://www.psmigrants.org/site/13-04-2020-lettre-ouverte-violences-policieres-acalais/


Human rights defenders explained to Amnesty International that law enforcement officials forcibly evicted people on the move living in tents to implement the policy of preventing so-called “attachment points”. One human rights defender told Amnesty International: “People are not informed about the evictions and they are not offered any alternative housing. Gendarmes force people to move their tents nearby and after two days they force them to move again. It doesn’t make sense”.58 Human Rights Observers, a team of volunteers who work with different NGOs, documented 175 forced evictions of migrants, asylum-seekers and refugees in Calais between March and May.59

While implementing lockdown measures to combat the COVID-19 pandemic, local authorities have disproportionately restricted the activities of human rights defenders in Calais and Grande-Synthe. On 23 March, local authorities (sous-préfectures) informed NGOs and human rights defenders that they could provide humanitarian support to people on the move only in specified areas of Calais and between 8.30am and 8pm. Restrictions on freedom of movement were applied inconsistently to human rights defenders.

While defenders were allowed to provide some humanitarian support, police prevented them from observing the forced evictions of people living in camps, which were scheduled between 7.15am and 10am each day.

Law enforcement officials fined human rights defenders on 37 occasions between 19 March and 11 May for non-compliance with restrictions on their right to freedom of movement.60 On 24 April, law enforcement officials arrested four human rights observers from Utopia56 who were filming forced evictions at a camp in Grande-Synthe and placed them in pre-charge detention. They were subsequently released without charge. A Utopia56 human rights observer told Amnesty International that when law enforcement officials surrounded the camp to carry out the forced eviction, residents attempted to run away towards the motorway. In a video available online, two law enforcement officials appear to spray tear gas directly at two people who are running away.61 Tear gas is a public order weap on to be used only to disperse crowds that are perpetrating widespread violence; it is never lawful to use tear gas on individuals who are fleeing.

On 22 May, police forcibly removed two Black men from a bus in Calais. According to media reports, prefectorial authorities stated that the two men had not respected social distance and had behaved aggressively. However, according to a witness the two men did not behave aggressively. On a video available on the internet62, the two men, who were wearing a mask, did not pose any resistance to police. In March a local official had announced that buses would not serve stops for groups of people on the move. 63

The French authorities must end the current policy preventing “attachment points” and the daily forced evictions from camps. Instead, local and national authorities have an obligation to enable people on the move to access their rights to water, sanitation and adequate housing. In addition, human rights defenders must be able to continue their work free from fear of police repression


58 Amnesty International phone interview with a human rights observer, 5 May 2020.
59 https://twitter.com/HumanRightsObs/status/1260170204350418945
60 Amnesty International phone interviews with human rights defenders and a representative of Utopia56, 5 May 2020.
61 https://www.facebook.com/258099198180444/videos/231031304834376/
62 https://actu.orange.fr/societe/videos/les-refugies-ne-semblent-pas-les-bienvenus-dans-les-bus-a-calais-CNT000001qpkat.html
63 https://www.mediapart.fr/journal/france/290520/calais-des-associations-pointent-une-recrudescence-des-violences-policieres

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Sam 27 Juin - 7:09

du 25 juin, chapeau du 27 juin
la critique du Capital dans celle de l'État
comme racialisateur et structurant le racisme sociétal
soyons clair, le problème, mon problème, sans les renvoyer dos à dos, n'est pas de prendre la défense de l'« antiracisme politique » ou des impensés de la « pensée décoloniale » contre les tenants de « l'antiracisme universaliste abstrait » ou ceux de la Révolution prolétarienne universellle colorblind, qui tel Robert Bibeau des 7 du Québec ou Jean-Louis Roche, Le Prolétariat Universel, qui considèrent, du PIR au Comité Traoré, cet antiracisme politique comme ni plus ni moins que « fasciste »

parenthèse : je vois qu'un certain communisateur guerre-civiliste leur fait une cour démagogique sur les réseaux sociaux, en les critiquant moins que je ne faisais quand je m'intéressais à la pensée et aux luttes décoloniales en 2014-2016, dans la grande tradition de l'entrisme, en concurrence avec le NPA dans son appui politicien à ces mouvements. L'enjeu, pour lui militant, comme on l'a vu pendant le mouvement des Gilets Jaunes qu'il voyait porteur de contenus communistes, est « la jonction avec les racisés des banlieues ». Il a ravalé la théorie de la communisation à une fonction de guide de la jonction entre prolétaires introuvables et représentation politique des "racisés", ce que les défenseurs d'une certaine idée de cette théorie apprécieront

cela ne lui donne pas tord de juger « malhonnête » le propos de Nedjib Sidi Moussa le 18 juin 2020 dans Ces alliés de l’antiracisme politique « qui ne voient pas où est le problème ». Ce trotskiste bon teint qui fustigeait les décoloniaux au nom de la lutte des classes en 2017 dans La Fabrique du Musulman se répand le même jour dans Marianne : Antiracisme : "Nous avons ici les ennuis de l’Amérique sans en avoir la force", mais il n'y a pas lieu de se prendre au jeu du bras de fer idéologique binaire sur le terrain des débats entre "intellos médiatiques parisiens". Sidi Moussa en est un aussi, et l'on est toujours marron à tenter de leur faire concurrence en s'égosillant sur Twitter. Voir les attributs de la tribu de la tribune


car le véritable problème est la critique du Capital dans celle de l'État comme racialisateur et structurant le racisme sociétal, au moins pour le cas français, celui des États-Unis relevant plus explicitement d'un État raciste, comme Israël est un État néo-colonial
Débat :
Peut-on parler de « racisme d’État » ?

The Conversation, 8 juin 2020

OUI ! MAIS...
un article intéressant dans la mesure où il répond objectivement à la question qu'il pose. Mais le problème pourrait être dans la question : peut-on critiquer l'État sans le rattacher aux intérêts du Capital ?, dont il n'est nulle part question, ceci pour la bonne raison que les Organisations ou Associations antiracistes évoquées n'en font guère état elles-mêmes, et c'est bien le problème

d'où je tirerais cette sanction : comme on dit qu'il vaut mieux ne pas confier les orientations informatiques aux informaticiens, mieux vaut ne pas attendre des antiracismes, en soi et quels qu'ils soient dans leurs oppositions, des solutions aux causes capitalistes, de politiques économiques donc d'économie politique du Capital, du racisme, même si elles ne le sont pas toutes

pour 'prendre parti' sur la question posée, je dirais que le "racisme d'État", dans la définition qui pourrait me convenir qu'en donne par exemple Mélusine, qui « soutient qu’« une approche systémique du racisme » combine le fait qu’il est à la fois une « idéologie » et « un système structurant où le stigmate racial détermine la position sociale relative des personnes » », ce racisme d'État s'inclue comme tel (l'appareil d'État, ses Institutions, son personnel politique et les administrations et fonctionnaires appliquant leurs lois) dans un racisme structurel qui s'est doublement emparé de l'État français et de la Société civile française, pour des raisons historiques remontant au XVIe siècle, puis passant par les Lumières (Voltaire surtout) à la Révolution française bourgeoise, càd débouchant sur le pouvoir d'État de la bourgeoisie comme classe capitaliste

en tant que racisme structurel, c'est un racisme sociétal autant que social (et donc politique). Le terme d'idéologie, toujours un peu fourre-tout, est un peu court pour rendre compte des mécanismes, des processus de construction de la racisation, ou racialisation. Il y a, au sens de Raymond Williams travaillant avec Stuart Hall aux fondements marxistes des Post-Colonial Studies, une "Structure of Feeling" du racisme, spécifique à chaque pays, et relativement facile à cerner en France, malgré des oppositions (idéologiques) diverses et antagoniques (exemple ici, les "antiracistes universalistes" contre les "antiracistes décoloniaux", ce qui ramène le problème à ceux qui font le plus de bruit et s'approprient ainsi tous les antiracismes)

si l'on ne prend pas tout cela en compte, le terme « racisme d'État » est lourd de confusions, de simplifications, et partant surtout d'un oubli de la banalité du racisme, répandue dans tout le tissu social français et toutes ses classes sociales. Il existe beaucoup plus qu'on ne pense des racistes à titre individuel, plus ou moins raffinés et potentiellement violents ou criminels (on le voit dans la police), un racisme banal fondé sur la couleur de peau, ou s'en servant de repère, ce qui au fond est le processus même du passage de l'esclave noir au "sale nègre" ou du colonisé algérien au "sale bougnoule", et l'on connaît la suite

oublier cette dimension "humaine", construite historiquement comme habitude psycho-sociale, du racisme, pour renvoyer à la responsabilité de l'État, voire du Capital, qu'il suffirait d'abolir pour en finir avec ce racisme-là, me semble une grossière erreur
Auteurs
Camille Gourdeau
Socio-Anthropologue, Université de Paris
Aude Rabaud
Maîtresse de Conférences en Sociologie, Université de Paris
Fabrice Dhume
Sociologue, chercheur à CRISIS, associé à l'URMIS, Université de Paris


RACISME et ANTIRACISME File-20200608-176564-7qjtu9.jpg?ixlib=rb-1.1
Manifestation à Lyon, le 6 juin 2020 en soutien au mouvement « Black Lives Matter » à travers le monde
suite au décès de George Floyd, tué par la police de Minneapolis.
Jeff Pachoud/AFP
« Knee-to-neck » : cette technique d’immobilisation controversée qui a causé la mort de George Floyd aux États-Unis se matérialise par un genou (policier) sur le cou d’une personne interpellée. Cette mort a-t-elle été causée par le genou du policier ou par une violence institutionnelle qui tolère, voire légalise, l’usage de ce type de techniques dans le travail ordinaire policier ?

La même question se pose, en France, avec l’usage du Lanceur de balles de défense (LBD) dans la surveillance policière des manifestations. La comparaison et les écarts entre pays permettent de poser à nouveaux frais l’hypothèse de la violence institutionnelle.

Et si nous passions à côté de ce qui est raciste ?
Cette institutionnalisation de l’analyse marque cependant le pas dès que l’hypothèse de « racisme institutionnel » ou de « racisme d’État » vient colorer le tableau d’une prise en compte des principales victimes des actes policiers.

La surreprésentation des victimes dites racisées lors des contrôles policiers et des actes policiers qui « dégénèrent » – aux États-Unis certes, mais aussi en France – continue d’être protégée par une timide chasse institutionnelle au « policier raciste ».

Les débats qui traversent l’antiracisme contemporain rejaillissent alors : et si à force de traquer qui est raciste nous passions à côté de ce qui est raciste dans le fonctionnement ordinaire de nos institutions ? Pour reprendre une distinction célèbre, le « racisme individuel » serait l’arbre qui cache – sert à cacher ? – la forêt du « racisme institutionnel », souvent décliné dans le contexte français en hypothèse de « racisme d’État ».

Cette résistance collective à la prise en compte de la dimension institutionnelle du racisme ressort particulièrement de notre enquête menée sur « l’affaire SUD éducation 93 ». En effet, en octobre 2017, ce syndicat annonçait l’organisation d’un stage centré sur l’« analyse du racisme d’État dans la société et en particulier dans l’Éducation nationale ».

L’objet même du stage fait alors polémique tant l’expression est communément associée aux États ayant appliqué des politiques ségrégationnistes ou à des régimes affichant une idéologie explicitement raciste.

RACISME et ANTIRACISME File-20200608-176595-rbnxjv.jpg?ixlib=rb-1.1
L’ouvrage Du racisme d’état en France vient de paraître (éditions Les Bords de l’Eau, 2020). Editionsbdl.com, CC BY

D’ailleurs, le 21 novembre 2017, le ministre de l’Éducation Jean‑Michel Blanquer déclare, à l’Assemblée nationale, porter plainte pour diffamation. La grande majorité des députés se lève pour l’applaudir. Le débat prend alors de l’ampleur avec une forte médiatisation portée par les grands quotidiens nationaux.

Les militants, chercheurs, éditorialistes se confrontent à l’objet-tabou : peut-on utiliser l’expression « racisme d’État » pour caractériser la France contemporaine et les institutions rattachées à l’État ?

Une analyse du contenu de la presse nationale montre que la polémique met en scène des conceptions opposées du racisme.

Les deux pôles de l’antiracisme

L’usage ou non de l’expression « racisme d’État » participe d’une lutte au sein du champ de l’antiracisme, présentée dans les médias comme une « guerre des antiracismes » qui, selon Audrey Loussouarn, prendrait « en partie sa source en 2005, année des révoltes des banlieues » (L’Humanité, 23 octobre 2018). Ce conflit opposerait, selon les commentateurs, « associations généralistes » vs « spécifiques » (Pap Ndiaye, in Le Monde, 18 décembre 2017), « universalistes » vs « décoloniaux » (L’Express, Paul Conge, 20 mars 2019). « Généralistes et universalistes » désigneraient les associations davantage institutionnalisées (LICRA, SOS Racisme, MRAP…) ; « spécifiques et décoloniaux » désigneraient les « nouveaux militants antiracistes » qui participent depuis les années 2000 au Mouvement des Indigènes de la République (MIR), au Conseil représentatif des associations noires (CRAN), au Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), etc. Ces deux visages de l’antiracisme se distingueraient fortement.

RACISME et ANTIRACISME File-20200608-176550-1ajtlox.jpg?ixlib=rb-1.1
Un militant du CRAN dont le corps est peint d’injures racistes distribue des tracts place de la République à Paris,
le 24 avril 2017 lors d’un événement.
Francois Guillot/AFP


D’une part, l’antiracisme dit spécifique serait davantage animé par les « principaux concernés », des « militants issus de l’immigration maghrébine et subsaharienne » selon le journaliste Yves Mamou (Le Figaro, 13 mars 2019). Cette particularisation « identitariste » ne se retrouve pas pour l’antiracisme dit généraliste dont le profil militant n’est pas spécifié dans la presse.

D’autre part, selon les nouveaux militants antiracistes, le racisme ne serait pas intentionnel, individuel, populaire, mais « un système structurant les rapports sociaux » (Libération, Frantz Durupt, 25 novembre 2017). Pour le philosophe Pierre Tévanian, parler de racisme d’État revient alors à « souligner que le racisme […] vient d’en haut » contre une définition pathologique qui « permet aux élites de se poser comme les médecins » (in L’Obs, 3 décembre 2017). Dans ce conflit entre antiracismes, vient se loger la mise en visibilité du rôle de l’État et des institutions dans la production du racisme.

Les formes du rejet : stratégique, historique, républicain
Nos recherches montrent que la presse fait d’abord parler les chercheurs, militants ou éditorialistes qui réfutent la pertinence de l’expression « racisme d’État » pour caractériser la France actuelle.

La première forme de rejet est stratégique et consiste à proposer d’autres termes pour dépassionner le débat, comme ceux de « politiques de racialisation » du sociologue Eric Fassin (cité in Libération, Frantz Durupt, 25 novembre 2017).

La deuxième est historique et réserve l’usage de l’expression « racisme d’État » aux régimes politiques qui ont reposé sur – ou promu – une législation raciste.

RACISME et ANTIRACISME File-20200608-176585-kvjmiy.jpg?ixlib=rb-1.1
Une visiteuse au centre Nelson Mandela à Howick, à 90 kms de Durban, 2018.
Mandela a été un fervent militant anti-apartheid, régime de ségrégation raciste en Afrique du Sud mis en place en 1948 et aboli en 1991.

Rajesh Jantilal/AFP


À titre d’exemples, le sociologue Michel Wieviorka cite l’apartheid sud-africain (Libération, 25 novembre 2017) et la philosophe Magali Bessone pointe la « ségrégation légale » aux États-Unis (in La Croix, 30 novembre 2017). Ainsi, selon l’historien Pap Ndiaye,

« Le “racisme d’État” suppose que les institutions de l’État soient au service d’une politique raciste, ce qui n’est évidemment pas le cas en France. » (Le Monde, 18 décembre 2017)

Le troisième rejet se présente comme républicain et vise les « Indigènes de la République », mouvement devenu parti en 2010. Par une opposition frontale à ce courant, il s’agit de déjouer une supposée offensive racialiste, séparatiste, communautariste et islamiste.

D’abord, selon l’éditorialiste Barbara Lefebvre, un « séparatisme racial » se cacherait derrière la dénonciation d’un « prétendu racisme d’État des blancs » et de leur « racisme atavique », intergénérationnel (Le Figaro, 21 novembre 2017).

Ensuite, selon d’autres éditorialistes classés à droite, l’offensive politique du mouvement indigéniste serait partout : à l’école, au sein de la lutte contre le sida via Act Up (Le Point, Clément Pétreault, 10 mai 2018), de l’« aide aux migrants » via la Fasti, du féminisme via le Planning familial, du syndicalisme étudiant via l’Unef (L’Express, Paul Conge, 20 mars 2019). Enfin, cette offensive serait aussi religieuse, car, selon le militant laïc Naëm Bestandji, elle donne « la priorité à la lutte contre les discriminations envers “les musulmans” (dévoyée par le terme “islamophobie”) » (Le Figaro, 27 novembre 2017) et, selon l’éditorialiste Guylain Chevrier, on « voit poindre concrètement ici cette frange de l’islam qui se radicalise » (Atlantico, 8 décembre 2017).

Face au risque de sombrer dans de nouvelles formes de racisme, il faut alors, selon Bestandji, conserver « notre modèle universaliste français, un idéal à préserver, car le seul respectueux de chaque être humain » (Le Figaro, 27 novembre 2017).

Le racisme d’État existe même si l’État n’est pas nécessairement raciste
La position selon laquelle on peut parler de racisme d’État à propos de la France contemporaine est minoritaire. Et, dans ce cas, la prudence est toujours de mise. Se dessine alors un champ de légitimation sous conditions de l’usage du concept.

Selon la sociologue Nacira Guénif, il s’agit de viser un « racisme qui a fini par s’installer dans les instances de l’État, à tous les niveaux » (citée in Libération, Frantz Durupt, 25 novembre 2017). Celui-ci se repérerait dans les « contrôles au faciès » et dans la politique migratoire, notamment la « manière dont sont traités les étrangers venant demander des papiers dans les préfectures » et la « (non-)gestion de la crise des migrants ».

RACISME et ANTIRACISME File-20200518-83384-1x35cwf.jpg?ixlib=rb-1.1
La Marche solidaire pour les migrants Vintimille-Londres, à Paris, le 17 juin 2018.
Jeanne Menjoulet/Flickr, CC BY-SA


Que ce soit aux États-Unis ou en France, selon la journaliste Rokhaya Diallo, ce sont cependant les « contrôles d’identité » et les « violences policières contre de jeunes Noirs » qui illustrent le plus le racisme d’État (Courrier international, 29 décembre 2017). Le rôle de l’école est rarement mis en question sauf par les nouveaux militants antiracistes qui associent le racisme d’État au « manque de moyens » pour les établissements où « la plupart sont immigrés », à la « concentration de noirs et d’arabes dans certaines filières professionnelles » (Challenges, 18 décembre 2017). Enfin, lorsque l’expression « racisme d’État » est légitimée, on partage l’idée qu’il faut différencier « racisme d’État » et « État raciste », car les pratiques discriminatoires ne se traduisent pas nécessairement dans le droit et sont même interdites.

La question centrale de l’intentionnalité
Cependant, une tribune de la « militante féministe et antiraciste » Mélusine (Libération, 23 novembre 2017) et une interview du philosophe Pierre Tévanian (L’Obs, 3 décembre 2017) donnent à voir une légitimation sans détour du concept de « racisme d’État ».

D’une part, selon Mélusine, il faut une terminologie pour « rendre dicible » et exprimer la « réalité – non pas biologique, mais sociale – » de la race. Le concept permet alors d’interroger « les choix de politiques publiques », notamment de circulaires qui contournent la loi.

Le statut des Territoires d’outre-mer, les politiques migratoires et sécuritaires, les circulaires spéciales « Roms », la double peine pour les étrangers, les emplois sous condition de nationalité, la loi de 2004 sur « le voile », valideraient l’hypothèse d’un racisme d’État qui, selon Tévanian, « institue de manière active et volontariste une discrimination ».

D’autre part, Mélusine soutient qu’« une approche systémique du racisme » combine le fait qu’il est à la fois une « idéologie » et « un système structurant où le stigmate racial détermine la position sociale relative des personnes ». Il faut alors changer de point de vue en s’intéressant davantage aux « résultats » qu’aux « intentions » racistes selon le sociologue Eric Fassin, l’historienne Stéphanie Roza et la militante communiste Fabienne Haloui (L’Humanité, 16 avril 2018).

Ainsi, dans ces conflits, la question de l’intentionnalité raciste est centrale, avec d’un côté une traque de qui est raciste et de l’autre une définition de ce qui est raciste. Or, il nous semble que, si l’on ne s’émancipe pas du « qui », on ne peut pas saisir les dynamiques contemporaines du racisme, de son institutionnalisation en particulier. C’est le racisme institutionnel dans la police qui a tué George Floyd, plus qu’un policier.

Xavier Dunezat, sociologue rattaché au CRESPPA et l’URMIS est co-auteur de ce texte, et co-auteur de l’ouvrage qui vient de paraître L’ouvrage « Du racisme d’État en France », éditions Les Bords de l’Eau, 2020.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Ven 3 Juil - 2:10

- L'histoire des Blancs, Neil Irvin Painter
- QUAND DES BLANCS PARLENT ENTRE EUX DE "PRIVILÈGE BLANC" en pour ou en contre
comment les communisateurs déracisent le prolétariat universel
- TONI MORRISON ET LES AUTRES
- vous avez dit Color Blind ?
CE POINT AVEUGLE  ET NOIR D'UN RACISME QUI S'IGNORE
RACISME et ANTIRACISME 21TzF5OrhKL
2011 / fr 2019
La notion de race fait un retour violent dans le langage et les conflits sociaux en France, comme si le sujet avait été refoulé, alors que les États-Unis n'ont pas cessé de s'y confronter. Les minorités visibles n'hésitent plus à revendiquer leur couleur ou leur identité racisée. L'historienne afro-américaine, Nell Irvin Painter, adopte un point de vue révolutionnaire : au lieu d'étudier la négritude, elle interroge la construction de la notion de race blanche, depuis les Scythes de l'Antiquité jusqu'aux catégories raciales utilisées dans l'Occident d'aujourd'hui. Elle étudie la manière dont la désignation de Blancs et de Non-Blancs a évolué selon les croyances politiques et la représentation des corps. Elle montre les constructions du regard sur la couleur, et leurs liens avec les critères esthétiques de la beauté féminine. Elle étudie les passages entre les pensée américaines et européennes au XIXe siècle. Elle analyse les catégories raciales qui définissent les identités aujourd'hui.

Formée à l'université de Berkeley, et aussi à l'université de Bordeaux, Nell Irvin Painter est diplômée de Harvard. Professeure d'histoire à l'université de Princeton, elle est spécialiste de l'histoire du Sud des États-Unis. Parmi ses livres les plus connus figurent "The History of White People" (Norton 2011), "Creating Black Americans : African-American History and its Meanings. 1619 to the present" (Oxford 2005), "Southern History Across the Color Line" (UNC 2002), "Standing at Armageddon : The United Stats, 1877-1919" (Norton 1989)
30 juin
TONI MORRISON ET LES AUTRES
dans la logique de ce qui précède, s'intéresser à la production particulièrement artistique des catégories de la population soumises au racisme, on peut se reporter à mes écrits précédents sur le jazz depuis la fin des années 90, ou aux auteurs que j'ai déjà conseillés. Parmi eux, ici ou là, des écrivains au sens de la littérature ou de la poésie. Je ne peux conseiller que ceux que j'ai lus et parmi eux et elles : Chester Himes, Richard Wright, James Baldwin, Alice Walker pour les États-Unis, Léon-Gontran Damas, Frankétienne, Édouard Glissant, Maryse Condé, Fabienne Kantor pour les Antilles-Guyane françaises, Nicolás Guillén pour Cuba, Ahmadou Kourouma, Kateb Yacine, Aminata Sow Fall, Véronique Tadjo

je donne personnellement une place particulière à Toni Morrisson pour ses romans qui permettent de plonger plus profondément qu'aucuns autres, par la voix d'une femme, dans la nature du racisme étatsunien. Le plus important à mon avis concernant ce sujet est Beloved, 2017, que j'ai entrepris de relire, mais je conseille aussi la série de six conférences de 2016 réunis dans et L’Origine des autres

deux articles de 2018 : Toni Morrison : aux origines du racisme, la violence du langage, et Toni Morrison remonte aux sources du racisme américain, et quelques entretiens : en 2006 : La race ne dit rien de la personne que vous avez en face de vous en 2009 à l'Express et aux Inrocks, ou autres

rien de tels pour remettre les pendules à l'heure des accusations tous azimuts, en France, de racialisme



vous avez dit Color Blind ?

CE POINT AVEUGLE  ET NOIR
D'UN RACISME QUI S'IGNORE



Frances Cress Welsing (18 mars 1935 — 2 janvier 2016)
une forme sournoise de racisme consiste à ne pas parler du tout, ou jamais positivement, de ce que produisent les non Blancs occidentaux. Elle se double d'une autre forme, davantage du racialisme, qui consiste, quand on en parle, à préciser « athlète noir, chanteur noir, écrivain noir »... ce qui dans certaines circonstances peut s'avérer nécessaire, mais fait généralement qu'on les singularise -"racise"-, au sens d'ajouter ce qui n'a rien d'indispensable s'agissant d'écrivains, scientifiques ou théoriciens. Écrit-on « Patrick Modiano, écrivain blanc » ? « Gilles Deleuze, philosophe blanc » ?

ceux qui, de la dernière heure théoricienne, s'expriment aujourd'hui sur la question qu'ils nomment "de la race", bien pratique jusqu'à pouvoir l'évacuer puisque "les races n'existent pas"*, plutôt que sur la question raciale, en clair le racisme, qui tue, n'en parlent que sous l'angle racisme-antiracisme, parfois intégrée à une critique du mode de production capitaliste, ce qui vaut toujours mieux qu'en faire une question morale ou strictement politique, ceux-là, donc, quand et où ont-ils parlé ou parlent aujourd'hui des productions artistiques, littéraires, poétiques, scientifiques, et, cerise sur le gâteau, théoriques, de non Blancs occidentaux ? Quand ? Où ? Circulez, y'avait rien à voir, dans le noir

* voir 27 juin 2020, le so called "Color Blind" Yves Coleman, entre 90% de textes sur l'antisémitisme : « Groupes raciaux » et haplogroupes aux Etats-Unis... et ailleurs

... première Déclaration de l’UNESCO en 1950, qui fut ensuite remise en cause par un certain nombre d’anthropologues, rejoints aujourd’hui par toutes sortes de gauchistes voire de libertaires : « Les graves erreurs entraînées par l’emploi du mot “race” dans le langage courant rendent souhaitable qu’on renonce complètement à ce terme lorsqu’on l’applique à l’espèce humaine et qu’on adopte l’expression de “groupes ethniques”. ». Soixante-dix ans plus tard, malheureusement, même sous couvert de concepts comme « population », « ethnie » et « groupe ethnique » on continue à parler de la race, comme en témoigne en France l’utilisation des termes « Black », « Blanc » et même « Beur », par des militants qui se proclament antiracistes...

et sauf de date récente, l'ultragauche théorique en particulier s'est caractérisée par une ignorance totale et un mépris complet pour les théoricien.ne.s noir.e.s, de Frederick Douglass à Angela Davis, en passant par WEB Dubois, CLR James, Frantz Fanon, Édouard Glissant, Stuart Hall, Paul Gilroy, Frances Cress Welsing*... ?

RACISME et ANTIRACISME 41MjKAgnxTL._SX340_BO1,204,203,200_
1970 !
Pour Welsing, les Blancs ont conscience de la faiblesse de leur nombre et de leur inadéquation. Par conséquent, ils adoptent une série de « mécanismes de défense » visant à contre-carrer ses sentiments d'infériorité :

- répression du sentiment d'infériorité en niant son existence ;
- mépriser les Noirs et les autres personnes de couleur;
- bronzage et maquillage pour acquérir de la couleur ;
- élaboration de mythes relatifs à la supériorité génétique des Blancs ;
- projection de leur haine et de leurs désirs sexuels sur les personnes du Tiers-Monde en prétendant que c'est eux qui à la fois détestent et désirent sexuellement les Blancs ;
- focalisation excessive sur le corps mais éloigné du sexe à cause de l'incapacité à produire de la couleur ;
- division des personnes du Tiers-Monde afin d'en faire des minorités ;
- imposer le contrôle des naissances aux populations du Tiers-Monde afin d'accroître la part de la population blanche.

quand on n'appartient pas à telle catégorie particulière de l'humanité, qu'on ne vit pas ce qu'elle vit donc ne peut penser ce qu'elle pense, la seule façon de la connaître de l'intérieur est de s'intéresser à ce qu'elle produit, des œuvres qui la caractérisent comme telle aussi bien qu'universellement. Et le reste est littérature, au sens ironique et péjoratif où l'utilise Verlaine dans son Art poétique, qui sur ce point ne commit pas d'impair


Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Ven 10 Juil - 7:35

d'hier, complété
D'UNE DIFFÉRENCE UN PRIVILÈGE ?
d'une notion contestable au déni du racisme structurel

focaliser sur  le "privilège blanc" permet de masquer
la pertinence théorique des notions de Blackness et Whiteness
recouvrant des faits objectifs avec leurs implications sociales
dans le racisme structurel du capitalisme
1.
les races n'existent pas. Il existe des différences de couleurs de peaux et autres données physiques. La couleur de peau des êtres humains est un attribut de la nature. La race est une attribution historique et sociale

2.
la couleur de peau ne confère aucun avantage a priori, hormis une adaptation aux conditions de vies, l'ensoleillement par exemple. Les caractères physiques et physiologiques peuvent conférer des facultés différents aux différentes types humains, par exemple la voix, ou la musculature par son adaptation aux conditions de vie différentes, naturelles et sociales

cet attribut constitue le fait d'être "noir", "blanc", etc. et définit la Blackness, "noirceur" ou "négritude"*, et la Whiteness, "blanchité". Il n'y a rien de répréhensible d'en analyser les conséquences sociales et sociétales ni à en chercher les causes, les racines historiques et économiques

* termes ambivalents du fait de leurs connotations positives ou négatives surajoutées

3.
la construction historique et sociale des différentiations hiérarchisées entre "races" est consécutive à la traite esclavagiste et au colonialisme. Le racisme a consisté à objectiver ces hiérarchies de qualités physiques et psychiques, et à les relier de façon causale

4.
de ce traitement différent des êtres humains selon leur couleur de peau a résulté des préjudices pour les populations dominées par les pouvoirs de nations à population majoritairement blanches, et comparativement des avantages relatifs à ces populations dans des situations de concurrence, pour l'emploi, le salaire, le logement, la considération culturelle...

5.
tout cela n'est qu'objectivité constatée empiriquement et prouvée scientifiquement par l'histoire du passé et la sociologie contemporaine. Peu de personnes en remettent en cause la réalité, mais beaucoup y trouvent des justifications historiques et encore actuelles, qui constituent le fait du racialisme et du racisme

6.
qui subit le racisme par une différence de priorités dans l'accession aux divers degrés de hiérarchie sociale et sociétale peut y voir personnellement un privilège accordé à qui n'est pas comme lui par la couleur de peau ou autres attributs physiques (dont le sexe, homme ou femme, l'âge, l'état de santé, les handicaps...)

7.
partir de ce privilège ressenti pour analysé la pertinence de la notion de "privilège blanc" tend à faire oublier tout ce qui précède. Que l'on y soit favorable ou non, nier le "privilège blanc" permet d'effacer les réalités vécues des différences de traitement social et sociétal selon les couleurs de peaux. C'est évident du point de vue raciste ou racialiste, moins discuté quand il s'agit de mettre en avant une communauté d'intérêts de classe face à l'exploitation et aux dominations au travail et dans la société

la vision universaliste abstraite de la révolution prolétarienne constitue un négationnisme des différences de fait, et partant justifie de ne pas y prêter attention, jusqu'à condamner tout antiracisme comme s'opposant à la « contradiction principale » :  « Le racisme existe comme dispositif de division du prolétariat », ou parce qu'elle débouche sur les mesures juridiques de compensation, la "discrimination positive", qui, ne remettant pas en cause l'État et le Capital, sont effectivement réformistes :  « L’intersectionnalité de manière générale a toujours été pensée dans le but de constituer des cadres juridique. Il s’agit paradoxalement de renforcer l’Etat je pense. »

mais ni plus ni moins réformistes que les avantages sociaux accordées par la démocratie politique de l'État providence en terme de salaire différé (revenu minimum, allocations familiales, logement social...). Dans cette optique de vérités sélectives alimentant une présupposition idéologique, on condamne aussi condamner le syndicalisme ou la lutte revendicative dans le cadre du capitalisme, mais ce faisant on dénie la légitimité des dominés et exploités à se défendre, et risque de se retrouver en "révolutionnaire" sur le terrain de l'adversaire, qui n'en demande pas tant

les mesures étatiques contre le racisme ne sont pas plus contre-révolutionnaires que les augmentations de salaires ouvriers, ou bien il faut considérer comme "meilleures conditions révolutionnaires" les pires de ces deux points de vue, une position hasardeuse au regard du passé. Et puis, n'est-ce pas, qui peut d'un point de vue révolutionnaire condamner la fin de l'esclavage, de l'apartheid, de la ségrégation raciale, les lois antiracistes ?

8.
en conclusion, la notion subjective de "privilège blanc", pour non complètement incongrue qu'elle est relativement à ce qu'elle nomme mal, ne présente aucun intérêt pour comprendre ce qui relève de la réalité des différences sociales du fait d'être "noir" ou "blanc"

la focalisation sur  le "privilège blanc" permet de masquer l'utilité théorique des notions objectives de Blackness et Whiteness

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mer 15 Juil - 10:03


vous avez dit
RACISME STRUCTUREL :
de quoi ?
encore un article - une interview - et un livre qui parlent de "racisme systémique", de "racisme structurel". On sait que je n'ai rien contre ce label, mais encore faut-il dire de quelle structure est né et perdure le racisme. Je renvoie à mes interventions précédentes depuis la critique du Capital dans celle de l'État comme racialisateur et structurant le racisme sociétal

on peut certes pratiquer une « sociologie de la domination », mais le risque est d'en rester à une analyse phénoménologique. À lire cette interview, la sociologue américaine n'évite pas ce risque, et la traduction en français celui d'assimiler le problème à la situation américaine. Cela n'enlève rien à la description du déni, dans des termes qui n'épargnent pas son fonctionnement psychique à gauche et plus encore à l'ultra-gauche empêtrée dans ses présupposés universalistes anti-antiracistes

incidemment, paraît dans le même Libé un article de Louis-Georges Tin, ancien président du Conseil représentatif des associations noires (CRAN) : Palais de l’Elysée, palais du négrier. Quand on sait que Macron compte résoudre la chasse au faciès en équipant les policiers de "caméras-piétons", il a fait mon 14 juillet

Inauguré en 1720, il y a trois cents ans exactement, le palais de l’Elysée a été bâti et financé par Antoine Crozat, pour y loger sa fille et son gendre Louis-Henri de la Tour d’Auvergne. Selon Saint-Simon, Antoine Crozat était à l’époque «l’homme le plus riche de Paris», par conséquent du royaume. En 1701, il avait obtenu la fourniture en esclaves des colonies espagnoles, ce qui représentait bien entendu un marché colossal. Il devint bientôt le premier propriétaire de la Louisiane, et créa la Compagnie de la Louisiane, qui était à l’époque une colonie française. Il dirigea également la Compagnie de Guinée. En d’autres termes, Antoine Crozat fut certainement le plus grand négrier de l’histoire de France.

si racisme structurel il y a, et si cette structure est celle du capital, alors c'est la fonction du racisme pour ce mode de production qu'il s'agit de cerner, et gage que les explications sur la division, la fragmentation du prolétariat, son "kaléïdoscope" (TC 26) sont très courtes, puisqu'elles présupposent l'unité du prolétariat comme sujet constitué d'une révolution communiste, et son unicité, deux points non démontrés théoriquement, croyances comblant un manque par un faux espoir
Robin DiAngelo :
« Les Blancs se protègent, eux et leur racisme, pour maintenir le statu quo »

Paloma Soria Brown, Libération, 14 juillet 2020


RACISME et ANTIRACISME 1325059-prodlibe-2020-0821-manifestation-a-paris-contre-les-violences-policieres
Lors de la manifestation organisée par le Comité Adama, le 13 juin, place de la République, à Paris.
Photo Cyril Zannettacci.

La sociologue américaine analyse les difficultés qu’éprouvent les Blancs à dénoncer les inégalités raciales systémiques. Un déni qui passe par l’émotion, l’indignation, la colère d’être accusé… de racisme.
En août 2018, Lisa Benson Cooper est renvoyée de son poste de reporter sur une chaîne de télévision américaine. Plusieurs de ses collègues, blancs, se sont plaints aux ressources humaines d’un article que la journaliste, noire, a partagé sur les réseaux sociaux, titré «Comment les femmes blanches utilisent leurs larmes pour faire taire les femmes noires». Coïncidence, au même moment de cette année-là, paraît en anglais le percutant essai Fragilité blanche, qui deviendra vite un best-seller et un incontournable de la lutte antiraciste. Publié en français (Les Arènes, 2020) en plein soulèvement international contre le racisme et les violences policières, l’ouvrage de la sociologue américaine Robin DiAngelo, spécialiste des «whiteness studies», analyse avec minutie les difficultés qu’éprouvent souvent les Blancs à parler de racisme.

RACISME et ANTIRACISME 415TcrOPV8L RACISME et ANTIRACISME 51JnjXwg08L._AC_SY400_
images ajoutée
Pourquoi est-il si difficile de parler de racisme quand on est blanc ?
La sociologue américaine Robin DiAngelo a passé vingt ans à étudier cette question dans des ateliers sur la diversité et le multiculturalisme. Elle en a tiré un concept fondamental pour comprendre le rapport des Blancs au racisme : la fragilité blanche, un mécanisme de défense ou de déni qui permet de détourner la conversation, empêchant d’identifier le racisme systémique qui persiste dans nos sociétés. Et donc de le combattre. Dans ce livre devenu un phénomène aux États-Unis, en tête des meilleures ventes depuis deux ans, Robin DiAngelo nous donne les clés pour être véritablement antiraciste.

« Une dénonciation méthodique, précieuse et irréfutable, un appel à l’humilité et à la vigilance. » THE NEW YORKER

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Bérengère Viennot. Préface de Maxime Cervulle.

Forte d’une expérience de vingt ans dans la formation à l’antiracisme, la chercheuse remarque les mêmes comportements. Pour éviter de s’interroger sur leurs biais racistes et s’épargner ce qu’elle appelle un «stress racial», de nombreux participants blancs détournent l’objet de ces conversations où ils se sentent personnellement attaqués, en ayant recours à la colère, l’indignation… ou aux larmes. Jamais condescendant, Fragilité blanche invite les Blancs à dépasser ces stratégies de contournement, souvent inconscientes, et à devenir de vrais alliés de ce combat essentiel pour l’égalité.

Aux Etats-Unis puis dans le monde, le meurtre de George Floyd par un policier fin mai a déclenché de larges manifestations contre le racisme. En tant que société, comment la façon dont nous abordons la lutte contre le racisme est-elle en train d’évoluer, selon vous ?

La nouveauté, c’est que nous utilisons des concepts que nous n’utilisions pas auparavant. Celui de «racisme systémique» : je ne pense pas qu’on puisse comprendre le racisme si on ne comprend pas qu’il est intrinsèquement structurel. Or, jusqu’à récemment, nous parlions du racisme comme étant limité à des actes isolés que seules certaines personnes commettent. Et les personnes qui commettent ces actes étaient considérées comme de «mauvaises personnes». Le problème est que, tant que c’est la façon dont nous définissons le fait d’être raciste, nous exemptons tous les Blancs du racisme systémique. Et nous laissons la possibilité aux Blancs d’être sur la défensive lorsqu’on parle de racisme, parce que si l’on croit que les actes racistes sont uniquement commis par de mauvaises personnes souhaitant sciemment en heurter d’autres, alors pointer du doigt le comportement raciste de quelqu’un remet en question sa moralité. C’est ce qui poussera cette personne à faire preuve de résistance : elle cherchera à se défendre. En réalité, pratiquement tous les actes racistes sont commis par des personnes blanches qui, elles, diraient : «Je ne suis pas raciste, vous savez.»

Dans cette perspective, qu’apporte le concept de «fragilité blanche» à la lutte antiraciste ?
Jusqu’à présent, les Blancs ont pu très mal se comporter sans avoir à rendre de comptes. Le concept de «fragilité blanche» contribue à ce qu’ils soient tenus pour responsables de leurs actes. Ce terme montre à quel point il suffit de peu pour que les Blancs se réfugient dans l’indignation ou adoptent une attitude défensive dès que leur vision du monde, leurs présupposés, leurs comportements ou leurs avantages raciaux sont remis en question. Suggérer qu’ils bénéficient des inégalités raciales est un défi. En fait, c’est un cercle vicieux. Ainsi, récemment, quelqu’un a souhaité organiser une présentation de Fragilité blanche sur son lieu de travail. Mais certains Blancs, très contrariés par cet événement, l’ont fait annuler. En fin de compte, c’est une occurrence de la fragilité blanche qui a empêché une conversation sur la fragilité blanche d’avoir lieu.

Contrariété, indignation… Comment se fait-il que les émotions puissent faire obstacle à la lutte contre le racisme ?
Le racisme, c’est le statu quo. Si je suis blanc et que parler de racisme provoque chez moi un inconfort, cela signifie que je suis à l’aise dans une société raciste. Par ailleurs, lorsque l’on est en situation de pouvoir, on peut utiliser ses sentiments pour détourner l’attention du vrai problème et conserver ce pouvoir. Si quelqu’un me dit que j’ai tenu des propos racistes, que je me mets à pleurer et que je me sens attaqué au point d’appeler la police, ma réaction est émotionnelle, mais elle est soutenue par le pouvoir que je détiens. Je fais référence à la vidéo devenue virale fin mai, dans laquelle une Américaine blanche, Amy Cooper, accuse à tort un Afro-Américain, Christian Cooper, de l’avoir menacée. C’est une illustration parfaite de la fragilité blanche et de ce qu’on appelle les «larmes des femmes blanches». Amy Cooper s’attendait à ce que la police prenne son parti. Remarquez à quel point ses émotions lui ont servi d’arme.

Existe-t-il d’autres obstacles ?
Bien sûr. D’abord, l’idéologie individualiste dans les cultures occidentales. Grâce à elle, les Blancs deviennent des individus. Nous ne sommes pas marqués par notre race, on ne nous apprend pas à la considérer comme ayant une signification quelconque. Par conséquent, si vous, en tant que membre d’une minorité ethnique, avez des problèmes liés à la race, ce ne sont pas les miens. Nous nous déchargeons donc du fardeau psychique, intellectuel et émotionnel de la race sur les personnes noires. Ensuite, le fait est qu’en tant que Blancs, nous intériorisons la croyance en notre supériorité. C’est ce qui est le plus difficile à admettre. Pourtant, les images de la blancheur comme idéal sont bel et bien omniprésentes dans les cultures occidentales. Enfin, vous avez l’idéologie de la méritocratie : on nous apprend que tout ce que nous obtenons est le résultat de notre travail acharné et de nos valeurs supérieures, et non le résultat de privilèges obtenus dans une société qui valorise les Blancs au détriment des autres. La conjonction de ces phénomènes fait qu’en tant que personne blanche, je suis rarement en dehors de ma zone de confort raciale et que je peux vivre la majeure partie de ma vie sans jamais avoir à affronter cette vérité.

Parler «des Blancs» en général ne comporte-t-il pas le risque d’alimenter les préjugés racistes ?
Comme cette idée est pratique ! La notion de fragilité blanche appartient à la sociologie de la domination, c’est-à-dire la façon dont les groupes dominants maintiennent leur position sociale et intimident les autres pour qu’ils ne contestent pas ces positions. Oui, nous sommes tous des individus uniques, bien sûr, et je ne prétends pas connaître l’histoire de chaque personne blanche qui lit cet article en ce moment. Et cela s’applique aussi à moi : j’ai grandi pauvre, j’ai un handicap, vous ne savez pas ces choses-là sur moi. Vous ne savez pas à quel point j’ai souffert. Mais nous sommes aussi membres d’un groupe social. Pensez-vous que si j’étais noire, j’aurais vécu ces expériences exactement de la même façon ? Ou pensez-vous qu’une personne noire est confrontée au racisme, en plus de tout le reste ?

C’est-à-dire ?

En vertu de mon appartenance à ce groupe social, et du fait qu’on m’a attribué la catégorie de «blanche», il est possible de prédire un certain nombre de choses. Si ma mère et moi allons survivre à ma naissance, ou combien de temps je vais vivre ! Cela signifie que nous recevons des messages collectifs de la société, tout autour de nous. Nous devons donc être prêts à analyser ces messages et à observer ce qui se passe au niveau général et pas seulement particulier. Lorsque nous aurons vraiment atteint un monde où la couleur n’importe pas, ce qui n’est pas encore le cas, alors, peut-être qu’il ne sera plus utile de généraliser. En attendant, nous devons examiner ce que signifie le fait de se voir attribuer des statuts sociaux différents.

L’histoire française du racisme diffère fortement de celle des Etats-Unis. La «fragilité blanche» peut-elle trouver une résonance ici ?
Je vais vous répondre en vous racontant quelle est mon expérience dès que je me rends hors des Etats-Unis pour parler de mon livre. Ce sont généralement des Noirs qui font appel à moi. Donc, j’arrive, et là, des Blancs me prennent à part et disent : «Le racisme est un problème américain. C’est différent ici. Vous ne connaissez pas notre culture. Ici, le racisme n’existe pas.» Sauf que, dans ces mêmes endroits, les Noirs qui m’ont fait venir me prennent à part et disent : «Oh ! mon Dieu, s’il vous plaît, venez ici et réveillez ces gens. Parce que tout ce dont vous parlez, c’est ce que nous vivons !» Donc nos histoires sont peut-être différentes, mais la fragilité banche et les conséquences des discriminations raciales sont les mêmes.

En France, l’argument «je ne vois pas la couleur» est souvent utilisé comme preuve que le racisme n’existe pas. Quelle est sa légitimité selon vous ?
Il suffit de faire un parallèle avec le sexisme. Imaginez que je sois l’une des rares femmes dans un milieu de travail majoritairement masculin et que je sois victime de misogynie. Je vais voir mon chef et je lui explique que je ressens de l’hostilité en tant que femme dans cet environnement. Et il me regarde et me répond : «Je ne vous vois pas comme une femme.» Ce serait absurde ! Cette idée selon laquelle nous ne voyons pas la couleur l’est tout autant… Je n’oublierai jamais ce jour où je me suis trouvée à côté d’un homme noir qui organisait un atelier sur le racisme. Une femme blanche lui a dit : «Je ne vous vois pas comme un Noir.» Il l’a regardée et lui a répondu deux choses. La première était : «Y a-t-il un problème avec votre vue ? Parce que je suis noir, et je suis presque sûr que vous le voyez.» Et la seconde : «Comment allez-vous voir le racisme, dans ce cas ? Parce que je suis noir et cela rend mon expérience différente. Si ne pouvez pas l’admettre, alors vous refusez ma réalité.»

Le fait que vous soyez blanche influe-t-il sur la portée de votre message ?
Je pense que c’est en partie dû à des gens comme moi, des personnes blanches, qui ont transmis ce message encore et encore jusqu’à ce qu’il finisse par être entendu à plus grande échelle. Comme la chercheuse et militante britannique Peggy McIntosh, qui a inventé le concept de «privilège blanc». Les Noirs en parlent depuis des centaines d’années. Mais le racisme entraîne une forme de partialité implicite : lorsque les Blancs valident ce que disent les Noirs, alors les autres Blancs sont plus susceptibles de le croire. Nous sommes paradoxalement considérés comme les plus objectifs sur le plan racial. Personnellement, je pense que nous sommes les plus subjectifs parce que nous sommes ceux qui bénéficions le plus du statu quo.

Quels conseils avez-vous à donner aux Blancs qui veulent s’investir dans la lutte contre le racisme ?

J’ai un tatouage sur le bras qui dit «Sois courageuse». Les Blancs doivent prendre des risques. Il faut du courage, vous savez, même si je ne compare jamais cela aux risques que prennent les Noirs… sinon nous en prendrions plus souvent. Dans la société, il existe ce que j’appelle la «solidarité blanche», l’accord tacite entre les Blancs pour que nous nous protégions, nous et notre racisme, pour que nous maintenions le statu quo. Aller contre cette solidarité a un coût : nous sommes rejetés par les autres Blancs, jugés trop sensibles, dénués de sens de l’humour. C’est pour cela que je crains que, sans système de soutien, la sincérité et les efforts des Blancs investis actuellement dans l’antiracisme ne s’estompent. Il va y avoir encore pour longtemps des résistances. C’est une chose de manifester dans la rue, c’est important. Mais retournez sur votre lieu de travail et défiez votre administration. Ce sera difficile d’une manière très différente. Nous devons donc trouver comment nous allons soutenir ce mouvement au-delà des protestations et des symboles.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mar 4 Aoû - 11:52


L'ÉLYSÉE RECLUS ?
j'ai annoncé que LE FORUM N'EST PLUS ALIMENTÉ QU'EN LIEN AU 'PROJET ARTISTIQUE GLOBAL'. Je renvoie donc qui ne verrait pas le rapport au 'tableau' V. Sortis des soutes, tout y était, y compris les "ors de la République". Mais l'essentiel est que le racisme moderne, et donc capitaliste, est en France un produit direct de l'esclavage français, de la même manière que le mode de production capitaliste doit une forte proportion l'accumulation primitive dans le capitalisme marchand à la traite esclavagiste et au commerce triangulaire. L'Élysée est aussi en France le plus fort symbole du pouvoir politique, et de sa nature de monarchisme présidentiel héritée de l'ancien régime, d'avant la révolution qui n'a pas pu, ou voulu, jusqu'au bout, abolir l'esclavage. Le lien est donc direct, avec ou sans "travail de mémoire"

il est assez étonnant que cette histoire, au double sens du terme, ne soit pas sortie plus tôt, et plus surprenant qu'on ne l'évoque pas autant que l'on bavasse en tous sens et contre-sens sur le "privilège blanc", une manière finalement très "idéologie française" de tous l'éventail politique (et théorique) d'appeler à circuler, rien à voir

on se souvient en effet des attaques de Louis-Georges Tin, alors Président du CRAN, Conseil représentatif des associations noires,* contre les pâtisseries racistes au chocolat


* le Cran s'en est débarrassé : Radiation du CRAN de Louis-Georges Tin...


mais son article de Libération la veille du 14 juillet, Palais de l’Elysée, palais du négrier, plutôt pertinent quant à l'information historique, n'avait pas fait de deuxième vague. Vrai que ce n'est pas tout-à-fait l'histoire des Monuments français officiels selon Stéphane Bern...

voilà que France Culture a le bon goût d'y revenir dans une émission du 2 août, avec la participation d'un connaisseur, plus très jeune, Marcel Dorigny, "spécialiste de l’histoire de l’esclavage, de la colonisation et des mouvements indépendantistes et abolitionnistes", dont j'avais apprécié une conférence-débat à l'époque du bicentenaire de la première abolition de l'esclavage


Trois siècles après sa construction financée par un négrier, l'Élysée est un des derniers grands témoignages à Paris de l’histoire du commerce colonial. Les autres bâtiments prestigieux occupés par des esclavagistes ont disparu ou sont tombés dans l’oubli. Un travail de mémoire reste à accomplir.

RACISME et ANTIRACISME 838_gettyimages-142085239
Les jardins du palais de l'Elysée au milieu du XVIIIe siècle.  
Crédits : De Agostini Editorial - Getty
Sans un négrier, Antoine Crozat, le palais de l'Élysée n’aurait pas été édifié en 1720, avant d'être occupé par la marquise de Pompadour, Napoléon et depuis plus d'un siècle maintenant par les présidents de la République.

L’homme le plus riche de France au début du XVIIIe siècle, selon Saint-Simon, en a financé la construction pour le compte de son gendre, Louis-Henri de la Tour d’Auvergne, dans le cadre d’une stratégie, en vue d'intégrer la haute société aristocratique.

Antoine Crozat à la direction de la Compagnie de Guinée, l’une des plus importantes sociétés de commerce triangulaire, a bâti sa fortune en obtenant en 1701 le monopole de la fourniture en esclaves de toutes les colonies espagnoles.

Mais il n’est pas le seul grand acteur à l'époque.

À Paris, le Club de l’hôtel de Massiac, société de colons de Saint-Domingue et des Petites Antilles défend ses intérêts dans un bâtiment qui a disparu comme beaucoup d’autres, depuis les travaux haussmanniens, depuis les transformations de la capitale en profondeur, à partir de 1853 sous le Second Empire. Bâtiment sur la place des Victoires remplacé par l'hôtel de L'Hospital. Alors que les stigmates de l'esclavage sont encore nombreux aujourd'hui dans l'urbanisme des anciens ports négriers, Bordeaux et Nantes, notamment.

Reste le Palais de l'Élysée, mais aussi et dans une certaine mesure la Banque de France et la Caisse des dépôts.

L’ancien président du Conseil représentatif des associations noires (Cran), Louis-Georges Tin, a demandé au chef de l’Etat Emmanuel Macron, le 13 juillet dernier dans Libération, le lancement d’une enquête pour mettre en lumière tous les liens entre l’esclavage colonial et les grandes institutions de la République.

La Fondation pour la mémoire de l’esclavage, mise en place le 12 novembre 2019, doit travailler avec la ville de Paris à la création d’un monument et d’un lieu muséal dédiés.

L’historien Marcel Dorigny, membre du comité scientifique de cette fondation, plaide pour un mémorial et milite pour des explications aux quatre coins de la capitale où le passé colonial et esclavagiste est omniprésent.

RACISME et ANTIRACISME 838_1620495
Antoine Crozat, milliardaire sous Louis XIV et dont la fortune colossale construite grâce à la traite négrière a permis de financer l'hôtel d'Evreux, l'actuel palais de l'Elysée.
Crédits : Alexis Simon Belle / Musée national du château de Versailles


Le palais de l'Élysée s’est construit sur le dos d’esclaves
Le Toulousain Antoine Crozat, l’homme le plus riche de France au début du XVIIIe siècle, selon le courtisan et mémorialiste Saint-Simon, est un parvenu aux yeux de ses contemporains, un financier et négociant cupide, engagé dans toutes les affaires pouvant rapporter gros, à commencer par la traite négrière.

C’est sur décision du roi Louis XIV que cet homme né roturier prend la direction de l’une des plus importantes sociétés du commerce triangulaire créée en 1684, la Compagnie de Guinée, avec pour mission d’acheminer du port de Nantes, le plus grand nombre possible d’esclaves noirs vers Saint-Domingue et de remplacer sur l’île, le tabac par le sucre.

Le monopole qu’il obtient à partir de 1701 sur la fourniture d’esclaves aux colonies espagnoles, permet à Antoine Crozat d’amasser une fortune colossale.

L’auteur d’une biographie intitulée Le Français qui possédait l’Amérique. La vie extraordinaire d’Antoine Crozat, Pierre Ménard, évalue sa fortune en 1715, à la mort de Louis XIV, à 20 millions de livres, soit près de 300 milliards d’euros !  

De quoi acheter des châteaux par dizaines, de posséder un hôtel particulier dans sa ville de Toulouse et d’en acquérir un autre, prestigieux, sur l’actuelle place Vendôme, à l’endroit où se trouve maintenant le Ritz.

Quoique richissime, Antoine Crozat est maintenu à l'écart du système d'honneurs, moqué pour son inculture et sa vulgarité par la noblesse qui ne le fréquente que pour lui emprunter de l'argent.

RACISME et ANTIRACISME 838_ifn-22048444-1
Henri-Louis de la Tour-d'Auvergne, le comte d'Evreux premier propriétaire jusqu’en 1753 de l'Elysée, occupé ensuite par la marquise de Pompadour, Napoléon et les présidents de la république.
Crédits : Hyacinthe Rigaud / Bibliothèque nationale de France


Et c'est grâce à sa fortune bâtie sur la traite négrière qu'il s'ouvre les portes de l’aristocratie, en mariant sa fille - alors qu'elle n'a que 12 ans - à Louis-Henri de la Tour d’Auvergne, le comte d’Evreux.

Ce membre de la haute noblesse française, gouverneur de l'Île-de-France, profite de son beau-père en bénéficiant d'une dot de 2 000 000 de livres pour se faire construire un hôtel particulier, l’hôtel d’Évreux, qui prendra le nom d'hôtel de l'Élysée à la toute fin de l’Ancien Régime.

Le bâtiment est édifié entre 1718 et 1720 "en marge du Paris de l'époque, sur une simple chaussée bordée de masures au toit de chaume, dans une zone non urbanisée, mal vue, mal fréquentée... une zone boueuse, avec des marais qu'il a fallu assécher", souligne l'historien Marcel Dorigny, maître de conférence honoraire de l'université de Paris VIII, spécialiste de l’histoire de l’esclavage, de la colonisation et des mouvements indépendantistes et abolitionnistes.

Les marais des Gourdes rachetés par Louis-Henri de la Tour d’Auvergne sont des terrains ayant appartenu à André Le Nôtre, situés entre l'actuelle rue du Faubourg-Saint-Honoré menant au village du Roule et le Grand Cours, ce lieu de promenade créé par Colbert dans l'axe des Tuileries qui deviendra plus tard les Champs-Élysées.

RACISME et ANTIRACISME 838_gettyimages-1174764413_1
L’hôtel d’Evreux rebaptisé hôtel de l’Elysée puis palais de l’Elysée a été construit dans une zone marécageuse, sur une simple chaussée bordée de masures qui deviendra le faubourg Saint-Honoré.
Crédits : Getty


Il n'y avait sur place à l'époque que des jardins maraîchers, des bois et des pépinières.

L'hôtel d'Évreux, construit sous la direction de l’architecte Armand-Claude Mollet, est de modèle classique. Il comprend un vestibule d’entrée situé dans l’axe de la cour d’Honneur et des jardins, un corps de logis double en profondeur et un grand appartement ou appartement de parade partagé, en son milieu, par un grand salon ouvert sur le jardin.

Construit par l’architecte Armand-Claude Mollet, l'hôtel d’Evreux est bâti, comme il est d'usage à l'époque, entre cour et jardin. Crédits : 1726 / Bibliothèque nationale de France

Les décors intérieurs, de style Régence, sont l'œuvre d'un autre architecte : Jules-Michel Hardouin qui remplace Armand-Claude Mollet, entre 1720 et 1722.

RACISME et ANTIRACISME 838_ornements_hotel_devreux_1
Un trophée d’armes dessiné par l’architecte Jules-Michel Hardouin pour les ornements du futur palais de l’Elysée.
Crédits : Bibliothèque nationale de France / Gallica


Boiseries, fleurons, rosaces, dessus-de-porte et rinceaux ont été pour la plupart réalisés par le sculpteur Michel Lange.

RACISME et ANTIRACISME 838_ifn-32226609-1
L’hôtel d’Evreux au cœur d'un quartier métamorphosé dans le plan de la ville Paris, le plan de Turgot publié en 1739.
Crédits : Bibliothèque nationale de France


L'hôtel d'Évreux, à l'achèvement des travaux, est sacré "plus belle maison de plaisance des environs de Paris" par l'architecte Jacques-François Blondel, l'auteur des planches relatives aux palais et hôtels dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert.

L’hôtel d’Evreux décrit en 1725 comme un des plus considérables édifices à Paris, “tant par son étendue que pour la magnificence des décorations”, dans “Histoire de l’Elysée”, sur France Culture, le 24 avril 2007. Dans sa Description de la ville de Paris et de tout ce qu’elle contient de plus remarquable, l'observateur Germain Brice relève toutefois que :

Il n'y avait point autrefois de quartier plus négligé que celui-ci. C'était le plus malpropre de tous les faubourgs de Paris. On s'en éloignait à cause de la proximité du grand égoût [sic, France Culture y perd son orthographe], dont il est entouré, et qui répand aux environs - principalement en été - des exhalaisons insupportables. Mais le voisinage du cours et des belles promenades qui l'accompagnent ont fait aisément par-dessus cet inconvénient.

Les fortunes coloniales : fortunes mal acquises ?
Sans la fortune d’Antoine Crozat, sans la traite négrière, le palais de l'Élysée n’aurait sans doute pas vu le jour.  

Mais à l’époque, l’esclavage n’est pas mal perçu, il s’agit d’une activité légale, rappelle l’historien Marcel Dorigny :

La traite négrière est une des activités principales de tous ceux qui font du commerce maritime international, sachant que la France à ce moment-là, en plein essor colonial, vient de mettre la main sur la Louisiane. Au début du XVIIIe siècle, le Portugal est la plus grande puissance négrière, mais la France n’est pas trop mal placée, en arrivant en quatrième position, après l’Espagne et l’Angleterre. On dirait de nos jours qu’il s’agit de fortunes mal acquises puisque le commerce colonial repose sur l’importation dans les colonies d’esclaves noirs achetés sur les côtes africaines et sur le commerce de produits coloniaux : le café, le sucre, l’indigo... qui sont très demandées en France d’abord, puis dans toute l’Europe et qui sont le fruit du travail des esclaves. Mais pour la France, comme pour l’Angleterre, cette exploitation n’est possible qu’à l’extérieur du sol européen. Il n’y a pas et de longue date d’esclaves en France. C’est la devise de la monarchie : la terre de France rend libre !

RACISME et ANTIRACISME 838_197728
“Manière dont on conduit les esclaves”, gravure du XVIIIe siècle.
Crédits : James Basire / Musée du quai Branly - Jacques Chirac

Dans les colonies, en revanche, l’esclavage va très tôt être introduit, selon une double législation.

Les lois qui sont valables en métropole ne le sont pas dans les colonies.

Et comme l’esclavage est une des sources de richesse du royaume, Marcel Dorigny assure qu’il n’est pas du tout déshonorant de le pratiquer, à l’époque :

Les négriers ont pignon sur rue, ils acquièrent des titres de noblesse, des châteaux, ils vont à la cour du roi, ils font des bals, ils font des fêtes, ils font des concerts, ils s’offrent des hôtels particuliers dans Paris... et pourquoi ne le pourraient-ils pas ? Non seulement leur activité est légale, mais elle est favorisée ! Il y a d’abord tout un appareil législatif et ensuite tout un appareil fiscal pour l’encourager, afin de satisfaire un besoin de main-d’œuvre, dans la crainte alors d’un effondrement des colonies. Entre 1740 et 1780, de 80 000 à 90 000 esclaves traversent chaque année l’Atlantique, c’est évidemment énorme ! C’est une ponction sur la population africaine !

Les multiples acteurs de la traite négrière à Paris
Les fortunes du XVIIIe siècle, les fortunes d’origine coloniale vont principalement être dépensées dans des dépenses de prestige, des dépenses de luxe, des dépenses fastueuses qui montrent une intégration dans la haute société.  

C’est le cas notamment à Bordeaux et à Nantes, où pour l’historien Marcel Dorigny :  

Les hôtels particuliers sont absolument extraordinaires. Et à Paris, il y a l'Élysée, mais aussi des palais construits à la Chaussée d’Antin et sur l’actuelle place Vendôme. C’est une volonté ostentatoire de montrer que l’on est riche !

Et parmi les grands acteurs à l’époque, un puissant colon de Saint-Domingue, le marquis de Massiac, vice-amiral de la flotte du Levant, fait d’un hôtel particulier, l’hôtel de L’Hospital dont il hérite sur la place des Victoires en plein centre de Paris, le siège d'un groupe de pression que l’historien Marcel Dorigny présente comme :
le lobby politique des colons de Saint-Domingue pour empêcher toute réforme du système colonial. Le nom officiel était - Société des colons de Saint-Domingue résidant à Paris - mais en réalité tout le monde l’appelait : le Club de l’hôtel de Massiac. Ce lobby était très bien implanté à la cour et dans les assemblées politiques et il avait des relais très puissants, parce que l’intérêt des colons était très lié à celui des armateurs des ports et des industriels fournissant les produits servant à acheter les esclaves : tissus, métaux, armes, alcools, vaisselles... Il y avait donc des intérêts intégrés à cette économie avant même le départ des bateaux et à leur retour également pour ceux notamment qui étaient à la tête de sucreries, puisque les produits qui revenaient des colonies étaient des produits bruts qui devaient obligatoirement être transformés en France.  

L’opaque passé colonial de Paris
Le palais de l'Élysée, transformé en profondeur depuis son édification, est aujourd’hui le dernier grand témoignage visible à Paris de l’esclavage colonial de la France.

Et pour cause : "au XVIIIe siècle, on a construit. Au XIXe siècle, on a démoli", résume l’historien Marcel Dorigny.

Le paysage parisien a en effet été considérablement remodelé sous Napoléon III par le baron Haussmann.

Le percement de grands axes et de larges avenues a fait disparaître des bâtiments emblématiques, à commencer par l’hôtel de Massiac détruit pour laisser passer la rue Etienne-Marcel, laquelle débouche sur la statue de Louis XIV sous l’autorité duquel le Code noir a été rédigé par Colbert...

RACISME et ANTIRACISME 838_maxbestof136160
Devant l’Assemblée nationale, la statue de Colbert, figure contestée par les mouvements antiracistes pour avoir rédigé sous le règne de Louis XIV le Code noir relatif à l'administration de l'esclavage dans les colonies.
Crédits : Vincent Isore - Maxppp


Et pourtant, remarque l’historien Marcel Dorigny, "personne aujourd’hui ne parle de faire tomber cette statue"...

Modifiés, remaniés, profondément transformés, quelques bâtiments d’origine coloniale subsistent à Paris.

La Banque de France et la Caisse des dépôts ont joué un rôle crucial dans l’histoire du commerce colonial.

La Banque de France se trouvait dans une des ailes de l’ancienne Bibliothèque nationale, rue Vivienne, dans le deuxième arrondissement de Paris, dans les locaux de la Bourse où s’achetaient et se vendaient les actions des compagnies de commerce et des navires.

Le commerce négrier nécessitait de très gros investissements et beaucoup de Français y ont participé, explique l’historien Marcel Dorigny :  

Les armateurs ne prenaient pas les risques seuls. Le capital était dilué. Le lancement d’une expédition négrière passait par la création d’une société en commandite, soit aujourd’hui une société par actions. Les parts étaient vendues dans le public. Des milliers de personnes, en obtenant des revenus de leurs investissements, participaient donc aussi à la traite négrière. Des milliers de personnes y compris Voltaire qui a pourtant écrit des textes très puissants pour dénoncer l’esclavage...

La Caisse des dépôts, toujours installée près de l’Assemblée nationale, est liée également aux capitaux issus de l’esclavage, ajoute Marcel Dorigny :  
Quand la colonie de Saint-Domingue en 1801 devient la république d’Haïti, la première république noire fondée par d’anciens esclaves, la France cherche à obtenir des réparations financières et reconnait en 1825 l’indépendance du territoire sous condition qu’Haïti rembourse aux colons leurs propriétés à Saint-Domingue. Ce que l'on appelle la dette de l’indépendance. La Caisse des dépôts, chargée des dossiers d’indemnisation, a géré les fonds transmis par la république d’Haïti jusqu’en 1883 et a largement profité de ces capitaux énormes pour des investissements, avant de les restituer aux anciens colons !

RACISME et ANTIRACISME 838_gettyimages-2668944
Gravure de la révolte des esclaves africains dirigée par Toussaint Louverture, à Saint-Domingue en 1790.
Crédits : MPI - Getty


Et parmi les hôtels particuliers d'origine coloniale, l'un d'entre eux à la Chaussée d’Antin dont il ne reste plus de trace a servi de résidence à Thomas Jefferson, pour mener "un train de vie assez somptueux", tient à remarquer Marcel Dorigny :  

Thomas Jefferson, ce grand personnage, troisième Président américain au début du XIXe siècle, rédacteur de la déclaration d’indépendance des Etats-Unis, mais en même temps propriétaire de centaines d’esclaves en Virginie...

RACISME et ANTIRACISME 838_186271
Thomas Jefferson, troisième président des Etats-Unis fut propriétaire de centaines d’esclaves en Virginie et s’inspira de son séjour dans un hôtel particulier à Paris, pour l’édification de sa maison de Monticello.
Crédits : Jefferson Vail / Musée franco-américain du château de Blérancourt


Quel travail de mémoire à Paris ?
A l’instar des investigations menée outre-manche par l’University College of London, une enquête sur les liens entre l’esclavage colonial et les grandes institutions de la République en France, comme le réclame l’ancien président du Conseil représentatif des associations noires (Cran), Louis-Georges Tin, pourrait permettre de mettre en lumière tous les rouages et toutes les traces du passé esclavagiste à Paris, assure Marcel Dorigny :  

Il y a des archives partout et disponibles. On connaît l’histoire des édifices. On connaît l’histoire des institutions. Il existe une commission de la Banque de France très informée à ce sujet. Les bâtiments liés au commerce colonial ne sont pas sortis du néant, dans la clandestinité. Ils ont pignon sur rue, ils ont été construits en toute légalité. Et même si l’origine des capitaux peut paraître honteuse, scandaleuse, aujourd’hui, ceux qui en ont bénéficié à l’époque ne s’en cachaient pas. Il n’y a pas d’histoire cachée !

RACISME et ANTIRACISME 838_maxradiofr012214
Des plaques explicatives exposées au public, le 2 décembre 2019, avant d’être posées dans les rues portant des noms de négriers, en plein centre-ville de Bordeaux.
Crédits : Camille Huppenoire - Maxppp

Comme les plaques explicatives installées à Bordeaux dans les rues portant le nom d’armateurs négriers notoires, il faut à Paris, selon Marcel Dorigny, expliquer et non pas supprimer, d’autant que la capitale est parsemée de noms évoquant le passé colonial et esclavagiste :

C’est une position que je défends depuis longtemps, puisque de très nombreux monuments et rues portent le nom de fervents esclavagistes, comme le général Dugommier ou le colonisateur Charles Liénard de l’Olive qui a pris possession de la Martinique et de la Guadeloupe et instauré la traite négrière, pour les deux Antilles françaises. La rue de l’Olive, dans le XVIIIe arrondissement, après un mouvement de protestation, a été rebaptisée rue de l’olive, avec un o minuscule, mais avec toujours aux alentours, les rues de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Louisiane... Autrement dit, on a enlevé le voleur sans enlever l’objet volé ! Qui est Charles Liénard de l’Olive ? Pourquoi son nom est là ? Il faut le dire, pas l'éradiquer ! Et il n’est pas possible en tous cas de supprimer tous les noms évoquant les colonies ou l’esclavage. Cela reviendrait à passer une énorme éponge et refaire le plan de Paris. Si on efface tout, on n’a plus de leçons d’histoire, dans les rues.

RACISME et ANTIRACISME 838_dpaphotostwo328940
Ouvert en mars 2012, le "mémorial de l’abolition de l’esclavage" sur les quais de la Loire à Nantes, ancien premier port négrier de France. Crédits : Robert B. Fishman / Picture alliance - Maxppp

Un monument doit voir le jour dans la capitale aux Tuileries d’ici 2022. [l'idée n'est pas encore venue de raser l'Élysée...]

La Fondation pour la mémoire de l’esclavage, mise en place en novembre 2019, y travaille, en concertation avec la ville de Paris. Il est question de plaques, avec les noms des esclaves affranchis en 1848, mais il faudrait aller plus loin, pour Marcel Dorigny. En tant que membre du comité scientifique de la Fondation, il plaide pour la création d’un mémorial :

Un mémorial de l’esclavage à Paris qui serait un lieu à vocation pédagogique, avec des expositions, des reproductions d’œuvres, des bibliothèques... Un musée, cela suppose des œuvres authentiques et elles sont rares. Il existe déjà un mémorial à Nantes et 5 salles consacrées à la traite négrière et à l’esclavage, au musée d’Aquitaine, à Bordeaux.

La Fondation pour la mémoire de l’esclavage a été installée place de la Concorde, à l’Hôtel de la Marine, un bâtiment connu pour avoir abrité pendant plus d'un siècle le ministère de la marine et des colonies, haut-lieu symbolique aussi de l’histoire de la traite négrière...

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Ven 7 Aoû - 11:05

dessous "Kimberlé Crenshaw Conversation with Black and Female writers"

« Speak The Truth To The People »

Mari Evans

1923-2017

poétesse, écrivaine et dramaturge afro-américaine associée au Black Arts Movement
et militante du mouvement des droits civiques


RACISME et ANTIRACISME Story_main
An undated photo of Mari Evans at the piano.
From the Mari Evans papers, Rose Library at Emory University.


At 96, Ms. Mari Evans is the last known surviving member of the 1950’s and ‘60s Black Arts Movement. Recently honored with an Indiana Author’s Award for Lifetime Achievement, Ms. Evans consented to a rare interview to talk philosophy, activism, read some of her poetry, and play some Thelonious Monk


RACISME et ANTIRACISME 51grLIKnM5L._SX334_BO1,204,203,200_
2006


Host Kimberle Crenshaw
Guests: N.K. Jemisin, Saidiya Hartman
Intersectionality Matters with Kimberlé Crenshaw @IMKC_podcast
Kimberlé Williams Crenshaw, née en 1959 à Canton, est une féministe américaine majeure de la Critical Race Theory, juriste et professeure à la UCLA School of Law (en) et à la Columbia Law School, spécialisée dans les questions de race et de genre ainsi qu'en droit constitutionnel. Elle est particulièrement connue pour avoir développé le concept d'intersectionnalité.
African American Policy Forum
4,23 k abonnés
On this episode of our hit Under The Blacklight series, Kimberlé Crenshaw will be joined by N.K Jemisin and Saidiya Hartman, two revolutionary and genre-defying authors who use speculative fiction, science fiction, and fantasy to craft narratives which center the lives, experiences, and stories of Black precarity. Hartman and Jemisin write the violence of the past into their imaginations of a limitless future. This episode will center conversations about being Black and Female writers whose work provokes a glimpse into a commonly untold history and demands a radical reimagination of our lived reality by conjuring beautiful experiments in past and future worlds.

These powerhouses utilize historiographical and archival research in tandem with their creation of fantastical worlds to address the gaps in dominant narratives about slavery and its aftermath in the United States. We will discuss the literary and cultural critiques Jemisin and Hartman receive in opposition to their genre-bending, and discuss the important ways in which radical tradition and storytelling are pivotal in anti-racist thought and praxis.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Mer 19 Aoû - 12:39


Patrick Graney reflects on the life and death of a truly unique musician

RACISME et ANTIRACISME 32944
INSTAGRAM/WIKI_JAZZ
vidéos ajoutées
All jazz musicians have their own style, but some, surely, have more unique styles than others. Eric Dolphy’s sound continues to fascinate me because it was not just different, but radical in its refusal to bow to convention. Like pianist Thelonious Monk, he was an inspirational artist in the sense that he did not compromise this style for critical approval. His abrasive, unpredictable solos are exhilarating and endlessly inventive, but they did not please everyone. One high-profile critic was Miles Davis, who famously said Dolphy played saxophone like “someone was treading on his foot” (Davis softens the snub in his autobiography, saying Dolphy “could play; I just didn’t like the way he played”). Dolphy was an impressive multi-instrumentalist, too. As well as alto sax, he made some masterful recordings on the flute and bass clarinet, the latter being (up to that point) a rare feature in the jazz idiom.

I have been thinking of Dolphy lately because recent events have reminded me of the controversy surrounding his tragic death in 1964, cutting short his remarkable, if brief, career. Jazz musicians had always encountered widespread racism, but the case of Dolphy brings this to a whole other level, as such stereotyping literally left him for dead. While touring in West Berlin, he collapsed into a diabetic coma and was taken to hospital. The attendant doctors figured that, as a black jazz musician, Dolphy must have been a junkie, and so he was left in a hospital bed with the standard treatment for an overdose without having his blood sugars tested, never to emerge from the coma. Dolphy was, in fact, teetotal and took a dim view of drugs. We will never know what masterpieces he might have gone on to produce and, more tragically, what his life would have been like with the classical dancer to whom he had recently been engaged. What is certain is that, while short, his career was still long enough to have a lasting impact on a crowded jazz scene and in my view, he was one of the great originals of American music.


"Jazz musicians had always encountered widespread racism,
but the case of Dolphy brings this to a whole other level"

Jazz critic Ted Gioia is right to point out that, unlike most free-jazz musicians, Dolphy’s aspirations were originally on becoming a classical musician, and his early penchant for Debussy, Ravel and Webern would remain influences for his compositions, if not his solo technique. He became more interested in jazz in the early 1950s, dedicating much of that decade to perfecting his technique and carving out his own musical voice. He cut his teeth in the Chico Hamilton group of the late fifties, a live performance of which is immortalised in the 1958 film Jazz on a Summer’s Day, and went on to achieve more prominence working alongside other giants of the day, from John Coltrane and Charles Mingus to free-jazz pioneer Ornette Coleman. Nevertheless, his classical background occasionally made an appearance: Gioia notes that he was heard playing composer Edgard Varèse’s work for solo flute Density 21.5 at the 1962 Ojai Festival in California, for example. Dolphy was fortunate to appear in many sessions which have since become classics of the jazz canon, and I would venture that some of his most impressive solos are found in these recordings, rather than on those with him as leader. Personal highlights include his sensitive flute passages on “Stolen Moments” from the Oliver Nelson album, The Blues and the Abstract Truth (1961), and “Refuge” from Andrew Hill’s Point of Departure (1964), which captures his energetic virtuosity on alto. To have seen Dolphy live must have been a different experience altogether, but we are surely blessed to have his genius on these records, especially as most of them they have been remastered so superbly.



"Dolphy was fortunate to appear in many sessions which have since become classics of the jazz canon"


For me, the go-to Dolphy record has to be his most famous, Out to Lunch (1964), which was recorded shortly before his death and released posthumously. The Penguin Jazz Guide observes that this was the third time Dolphy had used the word “out” in his album title − the previous two were Outward Bound (1960) and Out There (1961) − which may give us an idea of its avant-garde pretensions. Out to Lunch showcases Dolphy as composer as well as musician, showing that, despite his tonal freedom as a soloist, he was still wedded to the fixed compositions of hard bop and bebop and did not go in for the whole free-jazz hog. Indeed, the album is characterised by an elaborate set of pieces which only occasionally skim the edges of musical freedom when the solo sections are long underway. “Gazzelloni”, the only vehicle for flute, still retains a hard bop swing to it for all its uneven structure and unusual harmonies. On the other hand, the duet between double bass and bass clarinet on “Something Sweet, Something Tender” seems to bring Dolphy’s classical origins to the foreground, although tenderness and sweetness are perhaps stretched to their harmonic limit. There is a certain playfulness about much of the album’s work, from the irregular 9/4 lilt of “Hat and Beard”, a Monk tribute, to the humorous “Straight Up and Down” which depicts a drunken gait in its slow rhythm and lurches in register. What makes Out to Lunch so appealing is its careful balance between ambitious compositional structure and a measured freedom during the solos. This is especially notable since jazz was being pulled in so many directions at the time − free jazz, hard bop, modal jazz − that this recording seems to resist identification with any single tendency, making it all the more original.

Eric Dolphy’s influence was huge in the jazz community and beyond. John Coltrane was given his flute and bass clarinet upon his death, and according to his biography used to travel with a photograph of their owner. Charles Mingus, a man famed for his quick temper, remarked of him that he was a man “absolutely without a need to hurt”. We should all take inspiration from Dolphy’s audacity as an artist to pursue a style that won as many detractors as fans, while reflecting on the fact that ingrained racist attitudes brought about his tragic demise.
à la clarinette en Bb, plus rare qu'à la clarinette basse. Une des plus belles manières de jouer "faux"


1961

Mal Waldron, piano
Eric Dolphy, clarinette
Ron Carter , violoncelle
Joe Benjamin, contrebasse
Charlie Persip, batterie

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Jeu 20 Aoû - 14:00


"Racial Capitalism:
Actually Existing Capitalism"
une vidéo que je n'ai pas visionnée, que je retiens pour le concept de "Racial Capitalism" et les références des intervenants
Black as in Revolution a écrit:How should we understand the concept of Racial Capitalism today?

You can find us on twitter: @annie_etc_ , @broseph_stalin & @ Gargi_at_home)

For the third discussion, I have invited Dr. Ashok Kumar and Prof. Gargi Bhattacharya:

Gargi Bhattacharya is a Professor of Sociology at the University of East London. Her 2018 book ‘Re-thinking Racial Capitalism: Questions of Reproduction and Survival’ (Rowman & Littlefield) is essential reading for anyone trying to get to grips with the concept. She is also the author of Race and Power (Routledge, 2001), Sex and Society (Routledge, 2002), and Traffick (Pluto, 2005).

Ashok Kumar is a Lecturer in International Political Economy at Birkbeck. His Recent book ‘Monopsony Capitalism: Power and Production in Twilight of the Sweatshop Age’ (Cambridge University Press) is a brilliant analysis of market dynamics within the garment industry. He is currently co-editing a special issue on Race and Capital for Historical Materialism Journal.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Ven 27 Nov - 12:59

03:40, reformulé

ACAB-BLANC


une police en sale État


analyse

"Tout ce qui est rationnel est réel; tout ce qui est réel est rationnel"
Hegel, Préface de la Philosophie du Droit

RACISME et ANTIRACISME 220px-ACAB_%286166309723%29

combien de temps se contentera-t-on de détester la police ?
petite analyse à chaud du passage à tabac de Michel Zecler par trois policiers de la bac du 17e ardt à Paris. Je l'ai suivi par le hashtag #violencespolicières/récent de twitter, qui permet de lire des centaines de réactions de tous bords en plus de suivre les infos par la presse et les habituels dénonciateurs des violences policières depuis des années

c'est la première fois me semble-t-il que la réprobation, pour le moins, est quasi unanime, à l'exception pour le dire vite de la fachosphère identitaire, ce qui au demeurant pointe en négatif le caractère incontestablement raciste de cette agression policière. À quoi cela tient-il ?

d'abord les faits sont avérés, ironie du sort policier, par la grâce d'une caméra de surveillance du studio de Zecler, donc pour la sécurité d'un bien privé, et non de la vidéo d'un journaliste ou d'un témoin, dont la diffusion serait limitée par l'article 24 de la loi Sécurité globale dont l'adoption dégénère en cafouillage institutionnel entre législatif et exécutif. Mais cela ne saurait suffire et nombre de précédents existent de violences policières racistes parfaitement documentées

deux aspects s'y ajoutent : 1) il ne s'agit pas de violence à l'encontre de manifestants, et moins encore de manifestants s'en prenant volontairement et physiquement à la police, genre totos 2) si la victime est originaire de banlieue parisienne, elle n'a pas le profil pour en faire une "racaille" telle que dans la plupart des affaires précédentes depuis la mort de Bouna Traoré et Zyed Benna, à l'origine des émeutes de 2005 et jusqu'aux "affaires" Adama Traoré en 2016 ou Théo en 2017

41 ans, dans le milieu de la production audiovisuelle et de spectacles depuis 2006, 2015 avec Black Gold Corp, Michel Zecler ne prête pas à une telle justification, d'où la gêne et la prudence du pouvoir (Darmanin, Castaner, Le Maire, Dupond-Moretti...), qui a vite fait part de son intention de punir les "brebis galeuses" d'une "police de la République" au dessus de tous soupçons*. Le tabassé lui-même considère comme telles ses agresseurs et donne des gages en affirmant que la justice française est "bonne", demandant que ces policiers soient "punis", comme en sage écho aux intentions gouvernementales mêmes et au vœux de l'opinion publique

* République étant devenue l'élément de langage politique obligé et le concept idéal pour remplacer celui de démocratie, suivant une longue dérive depuis l'appellation en 2015 par Sarkozy du parti Les Républicains, label que tous se disputent aujourd'hui. Cf Blanquer accusant Mélenchon d'avoir "un problème avec la République", ou Hidalgo exigeant de ses alliés d'EELV de "clarifier leur rapport à la République". Se dire républicain, c'est montrer patte blanche idéologique

l'affaire s'apparente donc plus aux violences policières courantes aux USA, dont les victimes n'ont strictement rien fait d'autre qu'être noires de peau. On a tout-à-fait l'impression que ces trois flics sont tombés ce soir-là sur une occasion (de plus ?) de "se faire un nègre", et je ne vois guère ailleurs leur motivation. Combien comme ça dans la police française ? Ils ne sont ni majoritaires ni cas isolés, si l'on en croit la répétition des "bavures" et la proportion du vote d'extrême-droite dans ses rangs. Cela n'en fait pas pourtant comme aux États-Unis l'aboutissement d'un "racisme systémique" dans la police, mais plutôt dans l'État par son intérêt de cliver, racialement entre autres, la population et particulièrement les "classes populaires" (le prolétariat). Comment cela dans la présente situation ?

une fois encore, viser les violences policières en elles-mêmes (à la manière de David Dufresne) ne peut que faire écran à la compréhension du lien structurel, ou systémique, entre racisme, État et Capital, et l'on vérifie que la plupart des réprobations ou condamnations ne souhaitent que "faire le ménage dans la police française", ou, ce qui revient au même, la démission du préfet Lallement ou du ministre Darmanin, comme si les précédents avaient fait mieux, et si un tel changement de personnel pouvaient changer les choses, les intérêts de la classe dominante, et son besoin d'une police qui fasse peur à des populations entières à tenir en laisse avec, si possible, leur consentement. C'est pourquoi les "bavures" ont une fonction idéologique intégrée à la stratégie du maintien de l'ordre et leur condamnation comme telles par l'État ne fait que l'entériner, comme celle venant de la gauche ou de son extrême


RACISME et ANTIRACISME 1350004-une-9_page-0001

de ce point de vue, dans le contexte actuel, la partition est bien interprétée d'un concerto pour orchestre politico-médiatique, car c'est peut-être la première fois qu'une affaire de ce genre crève l'écran des médias mainstream et choque à une telle échelle l'opinion publique. De plus en plus s'identifient aux victimes parce qu'au fond elles leur ressemblent, et, en période de surveillance tous azimuts des faits et gestes de chacun.e* beaucoup se disent que ça pourrait aussi leur arriver, si bien qu'un jour viendra où le mot d'ordre "Tout le monde déteste la police" sera vrai, puisqu'au fond elle sera de plus en plus détestable

* le prétexte policier est ici l'absence de port du masque, ce qui fait immédiatement le lien avec les mesures gouvernementales de "protection de la population"... contre la pandémie

mais pour autant, on sera encore loin d'une mise en cause des causes structurelles des violences policières, alors Présidents de la République, Ministres de l'Intérieur et de la Justice pourront se succéder sans que ça ne change rien à l'affaire, ni aux affaires, car c'est au fond la seule chose qui intéresse la grande bourgoisie française

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Invité Dim 17 Jan - 11:48

pour info, avec quelques réserves a priori sur le concept de capitalisme racial

RACISME et ANTIRACISME 9780231190756

The relationship between race and capitalism is one of the most enduring and controversial historical debates. The concept of racial capitalism offers a way out of this impasse. Racial capitalism is not simply a permutation, phase, or stage in the larger history of capitalism—since the beginning of the Atlantic slave trade and the colonization of the Americas, capitalism, in both material and ideological senses, has been racial, deriving social and economic value from racial classification and stratification. Although Cedric J. Robinson popularized the term, racial capitalism has remained undertheorized for nearly four decades.

Histories of Racial Capitalism brings together for the first time distinguished and rising scholars to consider the utility of the concept across historical settings. These scholars offer dynamic accounts of the relationship between social relations of exploitation and the racial terms through which they were organized, justified, and contested. Deploying an eclectic array of methods, their works range from indigenous mortgage foreclosures to the legacies of Atlantic-world maroons, from imperial expansion in the continental United States and beyond to the racial politics of municipal debt in the New South, from the ethical complexities of Latinx banking to the postcolonial dilemmas of extraction in the Caribbean. Throughout, the contributors consider and challenge how some claims about the history and nature of capitalism are universalized while others remain marginalized. By theorizing and testing the concept of racial capitalism in different historical circumstances, this book shows its analytical and political power for today’s scholars and activists.

ABOUT THE AUTHOR
Destin Jenkins is the Neubauer Family Assistant Professor of History at the University of Chicago. He is the author of The Bonds of Inequality: Debt and the Making of the American City (2021). Justin Leroy is assistant professor of history and codirector of the Mellon Research Initiative on Racial Capitalism at the University of California, Davis.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

RACISME et ANTIRACISME Empty Re: RACISME et ANTIRACISME

Message par Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum